Dosidicus gigas
L'Encornet géant (Dosidicus gigas) est une espèce de calmar, la seule connue du genre Dosidicus. Il est parfois appelé diable des profondeurs ou calmar de Humboldt. C'est la plus grande espèce connue d'ommastrephidé mais non le plus grand calmar (il est dépassé par ceux du genre Architeuthis qui sont rares, mais qu'on a trouvés dans tous les océans terrestres, sauf peut être sous les glaces polaires).
Règne | Animalia |
---|---|
Embranchement | Mollusca |
Classe | Cephalopoda |
Ordre | Teuthida |
Famille | Ommastrephidae |
Sous-famille | Ommastrephinae |
DD : Données insuffisantes
Après que ce calmar eut reçu son nom scientifique, on en a trouvé d'autres qui pouvaient aussi dépasser 1 m de long pour le manteau (cranchiidé de l'Antarctique[1], l'onychoteuthidé de l'Antarctique Kondakovia longimana, l'onychoteuthidé du Pacifique Moroteuthis robusta et le Taningia danae[2] qu'on a trouvé dans tous les océans). Néanmoins, notamment dans les profondeurs et dans le courant de Humboldt, sur les côtes sud-américaines du Pacifique, l'encornet géant peut atteindre 4 mètres de long et peser jusqu'à 400 kilos (son manteau dépasse toutefois rarement 1 m).
Ces encornets sont une des sources d'alimentation des phoques et des cachalots et de divers oiseaux marins (Clarke, 1996).
Répartition, habitat
Cette espèce rarement visible en surface[3] est connue dans le Pacifique Est, à partir de 35° de latitude nord, du large de la Californie au sud du Chili et vers l'ouest jusque dans les Tropiques jusqu'à environ 120° de longitude ouest. Il vit surtout au large des plateaux et semble-t-il parfois à grande profondeur. C'est l'une des rares espèces de calmar qui ne soit pas inféodée à des systèmes de courants rapides des bordures de plateaux continentaux, et on la rencontre jusque dans le courant froid du Pérou (courant de Humboldt) qui est faible et s'écoule lentement vers le nord, dans le Pacifique Sud-Est. Devant les fonds péruviens, D. Gigas ne semble pas attiré par les zones les plus riches en productivité primaire, mais leur préférer des zones mésopélagiques où il mange essentiellement des poissons sur le rebord du plateau continental de l'Amérique du Sud[4]. Ailleurs on sait qu'ils consomment aussi des myctophidés (Rodhouse et Nigmatullin, 1996), lesquels sont abondants dans l'océan Indien (nord de la mer d'Arabie) (Shotton, 1997) et dans la zone antarctique de l'Atlantique-sud où ils sont aussi mangés par d'autres ommastrephidés Sthenoteuthis oualaniensis et Martialia hyadesii.
Description
Deux longs tentacules rétractiles s'ajoutent à une couronne de huit tentacules armés de puissantes ventouses permettant d'immobiliser des proies importantes.
Portées à l'orifice buccal situé au cœur de la couronne, les victimes sont broyées par un puissant "bec de perroquet".
Champions du camouflage grâce à des pigments changeants qui semblent aussi traduire leur humeur, les céphalopodes peuvent aussi fuir à reculons. Doté d'un système de propulsion « à réaction » et un profil très hydrodynamique, ils filent dans l'eau en accompagnant la manœuvre d'un lâcher d'encre, nuage de substance colorante à base de mélanine et de sécrétions, qui imitent leur silhouette. Abusé, l'ennemi se jette sur la proie factice.
Réputés sourds, muets et pratiquement dépourvus d'odorat, ces animaux apparemment indolents n'en sont pas moins de redoutables prédateurs, grâce à un sens tactile très développé et, surtout, à une excellente vue. Leurs yeux sont démesurés ; ce sont les plus gros dans le règne animal. On a retrouvé des yeux de calmar de près de 40 centimètres de diamètre dans des estomacs de cachalots. Ils sont proches, par leur structure et acuité, de ceux des vertébrés. Ce regard étrange et familier, insolite d'intelligence dans un corps étrange, a longtemps effrayé les hommes et les fascine aujourd'hui.
Il n'a ni squelette interne, ni squelette externe, son bec de perroquet est attaché à de puissants muscles avec un passage progressif des cellules dures du bec aux cellules plus "molles" de la « bouche ».
Éthologie
L'écologie et le comportement de ce calmar sont encore mal connus. Remontant des abysses, il attaque de grosses proies dont les thons (et peut-être des légines) par surprise, les avalant entiers, sauf la tête, après les avoir capturés avec deux longs tentacules.
Tous les calmars sont réputés migrateurs et potentiellement cannibales quand ils manquent de nourriture.
En dépit d'une remarquable adaptation au milieu marin, de leurs tentacules presque aussi adroits que des mains humaines et d'un « cerveau » relativement complexe, les céphalopodes ne sont pas devenus les maîtres de la mer. Si ce sont des animaux qui grandissent inhabituellement vite, leur espérance moyenne de vie ne dépasse guère trois ans. Ils ont de nombreux prédateurs, dont l'Homme.
Par ailleurs, malgré des muscles puissants et trois cœurs vigoureux, ils n'ont aucune endurance. Deux de leurs cœurs irriguant uniquement leur système branchial. Cette faiblesse tiendrait à leur sang bleu-vert qui transporte l'oxygène sur du cuivre oxydé et non sur du fer comme chez les mammifères, ce qui les rend moins performants.
Ces calmars auraient la faculté de se déplacer en pleine mer hors de l'eau en utilisant leurs nageoires et tentacules comme ailes et leur siphon comme propulseur, de même sans doute que d'autres espèces telles Sthenoteuthis pteropus et Illex illecebrosus[5], ainsi que Ommastrephes bartramii[6].
Origine
Ce calmar dit "géant" est l'un des lointains descendants des mollusques primitifs à lourde coquille qui vivaient il y a plus quatre cent cinquante millions d'années et dont sont issus tous les céphalopodes.
État des populations, menaces
Face à la surpêche qui a généré une régression ou disparition des stocks de poissons traditionnellement pêchés, une partie de l'effort de pêche s'est reportée sur les calmars et notamment depuis les années 1980-90 sur cette espèce qui est l'une de celles qui font l'objet (en Nouvelle-Zélande) d'une forme de pêche industrielle inspirée de la pêche traditionnelle au lamparo (les autres étant Todarodes pacificus et Ommastrephes bartrami surtout pêché au Japon alors qu'en Nouvelle-Zélande ce sont les calmars Nototodarus sloanii qu'on attire de nuit avec de la lumière artificielle. En Atlantique du Sud-Ouest on pêche de la même manière une autre espèce ; Illex argentinus).
Une hypothèse est que la surpêche pourrait avoir au moins localement favorisé (par diminution de la prédation sur les jeunes calmars) une augmentation d'abondance et de captures de calmars (Caddy et Rodhouse, 1998).
En 2007 et en 2009, ces calmars ont envahi les eaux californiennes, s'attaquant à toutes les proies passant près d'eux. Les humains n'ont pas été épargnés[7].
Pêche
La pêche de D. gigas était dans les années 1990-2000 surtout pratiquée au large du Pérou et près du dôme du Costa Rica, au large de l'Amérique centrale. Au Pérou, cette espèce fut pêchée par les indigènes pour faire des sacrifices aux dieux locaux.
Voir aussi
Articles connexes
Liens externes
- (en) Référence UICN : espèce Dosidicus gigas (d'Orbigny, 1835 in 1834–1847) (consulté le )
- (en) Référence World Register of Marine Species : espèce Dosidicus gigas (d'Orbigny, 1835)
- (fr+en) Référence ITIS : Dosidicus gigas (d'Orbigny, 1835)
- (en) Référence Catalogue of Life : Dosidicus gigas (d'Orbigny [in, 1834-1847 , 1835) ] (consulté le )
- (en) Référence Animal Diversity Web : Dosidicus gigas
- (en) Référence NCBI : Dosidicus gigas (taxons inclus)
Notes et références
- Exemple illustré de "calmar collossal"
- Exemple de capture (4 photographies)
- Yatsu, A., Yamanaka, R. et Yamashiro, C. 1999. Tracking experiments of the jumbo flying squid, Dosidicus gigas, with an ultrasonic telemetry system in the eastern Pacific Ocean. Bulletin of the National Research Institute of Far Seas Fisheries , 36, 55–60.
- Nesis, K.N. 1983. Dosidicus gigas. In: Boyle, P.R., (éd.), Cephalopod Life Cycles. Academic Press, Londres, Vol. 1, p. 215–231.
- Les surprenantes prouesses des calmars volants,
- L'attaque des calamars volants,
- (en) Just when you thought it was safe… giant squid terrorise Californian coast, article du quotidien The Guardian, publié le 20 juillet 2009.
- Portail de la biologie marine
- Portail des mollusques et de la malacologie