Clemente Domínguez y Gómez

Clemente Domínguez y Gómez (Séville, le - El Palmar de Troya, Utrera le ) est le fondateur de l'Église chrétienne palmarienne des Carmélites de la Sainte-Face ou « Église catholique palmarienne » ; à la suite d'une vision, il s'est proclamé pape sous le nom de « Grégoire XVII » en 1978, dès la mort du pape Paul VI.

Biographie

Après une jeunesse difficile, marquée par plusieurs fugues de la maison paternelle, ses facultés mentales sont, selon sa propre mère, très perturbées[1]. Dans la présentation de ses disciples palmariens eux-mêmes, cette jeunesse n'est pas exempte de « certaines attaches avec les vanités de la vie ».

En 1968, quatre jeunes filles d'El Palmar de Troya affirment avoir eu une vision de la Vierge. Domínguez se rend sur les lieux en août 1969 et déclare pendant plusieurs années bénéficier lui aussi de visions mystiques, porter des stigmates et recevoir des messages du Ciel. Ces messages dénoncent une crise de l'Église catholique depuis le concile Vatican II, la dégradation croissante du clergé et la baisse de la pratique religieuse.

Ayant fondé avec ses disciples un "ordre des Carmes de la Sainte-Face", Domínguez tente sans succès d'entrer en contact avec Mgr Lefebvre. Il réussit à convaincre l'ancien archevêque de Huế, Pierre Martin Ngo Dinh Thuc de l'ordonner prêtre et de le sacrer évêque en janvier 1976, de façon illicite, entraînant une excommunication immédiate (latae sententiae) de tous les protagonistes de l'affaire, comme le prévoit le droit canon. La validité même d'un tel sacre est discutée[2].

Le 29 mai 1976, au cours d'un trajet sur l'autoroute Bilbao-Behobia, il est victime d'un grave accident d'automobile où il perd la vue. Cette infirmité n'empêche pas le nouvel évêque de sacrer à son tour de nouveaux évêques pour son ordre. Les autorités espagnoles civiles essayent de faire cesser les manifestations publiques des Carmes d'El Palmar de Troya, en s'appuyant sur le Code criminel en vigueur à l'époque, qui réprime le délit d'« usurpation de titres et d'honneurs ». Il est mis en prison, peu de temps, pour avoir porté des vêtements épiscopaux.

En 1978 il assure avoir eu la vision surnaturelle de Jésus-Christ lui ordonnant de se proclamer pape à la mort de Paul VI, laquelle survient peu après ; cette vision condamne l'« hérésie », à savoir le modernisme (déjà condamné par Pie X) et le communisme, idéologies que, selon lui, le IIe concile œcuménique du Vatican aurait acceptées. C'est à Bogota, en Colombie, où il séjourne, qu'il se proclame pape en août 1978.

Ceux qui l'accompagnaient à Bogotá assurent avoir vu un papillon se poser sur la tête de Clemente Domínguez, au moment même où il tombait en extase et avait la vision du pape Paul VI venant de mourir à Castel Gandolfo ; avec saint Pierre qui l'accompagnait, le défunt pontife proclamait que Jésus-Christ avait directement choisi le nouveau pape. Le papillon fut capturé et conservé comme une relique parce qu'on croyait que c'était la forme prise par l'Esprit Saint pour sanctionner de façon visible l'élection papale. Le nouveau pontife donne immédiatement sa première bénédiction urbi et orbi depuis le balcon de sa chambre d'hôtel à Bogotá, paré des ornements pontificaux et la tête ceinte d'une tiare pontificale improvisée.

Le nouveau pape revient en Espagne, où il se consacre à l'organisation de son Église, créant un Sacré-Collège et nommant un secrétaire d'État en la personne de son second, l'évêque Manuel Alonso Corral, appelé père Isidoro. Il est bien sûr immédiatement excommunié par l'Église catholique[3], à quoi il réplique sans tarder en excommuniant lui-même l'ensemble de la hiérarchie à commencer par les cardinaux romains et frappant de nullité toute élection papale qui se tiendrait à Rome. La même année, il canonise des personnalités du franquisme mortes plusieurs années auparavant.

À l'emplacement des premières apparitions à El Palmar de Troya une église, devenue par la suite une grande basilique, a été érigée. Grégoire en fait son petit Vatican, le nouveau Saint-Siège, c'est de là qu'il lance ses excommunications (entre autres contre les papes qui se succédèrent à Rome, Jean-Paul Ier, Jean-Paul II et Juan Carlos Ier, le roi d'Espagne.

Au cours de la décennie 1990, il est accusé d'abus sexuels à l'encontre des prêtres et des religieuses de son ordre, de détournement de fonds, de pédophilie. En 1997, Domínguez reconnait de tels abus et en demande pardon. Il meurt à 58 ans, à peine 11 jours avant Jean-Paul II, son « pontificat » aura duré presque exactement le même temps que celui de son concurrent. Selon ses fidèles, Domínguez Gómez était destiné à être le dernier pape, à être crucifié et à mourir à Jérusalem, puis à revenir sur la Terre sous le nom de Pierre II. Son successeur, Manuel Alonso Corral, s'est précisément fait appeler Pierre II et, joint au Collège des cardinaux de l'Église catholique palmarienne, il a canonisé Clément en le nommant « le Saint pape Grégoire XVII, le Très Grand ».

Par ailleurs l'Église catholique palmarienne a canonisé, entre autres, Josemaría Escrivá de Balaguer, Francisco Franco, José Antonio Primo de Rivera, Luis Carrero Blanco, Pélage le Conquérant, et Christophe Colomb[4],[5].

La cathédrale de l'Église palmarienne.

Dans la culture populaire et la musique, Carlos Cano lui a consacré la chanson satirique El milagro del Palmar ; le groupe Siniestro Total a fait la même chose avec (I Left my heart in) El Palmar de Troya. Dans Manuel y Clemente, un film de 1985 réalisé par Javier Palmero, Clemente Domínguez et Manuel Alonso sont dépeints comme un couple d'homosexuels au style bouffon, mais au talent indéniable an matière d'escroquerie financière[6].

Notes et références

(es)/(it) Cet article est partiellement ou en totalité issu des articles intitulés en espagnol « Clemente Domínguez » (voir la liste des auteurs) et en italien « Clemente Domínguez y Gómez » (voir la liste des auteurs).
  1. (es) Voir sa nécrologie dans le journal El Mundo.
  2. (en) Voir cette page sur la succession des évêques consacrés par Mgr Thuc (parmi lesquels Clemente Domínguez y Gómez).
  3. Cyril Tallec, Les sectes politiques : 1965-1995, Paris, Harmattan, (ISBN 978-2-296-00347-7), p. 98
  4. (es) Pepe Rodríguez, Las sectas hoy y aqui, Barcelone, Tibidabo, coll. « Conocer a tiempo », , 191 p., Dépôt légal: B-19.249-85 (ISBN 84-86421-01-2), p. 147
  5. (es) Pepe Rodríguez, El poder de las sectas, Barcelone, Ediciones B, , 425 p., Dépôt légal: B-6.022-1997 (ISBN 84-406-7205-5), p. 352
  6. (es) Manuel y Clemente.

Voir aussi

Bibliographie

  • Bernard Vignot (préf. Jean Vernette), Les Eglises parallèles, Paris/Montréal, Éditions du Cerf, coll. « Bref », , 126 p. (ISBN 2-204-04294-3 et 2-7621-1781-X, ISSN 0986-4849)
  • Frédéric Luz, Le Soufre et l'Encens : enquête sur les Églises parallèles et les évêques dissidents, Paris, Claire Vigne, coll. « La Place royale », 1995, 319 + XVI p.  (ISBN 2-84193-021-1), (notice BnF no FRBNF36687158).

Article connexe

Liens externes

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