Boa (RATP)

Le Boa est une rame expérimentale du métro de Paris, conçue par la RATP à base de caisses de MF 77. Mis en service en , il circule jusqu'en avant d'être abandonné puis mis à la ferraille en 1999.

Pour les articles homonymes, voir Boa (homonymie).

BOA

Identification
Exploitant(s) RATP
Type métro
Composition 3 puis 4 voitures
(M+N+N+M)
Conduite Conducteur
Couplage Pour dépannage
Constructeur(s) Alstom, Faiveley,
Renault, ANF, Jeumont-Schneider, Ansaldo, Mitsubishi
Mise en service
Effectif 1 rame (démolie)
Service commercial -
Retrait
Affectation Métro de Paris
Caractéristiques techniques
Disposition des essieux 2'A'-1'A'-A'1'-A'2
Écartement standard (1 435 mm)
Moteurs de traction voitures 1 et 2 : asynchrone triphasé
voitures 3 et 4 :
à courant continu
Puissance continue moteurs asynchrone : 180 kW
moteurs à courant continu (MP4) : 107 kW
Accès 2 par flanc
Portes louvoyantes
voit. 1 et 4 : 1,575 m
voit. 2 et 3 : 1,312 m
Intercirculation intégrale
Vitesse maximale 80 km/h mais
limitée à 40 km/h

Le Boa est constitué à partir de caisses de MF 77.

Ce prototype destiné à concevoir le métro du futur, a permis d'expérimenter plusieurs innovations majeures, aujourd'hui utilisées sur les nouveaux matériels roulants du réseau. Il tire son nom de l'une d'elles, l'intercirculation entre les voitures, qui lui donne l'apparence intérieure d'un long serpent.

Histoire

Au début des années 1980, la RATP assume depuis trente ans les conséquences du non-renouvellement progressif des rames Sprague-Thomson : elle doit investir massivement dans du matériel neuf, autant pour des raisons techniques (les rames étant « plus que vieillissantes ») que commerciales (le métro apparaissant « vieillot » aux yeux du grand public).

Après la commande du MP 55, rapidement suivie du MP 59 équipant les lignes sur pneus, l'arrivée en nombre de MF 67 permet de moderniser l'apparence du réseau. La petite série MP 73 équipe quant à elle la ligne 6. La commande massive de MF 77 à la fin des années 1970 permet enfin de retirer les dernières rames Sprague-Thomson en 1983 et d'abaisser sensiblement l'âge moyen du parc.

La régie ne souhaite donc pas reproduire les mêmes erreurs et avoir à changer quasi-simultanément l'intégralité des rames vingt à trente ans plus tard. Elle profite par conséquent d'une longue pause pour réfléchir aux générations de matériels roulants à venir, destinées à remplacer les matériels les plus anciens, en particulier les MP 59 et MF 67. La conception du prototype Boa rentre dans cette stratégie de préparation progressive de la future génération du métro des années 2000[1].

La RATP engage une vaste réflexion sur les diverses problématiques posées à l'époque, comme l'usure et le crissement des roues dans les courbes, la complexité des câblages « fil à fil », les moteurs à courant continu dont le collecteur représente le point faible, ou encore la circulation des voyageurs entre les voitures. Les futurs matériels doivent par ailleurs prendre en compte la volonté de réduire les coûts de construction et de maintenance grâce aux progrès enregistrés dans l'industrie ferroviaire.

La création d'un prototype vise à mettre au point en grandeur nature des solutions à deux problématiques principales[1] :

  • l'inégale répartition des voyageurs dans les rames : les entrées des stations se trouvant majoritairement en tête et en queue de train, une intercirculation intégrale permettrait de mieux répartir les voyageurs sur la longueur de train ;
  • les bogies usent les voies et les crissements incommodent les voyageurs : « solution miracle » appliquée au début des années 1900 sur les rames M1, les bogies ont permis d'allonger la longueur des voitures. Ils sont cependant source d'usure des voies et de bruit et de vibrations pour les voyageurs (et les riverains), en raison des courbes prononcées du métro.

Objectifs

Le Boa a pour but de tester particulièrement deux évolutions technologiques :

  • l'intercirculation intégrale entre les voitures, de plusieurs types, afin d'améliorer la répartition des voyageurs ;
  • des bogies spécifiques pour diminuer les frottements et les crissements dans les courbes à faible rayon du métro parisien.

La RATP s'intéresse en effet aux essieux orientables durant les années 1980, principe mis en application dès 1846 par l'ingénieur Arnoux sur la ligne de Sceaux. Les bogies modernes possèdent une rigidité n'autorisant pas de déformation en parallélogramme, les bogies monomoteurs ayant de plus tendance à être particulièrement agressifs pour les voies en courbe. Les roues circulant sur le rail au rayon le plus faible glissent obligatoirement, n'ayant pas le même chemin à parcourir, ce qui provoque des crissements désagréables et une usure accélérée de la voie[2].

La régie imagine donc un système de guidage qui se veut simple, performant et fiable. Deux solutions sont envisagées : le pont réducteur avec différentiel, ou la mise en place d'un moteur par roue. L'intercirculation semble en revanche plus complexe à mettre en œuvre, en raison des rayons de courbure serrés du métro sur certaines lignes[1].

Première version

Une première version à trois voitures voit le jour en 1985 aux ateliers de Vaugirard, réalisée par la RATP avec les caisses M 30154 et B 32154 du MF 77 accidenté à Saint-Denis - Basilique en 1983. Composé de trois voitures d'une longueur de dix mètres, son apparence est fortement inspirée du MF 77. L'équipement de puissance est celui du MP 73.

Cette courte rame est révolutionnaire pour un métro : elle forme un train articulé à intercirculation totale, la circulation des voyageurs entre les voitures étant permise par de larges soufflets. Les bogies sont par ailleurs remplacés sur le prototype par des essieux monomoteurs indépendants et orientables, qui facilitent l’inscription du train en courbe diminuant crissements et usure de la voie. Les efforts de guidage sont faibles, à l'exception des appareils de voie. La rame circule sans incident sur la boucle de Porte Dauphine, courbe la plus serrée du réseau avec seulement 32 m de rayon. Les essais sont satisfaisants et poussent à la poursuite de l'expérimentation[2].

Le Boa retourne en conséquence aux ateliers de Vaugirard pour subir des modifications début 1986. Des essieux orientables remplacent dorénavant les bogies qui subsistent à chaque extrémité du train. L'essieu avant devient non porteur et est muni de roues de plus petit diamètre. Il permet de détecter la géométrie de la voie, pour guider en conséquence l'essieu suivant[3].

Seconde version

Forte des premiers retours très positifs du Boa, la RATP décide de mener des tests plus poussés, afin de valider les innovations techniques et de déterminer les aménagements intérieurs à prévoir sur de futurs matériels. De nouvelles modifications permettent en conséquence d'aménager la rame en vue d'une exploitation avec des voyageurs.

Les ateliers de Vaugirard transforment le prototype en rame à quatre caisses en découpant et réassemblant les trois voitures en quatre voitures de 12,19 m (deux motrices) et 10,98 m (deux remorques intermédiaires). Cette transformation permet de tester trois types différents de dispositifs d'intercirculation intégrale sur la même rame pour les comparer. Celles-ci sont fournies par Faiveley, ANF et Alsthom.

Faiveley propose une intercirculation en caoutchouc souple, avec joints élastiques. ANF réalise un assemblage déformable d'anneaux rigides et mobiles. Alsthom fournit un modèle d'intercirculation à deux grands anneaux et trois soufflets, sur un brevet RATP. Les modèles ANF et Alsthom sont dotés de sièges. Le modèle Alsthom, est même muni de fenêtres, ce qui permet de lier en continu caisses et intercirculation.

Le Boa forme un ensemble indéformable d'une longueur de 46,34 m (contre 77,40 m pour une rame MF 77 de cinq caisses) et pesant à vide 85,96 tonnes. Sa composition est la suivante : M 30412 - N 11552 - N 11553 - M 30411. De très nombreux essais d'endurance sont réalisés sur l'ensemble du réseau entre début 1987 et février 1989[1]. Le prototype donnant toujours satisfaction, des tests commerciaux sont engagés afin de mieux définir les options à retenir pour le MF 88, dont la mise au point a commencé[2].

Il s'installe alors sur la ligne 5 du métro[4] où il débute ses marches à blanc le . Afin de compléter les essais avec voyageurs, la rame expérimentale circule régulièrement en exploitation commerciale à partir du [5]. Vu sa longueur réduite et l'absence d'équipement du pilotage automatique, elle ne circule qu'aux heures creuses du lundi au vendredi. Début 1993, elle est définitivement garée pour être détruite six ans plus tard.

Validation des technologies

L'intercirculation Faiveley est directement adoptée par le nouveau matériel MF 88.

Afin de mettre en application concrète les technologies mises au point, la RATP commande une petite série, le MF 88, destiné à équiper la ligne 7 bis, au tracé pentu et tortueux. Cette série de neuf rames reprend un ensemble de caractéristiques, avec notamment interciculation intégrale, essieux orientables et système informatique embarqué, ce qui en fait le descendant direct du Boa[5].

Ces technologies sont reprises sur les générations suivantes. Le concept de l'intercirculation est validé et repris dans les modèles suivants de métro : MP 89, MF 01, MP 05 et MP 14. L'intercirculation Faiveley est directement adoptée par le nouveau matériel MF 88 ; une version dérivée équipe plus tard le MP 89 CA. Le modèle construit par Alsthom sur brevet RATP, pourtant le plus abouti, ne trouve pas d'application immédiate auprès de la RATP, mais est finalement développé sur les tramways Citadis du constructeur.

Le système de commande-contrôle de la traction et du freinage, avec frein oléo-pneumatique, le système de gestion d'énergie, la traction asynchrone, ainsi que le réseau informatique embarqué, seront repris et développés sur les nouvelles générations de matériels roulants. Il n'en sera toutefois pas de même pour les essieux orientables à roues indépendantes : elles se révèlent en effet très vulnérables lors de leur mise en application sur le MF 88, nécessitant une maintenance beaucoup trop coûteuse. Le MF 01, dernière génération de matériel fer du métro parisien, reste en conséquence équipé des traditionnels bogies.

L'agonie du serpent

Devenu inutile et laissé à l'abandon plusieurs années dans la galerie de raccordement[6] entre la ligne 7 (Place Monge) et la ligne 10 (Cardinal Lemoine puis Maubert - Mutualité), le Boa est tellement vandalisé qu'on le déclare irrécupérable. Il est mis à la ferraille pendant l'été 1999.

Notes et références

  1. Jean Tricoire, Un siècle de métro en 14 lignes, éd. 1999, p. 108
  2. Gaston Jacobs, Le Métro de Paris : un siècle de matériel roulant, p. 163
  3. « MF77 Boa - 1990 », sur YouTube (consulté le )
  4. Gérald Rossi, « Le BOA de l'An 2000 », sur humanite.fr, article du 13 novembre 1990 (consulté le ) : « Toutes les nuits, BOA effectue des essais, entre les stations Italie et Bobigny, afin d'en examiner l'endurance, et… ».
  5. Gaston Jacobs, Le Métro de Paris : un siècle de matériel roulant, p. 164
  6. Configuration des voies sur le site cartometro.com, consulté le 5 décembre 2017.

Voir aussi

Bibliographie

  • Gaston Jacobs, le métro de Paris, un siècle de matériel roulant, éd. La Vie du Rail, 2001, 223 pages. (ISBN 2902808976)
  • Jean Tricoire, Un siècle de métro en 14 lignes. De Bienvenüe à Météor, Éditions La Vie du Rail [détail des éditions]

Articles connexes

Liens externes

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