Cisplatine

Le cisplatine ou cis-diaminedichloroplatine(II) (CDDP) est un complexe à base de platine utilisé dans le traitement de différents cancers tels les sarcomes, carcinomes (cancer du poumon à petites cellules, cancer de l'ovaire, cancer du testicule…), lymphomes.

Pour la province sud-américaine, voir Province cisplatine.

Cisplatine
Identification
Nom UICPA cis-diaminedichloroplatine(II)
No CAS 15663-27-1
No ECHA 100.036.106
No CE 239-733-8
Code ATC L01XA01
DrugBank DB00515
PubChem 5702198
SMILES
InChI
Apparence cristaux jaunes
Propriétés chimiques
Formule H6Cl2N2Pt  [Isomères]
Masse molaire[1] 300,051 ± 0,014 g/mol
H 2,02 %, Cl 23,63 %, N 9,34 %, Pt 65,01 %,
Propriétés physiques
fusion décomposition à 270 °C
Solubilité 2,53 g·L-1 eau
Masse volumique 3,7 g·cm-3 à 20 °C
Précautions
SIMDUT[2]

Produit non classé
Directive 67/548/EEC

T


Transport
668
   3290   
[3]
Classification du CIRC
Groupe 2A : Probablement cancérogène pour l'homme[4]
Écotoxicologie
DL50 32,7 mg·kg-1 souris oral
11 mg·kg-1 souris i.v.
13 mg·kg-1 souris s.c.
6,6 mg·kg-1 souris i.p.
Données pharmacocinétiques
Excrétion

Rénale

Considérations thérapeutiques
Voie d’administration Intraveineuse

Unités du SI et CNTP, sauf indication contraire.
Représentation compacte du cisplatine.

Il appartient à la famille des sels de platine avec le carboplatine et l'oxaliplatine. Ces composés sont des agents alkylants de l'ADN, inhibant la réplication et induisant la mort cellulaire préférentielle des cellules cancéreuses.

Elle comporte une toxicité rénale pouvant être à l'origine de nécrose tubulaire aiguë.

Historique

Le cisplatine a été synthétisé pour la première fois en 1844 par un chimiste italien, Michele Peyrone (1813-1883)[5], et sa structure chimique identifiée en 1893 par le suisse Alfred Werner[6]. Ce n'est que dans les années 1960 que Barnett Rosenberg de l'université du Michigan découvre par hasard que des produits d’électrolyse des électrodes de platine pouvaient inhiber la division cellulaire[7]. Par la suite ses propriétés anticancéreuses ont été mises en évidence au cours des années 1960 après des tests sur des modèles murins et le cisplatine entra en développement clinique en 1971 aux États-Unis. Les premiers résultats encourageants l'ont été pour les cancers des testicules et des ovaires malgré des néphropathies sévères. En 1976, des cliniciens américains ont alors pratiqué une hyperhydratation et une diurèse forcée afin de contrôler la néphrotoxicité[8],[9].

Le cisplatine obtint finalement son autorisation de mise sur le marché en 1978 aux États-Unis et en 1983 en France[10],[11].

Mécanisme d'action

Le cisplatine est un complexe qui se fixe sélectivement sur les bases puriques de l'ADN (A ou G) et induit une variation de la conformation locale du double brin d'ADN. Cette déformation inhibe la réplication et la transcription de l'ADN en ARN, et induit par ce biais la mort cellulaire. Différents mécanismes protéiques de réparations de vis-à-vis de la formation d'adduits de cisplatine-ADN existent et reconnaissent certains des adduits formés.

Indications

En France[12], le cisplatine est indiqué pour le traitement de :

  • Cancers du testicule et de l'ovaire
  • Cancers du col utérin et de l'endomètre
  • Cancers de la vessie
  • Cancers de la sphère ORL et de l'œsophage
  • Cancers épidermoïdes.

Effets indésirables

Ce produit est un puissant cytotoxique, ainsi il provoque :

  • néphrotoxicité : nécrose tubulaire aiguë évoluant généralement favorablement en quatre à six semaines, ou insuffisance rénale chronique ;
  • ototoxicité[13] : éventuelle perte définitive d'audition dans les hautes fréquences, bourdonnements ;
  • neurotoxicité : neuropathies périphériques ;
  • neutropénie fébrile, chez l'enfant atteint d'une tumeur solide traités par chimiothérapie au cisplatine. Une étude clinique (monocentrique, randomisée, publiée en 2020) a conclu que ce risque peut être diminué par un complément oral en magnésium (250 mg/jour)[14]
  • myélosuppression ;
  • nausées et vomissements fréquents, généralement d'une à quatre heures après administration mais également parfois retardés ;
  • réactions allergiques.

En 1986, il a été montré que chez un patient anciennement intoxiqué au plomb, une chimiothérapie au cisplatine peut aussi induire un saturnisme, par brusque remobilisation du plomb stocké dans l'os[15]. Les symptômes du saturnisme peuvent alors facilement être confondus avec les effets secondaires de la chimiothérapie.

Limites

Une surexpression de métallothionéines chez le patient (phénomène normalement observé après intoxication par un ou plusieurs métaux lourds) peut induire une résistance à un sous-ensemble de médicaments anticancéreux cliniquement importants, dont le cisplatine, ainsi que le melphalan et le chlorambucil[16] (alors que le 5-fluorouracile ou la vincristine restent efficaces[16]). Or certains cancers peuvent être dus à une intoxication chronique par des métaux ou oxydes métalliques.

Notes et références

  1. Masse molaire calculée d’après « Atomic weights of the elements 2007 », sur www.chem.qmul.ac.uk.
  2. « cis-Diamminedichloroplatine(II) » dans la base de données de produits chimiques Reptox de la CSST (organisme québécois responsable de la sécurité et de la santé au travail), consulté le 24 avril 2009
  3. Entrée du numéro CAS « 15663-27-1 » dans la base de données de produits chimiques GESTIS de la IFA (organisme allemand responsable de la sécurité et de la santé au travail) (allemand, anglais), accès le 28 novembre 2008 (JavaScript nécessaire)
  4. IARC Working Group on the Evaluation of Carcinogenic Risks to Humans, « Evaluations Globales de la Cancérogénicité pour l'Homme, Groupe 2A : Probablement cancérogènes pour l'homme », sur https://monographs.iarc.fr/ENG/Monographs/vol100A/mono100A-10.pdf, CIRC, (consulté le )
  5. (de) Peyrone M, « Ueber die Einwirkung des Ammoniaks auf Platinchlorür », Ann Chemie Pharm, vol. 51, no 1, , p. 1-29. (DOI 10.1002/jlac.18440510102)
  6. (en) Stephen Trzaska, « Cisplatin », C&EN News, vol. 83, no 25, (lire en ligne)
  7. (en) Rosenberg B, Van Camp L, Krigas T, « Inhibition of cell division in Escherichia coli by electrolysis products from a platinum electrode », Nature, vol. 205, no 4972, , p. 698–699. (PMID 14287410, DOI 10.1038/205698a0)
  8. (en) « Amelioration of renal toxicity of high dose cis-platinum diammine dichloride (CPDD) by mannitol induced diuresis », Am Assoc Cancer Res,
  9. (en) « A new method to prevent toxicity with high doses of cis diammine platinum (therapeutic eYcacy in previously treated widespread and recurrent testicular tumors) », Proc Am Soc Clin Oncol,
  10. (en) « Cisplatin in cancer therapy: Molecular mechanisms of action », European journal of pharmacology,
  11. Pharmacocinétique: de la recherche à la clinique : Quatrièmes journées ...
  12. « Substance active cisplatine », sur vidal.fr, (consulté le )
  13. Amsallem P. & Andrieu-Guitrancourt J. « Étude expérimentale de l'ototoxicité du cisplatinum » Annales d'oto-laryngologie et de chirurgie cervico-faciale 1985;102(5):365-372.
  14. Dr Hubert Claes, « L'ajout de magnésium à une chimiothérapie à base de cisplatine réduit le risque de neutropénie chez les enfants », sur Site-LeJournalDuMedecin-Oncologie-FR, (consulté le )
  15. el-Sharkawi AM, Morgan WD, Cobbold S, et al. (1986) Unexpected mobilisation of lead during cisplatin chemotherapy. Lancet. ;2:249–50
  16. (en) A Basu, BA Teicher, MP Hacker, DH Hamer et JS Lazo « Overexpression of metallothionein confers resistance to anticancer drugs » Science 1988;241(4874):1813-1815. DOI:10.1126/science.3175622 SL Kelley (Résumé)

Liens externes

cisplatine
Noms commerciaux
  • Cisplatin (Belgique, Canada, Suisse)
Laboratoire Accord Healthcare, Hospira, Mylan ULC, Sandoz, Teva
Administration perfusion intraveineuse
Classe antinéoplasiques dérivés du platine : ATC code L01XA01
Autres informations non disponible en ville
Identification
No CAS 15663-27-1
No ECHA 100.036.106
Code ATC L01XA01
DrugBank 00515
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