Centrale hydroélectrique de la vallée de Dodé

La centrale hydroélectrique de la vallée de Dodé, située au nord de Lhassa, est la première centrale hydroélectrique du Tibet. Elle fut créée par Ringang[1], qui débuta le projet en 1924 et mit en service la centrale en 1927[2].

Historique

Ringang (Rinzin Dorji), 1939
Trabshi Lekhung, 1933
Trabshi Lekhung, 1933

La Grande-Bretagne facilita l'installation d'une centrale hydroélectrique[3],[4]. Ringang, des 4 stagiaires militaires formés en Angleterre, celui qui y était resté le plus longtemps et avait fait des études de génie électrique, fut chargé de la construire au pied d'un torrent de montagne près de Lhassa, à partir d'équipements acheminés à dos d’homme et de mules à travers l’Himalaya. Il installa également une ligne électrique desservant la capitale et le palais d'été du dalaï-lama, une entreprise colossale pour un Tibétain[5].

Le courant était conduit sur une distance d’environ km par un câble de haute tension reliant la centrale électrique à une station de relais située juste au-dessous de la maison de Ringang à Lhassa[6].

Alimentation de l'usine Drapchi Lekhung

L'électricité produite par la centrale alimentait aussi une usine hydroélectrique, le Drapchi Lekhung, fondé par Ringang, sa construction fut achevée en 1935[7]. Elle servait notamment à fabriquer la monnaie[8]. En 1931, le 13e dalaï-lama confia le département gouvernemental regroupant la monnaie, l'arsenal et la production électrique, de son nom tibétain Trabshi Lotrü Lekhung (grwa bzhi glog ´khrul las khung)[9], à Thupten Kunphel-la, un moine issu d'une famille d'humbles paysans[3].

Le complexe Trabshi Lekhung fut fermé en mars 1959 par l'armée chinoise, à l'époque du soulèvement tibétain de 1959[10]. De nos jours, le complexe est occupé par l'une des prisons de Lhassa connue sous le nom de Drapchi.

Nouveau complexe hydroélectrique

Dundul Namgyal Tsarong fut à l'origine du nouveau complexe hydroélectrique, et invita le réfugié russe Dmitri P. Nedbailoff (ou Nedbailov) à participer au projet[11]. Peter Aufschnaiter, un Autrichien arrivé à Lhassa le , fut chargé par le gouvernement tibétain d'évaluer si l'ancienne centrale électrique pouvait être agrandie[12]. À l'aide de Reginald Fox, qui en conçut les plans, Aufschnaiter construisit une centrale beaucoup plus performante que la précédente, laissée sans entretien et tombant en décrépitude depuis la mort de son constructeur, Ringang[13], le [7]. La nouvelle centrale était en construction en 1948, d'après le témoignage du Professeur Giuseppe Tucci, un universitaire italien, alors en voyage au Tibet. La construction était supervisée par « deux Autrichiens qui s'étaient échappés d'un camp de prisonniers de guerre en Inde »[14] (c'est-à-dire Peter Aufschnaiter et Heinrich Harrer).

Le , Peter Aufschnaiter, qui avait la charge de la centrale[15], quitta Lhassa[16].

Critique

Dans son livre My China eye: memoirs of a Jew and journalist, Israel Epstein rapporte que la distribution de l'électricité, souvent irrégulière, ne concernait que le Potala et quelques familles nobles[Quand ?]. En 1965, ajoute-t-il, les neuf-dixièmes des foyers de Lhassa disposaient de l'éclairage électrique[17]. Selon Tubten Khétsun, un des travailleurs du chantier de la centrale hydroélectrique de Nagchen construite par des prisonniers entre 1959 et 1960, cette dernière située dans la région de Lhassa fournissait de l'électricité aux unités de travail chinoises, la population ne bénéficiant que d'un éclairage succinct durant près de 10 jours par mois. En hiver et au printemps, quand le niveau d'eau était au plus bas, elle ne fonctionnait pas. L'électrification n'était qu'une fiction[18].

Notes et références

  1. (en) W. D. Shakabpa, Derek F. Maher, One hundred thousand moons, Volume 1, p. 804
  2. (en) Wolfgang Bertsch, The Production of Tibetan Banknotes, The Tibet journal, Library of Tibetan Works & Archives, 24 (1) 1999, p. 30 : « In that period Rigzin Dorje Ringang who had received his education at Rugby in England and who had studied electro-engineering at the University of London and in Birmingham, was working as chief engineer for the mint and was also in charge of the hydro-electric power station in the Dode valley. In 1924 he ordered a 125 HP generator and coining presses from British firms. In 1927 the generator was installed at the hydro-electric power station in the Dode valley, while the modern machinery was destined for the extension of the Trabshi mint, north of Lhasa, which was reopened in November 1931 with Tsarong. »
  3. Roland Barraux, Histoire des Dalaï Lamas - Quatorze reflets sur le Lac des Visions, Albin Michel, 1993 ; réédité en 2002, Albin Michel (ISBN 2226133178).
  4. Roland Barraux, op. cit., pp. 298-299 : « Pendant quelques années, Thubten Gyatso poursuivit son œuvre de modernisation, en grande partie avec l'assistance technique de la Grande-Bretagne. Une centrale hydroélectrique fut installée dans la capitale. »
  5. Robert W. Ford, Tibet Rouge. Capturé par l’armée chinoise au Kham, Olizane, 1999 (édition originale en 1957) (ISBN 2-88086-241-8), pp. 98-100.
  6. (en) Margaret D. Williamson, John Snelling, Memoirs of a political officer's wife in Tibet, Sikkim and Bhutan, Wisdom, 1987, (ISBN 0861710568 et 9780861710560), p. 206 : « The current was conducted over a distance of about four miles by high-tension cable from the power house beyond Trapchi to a sub-station in the city situated just below Ringang’s own house ».
  7. (en) The Tibet Album, Ringang Biography.
  8. Tibetische Münzstätte Trabshi Lekhung (Grwa-bzhi glog-´phrul las-khungs)
  9. (en) Nicholas G. Rhodes (August 1978), Tibetan Mints, Oriental Numismatic Society, Information Sheet no. 19.
  10. (en) Wolfgang Bertsch, A survey of Tibetan paper currency (1912-1959), Bulletin of Tibetology, Institut Namgyal de tibétologie
  11. Robert W. Ford, op. cit., p. 116.
  12. (en) Peter Aufschnaiter et Martin Brauen, Peter Aufschnaiter's eight years in Tibet, 2002, p. 90 : « The Tibetan government commissioned me to find out whether the old power station on the Doti River could be expanded. »
  13. Robert W. Ford, op. cit., pp. 23, 100, 117.
  14. (en) Himalayan Club, The Himalayan journal, vol. 17 à 18, Oxford University Press, 1952, p. 172 : « A new station was being built when Professor Tucci was in Tibet, under the supervision of two Austrians who had escaped during the war from a camp in India. No new works were being started, however, as according to the astrologists — and with some justification — 1948 was to be a year of ill-omen for the Dalai Lama. »
  15. (en) The Geographical Journal, New British Exploration in Nepal: Discussion, 1950, Evening Meeting, 20 February 1950 : « war broke out he was interned at Dinajpur, but escaped with several others and got clear away into Tibet, and in the course of time — pretty nearly two years — arrived at Lhasa where he still is, running the power station there. »
  16. Peter Aufschnaiter, op. cit., p. 15 : « On 20 December 1950, Peter left Lhasa. »
  17. (en) Israel Epstein, My China Eye: memoirs of a Jew and a journalist, Long River Press, 2005, 358 p., p. 277 (ISBN 1-59265-042-2).
  18. Sofia Stril-Rever, Dalaï Lama, Appel au monde, Seuil, 2011, (ISBN 9782021026757), p. 119

Voir aussi

Article connexe

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