Johan de Witt

Johan de Witt (en français : Jean de Witt), né le à Dordrecht et mort le à La Haye, seigneur de Zuid- en Noord-Linschoten, Snelrewaard, Hekendorp et IJsselvere, est grand-pensionnaire de Hollande (Provinces-Unies) de 1653 à 1672. Il est assassiné massacré par la foule avec son frère Cornelis.

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Biographie

Jeunesse

Né en 1625 dans une famille patricienne de Dordrecht, il est le plus important représentant de la bourgeoisie hollandaise dans le gouvernement de la république des Provinces-Unies, qu'il dirige de fait pendant 20 ans.

Johan de Witt étudie le droit à l'université de Leyde. Géomètre-mathématicien à ses heures, il publie des Elementa curvarum linearum[1] traitant de la génération des sections coniques par des pantographes. Cet ouvrage est publié en annexe de la réédition de la Géométrie de René Descartes dont la deuxième partie de l'édition latine date de 1661 (bien que le texte définitif date de 1659) par l'ami de de Witt, Frans van Schooten, professeur de mathématiques à Leyde. C'est par ce biais qu'il suit le développement du calcul des probabilités.

Dès 1670, il publie le premier traité moderne[2] d'évaluation des rentes viagères par l'espérance mathématique (de la valeur actuelle des paiements futurs) sous le titre Waardije van Lyf-renten naer Proportie van Los-renten.

Grand Pensionnaire de Hollande

Tôt après son élection en tant que pensionnaire de Hollande, il doit mener de front la guerre contre l'Angleterre républicaine. En 1654, il conclut la paix avec l'Angleterre de Cromwell qui demande l'exclusion de la famille d'Orange-Nassau du stathoudérat, car depuis le mariage de Guillaume II à Marie Henriette Stuart, fille de Charles Ier d'Angleterre, il se défie des liens entre les Stuarts et la maison d'Orange.

Grandeur et décadence des frères de Witt, 1675

Une des clés de la réussite politique de De Witt réside dans son étroite collaboration avec son oncle Cornelis de Graeff, l’un des plus influents régents d'Amsterdam.

Pendant la Deuxième guerre anglo-néerlandaise de 1665-1667, les Néerlandais ont capitalisé sur l'incendie de Londres de 1666 ainsi que sur le raid sur la Medway mené par Michiel de Ruyter en 1667. En tant que pensionnaire de la plus importante des provinces de l'union, Johan de Witt supervise les négociations menant à la signature du Traité de Breda[3] menées conjointement avec la France, qui a participé (quoique mollement) au conflit. Celui-ci prévoit l'assouplissement des dispositions de l'édit de Navigation anglaise ainsi que la rétention des conquêtes de guerre : les plantations du Suriname deviennent donc néerlandaises alors que la Nouvelle-Néerlande passe sous la coupe anglaise.

Il renforce la souveraineté des provinces. En 1667, par l'Édit perpétuel, De Witt et ses acolytes (Andries de Graeff, Gaspar Fagel et Gillis Valckenier) abolissent la fonction de stathouder en Hollande et influencent en ce sens plusieurs autres provinces dont la Zélande et Utrecht.

En étau entre France et Angleterre

En 1668, les ambitions non dissimulées de Louis XIV sur les Pays-Bas espagnols (actuelle Belgique) — notamment durant la Guerre de Dévolution — inquiètent l'opinion publique néerlandaise. Johan de Witt voit sa politique pro-française s'écrouler face à l'agitation pro-anglaise des Orangistes, qui entraînent dans leur sillage les régents des grandes villes. Louis XIV, persuadé que la Triple alliance (Suède, Provinces-Unies et Angleterre) mise sur pied pour contrecarrer ses desseins sur les Pays-Bas espagnols est le fruit de la fourberie de Witt, ne se sent plus tenu par l’alliance de 1663, et travaille activement à une coalition contre la République en concluant le traité secret de Douvres avec Charles II d'Angleterre.

Une fin atroce

Les corps des frères De Witt sur le Groene Zoodje du Lange Vijverberg à La Haye, par Jan de Baen (Rijksmuseum Amsterdam)[4].

En 1672, « l'année désastreuse », Johan de Witt ne peut empêcher Louis XIV d'envahir les Pays-Bas dans le cadre de la guerre de Hollande. Accusé d'avoir livré la République à la France et, à tort, de vouloir faire assassiner le prince Guillaume, il est emprisonné avec son frère Cornelis en attente d'un jugement pour haute trahison ; le , les deux hommes sont massacrés par un attroupement orangiste qui force les portes de leur cellule, puis mutile sauvagement leurs corps (la chronique parla même d'un cas d'anthropophagie).

Postérité

  • L'assassinat d'une personnalité nationale est considéré par les Hollandais comme absolument indigne[5].

Galerie

Notes et références

  1. Texte rédigé entre 1649 et 1659 ; cf. Grootendorst, Jan de Witt's Elementa Curvarum Linearum, Liber Primus, Springer, 2000.
  2. Sur ce point, cf. l'analyse historique détaillée d'H. Le Bras, Naissance de la mortalité, Gallimard/Le Seuil, coll. « Hautes études », , 384 p. (ISBN 2020406446), II. L'argent et la mort, « 1. Probabilités, annuités et mortalité ».
  3. Cf. Herbert H. Rowen, John de Witt, Statesman of the True Freedom, Cambridge University Press, (réimpr. 2002), « A snarling peace », p. 125-140
  4. Au dos du tableau on trouve la mention manuscrite suivante : « Ce sont les corps de Jan et Cornelis de Witt peints par un peintre de premier plan, d'après nature, le soir à onze heures, encore accrochés sur l'estrapade. Cornelis est celui sans perruque. Jan de Witt a ses propres cheveux. Ceci est la seule peinture d'après nature [d'un tel acte perpétré] le 20 Août 1672 et donc vaut beaucoup d'argent. »
  5. (en) Is it true that an angry mob of Dutchmen killed and ate their own prime minister in 1672?, par Eugen Byrne, sur Historyextra, BBC World History Magazines.

Annexes

Articles connexes

Bibliographie

Liens externes

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