Ana Brnabić

Ana Brnabić (/âna bř̩nabit͡ɕ/[alpha 1],[alpha 2] ; en serbe cyrillique : Ана Брнабић) est une femme d'État serbe membre du Parti progressiste serbe (SNS), née le à Belgrade. Elle est présidente du gouvernement depuis le .

Ana Brnabić
(sr) Ана Брнабић

Ana Brnabić en 2018.
Fonctions
Présidente du gouvernement de Serbie
En fonction depuis le
(4 ans, 2 mois et 18 jours)
Président Aleksandar Vučić
Gouvernement Brnabić I et II
Législature XIe, XIIe
Coalition SNS-SPS
Prédécesseur Ivica Dačić (intérim)
Aleksandar Vučić
Ministre des Affaires étrangères
(intérim)

(6 jours)
Président du gouvernement Elle-même
Gouvernement Brnabić I
Prédécesseur Ivica Dačić
Successeur Nikola Selaković
Ministre des Finances
(intérim)

(13 jours)
Président du gouvernement Elle-même
Gouvernement Brnabić I
Prédécesseur Dušan Vujović
Successeur Siniša Mali
Ministre des Administrations publiques et des Affaires locales

(10 mois et 18 jours)
Président du gouvernement Aleksandar Vučić
Ivica Dačić (intérim)
Gouvernement Vučić II
Prédécesseur Kori Udovički
Successeur Branko Ružić
Biographie
Date de naissance
Lieu de naissance Belgrade (Yougoslavie)
Nationalité Serbe
Parti politique SNS (depuis 2019)
Diplômée de Université de Hull
Profession Fonctionnaire


Présidents du gouvernement de Serbie

Formée aux États-Unis et au Royaume-Uni, elle revient en Serbie en . Elle s'engage dans la promotion des énergies renouvelables en 2011.

En 2016, elle est nommée ministre des Administrations publiques et des Affaires locales par Aleksandar Vučić. Sans affiliation partisane, elle est la première ministre assumant son homosexualité dans un pays conservateur.

Elle devient présidente du gouvernement en 2017, sur proposition de Vučić, devenu président de la République. Elle est alors la première femme, la première personne ouvertement homosexuelle et la première personnalité d'origine croate à occuper cette fonction. Elle adhère au SNS deux ans plus tard.

Situation personnelle

Études

Née en Yougoslavie socialiste, elle est d'origine croate[1]. Après avoir achevé ses études secondaires en . elle quitte la Yougoslavie pour les États-Unis. Inscrite à l'université Northwood, dans l'État du Michigan, elle entreprend un cursus en administration des affaires. Elle le poursuit à partir de à l'université de Hull, au Royaume-Uni, où elle obtient une maîtrise (MBA)[2].

Carrière

Elle fait son retour en Serbie en . Elle est d'abord agent de relations publiques pour le programme de développement agricole, puis rejoint en le programme Continental Wind Serbie, qui promeut le recours aux énergies renouvelables. Elle en devient la directrice deux ans plus tard[2].

Vie privée

Le , Ana Brnabić annonce que sa compagne, Milica Đurđić, a donné naissance à un garçon. Brnabić n'en est pas légalement la mère, puisque la loi serbe ne reconnaît pas les couples homosexuels ou l'homoparentalité[3].

Parcours politique

Ministre

Elle est nommée ministre des Administrations publiques et des Affaires locales le dans le nouveau gouvernement formé par Aleksandar Vučić.

Alors qu'elle assume pleinement son homosexualité dans un pays où 80 % de la population se déclarent chrétiens orthodoxes et où les marches des fiertés sont l'objet de violences voire sont annulées, cette nomination est perçue par les ONG comme un moment historique. Vučić déclare à ce propos « ses orientations personnelles ne m’intéressent pas, seuls les résultats de son travail comptent »[4].

Premier mandat

Elle est proposée le à l'Assemblée nationale pour le poste de présidente du gouvernement par Vučić, désormais président de la République. Sa désignation constitue une première de trois points de vue : elle est en effet la première femme, la première personne ouvertement homosexuelle, et d'origine croate choisie pour exercer cette responsabilité[5],[6].

Alors que le chef de l'État considère qu'« elle possède les qualités personnelles et professionnelles pour exercer ces fonctions », il justifie d'avoir désigné une indépendante et non une membre du Parti progressiste serbe (SNS), majoritaire et dont il est issu : « ce n'est pas une défaite pour le SNS. Le prochain président du gouvernement doit encore renforcer la réputation du pays et les réformes »[6]. Sa nomination, dans un pays peu actif pour lutter contre l'homophobie est interprétée par « beaucoup de militants anti-discriminations » (selon Le Monde) comme une démarche de pinkwashing, afin de favoriser la procédure d'adhésion à l'Union européenne[7].

Pour sa part, elle déclare « servir mon pays est pour moi le plus grand honneur. Je travaillerai avec dévouement et de manière responsable avec beaucoup d'amour et d'honnêteté ». Précisant qu'elle n'est pas militante LGBT, elle estime que la situation des homosexuels s'améliore « lentement » en Serbie mais que l'homophobie reste un problème[8]. Elle explique ne pas comprendre « en quoi [son] orientation sexuelle est si importante », jugeant que « ce qui est important, c’est la capacité professionnelle à accomplir un travail honnête, à aimer sa patrie et à travailler dans le plus grand intérêt de son pays »[9].

Présentée comme favorable à l'intégration européenne, elle sera principalement chargée de mettre en œuvre les réformes économiques tandis que Vučić continuera de piloter la politique étrangère et intérieure, lui permettant ainsi de garder la main sur le pouvoir tout en donnant des signes d'ouverture[10]. Le président de la République lui-même indique qu'elle « se concentrera sur l'économie et le numérique » alors que le premier vice-président Ivica Dačić « gérera la partie politique »[6].

Le suivant, Ana Brnabić est investie présidente du gouvernement par l'Assemblée nationale, à 41 ans, par 157 voix favorables sur 250[11].

Ayant indiqué en son intention d'adhérer au Parti progressiste, qu'elle dit « aimer et respecter » et dont elle affirme « qu'il n'a pas eu peur de changer, d'apprendre et de donner une chance aux gens, y compris ceux qui n'en étaient pas membres », elle concrétise cette annonce quatre mois plus tard[12],[13].

Prises de position

Confrontée à un mouvement de grève dans les usines automobiles Fiat de Kragujevac lors de son arrivée au pouvoir, elle accuse les ouvriers grévistes d’être « trop payés » dans la mesure où leur salaire est légèrement supérieur au revenu serbe moyen. Selon elle, en risquant de décourager les investisseurs étrangers, ces employés se montreraient « égoïstes »[14].

Le , elle participe à la marche des fiertés de Belgrade, devenant la première chef de gouvernement d’un pays balkanique à se rendre à une telle manifestation[15].

Dans un entretien accordé au quotidien suisse Le Temps en suivant, elle explique que les droits LGBT ne sont pas sa priorité car « nous avons encore beaucoup à faire pour offrir aux Serbes des perspectives pour une vie meilleure et davantage de sécurité. C’est notre première responsabilité ». Selon elle, « si l’économie va bien, que la population dispose d’un travail, d’un salaire décent et des perspectives de carrière, elle sera moins intéressée à détester les autres ». Elle précise que pour l'adhésion de la Serbie à l'Union européenne, « nous avons un plan d’action, selon lequel les réformes devraient se terminer d’ici à 2020, voire 2021 », indiquant ainsi qu'elle vise la possibilité d'une entrée dans l'UE à l'horizon , une date fixée par le président de la Commission européenne Jean-Claude Juncker[16].

Interrogée sur les liens avec le Kosovo en , elle adopte une position médiane. Indiquant que « la Serbie ne reconnaîtra jamais le Kosovo indépendant », elle précise dans la foulée que « si nous continuons à insister sur le fait que le Kosovo appartient à la Serbie, un compromis sera impossible ». Pour elle, « le Kosovo, c'était la Serbie, point ». Brnabić dénonce que « l'intention de Pristina pourrait être de déporter tous les Serbes [du Kosovo] » ajoutant que « la Serbie ne l'autorisera pas » et qu'elle « est prête pour des discussions »[17].

Lors d'un discours le , elle rappelle que « mon grand-père est Croate et moi je suis présidente du gouvernement en Serbie », saluant « la tolérance » de ses concitoyens d'avoir à la tête de leur exécutif une personnalité d'origine croate[18],[19]. Elle évoque également sa peur de la montée de l'intolérance en Croatie, dénonçant la force et l'influence acquises selon elle par les mouvements d'extrême droite dans ce pays[20]. Elle ajoute rêver de voir la Croatie aussi tolérante que la Serbie, avec un Premier ministre d'origine serbe dirigeant le gouvernement croate[21].

Second mandat

Le , 106 jours après la tenue des élections législatives qui se sont soldées par une large victoire de la coalition formée autour du Parti progressiste serbe, le président de la République Aleksandar Vučić confie à Ana Brnabić le soin de former un nouveau gouvernement. Indiquant qu'il lui a demandé de choisir la moitié des ministres elle-même, le chef de l'État explique l'avoir reconduite car « elle n'a pas usé de son poste pour favoriser des intérêts étrangers ou purement locaux, elle s'est battue dans l'intérêt de son pays »[22].

Notes et références

Notes

  1. Prononciation en serbe retranscrite phonétiquement selon la norme API.
  2. La prononciation en français standard retranscrite phonémiquement peut être /a.na bɛʁ.na.bitʃ/.

Références

  1. « La Première ministre homosexuelle qui défie la Serbie conservatrice », Le Journal du dimanche, (lire en ligne, consulté le ).
  2. Edwy Malonga, « Serbie : qui est Ana Brnabic, cette femme homosexuelle nommée Premier ministre ? », LCI, (lire en ligne, consulté le ).
  3. « Serbie. La compagne de la Première ministre accouche d’un petit garçon », Ouest-France, (lire en ligne, consulté le ).
  4. Philippe Bertinchamps, « Ana Brnabic, ministre lesbienne d’une Serbie aux penchants homophobes », Libération, (lire en ligne, consulté le ).
  5. « #LGBTQI Serbie : Ana Brnabic, femme ouvertement gay, nommée Premier ministre », L'Obs, (lire en ligne, consulté le ).
  6. (en) Nikolina Demark, « Progressive Balkan Love: Croatian Origins, Serbian's First Gay Prime Minister », Total Croatia News, (www.total-croatia-news.com/politics/19716-progressive-balkan-love-croatian-origins-serbia-s-first-gay-prime-minister, consulté le ).
  7. « « Sexe et pouvoir » : Ana Brnabic, première ministre lesbienne au risque du « pinkwashing » », Le Monde.fr, (lire en ligne, consulté le )
  8. « Serbie : Ana Brnabic, ouvertement lesbienne, est nommée Première ministre », L'Express, (lire en ligne, consulté le ).
  9. Yannick Van der Schueren, « Ana Brnabic rejoint le club des dirigeants européens ouvertement gays », Tribune de Genève, (lire en ligne, consulté le ).
  10. « Ana Brnabic nommée 1re ministre en Serbie : le coup politique du président Vucic », Radio France internationale, (lire en ligne, consulté le ).
  11. « Serbie : le parlement nomme Ana Brnabic Première ministre », RTL, (lire en ligne, consulté le ).
  12. (en) Milos Mitrovic, « Brnabic to become a member of SNS », balkaneu.com, (lire en ligne, consulté le ).
  13. (en) « Promised – fulfilled: Ana Brnabic becomes SNS member », bizlife.rs, (lire en ligne, consulté le ).
  14. Jean-Arnault Dérens et Laurent Geslin, « L’autocrate serbe que Bruxelles dorlote », Le Monde diplomatique, (lire en ligne, consulté le )
  15. « La Première ministre serbe, lesbienne, à la Gay pride de Belgrade », ouest-france.fr, 17 septembre 2017.
  16. « Ana Brnabic: «Nous serons prêts pour l’UE en 2020» », Le Temps, (lire en ligne, consulté le ).
  17. (en) « Brnabic: “Kosovo was Serbia. Point.” », balkaneu.com, (lire en ligne, consulté le ).
  18. (hr) « Brnabić: Moj deda je bio Hrvat, pa sam premijerka », B92, (lire en ligne, consulté le )
  19. (hr) « Brnabić: Moj deda je bio Hrvat,a ne Srbin iz Hrvatske – zato sam premijerka », Haber, (lire en ligne, consulté le )
  20. (hr) « Ana Brnabić: Moj deda je bio Hrvat, pa sam predsednik Vlade Srbije », Kurrir, (lire en ligne, consulté le )
  21. (hr) « Moj deda je bio Hrvat, pa sam predsednik Vlade Srbije », Tanjug, (lire en ligne, consulté le )
  22. (en) « Serbia: 1st woman premier gets turn at forming govt », Agence Anadolu, (lire en ligne, consulté le )

Voir aussi

Articles connexes

Liens externes

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