Bohémond de Tarente

Bohémond de Tarente ou de Hauteville ou encore Bohémond Ier d'Antioche le Grand (autant par sa taille que par son prestige) (vers 1054-mars 1111), prince de Tarente et prince d'Antioche, est un des meneurs de la première croisade.

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Bohémond de Tarente

Bohémond de Tarente, par Merry-Joseph Blondel. Salles des croisades, Versailles.
Fonctions
Prince de Tarente
Prédécesseur Robert Guiscard
(duc d'Apulie et de Calabre)
Successeur Bohémond II d'Antioche
(prince)
Prince d’Antioche
Prédécesseur Yâghî Siyân
(émir d'Antioche)
Successeur Tancrède de Hauteville
(régent d'Antioche)
Biographie
Dynastie Maison de Hauteville
Date de naissance vers 1054
Lieu de naissance San Marco Argentano en Calabre
Date de décès
Lieu de décès Canosa en Apulie
Sépulture Canosa di Puglia
Père Robert Guiscard
Mère Aubrée de Buonalbergo
Conjoint Constance de France
Enfants Bohémond II d'Antioche
Religion Catholicisme
Résidence Tarente, Antioche

Il est le fils aîné de Robert Guiscard et de sa première épouse Aubrée de Buonalbergo.

Biographie

Bohémond est fils aîné de Robert Guiscard, comte normand d'Apulie, et de sa première épouse Aubrée de Buonalbergo[1][2]. Il naît entre 1050 et 1058 (en 1054 selon l'historien John Julius Norwich)[3],[4].

Bohémond de Tarente participe aux expéditions de son père Robert Guiscard et le seconde entre 1081 et 1085 dans sa guerre contre Byzance en territoire byzantin. Il remporte notamment deux victoires en 1082 contre l'empereur byzantin Alexis Ier Comnène[5]. À la mort de son père en juillet 1085, il est écarté de la succession sur les duchés d’Apulie, de Calabre et de Sicile au profit de son demi-frère, le jeune et faible Roger Borsa[6], favorisé par sa mère Sykelgaite de Salerne.

Des tensions apparaissent rapidement entre les deux frères et, dès la fin de l'année 1085 ou le début de l'année 1086, Bohémond se révolte, occupe les villes d'Oria, de Tarente et d'Otrante, et s'empare d'une bonne partie de la Pouille méridionale ; Roger est obligé de céder à son frère, outre les trois villes dont il s'était emparé, Gallipoli et presque toute la région qui s'étend de Conversano à Brindisi[7]. En 1087, des tensions réapparaissent entre les deux frères. Bohémond commence les hostilités et tente de surprendre son frère près de Bénévent ; il est battu à Fragneto mais parvient à fuir et à regagner Tarente. Malgré sa défaite, Bohémond, soutenu par un certain nombre de barons, parvient à conserver tout le territoire situé entre Bari et Otrante, ainsi que quelques villes de Calabre. En 1088, un accord est conclu entre les deux frères : Bohémond obtient la principauté de Tarente en compensation de sa renonciation au duché d'Apulie et de Calabre[8].

Mausolée de Bohémond à Canosa di Puglia.

En 1096, alors qu’il participe aux côtés de son oncle Roger, comte de Sicile, au siège de la principauté indépendante d’Amalfi, il apprend qu’une grande expédition pour l’Orient est en route, un bon moyen pour lui d’aller se tailler un fief plus important que sa principauté et s’embarque avec des troupes et des proches dont son neveu le jeune Tancrède de Hauteville et Roger de Salerne, pour la première croisade, dont il est l’un des principaux chefs. Il s’empare par ruse d’Antioche le 2 juin 1098 et conserve la ville, malgré les véhémentes protestations de Raymond IV, comte de Toulouse. Il fait de la ville le centre d’une principauté où ses descendants indirects gouverneront tant bien que mal durant près de deux siècles. Cependant la situation de Bohémond, devenu le prince « Bohémond Ier d’Antioche », est précaire entre les ambitions d’Alexis Comnène, l’empereur byzantin, qui lorgne sur ses possessions autrefois byzantines, mais aussi la volonté des Fatimides et des Seldjoukides, de reprendre le contrôle de la Syrie du Nord.

Au mois d’août de l’an 1100 Bohémond est fait prisonnier par l'émir de Sivas et n'est libéré qu’en mai 1103 : Tancrède de Hauteville gouverne Antioche à sa place durant cette période.

Après sa libération Bohémond repart en Europe en 1104 afin d’obtenir des renforts. En fait il ne reviendra plus jamais dans sa principauté. En effet il épouse la fille de Philippe Ier, roi de France, Constance et tente d’attaquer l’Empire byzantin avec un débarquement en Dalmatie comme l'avait fait son père vingt ans plus tôt, en 1105. À la fin de l’année 1107, il prend Avlona et assiège Durazzo. Mais un an plus tard, les Byzantins le tiennent en échec et son expédition tourne court ; humilié, il doit traiter avec l’empereur qui lui fait reconnaître l’autorité de Byzance sur sa principauté d’Antioche (traité de Déabolis, 1108). En tant que prince d’Antioche il doit se reconnaître vassal d’Alexis Ier. Ce traité est mal accepté par Tancrède, qui s’empresse de le dénoncer après la mort de Bohémond en Apulie, à Canosa le , laissant un jeune fils, Bohémond.

La princesse byzantine Anne Comnène, témoin oculaire de l’époque de la croisade, qui l’a rencontré pour la première fois alors qu’elle avait quatorze ans, fut fascinée par Bohémond et a laissé, dans l’Alexiade, une description détaillée de lui pareille à nulle autre prince croisé :

« II dépassait les plus grands d’une coudée ; il était mince du ventre, large des épaules et de la poitrine ; il n’était ni maigre ni gras. Il avait les bras vigoureux, les mains charnues et un peu grandes. À y faire attention, on s’apercevait qu’il était tant soit peu courbé. Il avait la peau très blanche, et ses cheveux tiraient sur le blond ; ils ne passaient pas les oreilles, au lieu de flotter, comme ceux des autres barbares. Je ne puis dire de quelle couleur était sa barbe ; ses joues et son menton étaient rasés ; je crois pourtant qu’elle était rousse. Son œil, d’un bleu tirant sur le vert de mer, laissait entrevoir sa bravoure et sa violence. Ses larges narines aspiraient l’air librement, au gré du cœur ardent qui battait dans cette vaste poitrine. Il y avait de l’agrément dans cette figure, mais l’agrément était détruit par la terreur. Cette taille, ce regard, il y avait en tout cela quelque chose qui n’était point aimable, et qui même ne semblait pas de l’homme. Son sourire me semblait plutôt comme un frémissement de menace… Il n’était qu’artifice et ruse ; son langage était précis, ses réponses ne donnaient aucune prise. »

Références

  1. Norwich 1992, p. 116.
  2. Brown 2003, p. 97.
  3. The Editors of Encyclopædia Britannica, « Bohemond II Prince of Antioch », Encyclopædia Britannica, Inc., (consulté le ).
  4. Norwich 1992, p. 116-117 (note 1), 227.
  5. Élisabeth Malamut, Alexis Ier Comnène, Paris, Ellipses, , 526 p. (ISBN 978-2-7298-3310-7, présentation en ligne), p. 79-80.
  6. « Roger Borsa et l'héritage de Robert Guiscard » sur le site mondes-normands.caen.fr.
  7. Ferdinand Chalandon, Histoire de la domination normande en Italie et en Sicile, A. Picard & fils, Paris, 1907, tome I, chapitre XII, pp. 288-289.
  8. Ferdinand Chalandon, Histoire de la domination normande en Italie et en Sicile, A. Picard & fils, Paris, 1907, tome I, chapitre XII, pp. 294-295.

Annexes

Bibliographie

  • Jean Flori, Bohémond d'Antioche. Chevalier d'aventure, Paris, Payot, 2007 (ISBN 9782228902267).
  • (en) Ralph Bailey Yewdale, Bohemond I, Prince of Antioch, Princeton University, 1917 [lire en ligne].
  • Ferdinand Chalandon, Histoire de la domination normande en Italie et en Sicile, A. Picard & fils, Paris, 1907.
  • René Grousset, L'Empire du Levant : Histoire de la Question d'Orient, Paris, Payot, coll. « Bibliothèque historique », (réimpr. 1979), 648 p. (ISBN 978-2-228-12530-7).

Liens externes

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