Drapeau de la Martinique
Plusieurs drapeaux sont en usage en Martinique. La collectivité territoriale de Martinique a adopté en 2019 un drapeau, baptisé « Ipséité », pour les « représentations sportives et culturelles internationales ». Le « drapeau aux serpents » (ancien pavillon de la marine marchande royale) et le « drapeau rouge, vert, noir » sont aussi utilisés soit historiquement soit pour revendiquer des prétentions nationalistes et/ou indépendantistes.
Ipséité
Drapeau de la Martinique Ipséité | |
Utilisation | Drapeau adopté par la Martinique (CTM) pour les représentations sportives et culturelles internationales |
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Caractéristiques | |
Création | 2019 |
Proportions | 8:11 |
Adoption | 2019 |
Fin 2018, la collectivité territoriale de Martinique a lancé un concours[1] afin de définir un drapeau et un hymne dans l’objectif de « représenter la Martinique lors des manifestations sportives et/ou culturelles internationales ».
L'hymne (Lorizon) et le drapeau (Ipséité) de la Martinique ont été choisis parmi les finalistes par le président du conseil exécutif de Martinique, Alfred Marie-Jeanne. Ils ont été présentés officiellement le [2],[3].
Le drapeau porte en son centre un Lobatus gigas, communément appelé Lambi : il s'agit d'un coquillage emblématique des Antilles dont la conque est utilisée comme instrument traditionnel de musique. Autour, 34 étoiles amérindiennes symbolisent les 34 communes de la Martinique et huit segments évoquent huit des langues différentes parlées après colonisation de l’île par les Européens : français, créole, anglais, espagnol, portugais, italien, chinois et arabe. Le bleu fait référence à l’océan Atlantique et à la mer des Caraïbes tandis que le vert rappelle les mornes abrupts et la nature du territoire[4].
Le drapeau est arboré en par l'équipe de football lors de sa participation à la Gold Cup 2019[5].
Ce drapeau est contesté par les partisans du drapeau rouge, vert, noir[6],[7].
Drapeau aux serpents
Ce drapeau, issu du pavillon orné du serpent fer de lance, serpent endémique qui caractérise de manière unique l'île, n'a aucun caractère officiel en Martinique mais a servi pendant plusieurs années à représenter l'île pour la différencier de la métropole.
À ses origines, il s'agissait, à l'instar du drapeau de la province canadienne de Québec, d'un pavillon de la marine marchande adopté par ordonnance du [8] :
« Tous les propriétaires de vaisseaux, bâtiments, goélettes et bateaux de la Martinique et de Sainte-Lucie feront pourvoir leurs bâtiments d’un pavillon bleu avec une croix qui partagera le dit pavillon en quatre ; dans chaque carré bleu, et au milieu du carré, il y aura la figure d’un serpent en blanc, de façon qu’il y aura quatre serpents en blanc dans le dit pavillon, qui sera reconnu dorénavant pour celui de la Martinique et de Sainte-Lucie. »
Il participait donc à l'organisation du transport maritime, conformément aux usages de l'époque.
L'utilisation de ce drapeau a fait l'objet de polémiques[8],[9] , selon lesquelles ce pavillon était entre autres hissé sur les navires négriers ou que les serpents représentés seraient "les couleuvres des armoiries de Colbert, père du code noir" (il s'agit en réalité du serpent trigonocéphale, appelé fer de lance pour sa position caractéristique d'attaque, qui est représentée sur l'emblème). Pour le député Jean-Philippe Nilor, « si la croix gammée représentative du nazisme renvoie à l’holocauste, ce drapeau bleu avec sa croix blanche et ses 4 serpents est lui, représentatif de l’esclavage et de la traite négrière »[10].
En 2017, plusieurs pétitions et actions ont été lancées à l'encontre de ce drapeau[11].
Lors de sa visite en Martinique le , le président de la République Emmanuel Macron, reconnaissant son ignorance complète du sujet[12], est interpellé par un blogueur partisan[13] sur cette représentation présentée alors comme symbole esclavagiste[12] ou colonialiste, et arboré par la gendarmerie nationale dans l'île. Le est annoncée la décision du Président Macron[12], d'enlever cet emblème des uniformes des gendarmes "par soucis d'apaisement"[14].
Drapeau rouge vert noir
Le drapeau rouge, vert, noir est un drapeau revendiqué par différents groupes et partis indépendantistes et nationalistes martiniquais, à l'exception notable du MIM (Mouvement Indépendantiste Martiniquais) d'Alfred Marie-Jeanne, le président du conseil exécutif de Martinique (2015-2021)[15].
Un historique incertain et sujet à polémiques
Il est dit que ces couleurs seraient apparues dès 1665 lors de révoltes d’esclaves menées par Francis Fabulé un « Nèg Maron » qui aurait combattu avec les Caraïbes contre les colons français. Elles auraient été reprises en 1801 lors d’une révolte d’esclaves au Carbet par Jean Kina, et en 1870, lors de la Grande insurrection du Sud durant laquelle les insurgés auraient arboré des foulards ou des bandeaux rouge, vert et noir en signe de ralliement.[réf. nécessaire]
Si ces couleurs ont été reprises dans les années 60 par l’Organisation de la Jeunesse Anticolonialiste de la Martinique (OJAM), elles l'ont été sous la forme de trois bandes verticales, comme le drapeau français, que les jeunes militants placardaient sur les murs de Fort-de-France en contestation à la départementalisation.[réf. nécessaire]
Ce serait le Mouvement national de libération de la Martinique qui, en 1968, aurait élaboré le dessin actuel constitué d'un triangle et de deux quadrilatères. Selon Alex Ferdinand, le rouge représente le socialisme, le noir, le combat pour la cause noire et le vert celui pour la paysannerie. Ces couleurs reprennent aussi celles de l'Universal Negro Improvement Association and African Communities League (UNIA) du leader Marcus Garvey[16]. Ce drapeau est devenu l’emblème de la revendication autonomiste et indépendantiste martiniquaise et réapparaît aujourd’hui lors de manifestations politiques et syndicales, sans pour autant faire l'unanimité dans le mouvement nationaliste[16]. Les couleurs auraient finalement été reprises par les membres de l'Organisation de la jeunesse anticolonialiste de la Martinique[17], mais dans le manifeste de l'OJAM qui détaillait les revendications de l'organisation, ces trois couleurs apparaissaient sous la forme de trois bandes verticales[réf. nécessaire].
Alors que Gesner Mancé explique que le drapeau fut créé par Victor (dit Totor) Lessort en 1963 lors de son séjour en prison en attendant le procès de l'OJAM[18], le Mouvement des démocrates et écologistes pour une Martinique souveraine (Modemas) explique que c'est le Mouvement national de libération de la Martinique qui a mis au point le dessin actuel avec le triangle et les deux quadrilatères en 1968[17].
Cependant, Guy Cabort-Masson explique que c'est lui, avec Alex Ferdinand, qui aurait dessiné le drapeau définitif en 1968 à Paris, avant qu'il n'apparaisse, à partir de 1971, en Martinique[16].
Affaire du drapeau de Sainte-Anne
Quand il devient maire de Sainte-Anne en 1989, Garcin Malsa fait retirer le drapeau de la France du fronton de la mairie, à la colère des anciens combattants. En 1995, une délibération du conseil municipal est adoptée pour que pavoise sur la mairie le drapeau rouge, vert et noir comme drapeau national martiniquais. Plusieurs recours judiciaires ont lieu à la suite de plaintes du préfet de la Martinique mais aussi de lettres de vacanciers métropolitains[réf. nécessaire] au président de la République Jacques Chirac.
Finalement, en 2001, le maire accepte de replacer le drapeau de la France avec d'autres drapeaux de pays caribéens sur la mairie, avec au-dessus, le drapeau rouge vert noir. Plusieurs décisions de justice déclarent cette présence illégale, y compris un arrêt du conseil d'État de 2005[19]. En effet, le juge administratif s'appuie sur le principe de neutralité qui s'impose aux services publics et interdit qu'un bâtiment public soit pavoisé de manière à promouvoir des idées politiques, philosophiques ou religieuses : « Considérant qu'en se fondant, pour apprécier la légalité de la délibération du 6 octobre 1995 par laquelle le conseil municipal de la Commune de Sainte-Anne a approuvé la pose d'un drapeau rouge, vert, noir sur le fronton de la mairie, sur la circonstance que le principe de neutralité des services publics s'oppose à ce que soient apposés sur les édifices publics des signes symbolisant la revendication d'opinions politiques, religieuses ou philosophiques, la cour administrative d'appel de Bordeaux n'a commis aucune erreur de droit ; (...) »
Cependant en octobre 2004, le préfet rendant visite au maire ne demanda pas l'enlèvement du drapeau pavoisant la salle des délibérations, malgré les décisions de justice.[réf. nécessaire]
Jean-Michel Gémieux fit enlever le drapeau rouge, vert et noir en question une fois élu maire de Sainte-Anne en 2014.[réf. nécessaire]
Fort-de-France
En , le conseil municipal de Fort-de-France, décide de hisser le drapeau nationaliste martiniquais rouge-vert-noir à la devanture de certains bâtiments de la ville aux côtés du drapeau national. Ce drapeau nationaliste arbore les mêmes couleurs que celles reprises par le PPM, parti majoritaire au conseil municipal de Fort-de-France; il a d’ailleurs recouvert le cercueil d’Aimé Césaire, fondateur de ce parti, lors de ses funérailles[20].
Notes et références
- Les drapeaux et hymnes soumis au vote des Martiniquais ont été dévoilés
- « Le drapeau et l’hymne représentant la Martinique sont connus », France-Antilles Martinique, (lire en ligne).
- Jean-Claude Samyde, « La Martinique a désormais son drapeau et son hymne », Martinique La 1re, 10 mai 2019.
- « Les drapeaux et hymnes soumis au vote des Martiniquais ont été dévoilés », Martinique La 1re,
- Laurie-Anne Virassamy, « Les Matinino s'envolent vers la Gold Cup », Martinique La 1re, 6 juin 2019.
- « Dévoilement drapeau et hymne : des militants du Rouge-Vert-Noir retirent et piétinent le drapeau », Radio Caraïbes International,
- Joseph Nodin, « Les militants "rouge-vert-noir" arrachent et brûlent le drapeau choisi par Alfred Marie-Jeanne », Martinique La 1re,
- Quel drapeau pour la Martinique?, La Première, consulté le 11 septembre 2018
- SaaTurn brûle le drapeau aux serpents de la Martinique, nofi.media, consulté le 11 septembre 2018
- « Le député Nilor veut le retrait de l'emblème aux 4 serpents qui symbolise la Martinique », sur Martinique la 1ère (consulté le )
- « Polémique sur le drapeau de la Martinique », ParisDépêches (consulté le ).
- « La fin d'un symbole de l'esclavage en Martinique » (consulté le )
- « Le pavillon aux quatre serpents vit ses derniers jours », sur Martinique la 1ère (consulté le )
- Victor HAUTEVILLE, « Sur ordre du Président, la gendarmerie en Martinique ne portera plus l’emblème aux 4 serpents ! », ICIMARTINIQUE.COM, (lire en ligne, consulté le ).
- "drapeau que presque tous les nationalistes revendiquent, à l’exception notable du MIM. Il a été brandi lors des funérailles d’Aimé Césaire, en avril 2008" - FranceTélévisions Martinique1 - 27 février 2019
- Ulrike Zander, « Le drapeau rouge-vert-noir en Martinique : un emblème national ? », Autrepart, vol. 2, , p. 181-196 (lire en ligne).
- Modemas, Rouge Vert Noir Trois couleurs pour un drapeau ! Wouj – Vè – Nwè Twa koulè ba an drapo !, S.l., s.d..
- Gesner Mencé, L'affaire de l'O.J.A.M. (Organisation de la Jeunesse Anticolonialiste de la Martinique) : ou Le "Complot du Mardi-Gras", Le Lamentin, Éditions Désormeaux, , 256 p. (ISBN 2-85275-032-5), p. 90.
- « Conseil d'Etat, 10ème et 9ème sous-sections réunies, du 27 juillet 2005, 259806, publié au recueil Lebon », Légifrance (consulté le )
- Le drapeau nationaliste martiniquais bientôt sur les édifices publics de Fort-de-France - FranceTélévisions Martinique1 - 27 février 2019
Annexes
Articles connexes
- Drapeau de la France
- Liste des drapeaux des régions et territoires français
- Galerie des drapeaux des territoires dépendants
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