Boris Galerkine

Boris Grigorievitch Galerkine (en russe : Бори́с Григо́рьевич Галёркин, Boris Grigorievitch Galiorkine), né le [1] à Polotsk (Empire russe, aujourd'hui en Biélorussie) et mort le à Leningrad, est un mathématicien et un ingénieur russe puis soviétique, réputé pour ses contributions à l'étude des treillis de poutres et des plaques élastiques. Son nom reste lié à une méthode de résolution approchée des structures élastiques, qui est l'une des bases de la méthode des éléments finis.

Boris Galerkine
Naissance
Polotsk, gouvernement de Vitebsk
Empire russe
Décès
Leningrad, RSFS de Russie
Union soviétique
Nationalité russe → soviétique
Domaines Résistance des matériaux
Institutions Institut Polytechnique de Saint-Pétersbourg
Diplôme Institut Technologique de Saint-Pétersbourg
Renommé pour Méthode de Galerkine
Distinctions Académie des sciences de Russie, Prix Staline 1942

Biographie

Jeunesse

Ses parents ne pouvant subvenir seuls aux besoins de leur famille, Boris Galerkine commença à travailler comme écrivain public dès l'âge de 12 ans. Ayant alors fini ses études primaires à Polotsk, il devait passer un examen à Minsk en 1893 pour continuer à étudier au lycée, mais la même année il réussit le concours d'entrée de l’Institut Technologique de Saint-Pétersbourg, et fut admis dans la filière de génie mécanique. Il dut continuer à travailler pendant ses études, comme dessinateur et répétiteur privé.

L'engagement politique

Comme beaucoup d'étudiants scientifiques russes de cette époque, Galerkine s'impliquait dans la politique et en 1899 il s'inscrivit au Parti ouvrier social-démocrate de Russie, ce qui peut expliquer qu'il changea plusieurs fois d'employeur à l'époque : les trois premières années suivant sa sortie d'école, il travaillait comme ingénieur à l'usine de Kharkov de l'Union Russe Mécanique et Ferroviaire, tout en donnant des cours du soir aux ouvriers ; puis à la fin de 1903 il rejoignit le chantier du Chemin de fer de l’Est chinois, et six mois plus tard prenait la direction technique de l'Usine des machines et chaudières du Nord. Il s'impliqua dans la création du Syndicat des Ingénieurs de Saint-Pétersbourg et en 1905 fut arrêté en tant que meneur d'une grève. En 1906, Boris Galerkine devint membre permanent du comité central du POSDR[2].

Le , la police cerna sa maison du 13, rue Alexeïevskaïa, non loin de la gare d’Oudelnaïa et arrêta tous les membres du comité. Jugés le , le tribunal se montra curieusement clément à leur égard, si l'on considère que plusieurs prévenus avaient ouvert le feu sur les forces de l'ordre au moment de leur interpellation : l'un des 19 membres du Comité fut condamné à deux ans d'incarcération, et 8 autres, dont B. G. Galerkine (dit « Zakhar », son nom dans la clandestinité) à 18 mois, les derniers étant relaxés[2].

Dans la prison, surnommée « Kresty » par les détenus, Galerkine se détourna de l'activisme révolutionnaire au profit des sciences et de la technique. Les conditions de détention à cette époque favorisaient cette reconversion. Mais on lit même dans les cahiers de Galerkine qu'en 1907 il aurait travaillé comme ingénieur à la construction de la centrale thermique de Saint-Pétersbourg : ce fait n'a jamais été vraiment éclairci, et par la suite Galerkine renâclait à revenir sur son engagement de jeunesse. Sous le régime soviétique, il répondait aux questionnaires de façon très évasive sur son appartenance politique à cette époque. S'il est certain qu'il connaissait la carrière de ses anciens comparses, la principale raison de son abstention était qu'il avait été porté au Comité par la faction des mencheviks, une révélation qui aurait pu lui coûter la vie[2].

Carrière académique

L'Institut polytechnique de Saint-Pétersbourg en 1902.

Galerkine retrouva la liberté à la fin de 1908. En mars, il obtenait un poste de professeur à l'Institut Polytechnique de Saint-Pétersbourg, et commença à publier le fruit de ses travaux (menés dans la « prison Kresty ») dans le journal scientifique de cet établissement, les Transactions de l’Institut Polytechnique : il s'agissait d'un article intitulé « Théorie et expérimentation de la flexion longitudinale, avec application aux structures multi-niveaux, aux treillis articulés et aux treillis à jonctions rigides ». La longueur du titre fait écho à celle de l'article lui-même : 130 pages. L'été de 1909, Galerkine entreprit une série de voyages à l'étranger pour voir les constructions et édifices dont il avait entendu parler. Au cours des quatre années qui suivirent, et qui se terminèrent par l'entrée en guerre de la Russie en , il visita l’Europe en compagnie de plusieurs de ses collègues de l'Institut : l'Allemagne, l’Autriche, la Suisse, la Belgique et la Suède.

Galerkine assurait les travaux dirigés et les cours d'atelier de mécanique des structures sous la direction du professeur V.L. Kirpichov, directeur de l'École de Mécanique de Saint-Pétersbourg. Mais la plupart de ses collègues : I. G. Boubnov, A.N. Krylov, I. V. Mechersky et S. P. Timoshenko, travaillaient à l’Institut Polytechnique.

À l'automne 1911, on confia à Galerkine, en plus de ses activités précédentes, les cours de l'Institut Polytechnique Féminin. En 1913, il conçut la structure métallique de la chaudière de la centrale thermique de Saint-Petersbourg, qui est la première grande structure métallique de type coque en Russie conçue pour les hautes pressions. Jusqu'en 1915, Galerkine n'avait publié que sur les structures en treillis, mais à compter de cette date il commença à s'intéresser aux plaques.

En 1915, Galerkine publia un article où il proposait une méthode de résolution approchée pour résoudre les équations différentielles, en particulier les problèmes de conditions aux limites ; il y appliquait sa méthode à des treillis de grande taille et à l'équilibre des plaques. Quelque temps auparavant, I. G. Boubnov avait imaginé une approche semblable pour résoudre le problème variationnel associé à l'équation d'équilibre (minimum de l'énergie de déformation élastique), approche qu'il interpréta comme une variante de la méthode de Ritz. La méthode de Galerkine se distinguait par le fait qu'on pouvait l'appliquer directement à une équation différentielle sans recourir à un principe variationnel ; Galerkine interprétait son algorithme par analogie avec le principe des puissances virtuelles. Ces idées devaient s'avérer très fertiles, non seulement en mécanique des structures, mais pour toute la physique mathématique de l'entre-deux-guerres.

Période soviétique

De 1917 à 1919, il publia plusieurs articles sur la statiques des plaques triangulaires et rectangulaires sous différentes conditions d'appui et de chargement, la plupart dans les Transactions de l’Académie des sciences de Russie. En , Galerkine obtint la chaire de mécanique des structures nouvellement créée à l'Institut, puis après la fuite en Pologne du professeur S. P. Belzetsky au cours de l'été 1921, il fut nommé professeur de la Faculté de Génie Civil, domaine qui coïncidait plus précisément à ses intérêts scientifiques du moment.

À partir de 1922, Galerkine ne publia plus que dans les revues étrangères (une pénurie de papier frappait alors la Russie, en proie à la Révolution). Il fut élu doyen de la Faculté de Génie Civil en  : cette élection intervenait à la suite de la démission de plusieurs professeurs, indignés des menées de soi-disant « étudiants » manipulés par les soviets et les comités du Parti communiste. Galerkine, désormais à la tête de la Faculté, parvint à composer avec les circonstances : il sut contenir les « assistants » qu'on lui avait imposés, et temporisa dans l'application des directives de supérieurs hiérarchiques incompétents, qui à l'époque multipliaient les expériences en matière éducative. De 1924 à 1929, Galerkine exerça encore en tant que professeur à l'Institut des Chemins de Fer et à l'Université de Saint-Pétersbourg[3]. En 1924 il prit part au Congrès international de mécanique appliquée aux Pays-Bas (1er congrès de l'IUTAM), et ce devait être son dernier voyage à l'étranger.

En 1926, ayant appris qu'à l'instigation du Comité politique de l'Institut, le Narkompros (ministère de l'Éducation) venait de voter la dissolution du Département des Voies de Communication, Galerkine représenta aux autorités de Moscou qu'il n'existait plus aucune école dans le pays pour donner des cours d'infrastructures ferroviaires, et parvint à faire annuler la décision. Il créa aussi les premiers laboratoires de la faculté avec l'appui du gouvernement ; l’un d’eux donnera naissance à l’Institut de recherche hydrotechnique.

En , sur proposition d’Abram Ioffé, de A. N. Krylov et de P. P. Lazarev, Galerkine fut nommé membre correspondant de l’Académie des sciences d’URSS. Il était depuis plusieurs années une autorité de rang international, souvent choisi comme consultant pour les projets industriels de grande ampleur dans le nord-ouest de la Russie (centrales thermiques, centrale hydroélectrique de Volkhov, usine de pâte à papier de Kondopoga, etc.[3]), membre des bureaux d'étude Gipromez et Giprotsvetmet, et conseiller scientifique de l’Institut de l’Irrigation (le futur Institut de Recherche Hydrotechnique) et de l’Institut des Structures. Une fois achevée la construction de l'usine hydroélectrique du Dniepr, Galerkine fut choisi comme membre de la commission gouvernementale hydroélectrique.

Lorsqu'en 1934, les autorités rétablirent les grades universitaires, Galerkine se vit attribuer deux doctorats, l'un en techniques industrielles et l'autre en mathématiques. Au début de 1936 il devint membre titulaire de l’Académie des sciences d’URSS, à côté de multiples marques de reconnaissance du régime[3] ; en avril, il obtenait la présidence de la Commission Gouvernementale des travaux du Palais des Soviets de Moscou.

En dépit de tous ces titres, Galerkine continuait d'exercer en tant que professeur de mécanique des structures et d'élasticité de l’Institut Hydrotechnique (rattaché à la faculté de génie civil depuis 1934). Il enseignait essentiellement l'élasticité mathématique, mais le faible niveau scientifique des étudiants de l'époque rendait son cours peu abordable : les étudiants venaient voir l'« académicien », mais le professeur lui-même était peu prolixe et parlait d'une voix faible. Son image ne correspondait pas au grand savant qu'ils s'imaginaient, sa reconnaissance était d'ailleurs surtout gouvernementale.

La guerre avec l'Allemagne

Avec la refondation en 1939 de l'Institut de génie militaire (grâce aux dons de l’Institut Polytechnique de Saint-Pétersbourg), Galerkine, nommé à la tête du département de Mécanique des Structures, dut prendre l'uniforme. En tant qu'académicien, on le reclassa avec le grade de lieutenant-général. Au cours de l'été 1941, le gouvernement de Léningrad créa une Commission des Installations Défensives, et y affecta les quelques académiciens et savants de la ville, mais seul Galerkine participa vraiment à des travaux de construction, de sorte qu'il s'imposa comme le président de cette Commission.

Quelques mois plus tard, il fut évacué sur Moscou où il rejoignit la Commission du Génie militaire de l'Académie des Sciences d'URSS. Sa santé se dégrada par suite du surmenage : il s'éteignit à Moscou quelques semaines après la victoire le .

Écrits célèbres

  • B.G. Galerkin, « Стержни и пластинки. Ряды в некоторых вопросах упругого равновесия стержней и пластинок (Développement en série des solutions de quelques problèmes d'équilibre élastique des poutres et des plaques) », Vestnik Ingenerovi Tekhnikov, no 19, , p. 897-908. (version en anglais : NTIS Rept. TT-63-18924)

Notes et références

  1. Le du calendrier julien.
  2. Haym Benaroya, Mark Nagurka et Seon Han, Mechanical Vibration: Analysis, Uncertainties, and Control, CRC Press, (réimpr. 4e) (ISBN 9781498752947), « Continuous Models for vibrations: Advanced Models ».
  3. Cf. Kurrer, p. 471.

Articles connexes

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