Canons des Églises chrétiennes

Les différentes Églises chrétiennes ne reconnaissent pas exactement les mêmes livres pour canoniques : d'accord sur une majorité, un petit nombre de livres, ou de chapitres de livres, restent admis seulement par l'une ou l'autre des trois grandes confessions chrétiennes : catholique, orthodoxe et protestante. Voici une liste détaillée de leurs canons respectifs. Pour savoir dans quels ordres sont classés ces livres suivant les différentes obédience chrétiennes, il faut consulter la Bible hébraïque et la Septante.

Église latine

La liste de tous les livres du Nouveau Testament actuel existe dans le décret du pape Damase, issu du synode de Rome de 382. L'adoption de la liste du canon des livres de l'Ancien Testament est également confirmée par les conciles de Carthage de 397 et de 419.

Le canon est donc défini à la fin du IVe siècle. L'influence de saint Augustin, qui a défendu comme livres qui pourraient être lus et cités certains livres qui n'étaient pas inclus dans la Bible hébraïque (conformément à la tradition de la Septante et aussi à celle de la Vetus Latina mais contrairement à saint Jérôme qui les considérait comme non canoniques), la canonicité des livres controversés fut importante. En effet, c'est lors du concile de Carthage et d'Hippone, en l'an 393 et 397, que fut ébauché le canon actuel des Écritures de la Bible catholique. Les manuscrits de Qumrân, découverts en 1947 et datant du premier siècle de notre ère, donc du temps de Jésus, démontrent que tous les livres présents dans les bibles catholiques et orthodoxes étaient lus par les Juifs, puisque tous ces livres ont été trouvés écrits en grec, mais aussi en hébreu. Par exemple, des fragments importants du livre de Tobie (absent des bibles juives depuis l'an 90 et la célèbre décision du concile juif de Jamnia décidant quels étaient les livres inspirés ou non pour les Juifs, repris plus tard par les protestants) ont été trouvés dans cette bibliothèque juive à Qumrân, en Israël, écrits en hébreu et araméen, alors qu'il était seulement jusque là connu par son texte grec présent dans la Septante. Cependant, le pape Grégoire le Grand, Hugues de Saint-Victor, Nicolas de Lyre, Cajetan confirment par la suite fortement cette canonicité à leur sujet. Le pape Grégoire fut obligé de rappeler fermement, par un décret au Ve siècle, la canonicité du livre de l'Apocalypse, qui n'était pas encore officiellement reconnue par les Églises d'Orient.

Pour l'Église catholique, c'est le concile de Trente (1545 - 1563) qui a définitivement confirmé le canon des Écritures, en énumérant par décret les livres reconnus comme inspirés (et par conséquent, en rejetant ceux qui ne le sont pas). Cette décision fut entérinée à cause de la Sainte Tradition, c'est-à-dire à cause de l'usage constant depuis 1 200 ans dans l'Église, laquelle ne peut se tromper dans la durée. C'est dans sa IVe session, en 1546, que le concile de Trente a donné cette liste canonique des Livres saints qui doivent être reçus par tous (Les noms et les attributions des livres sont les noms et les attributions traditionnels ; par conséquent, un nom de livre et une attribution d'auteur sacré ne requièrent pas nécessairement une adhésion dogmatique, dite de foi; seul le contenu des livres requiert l'adhésion de foi). Le Catéchisme de l'Église catholique (1991) qualifie ce canon en tant que « liste intégrale » (art. 120), c'est-à-dire fixe et pour toujours.

Églises grecques

Au milieu du IIIe siècle, l'opposition aux littératures apocalyptiques s'inscrivait dans la lutte contre le millénarisme montaniste, attestée par Eusèbe de Césarée, puis par Grégoire de Nazianze, Amphiloque d'Iconium (mort en 896) qui déclare à propos de l'Apocalypse : « Certains l'acceptent mais la plupart le disent inauthentique ».

Dans sa Lettre festale XXXIX, en 367,Athanase d'Alexandrie cite les vingt-sept livres du Nouveau Testament. Il indique que les livres qui seront beaucoup plus tard appelés deutérocanoniques par Luther au XVIe siècle dans son désaccord avec l'Église catholique, ainsi que la Doctrine des douze apôtres (la Didachè), et le Pasteur d'Hermas, (aujourd'hui rangés parmi les écrits des Pères apostoliques), ne sont pas inclus dans le canon mais doivent « être lus ».

La canonicité de l'Apocalypse fut encore discutée au Ve siècle et VIe siècle. C'est le pape saint Grégoire le Grand qui affirma, de toute son autorité, la canonicité de ce livre, en 419, en contradiction avec les avis orientaux, et notamment de l'école théologique chrétienne d'Alexandrie (lesquels devaient reconnaître plus tard à leur tour, cette canonicité, dans le cadre du concile in Trullo, en 692.

Pour l'Ancien Testament, si presque tous les Pères apostoliques suivaient la Septante, il y eut quelques interrogations vis-à-vis des livres qui n'appartenaient pas au canon juif (canon décidé définitivement par les juifs au concile de Jamnia en l'an 90 après la destruction totale du Temple par les Romains), à partir notamment de Justin (il n'a rien écrit contre ces livres deutérocanoniques. Sauf que pour défendre sa foi chrétienne, face aux juifs qui l'accusaient de corrompre la société avec sa secte, il voulut démontrer la divinité de Jésus par les seuls livres reconnus des juifs, donc par le canon hébraïque) et Méliton de Sardes, puis de la part d'Origène, Eusèbe de Césarée, Athanase d'Alexandrie, Cyrille de Jérusalem, Épiphane de Salamine, Grégoire de Naziance. Le concile de Laodicée ne retient que les livres de la Bible hébraïque pour l'ancien testament, et ne retint également que les livres de notre nouveau testament actuel; Ce concile a eu lieu en l'an 364. C'est donc pendant le IVe siècle que le canon biblique se figea définitivement en occident, avec tous les livres appelés aujourd'hui « deutérocanoniques » (depuis le XVIe siècle uniquement), et avec tous livres du nouveau testament commun à toutes les confessions dites chrétiennes (catholiques, orthodoxes, protestantes). Cependant en 1531 Luther décidera de revoir la liste des livres du canon des églises pour revenir à la position de Saint Jérôme, c'est-à-dire au canon de la Bible hébraïque.

Les Grecs finirent par accepter l'intégralité du canon occidental au concile in Trullo en 692[1], c'est-à-dire, tous les livres présents dans la Bible catholique, y compris les deutérocanoniques, et recommanda également la lecture des livres d'Esdras 3 et 4, Maccabées 3 et 4, le psaume 151, et la "prière de Manassé". Toutefois, la canonicité de ces derniers fait toujours débat dans quelques Églises dites orthodoxes (notamment russe, bulgare, serbe et roumaine) qui ont uniquement reconnus les livres deutérocanoniques et rejetés les autres. Seule l'Église orthodoxe grecque a reconnu la canonicité des livres d'Esdras 3 et 4, des livres des Maccabées 3 et 4, du psaume 151, et de la "prière de Manassé".

Cependant, ces décisions particulières, n'étant pas conciliaires au sens « catholique » du terme, mais seulement des décisions d'Églises locales « autocéphales », la liste du canon des Écritures devra certainement être encore débattue lors d'un éventuel prochain "concile" pan-orthodoxe, désiré par tous les orthodoxes du monde, mais aussi par tous les chrétiens des autres confessions orientales d'obédience non orthodoxes, et par l'Église catholique dans un souci d'union œcuménique.

Églises orientales

Le canon du Nouveau Testament n'a pas toujours été le même pour toutes les confessions chrétiennes orientales et par exemple le Diatessaron de Tatien a connu dans l'Antiquité une grande popularité. Actuellement, le canon du Nouveau Testament est le même pour toutes les confessions chrétiennes et comporte 27 livres.

L'Église éthiopienne orthodoxe a, de toutes les Églises, le canon biblique le plus large, qui inclut notamment l'Ascension d'Isaïe, le Livre des Jubilés et le Livre d'Hénoch.

Églises issues de la Réforme

Le canon protestant de l'Ancien Testament comprend les mêmes livres que le canon juif de l'Écriture (la Bible hébraïque), bien qu'il divise certains livres et les ordonne différemment, ce qui le distingue des canons orthodoxe et catholique, qui ont fait le choix de suivre la Septante. Le canon protestant de l'Ancien Testament comprend 39 livres[2].

Les raisons qui ont conduit les réformateurs à adopter le canon hébreu des Écritures plutôt que le canon élargi des livres de la Septante grecque et de la Vulgate latine sont les suivantes (1) Ni Jésus ni aucun des écrivains du Nouveau Testament ne font de citations directes de ces livres. (2) Certains des apocryphes contiennent des textes qui soutiennent le purgatoire (2 Macc. 12:43-45) et l'efficacité de l'aumône pour couvrir ses péchés (Tobie 4:7-11 ; 12:8-9 ; 14:10-11 ; Siracide 3:30 ; 35:2)[3]. (3) C'est le canon qui était défini par le concile de Laodicée et par Jérôme de Stridon, le traducteur de la Vulgate, sa note d'avertissement précisant que le « Prologue Galaetus » que, tout au long du Moyen Âge, les copistes reproduisirent à l'en-tête des deux livres de Samuel: « Tout ouvrage qui ne figure pas parmi les 24 livres de la Bible hébraïque doit être considéré comme apocryphe, c'est-à-dire non canonique » n'a été retirée qu'après le concile de Trente, au XVIe siècle.

Le canon protestant du Nouveau Testament est semblable à celui des autres grandes confessions chrétiennes et comprend les 27 livres qui sont attribués aux apôtres et personnes qui leur sont étroitement associées.

L'article 4 de la Confession de la Foi belge, l'article 2 de la Confession de foi de Westminster où encore la Confessions helvétiques confirment les 66 livres du canon protestant. Les réformés reconnaissent ces livres comme étant inspirés par Dieu.

Voici la liste des livres :

  • Ancien Testament : Genèse, Exode, Lévitique, Nombres, Deutéronome, Josué, Juges, Ruth, I Samuel, II Samuel, I Rois, II Rois, I Chroniques, II Chroniques, Esdras, Néhémie, Esther, Job, Psaumes, Proverbes, Ecclésiaste, Cantique des Cantiques, Ésaïe, Jérémie, Lamentations de Jérémie, Ézéchiel, Daniel, Osée, Joël, Amos, Abdias, Jonas, Michée, Nahum, Habaquq, Sophonie, Aggée, Zacharie, Malachie.
  • Nouveau Testament : Évangiles selon Matthieu, Marc, Luc, Jean; Actes des Apôtres, Épîtres de Paul aux: Romains, Corinthiens I, Corinthiens II, Galates, Éphésiens, Philippiens, Colossiens, Thessaloniciens I, Thessaloniciens II, Timothée I, Timothée II, Tite, Philémon; Hébreux, Jacques, I et II Pierre, I, II et III Jean, Épître de Jude, Apocalypse[4],[5].

Selon les églises réformées, le canon est une collection de livres faisant autorité par eux-mêmes ; les livres avaient leur autorité avant d'être collectés par l'Église. Dans le sens le plus élémentaire, ni les individus ni les conciles n'ont créé le canon ; au contraire, ils en sont venus à percevoir et à reconnaître la qualité d'auto-authentification de ces écrits, qui se sont imposés comme canoniques à l'Église. Cette conviction de l'autorité divine "vient de l'œuvre intérieure du Saint-Esprit, témoignant par, et avec, la Parole dans nos cœurs" (Confession de Westminster, 1.5)[6].

Luther, qui ne représente pas toute l'Église protestante, a décidé de déclarer non inspirés les livres deutérocanoniques de l'Ancien Testament ainsi que plusieurs du Nouveau Testament (l'Épître de Jacques, celle de Jude et l'Apocalypse), qu'il considérait cependant comme utiles. En effet, Luther voulut extraire la lettre de Jacques du Nouveau Testament, parce que dans cette lettre il est écrit : "Vous le voyez, c’est par les œuvres que l’homme est justifié, et non par la foi seulement" (Jc 2.24). Or Luther posait comme fondement de la foi naissante protestante, ce fameux cri de la réforme Sola Fide, c'est-à-dire "seule la foi justifie" et non les œuvres. Car selon les protestants, les œuvres sont les conséquences de la foi, et non l'inverse. Comme la lettre de Jacques était en tension avec la pensée personnelle de Luther, il décida de la retirer de son propre canon plutôt que réviser sa position. Cependant les réformateurs ne suivirent pas leur fondateur, et conservèrent cette lettre dans le canon biblique protestant, en reconnaissant, avec elle, que « la foi sans les œuvres est tout à fait morte » Jc 2, 26. Dans le sens où les bonnes œuvres, selon les protestants, suivent obligatoirement la vraie foi.

Notes et références

  1. Martin Jugie, « Le canon de l'Ancien Testament dans l'Église byzantine », Revue des études byzantines, vol. 10, no 64, , p. 129–135 (DOI 10.3406/rebyz.1907.3668, lire en ligne, consulté le )
  2. F. F. Bruce, The Canon of Scripture,
  3. R. Beckwith, The Old Testament Canon of the New Testament Church,
  4. « La Confession de la Foi Belge (Confessio Belgica) »
  5. « Confession de foi de Westminster »
  6. B. M. Metzger, The Canon of the NewTestament,
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