Jânio da Silva Quadros

Jânio da Silva Quadros /ˈʒɐ̃niu dɐ ˈsiwvɐ ˈkwadɾus/[alpha 2], dit Jânio Quadros , né le à Campo Grande (Mato Grosso) et mort le à São Paulo (État de São Paulo), est un avocat, professeur de droit et homme d'État brésilien, qui fut président de la République des États-Unis du Brésil pendant sept mois en 1961.

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Jânio Quadros

Portrait photographique du président Quadros (1961).
Fonctions
Maire de São Paulo

(2 ans, 11 mois et 30 jours)
Prédécesseur Mário Covas Júnior (pt)
Successeur Luiza Erundina

(1 an, 9 mois et 23 jours)
Prédécesseur Armando de Arruda Pereira (pt)
Successeur William Salem (pt) (intérim)
Président de la République des États-Unis du Brésil

(6 mois et 25 jours)
Vice-président João Goulart
Prédécesseur Juscelino Kubitschek
Successeur Pascoal Ranieri Mazzilli (intérim)
João Goulart
Gouverneur de l'État de São Paulo

(4 ans)
Prédécesseur Lucas Nogueira Garcez (pt)
Successeur Carvalho Pinto (pt)
Biographie
Nom de naissance Jânio da Silva Quadros
Surnom « Le Lincoln fou de Mato Grosso »[1]
Date de naissance
Lieu de naissance Campo Grande (Mato Grosso[alpha 1], Brésil)
Date de décès (à 75 ans)
Lieu de décès São Paulo (État de São Paulo, Brésil)
Nature du décès Hémorragie[1],[2]
Insuffisance respiratoire[1],[2]
Nationalité Brésilienne
Parti politique PTB (1947-1960)
PTN (1960-1961)
MDB (1980)
PTB (1981-1986)
Sans étiquette (1986-1989)
PSD (1989)
PTC (1989-1992)
Diplômé de Faculté de droit de l'université de São Paulo
Profession Avocat
Professeur
Religion Catholicisme


Présidents du Brésil
Maires de São Paulo
Gouverneurs de l'État de São Paulo

Toute sa carrière politique est marquée par son combat contre la corruption mais également par sa tendance à utiliser la démagogie et à adopter une attitude populiste pour gouverner. Cela lui coûta d'aller jusqu'au terme de son mandat présidentiel, lorsqu'il démissionna pour des raisons dont les historiens se disputent encore pour en connaître la nature véritable.

Situation personnelle

Jânio Quadros est né le à Campo Grande dans le Mato Grosso[alpha 3],[2]. Il est le fils de Gabriel Nogueira de Quadros (1892-1957)[3], médecin et ingénieur agronome, et de Leonor da Silva Quadros (vers 1854 – vers 1914)[4]. Son père est assassiné le à São Paulo[3].

Il est diplômé de la faculté de droit de l'université de São Paulo en 1939[1],[2]. Il donne des cours de géographie et de portugais durant ses études au collège Dante Alighieri de São Paulo puis de droit pénal à l'Université presbytérienne Mackenzie (en) de São Paulo jusqu'en 1945 où ses étudiants le persuadent de se lancer en politique[2]. Il exerce en parallèle le métier d'avocat[2].

Il était franc-maçon[5].

Parcours politique

Débuts (1947-1961)

En mars 1947, il est élu au conseil municipal de São Paulo. Il conserve ce mandat jusqu'à son élection comme député à l'Assemblée législative de l'État de São Paulo en mars 1951.

En avril 1953, il est élu maire de São Paulo. Durant son mandat de maire, il travaille en moyenne 15 heures par jour et parvient à rétablir l'équilibre des finances de la ville en à peine un an[2]. Il démissionne en janvier 1955 pour prendre ses fonctions de gouverneur de l'État de São Paulo. Il avait fait campagne contre la corruption et dû lutter contre les campagnes menées par la presse qui lui était largement hostile, remportant une victoire serrée[2].

Campagne présidentielle de 1960

Jânio Quadros pendant la campagne électorale, le .

Son parcours politique fait de lui un candidat potentiel pour l'élection présidentielle de 1960. Plusieurs partis politiques décident d'appuyer sa candidature[6], qu'il préparait depuis qu'il avait été élu député en 1958. Soutenu par une coalition hétéroclite menée par la droite[7], Quadros n'entendait pas renier son principal combat, à savoir la corruption. Il apparaît pendant la campagne électorale balai en main, signifiant une fois de plus sa volonté de purger le pays de la corruption qui selon lui sévissait dans le pays[6],[7]. Il reçoit le soutien de Carlos Lacerda, le chef du puissant parti de l'Union démocratique nationale. Mais l'attitude de Quadros pendant la campagne électorale fait que Lacerda fut de plus en plus critique, celui-ci allant jusqu'à le traiter de « pervers » et à le qualifier de personne « instable »[7]. Sa campagne est dynamique mais il n'a guère de programme, jouant surtout de son charisme auprès de l'électorat y ajoutant une touche populiste[6],[7]. Son voyage à Cuba qui est passé au côté du bloc soviétique après la Révolution cubaine ne passe pas auprès de ses soutiens. Un temps, il se retira même de la campagne, au plus grand étonement de ses soutiens et de l'électorat[6]. Lacerda eut beaucoup de mal à obtenir le retour de Quadros dans la campagne. Le journaliste Michel Faure écrit dans son Histoire du Brésil à propos de Quadros[7] :

«  Il est fantasque, imprévisible, populiste, cyclothymique, maniaque, colérique et plutôt à gauche.  »

Il remporte l'élection présidentielle le contre le maréchal Henrique Lott (pt) avec 48 % des voix et plus de 5 millions de voix, mais son colistier Milton Campos (pt) n'est pas élu[8]. C'est le candidat du Parti travailliste brésilien João Goulart qui est réélu à la vice-présidence[6],[8].

Président du Brésil (1961)

Le , Jânio Quadros est officiellement investi comme président de la République des États-Unis du Brésil. Pour la première fois depuis la proclamation de la République, la passation de pouvoirs se fait sans heurts.

L'aversion de Quadros pour la corruption s'avère très vite préjudiciable, le nouveau président voyant vite le Congrès s'opposer à lui[8]. De plus, son gouvernement comporte principalement des membres de l'UDN, le parti de Lacerda. Le fait qu'il gouverne par écrit, adressant de nombreuses notes à ses ministres et réclamant de nombreuses enquêtes parlementaires, heurte à la fois le Congrès mais aussi une partie des ministres[6].

Économie

Au moment de son arrivée au pouvoir, le déficit budgétaire était de 3,8 milliards de dollars, un déficit largement dû aux coûts de construction de Brasilia et aux divers projets de Kubitschek[2],[8],[9]. En plus de cela, le pays connaît une hausse importante de l'inflation[8].

Il dû procéder au licenciement de 20 000 employés fédéraux et diminua les dépenses de fonctionnement de 30 % durant les deux premiers mois[2]. En parallèle, le cruzeiro est dévalué et le gouvernement baisse les subventions en faveur des producteurs de blé et de l'industrie pétrolière[8]. Les horaires des fonctionnaires sont sévèrement encadrés[6].

En mars 1961, il déclare à un groupe d'hommes d'affaires[2] :

I have to apply drastic measures to lead this country to sanity.

« Je dois appliquer des mesures drastiques pour ramener le pays à l'équilibre budgétaire. »

Il se justifie et précise qu'il ne se soucie guère d'être impopulaire[2] :

Applause or censure are indifferent to me. My only ambition is to serve and to serve well.

« Les applaudissements ou la censure me sont indifférents. Ma seule ambition est de servir et de bien servir. »

Société

Il prend un certain nombre de mesures controversées ou fantaisistes comme l'interdiction des concours de beauté dont Miss Brésil ou du bikini sur les plages et de la minijupe dans les rues ainsi que le combat de coqs et tenta d'introduire une réglementation des jeux de cartes[1],[6],[10]. Commentant ces mesures étranges et la présidence de Quadros, l'ancien président Fernando Henrique Cardoso écrit dans ses mémoires[7] :

«  Une fois élu, il décida de devenir vraiment bizarre.  »

Éducation

Le Brésil compte encore 50 % d'analphabètes lorsque commence sa présidence, mais Quadros n'eut pas le temps de mener à bien un programme en faveur de l'éducation des couches populaires qui l'ont largement soutenu en 1960[6].

Politique extérieure

Parmi ses initiatives en matière de politique étrangère, il tente un rapprochement avec le bloc communiste. Parmi celles-ci, il décore Che Guevara alors en visite dans le pays de l'Ordre national de la Croix du Sud le [10]. Cette décoration suscita la controverse dans le pays et contribua en partie à son départ du pouvoir[1],[6].

Démission

Lettre de démission de Jânio Quadros.

La droite, qui l'avait soutenu dans sa campagne en 1960, se détourne assez vite de lui. Carlos Lacerda, le puissant gouverneur de l'État de Guanabara et farouche anticommuniste, l'accuse de préparer un coup d'État[10]. Quadros décide de tenter un coup en démissionnant quatre jours après la visite de Che Guevara, le [6]. L'historien Charles Morazé émet l'hypothèse que Quadros aurait voulu casser la dynamique établie par la campagne électorale afin de se débarrasser de Lacerda et de ses soutiens de droite[6]. Il pensait que le Congrès refuserait sa démission et lui demanderait de revenir sur sa décision. Cependant, le Congrès s'empressa d'accepter sa démission.

Quadros, voyant que sa manœuvre avait échoué, quitta le pays pour l'Europe profondément meurtri par cet évènement. Il jura qu'il reviendrait au pouvoir à la manière de Getúlio Vargas[10].

Échec pour le poste de gouverneur de l'État de São Paulo (1962)

Après son voyage en Europe, Quadros se relance en politique et annonce sa candidature pour le poste de gouverneur de l'État de São Paulo. Cependant, il est battu par Ademar Pereira de Barros (pt) qu'il avait pourtant battu en 1954 pour le même poste ou en 1960 lors de l'élection présidentielle.

Sous la dictature (1964-1985)

Contrairement à son prédécesseur et son successeur directs, Quadros ne quitte pas le Brésil après le Coup d'État de 1964. Cependant, ses droits civiques sont suspendus par la dictature militaire. Critiquant le pouvoir lors de plusieurs conférences de presses tenues à Recife, Rio de Janeiro ou São Paulo, il est arrêté en juillet 1968 par l'armée et placé en résidence surveillée à Corumbá dans le Mato Grosso (aujourd'hui dans le Mato Grosso do Sul) à proximité de la frontière avec la Bolivie. Il recouvre ses droits civiques en 1974 mais se tient à l'écart de toute activité politique. En 1979, il exprime sa volonté de concourir pour la troisième fois pour l'élection du gouverneur de l'État de São Paulo mais ne se lance que trois ans plus tard.

Maire de São Paulo (1986-1988)

Trente-deux ans après sa première élection comme maire, Quadros est réélu à la tête de la mairie de São Paulo[1],[2]. Il bat le futur président Fernando Henrique Cardoso.

Dernières années et mort

Il doit renoncer à se présenter lors de l'élection présidentielle en 1989 pour raisons de santé.

La mort de son épouse en 1990 l'affecte beaucoup. Il passe les deux dernières années de sa vie en maison de retraite, subit plusieurs accidents vasculaires cérébraux et meurt le à l'Albert Einstein Israelite Hospital (en) de São Paulo des suites d'insuffisance respiratoire et d'une hémorragie[1],[2].

Accusations de corruption

La réputation de Quadros est assez sulfureuse, y compris au sein de sa propre famille. Même sa fille le jugeait comme étant trop instable et lui fit faire un séjour en hôpital psychiatrique. Cependant, à la mort de son père, elle hérite de 66 propriétés qui lui appartenait. Elle fut parmi les premières à l'accuser de corruption en découvrant cet héritage[11].

En 2009, la police fédérale révéla au cours d'une vaste opération anticorruption que Quadros aurait caché l'équivalant de 20 millions de réal brésilien sur un compte bancaire en Suisse[12].

Hommages

Deux villes ont été nommées en son honneur : Janiópolis (Paraná) et Presidente Jânio Quadros (Bahia)

Décorations

Notes et références

Notes

  1. Campo Grande se trouve au sud du Mato Grosso, qui fut démembré en partie en 1977 sous la dictature militaire. Aujourd'hui, la ville se trouve dans le Mato Grosso do Sul.
  2. Prononciation en portugais brésilien retranscrite selon la norme API.
  3. Campo Grande est la capitale du Mato Grosso do Sul depuis 1977.

Références

  1. (en) Rédaction du Los Angeles Times, « Janio Quadros; Brazil Leader », sur www.latimes.com, (consulté le ).
  2. (en) James Barron, « Janio Quadros, 75, Dies; Leader Of Brazil Yielded Office in 60's », sur www.nytimes.com, (consulté le ).
  3. (en) « Gabriel Nogueira de Quadros », sur www.geni.com, (consulté le ).
  4. (en) « Leonor da Silva Quadros », sur www.geni.com, (consulté le ).
  5. (pt) « Maçons Presidentes », sur www.gob.org.br (consulté le ).
  6. Charles Morazé, « La démission de Janio Quadros », Revue française de science politique, vol. 12, no 1, , p. 39-53 (lire en ligne, consulté le ).
  7. Michel Faure 2016, p. 301.
  8. Michel Faure 2016, p. 302.
  9. Olivier Dabène 2020, p. 128.
  10. Michel Faure 2016, p. 303.
  11. (pt) Ricardo Arnt, « Caricatura de si mesmo, Jânio viveu em um desfile de ironias », sur www1.folha.uol.com.br, (consulté le ).
  12. (pt) Fernando Barros de Mello, « Família de Jânio tenta repatriar "20 milhões" », sur www1.folha.uol.com.br, (consulté le ).
  13. (pt) « Estrangeiros com Ordens Portuguesas », sur www.ordens.presidencia.pt (consulté le ).

Voir aussi

Articles de revues

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Bibliographie

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Articles connexes

Liens externes

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