Auto-Tune
Auto-Tune est un logiciel correcteur de tonalité élaboré par la société Antares Audio Technologies en 1997, mais créé auparavant à la fin 1996 par Andy Hildebrand, un ingénieur américain travaillant dans l'industrie pétrolière.
Créateur |
Andy Hildebrand (alors employé d'Exxon)[1] |
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Développé par | Antares Audio Technologies |
Première version | Printemps 1997[2],[3] |
Dernière version | 9.0.0[4] |
Système d'exploitation | Microsoft Windows et macOS |
Type | Audio processor (d) |
Licence | Licence propriétaire |
Site web | www.antarestech.com/product/auto-tune-pro |
Initialement, l'Auto-Tune est un logiciel correcteur de voix permettant de chanter juste. Mais, quand on pousse les réglages à l'extrême, le traitement, jusqu'ici transparent et naturel, prend un caractère artificiel, donnant à la voix un aspect « métallique ». Il est souvent associé à la chanteuse Cher et au rappeur T-Pain, qui en ont popularisé l'utilisation, mais de nombreux autres artistes en font usage, ouvertement ou non, notamment dans le milieu du rap et les musiques électroniques.
Depuis, l’Auto-Tune est passé du statut d’outil à celui de véritable instrument, permettant d’imaginer de nouvelles formes d’expressions musicales modernes[5].
Auto-Tune est une production originale d’Antares Audio Technologies, mais depuis 1997 un grand nombre de logiciels ont cette fonction, ainsi que des appareils « stand-alone ». Comme logiciels concurrents, on peut citer Melodyne (en), V-Vocal ou VoiceWorks[6].
Origine
L'inventeur de l'Auto-Tune est Andy Hildebrand, dit « Docteur Andy »[7], un ingénieur en électricité américain diplômé de l'Université de l'Illinois[7]. Se spécialisant en sismologie[7], il travaille ensuite dans l'industrie pétrolière[6] où il étudie les sols et fait des prédictions sismiques pour l'entreprise Exxon, puis pour sa propre entreprise, Landmark Graphics Corporation[7].
Dans le cadre de son travail, il met au point une méthode basée sur l'autocorrélation, qui permet d'envoyer des ondes acoustiques dans les sous-sols pour voir si une exploitation pétrolifère est possible[6]. Une fois son invention vendue aux compagnies pétrolières[6], il prend sa retraite à 40 ans[7],[6] et s'inscrit dans une école de musique, où son passé de scientifique impressionne[7].
Quelques mois plus tard, lors d'un dîner avec des amis, un des convives met Hildebrand au défi de créer un système pour chanter juste[6] : « Un jour, je mangeais avec des amis et une femme m'a demandé de lui fabriquer une boîte qui lui permettrait de chanter juste. Ça a fait rire tout le monde car nous savions qu'un tel système ne pouvait pas exister »[7]. Cependant, Hildebrand se rend rapidement compte que les algorithmes qu'il utilisait en sismologie pourraient être aisément appliqués à la musique, afin de corriger, par exemple, une voix qui ne chante pas dans le ton[7]. Il se sert alors à nouveau de l'autocorrélation pour mettre au point un logiciel[6]. Il crée l'entreprise Antares Audio Technologies[7] et se met au travail. À la fin de l'année 1996, l'Auto-Tune est né[6].
Selon lui, Auto-Tune est le Graal dont rêvaient tous les ingénieurs du son :
« Auto-Tune a changé la manière dont fonctionnent les studios d'enregistrement car la justesse des voix a toujours été un problème. Avant, un studio faisait chanter la même phrase au chanteur encore et encore, jusqu'à ce qu'elle soit juste. Ça prenait beaucoup de temps et ça nécessitait énormément de prises. Avec Auto-Tune, le chanteur chante sa chanson une fois et il rentre chez lui. Le producteur règle ensuite les problèmes de justesse lui-même, ce qui lui fait gagner beaucoup de temps, et donc d'argent. Aujourd'hui, tous les grands studios utilisent Auto-Tune : ça leur permet de rester compétitifs[7]. »
Fonctionnement
L'Auto-Tune est un programme informatique, un logiciel utilisé la plupart du temps par les ingénieurs du son, mais il est aussi de plus en plus prisé par des artistes du milieu hip-hop[6],[8]. Initialement, l'Auto-Tune est un correcteur de voix permettant de chanter juste[6].
Auto-Tune analyse la hauteur (la fréquence) de la voix humaine et la recale si nécessaire en l'alignant sur une gamme (une échelle) de notes définie à l'avance. Grâce à ce procédé, un piètre interprète peut chanter juste grâce à ce correcteur de fausses notes en temps réel[6]. Quand on pousse les réglages à l'extrême, le traitement, jusqu'ici transparent et naturel, prend un caractère artificiel, donnant à la voix un aspect « métallique »[6]. L'effet « métallique » sur les voix, rendu populaire par le rappeur T-Pain, est le résultat de réglages volontairement excessifs[9].
La vitesse d’ajustement de la voix à la musique dans le logiciel est paramétrée de 0 à 400[6]. Selon Hildebrand, « Si vous la réglez [la vitesse] à 10, cela veut dire que le résultat ira à la moitié de la note recherchée en dix millisecondes, mais si vous mettez ce paramètre à 0, le logiciel trouvera la note la plus proche et changera la voix instantanément », ce qui élimine la transition naturelle entre les notes et donne à la voix un aspect surnaturel et robotisé[6]. Dépassé par son invention, son créateur affirme qu'il n'avait « jamais imaginé que quelqu’un de sensé ferait cela »[6],[7].
Bien qu'il ait en commun d'être utilisé couramment pour donner un aspect synthétique au timbre vocal, et que les deux termes tendent à être utilisés de manière interchangeable dans le langage commun, l'Auto-Tune n'est techniquement pas un vocodeur[8]. Au sens d'origine, un vocoder (contraction de « voice coder ») présuppose d'effectuer un traitement de resynthèse sur les propriétés de la voix pour fonctionner, à minima en considérant les formants, qu'Auto-Tune ne prend pas en compte puisqu'il agit sur la forme d'onde.
Le fonctionnement le plus courant d'un vocoder musical est d'effectuer un croisement entre un « porteur » (par exemple, le son d'un synthétiseur) et un « modulateur » (en principe, une voix), alors qu'ici (Auto-Tune) il s'agit d'un traitement du son générique[8]. Sur les programmes d'édition logicielles tels que GarageBand, l'Auto-Tune est désignée comme un programme de « correction de hauteur tonale »[réf. souhaitée].
Utilisateurs
En novembre 1998[7], la chanteuse américaine Cher, avec la chanson Believe, devient le précurseur de l'utilisation massive de l'Auto-Tune sur une chanson devenant un hit (le single Believe sera en effet vendu à plus de 10 millions d'exemplaires). Ainsi, ce logiciel est parfois appelé « Cher Effect » par les anglophones[10],[11]. Greg Milner, auteur de l'ouvrage Perfecting Sound Forever, explique que : « tout en travaillant avec Cher sur la chanson Believe en 1998, les producteurs Mark Taylor (en) et Brian Rawling (en) ont découvert que s'ils mettaient l'Auto-Tune sur son réglage le plus sensible, de sorte qu'il corrigeait la hauteur au moment précis où il recevait le signal, le résultat était un ton robotique troublant[12]. »
À la fin des années 2000, l'utilisation de l'Auto-Tune comme effet musical est renforcé par le chanteur de rap T-Pain, qui perfectionne cet effet et en fait un usage intensif dans ses chansons[9], notamment avec l’album Rappa Ternt Sanga (en français, « un rappeur devenu chanteur »)[8]. Depuis, de nombreux artistes utilisent ce logiciel, notamment Kanye West avec l’album 808s & Heartbreak[6], Lil Wayne[6] et bien d'autres.
En France, ce sont les rappeurs Booba avec son album 0.9 (nov. 2008) et Rohff avec Le Code de l'horreur (déc. 2008) qui inaugurent les premiers albums français conçus avec Auto-Tune[8] même si certaines chansons plus anciennes utilisaient déjà l'Auto-Tune, comme Damien Saez en 2002 sur le titre Sexe[réf. souhaitée]. Après des premières critiques négatives de la part du milieu du rap, par la suite d'autres artistes en font l'usage, comme Jul[13] ou encore le groupe PNL[8], et font d'Auto-Tune un outil créatif permettant d’insuffler un souffle nouveau avec une véritable portée émotive[8], alors que d'autres trouvent ce traitement abominable[6].
Dans les années 2010, l'Auto-Tune séduit de plus en plus de musiciens et de chanteurs, tous domaines et genres confondus[7].
Accueil
Auto-Tune est rapidement devenu l'outil indispensable pour chasser la moindre imperfection lors des prises d’enregistrement[6],[7].
En 2009, le producteur de hip-hop Rick Rubin affirme : « En ce moment, si vous écoutez de la pop, tout est à la bonne tonalité avec une mélodie parfaite, et un timing parfait (...) ça montre l’omniprésence de l’Auto-Tune »[6].
En 2011, Stephen des Aulnois, un ingénieur du son indépendant cité par Libération, indique : « L’Auto-Tune est utilisé par tout le monde aujourd’hui. Sans exception. L’oreille des consommateurs est de plus en plus aiguisée. S’il y a quelques années encore, une note pas vraiment juste était possible pour un chanteur, c’est inimaginable aujourd’hui. Le niveau d’exigence a augmenté »[6].
En 2016, la chanteuse parisienne Oklou affirme : « On a l’impression de l’entendre partout aujourd'hui mais c’est parce qu’il est utilisé de manière plus frontale, et surtout qu’il est assumé par les artistes (...) On ne parle plus de "performance" vocale, on est moins attaché qu’avant à l’authenticité du timbre, au rapport "vrai" à la voix. Je pense que c’est une bonne chose, ça veut dire que les gens ont compris que la qualité d’un morceau n’est pas dans la performance mais dans la sincérité de la démarche, quelle qu’elle soit »[7].
Pour le pianiste Chilly Gonzales, « L’Auto-Tune ne transformera jamais un mauvais chanteur en virtuose, il officie comme un correcteur mais il n’agit pas sur d’autres paramètres essentiels comme l’intention, l’expressivité, le charisme ou la prononciation du chanteur »[6].
Pour l'inventeur Andy Hildebrand, « Dire que corriger la justesse d'une voix est une forme de triche revient à dire que le maquillage est une forme de triche. Qui suis-je pour juger ? Personnellement, ma femme utilise du maquillage[7]. »
Terminologie
En France, la Commission d'enrichissement de la langue française recommande depuis 2020 d'utiliser le terme ajustement automatique d’intonation à la place d'autotune[14],[15].
Notes et références
- (en) « The Inventor of Auto-Tune », Zachary Crockett, Pricenomics.com, 14 décembre 2015.
- (en) « "Antares News" » (version du 19 août 2000 sur l'Internet Archive), AntaresTech.com.
- (en) Francis Preve, « Antares Kantos 1.0 Audio Synthesizer (PC/Mac). », Keyboard 28, no. 10 (octobre 2002) : pp. 92-95, 97.
- « OS Compatibility » (consulté le )
- Xavier Ridel, « Comment l'auto-tune a révolutionné la musique », sur lesinrocks.com (consulté le ).
- François-Luc Doyez, « Comment Auto-Tune a tué les fausses notes », sur Libération.fr, .
- « Le jour où un sismologue a inventé l'Auto-Tune », Simon Clair, greenroom.fr, 26 avril 2016.
- « Comment l’auto-tune a révolutionné la musique », Xavier Ridel, Les Inrocks.com, 27 avril 2016.
- (en) (2007). « Singers do better with T-Pain relief », Jim Farber, New York Daily News.com, 10 décembre 2007.
- (en) Sasha Frere-Jones, « The Gerbil's Revenge », The New Yorker, Condé Nast, (lire en ligne, consulté le ). « In the manual accompanying Auto-Tune's fifth-release version, the zero speed setting is described as “the Cher Effect”. ».
- (en) « Auto-Tune or How Anyone Can Sing », sur Up Venue.com (consulté le ).
- (en) Greg Milner, Perfecting Sound Forever, Faber and Faber, p. 343, 2009. Cité dans Hodgson (2010), p. 232. [présentation en ligne]
- https://mcetv.fr/mon-mag-culture/mon-mag-musique/jul-prouve-tout-monde-il-defonce-tout-sans-auto-tune-videos-0812/
- Vocabulaire de la culture : édition, médias et mode (liste de termes, expressions et définitions adoptés), JORF no 125 du 23 mai 2020, texte no 97, NOR CTNR2007595K.
- Recommandation sur les équivalents français du mot autotune, FranceTerme.
Voir aussi
Articles connexes
Liens externes
- (en) GSNAP - Équivalent de l'Auto-Tune sous forme de plugin VST
- (en) Autotalent - Équivalent de l'Auto-Tune sous forme de plugin LADSPA
- [vidéo] « Auto-Tune, le logiciel qui fait chanter les casseroles », sur LCI
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