Armand de Gramont (1879-1962)

Antoine Auguste Agénor Armand de Gramont né le à Paris et mort le à Mortefontaine (Oise), duc de Guiche puis 12e duc de Gramont (1925), est un industriel et scientifique français.

C'était un ami proche de Marcel Proust.

Biographie

Fils d'Agénor, duc de Gramont et de sa deuxième épouse, née Marguerite de Rothschild, petit-fils du ministre des Affaires étrangères Agénor de Gramont, Armand de Gramont est le demi-frère d'Élisabeth de Clermont-Tonnerre, dite « la duchesse rouge » et le neveu du mémorialiste Alfred de Gramont. Le scientifique et académicien Arnaud de Gramont est le cousin de son père.

Jeunesse

Le , au château de Vallière, il se fiance avec Élaine Greffulhe (1882-1958), fille du comte Henry Greffulhe et de la comtesse, célèbres pour avoir été les modèles du duc et de la duchesse de Guermantes de Marcel Proust dans À la recherche du temps perdu. Il était lui-même ami de Proust qui le rencontra sans doute à la fin à un dîner chez les Noailles : Armand de Gramont, écrira-t-il dans son pastiche de Saint-Simon, « rappelait les grâces de ce galant comte de Guiche, qui avait été si initié dans les débuts du règne de Louis XIV. Il dominait sur tous les autres ducs, ne fût-ce que par son savoir infini et ses admirables découvertes. » Et il ajoute qu'il avait des yeux « admirables avec un regard qui, bien que personne n'aimât autant que lui à se divertir, semblait percer au travers de sa prunelle, dès que son esprit était tendu à quelque objet sérieux. » Marcel Proust assista au déjeuner de fiançailles qui le rendit extrêmement malheureux car il était le seul à y être venu en habit. Le duc de Guiche lui était fort dévoué et lui inspira quelques traits de Robert de Saint-Loup. Proust lui dédicaça ainsi l'exemplaire des Plaisirs et les Jours qu'il lui offrit : « Au duc de Guiche, au vrai plutôt qu'au réel, à celui qui aurait pu être, plus encore qu'à celui qui est… j'offre ce portrait, plus guère ressemblant, d'un moi qu'il n'a pas connu[1]. »

Le mariage du duc de Guiche eut lieu à l'église de la Madeleine à Paris le . Marcel Proust assistait à ce mariage[2]. « J’ai dit à madame Greffulhe que vous aviez envisagé votre mariage (des aspects seulement) comme une possibilité d’avoir sa photographie. Elle a ri si joliment que j’aurais voulu le lui redire dix fois de suite. Je voudrais bien que mon amitié avec vous me vaille ce privilège », écrira-t-il à Armand quelques semaines plus tard[3]. Cette union ne fut pas très harmonieuse : Élaine Greffulhe, même si elle versifie, est une épouse effacée, et elle sera irrémédiablement trompée par un mari qui adore les femmes. Ils eurent néanmoins cinq enfants :

  • Antoine Agénor Henri Armand (1907-1995), épouse Odile Sublet d'Heudicourt de Lenoncourt, dont Antoine (1951-2014), père d'Antoine, 15e duc de Gramont () ;
  • Henri Armand Antoine (1909-1994), dont une fille et un fils, mort en 1952 à l'âge de 12 ans ;
  • Jean Armand Antoine (1909-1984), dont trois filles et un fils, lui-même père de trois filles ;
  • Charles Louis Antoine Armand (1911-1976), sans descendance ;
  • Corisande Marguerite Élisabeth (1920-1980), comtesse Jean-Louis de Maigret.

Carrière

Anonyme, Antoine XII de Gramont, localisation inconnue.

Amateur de peinture, Armand de Gramont avait rêvé de devenir peintre et exposé en 1904 un tableau au Salon des artistes français. Sa famille l'avait poussé vers des études plus sérieuses et il avait obtenu une licence ès sciences en 1902. En 1908, sur les conseils du professeur Carlo Bourlet, il établit un laboratoire pour des expériences d'aérodynamique, dans le jardin d'une maison de retraite fondée par ses beaux-parents à Levallois. En 1911, il soutient à la faculté des sciences de Paris sa thèse pour le doctorat ès sciences intitulée Essai d'aérodynamique du plan, première thèse consacrée en France à ce sujet. Il obtient ensuite le prix Fourneyron de l'Académie des sciences avec Gustave Eiffel.

Au cours de la Première Guerre mondiale, Armand de Gramont est tout d'abord automobiliste interprète avec l'armée anglaise, puis aviateur à la Section technique de l'aéronautique où il rencontre le savant Henri Chrétien. En , le Service des fabrications de l'aviation du ministère de la Guerre demande à Gramont de transformer son laboratoire d'aérodynamique en atelier de fabrication d'appareils optiques, en particulier de collimateurs de visée. Il observe l'insuffisance de l'équipement de l'armée française en instruments d'optique de précision et l'absence d'ingénieurs capables de les mettre au point. Il prend alors la tête d'un comité en faveur de la création d'un institut d'optique appliquée chargé de la formation d'un corps d'ingénieurs-opticiens. Si la décision de principe fut prise par le Gouvernement dès 1916, l'Institut d'optique théorique et appliquée (SupOptique), qu'il présida jusqu'à sa mort, ne commença ses activités qu'en 1920. Sa fille Corisande y fut élève-ingénieur.

Un Foca PF3L avec objectif 135 mm et viseur universel (1945), Paris,Conservatoire national des arts et métiers.

En tant qu'industriel, avec l'ambition de rivaliser avec les productions allemandes, il fonde en 1919 et dirige la société Optique et précision de Levallois (OPL), qui prend la suite de l'atelier de fabrication d'appareils optiques. Son siège est installé au même endroit, 86, rue Chaptal à Levallois-Perret. L'armée fut son principal client jusqu'à la Seconde Guerre mondiale. En 1938, Armand de Gramont, voulant diversifier les productions d'OPL vers le monde civil, fit construire une usine à Châteaudun. La société produisit alors des appareils photographiques réputés sous la marque Foca.

En 1964, OPL fusionna avec la Société d'optique et de mécanique de précision (SOM-Berthiot) pour former la Société d’optique, précision électronique et mécanique (SOPELEM), qui a travaillé dans le domaine militaire. La SOPELEM devint en 1992 SOPELEM/SOFRETEC puis Société de fabrication d’instruments de mesure (SFIM ODS) et fut rachetée en 2000 par la SAGEM, intégrée depuis 2005 au groupe SAFRAN.

Les obsèques d'Armand de Gramont eurent lieu dans l'intimité, à l'église de Mortefontaine le et son corps inhumé au caveau de la Maison dans la même commune. Sa femme Elaine Greffulhe y avait été inhumée en [4]. À l'époque, la commune de Mortefontaine ne répertoriait pas toutes les personnes inhumées dans les concessions (seulement le nom du propriétaire de chaque concession). Il n'y a donc pas trace de leur inhumation à la mairie[5].

Distinctions

Le château de Vallière, propriété du duc de Gramont, carte postale (début du XXe siècle).

Armand de Gramont est élevé à la dignité de grand officier de la Légion d'honneur. Élu à l'Académie des sciences le (Armand de Gramont 32 voix, Louis Martin 29 voix), succédant à Achille Le Bel, il en fut le président l'année 1956. Il fut également président de la Société française de physique, président d'honneur de la Société française de photographie (1938-1946), succédant à Charles Fabry, président de la Commission scientifique de l'Aéro-Club de France, président de l'Institut d'optique théorique et appliquée (connu aujourd'hui sous le nom de SupOptique).

Publications

Notes et références

  1. George Painter, op. cit., tome I, p. 391.
  2. Ce film diffusé sur internet en a suscité une controverse pour savoir si l'on y voit réellement Marcel Proust ; lire à ce sujet cette analyse [archive] sur le site lefoudeproust.fr ainsi que https://imagesociale.fr/4157 [archive]. La revue l'Histoire de janvier 2018 a finalement publié un article « La Madeleine sans Proust » réfutant la thèse de l'apparition de Proust dans ce film.
  3. Laure Hillerin, La comtesse Greffulhe. L'ombre des Guermantes, Flammarion, (lire en ligne), pp. 371-374 et 403-412.
  4. Jean de Jaurgain et Raymond Ritter, La Maison de Gramont (1040-1967), tome 2, Les Amis du Musée Pyrénéen, 1968.
  5. Information fournie par la mairie de Mortefontaine[source insuffisante].

Bibliographie

  • William Adams (trad. Milena Hrdina), En souvenir de Proust : les personnages du temps perdu, Lausanne Paris, Edita Distribué par La Bibliothèque des arts, , 128 p. (ISBN 978-2-88001-187-1, OCLC 461976569).
  • George Painter, Marcel Proust, Paris, Mercure de France, 1966, 2de édition 1992.
  • Laure Hillerin, La comtesse Greffulhe : L'ombre des Guermantes, Paris, Flammarion, coll. « Libres Champs », , 596 p. (ISBN 978-2-08-142237-7, OCLC 1061089229, notice BnF no FRBNF45574886, présentation en ligne).

Articles connexes

Liens externes

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