Leonardo Fibonacci

Leonardo Fibonacci (v. 1175 à Pise - v. 1250) est un mathématicien italien. Il avait, à l'époque, pour nom d'usage « Leonardo Pisano » (il est encore actuellement connu en français sous l'équivalent « Léonard de Pise »), et se surnommait parfois lui-même « Leonardo Bigollo » (bigollo signifiant « voyageur » en italien). S'il est connu pour la suite de Fibonacci[note 1],[1], il joue surtout un rôle d'une importance considérable en faisant le lien entre le savoir mathématique des Arabes, notamment des chiffres indo-arabes, et l'Occident[2].

Pour les articles homonymes, voir Pisano et Fibonacci.

Leonardo Fibonacci
Leonardo Fibonacci
Naissance v.
Pise,  République de Pise
Décès v.
Pise,  République de Pise
Nationalité Pisan
Domaines Mathématiques
Renommé pour Chiffres arabes
Notation algébrique
Suite de Fibonacci
Statue de Léonard de Pise, dans sa ville natale.

Biographie

Les sources biographiques sur ce personnage font cruellement défaut.

Né à Pise, république maritime, son éducation s'est faite en grande partie à Béjaïa (Bougie) en Algérie, où son père Guglielmo Bonacci est marchand et notaire public des douanes pour le compte de l'ordre des marchands de la république de Pise. C'est dans cette ville portuaire, qui est à l'époque un centre commercial et intellectuel, que Fibonacci commence son éducation en mathématiques. Bien qu'on ne sache pas s'il est arabisant, il étudie notamment les travaux algébriques du Persan Al-Khwarizmi et de l'Égyptien Abu Kamil. Il est probable qu'il a eu connaissance des travaux[note 2] du Persan Al-Karaji[3],[4].

Ayant aussi voyagé sur le pourtour méditerranéen  en Égypte, en Syrie, en Sicile, en Provence, en Grèce, etc.  pour le compte de son père, et rencontré divers mathématiciens, Fibonacci rapporte à Pise en 1198 les chiffres arabes  dont certains attribuent l'introduction à Gerbert d'Aurillac . Ceci illustre les liens entre la vitalité commerciale des villes d'Italie de l'époque et la créativité scientifique et artistique de leurs membres[5].

De 1198 à 1228, résidant à Pise, il compile ses connaissances mathématiques et rédige ses différents ouvrages. Un élément bien connu de la vie de Fibonacci est la relation qu'il a entretenue avec la cour de l'empereur Frédéric II Hohenstaufen. À travers les œuvres qu'il publie en 1225, on comprend qu'il y eut au moins une rencontre à Pise, à l'occasion d'un séjour de l'empereur dans la ville toscane, avec deux courtisans de premier plan[note 3] de sa cour, qui lui proposent de résoudre différents problèmes mathématiques d'une remarquable complexité.

Après 1228, la vie de Fibonacci nous est presque inconnue. Un seul document connu se réfère à lui. Il s’agit d’un décret daté de 1241 notifiant l’attribution par la République de Pise d’un salaire annuel de vingt lires au « sage et discret Maître Léonardo Bigollo » en reconnaissance des services rendus à la cité et aux citoyens, en qualité de comptable[6],[5]. Fibonacci meurt peu après, probablement à Pise[5],[7].

Liber abaci (1202)

Le livre des calculs est un traité sur les calculs et la comptabilité fondée sur le calcul décimal à une époque où tout l'Occident utilise encore les chiffres romains et calcule sur abaque. Ce livre est fortement influencé par son enfance vécue au sud et à l'est de la Méditerranée ; il est d'ailleurs rédigé en partie de droite à gauche[5].

Par cette publication, Fibonacci introduit en Europe le système de notation indo-arabe importé des Indes par les invasions arabo-musulmanes[8]. Ce système est plus puissant et plus rapide que la notation romaine, et Fibonacci en est pleinement conscient. L'invention sera d'abord mal reçue car le public ne comprend plus les calculs que font les commerçants. En 1280, Florence interdit même l'usage des chiffres arabes par les banquiers. On juge que le zéro apporte la confusion et des difficultés au point qu'ils appellent ce système cifra, qui dérive du nom arabe du zéro (al sifr = vide, zéro). Ce serait par l'usage des nombres dans la tradition cabalistique que le mot chiffre aurait acquis le sens de code secret[5].

Fibonacci est plus connu de nos jours pour un de ses problèmes conduisant aux nombres et à la suite qui portent son nom, mais à son époque, ce sont surtout les applications de l'arithmétique au calcul commercial qui l'ont fait reconnaître : calcul du profit des transactions, conversion entre monnaies de différents pays utilisant des bases différentes (base 10, 12, 20). Son travail sur la théorie des nombres est ignoré de son vivant, mais il est très largement lu pendant les deux siècles suivants. Ses travaux sont désormais très utilisés en finance de marché, et en particulier en analyse technique[5].

Practica Geometriae (1220)

Ce livre marque un transfert des intérêts mathématiques pratiques de Fibonacci vers le domaine de la géométrie et de trigonométrie, basé sur les Éléments d'Euclide et la Métrique de Héron d'Alexandrie. L'ouvrage est dédié à un traducteur, membre de la cour de Frédéric II Hohenstaufen, du nom de Dominicus Hispanus. Il se compose de sept sections, dans lesquelles l'auteur aborde des problèmes de géométrie plane ou de géométrie dans l'espace. Bon nombre de ces problèmes concernent des mesures d'aires et de volumes, ainsi que des applications du théorème de Pythagore ou des propriétés des triangles semblables. On peut toutefois considérer que l'ouvrage compte une huitième section, une annexe intercalée entre les autres, qui porte sur le calcul de racines carrées et cubiques[9].

Il y montre entre autres que la solution réelle de l'équation n'est pas constructible à la règle et au compas[10]. Il s'agit d'un résultat sans équivalent depuis Euclide[10].

Liber quadratum (1225)

Ce Livre des carrés, dédié à Frédéric II[note 4], est un livre de problèmes numériques, partie très impressionnante du travail de Fibonacci[5].

Flos (1225)

Le titre complet : Flos super solutionibus quarumdam questionum ad numerum et ad geometricam pertinentium peut être traduit par Recueil de solutions à certaines questions liées au nombre et à la géométrie. C'est un recueil d'énoncés avec leur résolution de quinze problèmes d'analyse déterminée et indéterminée du premier degré. Trois d'entre eux sont proposés en guise de défi par Jean de Palerme  mathématicien de la cour qui en vérifie les solutions , lors d'un concours de mathématiques organisé par et en présence de Frédéric II, problèmes que seul Fibonacci a pu résoudre[5],[13].

Publications

Liber abaci, MS Biblioteca Nazionale di Firenze, Codice Magliabechiano cs cI 2616, fol. 124r.

Textes en ligne

Notes et références

Notes

  1. Le surnom auquel il est le plus identifié et par lequel on le connaît aujourd'hui, Fibonacci, vient de l'expression latine Filius Bonaccio  fils de Bonaccio , et ne fait son apparition qu'en 1828, sur proposition de l'historien italien Guglielmo Libri (1803-1869). S'il met plus de six cents ans à être consacré, ce surnom est aujourd'hui le plus répandu. Peu de temps après, toujours au XIXe siècle, le mathématicien français Édouard Lucas (1842-1891) l'utilise pour former le nom d'une célèbre suite que Leonardo avait étudiée, et que l'on connaît aujourd'hui sous le nom de « suite de Fibonacci » ; de même, il est employé pour désigner comme « nombres de Fibonacci » les membres de cette suite.
  2. Fibonacci a traité les équations complexes, dites diophantiennes, à la manière d'Al-Karaji.
  3. Jean de Palerme et Théodore. Plus tard, Fibonacci envoie une lettre à Théodore avec la résolution de deux des problèmes.
  4. « Lorsque, ô Seigneur Frédéric, prince très glorieux, maître Dominique m'amena à Pise, aux pieds de Votre Excellence, maître Jean de Palerme, m'ayant rencontré, me proposa la question, qui n'appartient pas moins à la géométrie qu'au nombre, de trouver un nombre carré qui, augmenté ou diminué de cinq, fait toujours naître un nombre carré. [...] Ayant d'ailleurs appris [...] que Votre Majesté avait daigné lire le livre que j'avais écrit sur les nombres[11], et qu'il Lui plaisait parfois d'entendre les subtilités relatives à la géométrie, je me suis rappelé la question que je viens d'énoncer et qui m'avait été proposée à Votre cour par Votre philosophe. J'en ai pris le sujet, ai entrepris de composer le présent ouvrage, et ai voulu l'intituler Le Livre des nombres carrés[12]. »

Références

  1. Deulofeu Piquet et Sanchez 2008, p. 17-18
  2. Roshdi Rashed, « Fibonacci et les mathématiques arabes », Micrologus, vol. II, , p. 145-160.
  3. Jacques Meyer, « FIBONACCI LEONARDO (1170 env.-env. 1250) », sur Encyclopædia universalis (consulté le )
  4. Marc Moyon, Fibonacci. Extraits du Liber Abaci, Paris, ACL-Éditions du Kangourou, , 64 p. (ISBN 978-2-87694-230-1), p. 20-22
  5. (it) Maria Muccillo, « Leonardo Fibonacci », sur treccani.it, (consulté le ).
  6. (it) F. Bonaini, in Arch. stor. italiano, VI (1845), Ricordi di ser Perizolo da Pisa, dall'anno 1422 fino al 1510, p. 385-396
  7. Deulofeu Piquet et Sanchez 2008, p. 22/28-30/32
  8. Marc Moyon, Fibonacci. Extraits du Liber Abaci, Paris, ACL-Édition du Kangourou, , 64 p. (ISBN 978-2-87694-230-1), p. 10-16
  9. Deulofeu Piquet et Sanchez 2008, p. 114/116
  10. Éliane Cousquer, La fabuleuse histoire des nombres, Paris, Diderot éditeur, arts et sciences, coll. « Jardin des sciences », , 259 p. (ISBN 2-84352-114-9), chap. 6 (« La renaissance scientifique en Europe »), p. 104.
  11. Baudet 2014, Note 44, p. 96 : « Il s'agit, bien sûr, du Liber abaci. »
  12. Jean Baudet, Histoire des mathématiques, Paris, Vuibert, , 346 p. (ISBN 978-2-311-01242-2), « Le Moyen Âge », p. 96. — Extrait de P. Ver Eecke : Léonard de Pise. Le Livre des nombres carrés, traduit pour la première fois du latin médiéval en français, Bruges, Desclée de Brouwer et Cie, 1952.
  13. Deulofeu Piquet et Sanchez 2008, p. 138/139
  14. Marc Moyon, Fibonacci. Extraits du Liber Abaci, Paris, ACL-Éditions du Kangourou, , 64 p. (ISBN 978-2-87694-230-1)
  15. Extraits du Liber Abaci, analysés sur le site BibNum.

Voir aussi

Bibliographie

 : document utilisé comme source pour la rédaction de cet article.

  • Franz Woepcke, Recherches sur plusieurs ouvrages de Léonard de Pise, découverts et publiés par Baldassarre Boncompagni, Éd. Imprimerie des sciences mathématiques et physiques, Rome, 1859.
  • Marc Moyon et Maryvonne Spiesser, L'arithmétique des fractions dans l'œuvre de Fibonacci : fondements & usages, Archive for History of Exact Sciences 69/4, 2015, p. 391-427.
  • Fibonacci, Extraits du Liber Abaci. (Textes choisis et traduits par Marc Moyon), Éd. ACL-Kangourou;Paris, 2016. (ISBN 978-2-87694-230-1)
  • Jordi Deulofeu Piquet et Stephen Sanchez (Trad.), Le créateur de la suite mathématique de la beauté : Fibonacci, Barcelone, RBA Coleccionables, , 161 p. (ISBN 978-84-473-9329-9). 

Articles connexes

Liens externes

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