Abbaye Saint-Denis de Nogent-le-Rotrou
L'abbaye Saint-Denis de Nogent-le-Rotrou est un monastère de moines bénédictins sur territoire de la commune de Nogent-le-Rotrou, dans le département d'Eure-et-Loir, en région Centre-Val de Loire, dans le diocèse de Chartres.
Histoire de l'Abbaye
Fondation au XIe siècle
L'abbaye est fondée par Geoffroy Ier du Perche (mort en 1040), fut seigneur de Mortagne-au-Perche et de Nogent-le-Rotrou des alentours de l'an mil à sa mort, et vicomte de Châteaudun (sous le nom de Geoffroy II) de 1004 à 1040. Il était fils de Fulcois, comte de Mortagne, et de Mélisende de Nogent. La charte de fondation décrit la fondation d'une basilique qui semble être achevée en 1031. Rotrou II du Perche, est cité avec son frère aîné Hugues en 1031 dans une charte que signa leur père Geoffroy Ier du Perche, lors de la fondation de l'abbaye Saint-Denis de Nogent-le-Rotrou. Charte dans laquelle il donne aux moines:10 arpents de prés autour de l'église, quatre moulins sur la Rhône, l'église de Saint-Hilaire, le Breuil (commune de Marcheville), la Beausserie (commune de Béthonvilliers), tous les droits sur ses forêts à l'exception de celle de Perchet, l'église de Champrond-en-Perchet, la terre de Nigelles, les Viviers, un moulin sur l'Erre, le cens sur les moulins de Chartres, l'église Saint-Sépulcre de Châteaudun, cinq étaux pour la vente du sel et de la viande dans la ville de Châteaudun, droit d'asile dans le bourg de Saint-Denis, ainsi que droits de juridiction et de seigneurie avec celui d'avoir des hommes d'armes pour veiller à la sécurité du bourg et du monastère.
Rotrou II est également témoin, toujours avec son frère, d'une autre charte de son père, qui fit une donation à ce même monastère en 1040. Leur père fut tué peu après dans une émeute à Chartres en 1040, et son frère aîné ne lui survécut que quelques années. C'est lui qui fera achever et consacrer l'édifice.
Avant 1069, Rotrou II fait appel aux moines de l'abbaye Saint-Père-en-Vallée à Chartres, pour peupler et restaurer la communauté monacale, qu'il place à la fin de sa vie sous l'autorité de l'abbé de cette abbaye chartraine, mais son fils Geoffroy IV, comte de Mortagne, et seigneur de Nogent (1079-1100) conteste cette donation et offre son abbaye aux moines de l'abbaye de Cluny, qui dès lors devient un prieuré en 1080[1].« Donation faisant suite à une querelle avec les religieux de Saint-Père de Chartres, premiers bénéficiaires de cette fondation qui remonte à 1031-1032. Cette concession est symptomatique de l'enjeu géo-politique que représente un établissement monastique de ce type, car le choix de Cluny – qui venait de récupérer du roi la collégiale de Saint-Martin-des-Champs, dans la capitale capétienne – au détriment de l'abbaye chartraine, dans un centre de pouvoir de la famille de Blois, ne peut pas être une simple coïncidence »,[2].
XIIe et XIIIe siècle
L'abbaye va se développer grâce aux nombreux dons qu'elle reçoit, c'est ainsi que sont construit les absidioles au chevet de l'église, la restauration des bâtiments étant dans le prolongement du transept sud de l'église que sont le chauffoir, le scriptorium, et au sud de l'entrée de l'église le bâtiment qui correspondrait au cellier ou grande salle, et possible logis de l'abbé. Construction du pavillon d'entrée (sur la rue Saint-Denis)
Après une période de prospérité, elle va subir le contre-coup des événements indépendants d'elle. Ses protecteurs la famille de Rotrou va s'éteindre en 1226. Dans le milieu du XIIe siècle il ne reste que 27 moines dans ses murs, ce qui lui confère encore le titre de prieuré.
En 1250, les moines n'étant plus assez nombreux, le monastère perd son statut de prieuré et devient un doyenné, dont les 20 moines restants assurent quatre messes journalières. C'est dans ce siècle que fut construite l'église mariale dite église Notre-Dame de Nogent-le-Rotrou, qui deviendra en 1807 le réfectoire de la caserne, et en logement à l'étage, puis en 1948 deviendra une salle d'étude et un économat.
XIVe et XVe siècle
Dans le courant du XVe siècle, les moines obtiennent la direction des écoles de Nogent. Puis au siècle suivant se met en place le régime de la commende où les abbés sont nommés par le roi.
L'église Saint-Laurent, construite dans l'enclos de l'abbaye aux XVe et XVIe siècles, était destinée aux laïcs. Elle était séparée par une porte[3].. À la sobriété de sa façade s'oppose la richesse de son mobilier intérieur, dont une Mise au tombeau du XVe siècle[3]. Elle a fait l'objet d'une inscription sur l' Inventaire supplémentaire des monuments historiques en 1927[4].
- Portail.
- Porche.
XVIe et XVIIe siècle
Du 20 au se tient dans la salle du Chapitre de l'abbaye la réunion des états de la province du Perche pour la rédaction de la coutume du Perche. Le XVIIe siècle voit les vocations diminuées, il ne sont plus que cinq moines dans le monastère. C'est au cours du XVIe siècle que sont édifiés la maison du bailly, et l'église Saint-Laurent; reconstruit , le chapitre et le dortoir, la grande salle, ou logis de l'abbé
XVIIIe et XIXe siècle
Tombé dans un état de délabrement total, il est supprimé en 1788, et par suites de la Révolution, les bâtiments sont mis en vente le 11 frimaire an VIII (), [Notes 1], et acquis par un monsieur Rouvray. Le clocher de l'église en ruines est abattu ainsi que divers bâtiments le .
Le un décret impérial autorise la municipalité à faire l'acquisition des bâtiments restants, ce qu'elle fait un an plus tard et y installe une caserne, qui va être convertie en collège, palais de justice, et prisons.
- La Maison de la Justice et du Droit, installée dans un bâtiment de l'ancienne abbaye Saint-Denis.
- La sous-préfecture de Nogent-le-Rotrou.
Basilique Saint-Denis de Nogent-le-Rotrou
Cette basilique est orientée, entrée à l'ouest, chevet à l'est. Elle est desservie par des moines bénédictins ayant pour fonction de prier pour le salut du fondateur, ainsi que des membres de sa famille, vivants et morts confondus. Elle est placée sous le vocable de saint Denis, et devient le lieu de sépulture de la famille de Rotrou. Elle avait 76 mètres dans sa plus grande longueur sur 22 mètres dans sa largeur la plus grande. On peut par les textes et les marqueurs stylistiques dater sa construction dans une période comprise en 1028 et 1080. Elle possédait huit autels.
La basilique fut consacré en 1076 en présence de Rotrou II du Perche, de l'évêque de Chartres: Robert de Grantemesnil (1075-1076), de Gauscelin (Gauscelinus), abbé de l'abbaye de Saint-Calais[5], et de l'évêque du Mans : Arnaud (1067-1081).
Après avoir subit les affres des conflits, le chœur est partiellement reconstruit dans les débuts du XIIIe siècle et de cette époque on peut encore voir les chapiteaux à crochets du vaisseau central, ainsi que les voûtes d'ogives des chapelles rayonnantes[Notes 2] A la hauteur du transept sud une porte donne accès à la salle capitulaire et au cloître d'où l'on accède au réfectoire et aux cuisines plus au sud de l'église. Derrière la partie ouest du cloitre se trouve le cellier à proximité des cuisines et du moulin Saint-Denis à l'intérieur de l'enclos sur les bords de l'Erre.
Au début du XVIe siècle des travaux sont entrepris au pied des contreforts des absidioles du chevet de l'église ou l'un des contreforts du chœur porte les armes de Jacques d'Amboise (v.1440-1516), abbé de Jumièges, de Cluny et de Saint-Alyre de Clermont, ainsi qu'évêque de Clermont.
En 1657, l'église est indiqué comme étant en ruines.
En 1807, La nef ruinée jusqu'au transept sera transformée en cour. Le déambulatoire et les absidioles cloisonnées font office de dortoirs, les bras nord du transept deviennent les écuries, et les tribunes de l'église servent de chambres aux officiers.
Sépultures
Inhumations dans l'abbaye de Geoffroy III, vicomte de Châteaudun et seigneur de Nogent mort en 1039, à Geoffroy V, comte du Perche et seigneur de Nogent, mort en 1202.
Privilèges
- Droit de justice haute, moyenne et basse[6].
- Droit de notariat et scel à contrats.
- Droit de sergenterie dont l'exercice exige la nomination d'un bailly, d'un lieutenant, et un procureur fiscal, un greffier et un notaire.
- Droit de prison close[Notes 3],[7], dans le monastère pour la garde et la correction des délinquants et malfaiteurs.
- Droit de parc pour les animaux capturés ayant causés des dommages.
- Droit de poteaux et pilori, près des halles et droit de fourches patibulaires à quatre piliers, dressée sur le grand chemin de Nogent à Mortagne.
- Droit d'amendes, confiscations et aubaines, appartenant aux seigneurs châtelains.
- Droit de halles et d'étalage.
- Droit de foire dans la ville de Nogent, le , jour de la fête de saint Denis.
- Droit de péage sur le Pont de Bois.
- Droit de boucherie et charcuterie.
- Droit de maîtrise de tanneurs et corroyeurs de cuirs, de tisserands , sergers, étaminiers.
- Droit d'avoir chaque année une paire de souliers de chaque cordonnier ayant boutique.
- Droit de four banal, et de banalité de moulin.
Abbés et prieurs
Abbés et prieurs réguliers
- 1390 : Doyen Pierre de Chastillon.
Prieurs doyens commendataires
- 1562-1567 : Jean IV Jouvenel des Ursins, abbé également de l'abbaye Notre-Dame de la Pelice, de Abbaye de Saint-Méen, et prieur doyen de Saint-Denis de Nogent-le-Rotrou. Il dépose un dossier au Parlement de Paris pour crainte de refus de dîmes[Notes 4] , [8],
Personnalités et bienfaiteurs de l'abbaye
- Rotrou II du Perche, sixième vicomte de Châteaudun, seigneur de Nogent-le-Rotrou ( 1039-1079), comte de Mortagne.
- Geoffroy II du Perche, (mort en octobre 1100), fut comte de Mortagne et seigneur de Nogent de 1060 à 1090, puis comte du Perche de 1090 à 1100. Fils de Rotrou II du Perche.
- Rotrou III du Perche le Grand, second comte du Perche (1100-1144).
- Rotrou IV du Perche, troisième comte du Perche, (1144-1191).
- Geoffroy IV de Châteaudun, vicomte de Châteaudun (vers 1180-1191).
- Geoffroy III, comte du Perche (1191-1202), mort 1202, mari de Mathilde de Bavière, nièce de Richard Cœur de Lion et fille d'Henri le Lion.
- Thomas du Perche, cinquième comte du Perche, 1202-1217, fils de Geoffroy III.
- Guillaume du Perche, (mort le ), fut comte du Perche de 1217 à 1226. Il était fils de Rotrou IV, comte du Perche, et de Mathilde de Blois-Champagne, évêque de Châlons-en-Champagne, sixième comte du Perche, 1217-1226.
Baillis de l'abbaye
- 1554 : Pierre Durand.
- 1581 : Pierre Duve.
- 1634 : René d'Amilly.
Procureurs fiscaux de l'abbaye
- 1550 : Gabriel Le Vaillant.
- 1680 : Pierre Leroy, révoqué en 1681.
- 1750 : Pierre Charles Clément Vasseur.
Propriétés et revenus
Cures
- L'église de Saint-Hilaire,
- l'église Saint-Aubin de Champrond-en-Perchet,[Notes 5] ,[9]. L'existence de cette église est attestée dès 1051, lors de son rattachement à l'abbaye Saint-Denis de Nogent-le-Rotrou[10].
- l'église Saint-Sépulcre de Châteaudun.
Prieurés
- Prieuré Saint-Pierre-ès-Liens de Ceton, fondé vers 1090 par des biens donnés par Gauthier et Yves Chesnel, en partie du XIe siècle[11], classée Monument historique[12]. Elle abrite une sculpture du XVIe siècle (Mise au tombeau), un retable et un tableau (Le Triomphe de saint Roch) du XVIIe classés à titre d'objets[13], avec le logis prieural, construit au XVIIe siècle pour loger le chapelain et le fermier général. [Notes 6] ,[14].
- Prieuré Saint-Sépulcre de Châteaudun.
- Prieuré Saint-Pierre de Pontneuf.
- Prieuré Saint-Lubin de Flacey.
- Prieuré Sainte-Trinité de Champrons-en-Gâtine, fondé vers 1250.
- Prieuré Saint-Pierre d'Happonvilliers.
- Prieuré Saint-Gilles de Saint-Ulphace, fondé vers 1100 par le comte Gauthier de Montmirail.
Fermes, moulins, terres, prés et bois
- Terres
Dix arpents de prés autour de l'église à Nogent-le-Rotrou, soit 3 hectares 40 ares, La terre du Breuil (commune de Marcheville), celle la Beausserie (commune de Béthonvilliers), la terre de Nigelles, les Viviers.
- Forêts
Tous les droits sur ses forêts à l'exception de la forêt de Perchet.
- Moulins
Notes et références
Notes
- ou le , selon Hadrien Rozier dans sa description de l'édifice
- En 2007, les fouilles préventives effectuées à l’occasion de la reconstruction du collège Arsène Meunier ont démontré l’existence d’une campagne de réfection datée entre les XIIIe siècle et le XIVe siècle . Le chœur était donc potentiellement pourvu de chapelles rayonnantes avant le XIIIe siècle. Si la fourchette chronologique indiquée ne permet pas de confirmer l’existence de chapelles rayonnantes avant cette période, elle ne permet pas non plus de l’infirmer. D’après Gaël Carré, et Nicolas Payraud . L’abbaye de Saint-Denis de Nogent-le-Rotrou, Histoire et archéologie. Dans Cahiers Percherons n°188. 2011. P.2-14..
- En 1652 une sentence, assigne les prisons de l'abbaye afin de servir de lieu de dépôt des prêtres traduits devant l'officialité de Nogent-le-Rotrou
- Archives nationales de France, X1 n 1603, fol.422 v°. Cf. X1 a 1621, fol.439 v°, 26 juin 1567
- Les ruines de l'église Saint-Aubin, situées près du lieu-dit la Cour aux Guillers au nord-est de la commune, ont été rénovées en 2013 par les bénévoles de l'association pour la mise en valeur du patrimoine de Brunelles et Champrond-en-Perchet (MVPBC). L'édifice est recensé dans l'inventaire général du patrimoine culturel
- Il faut attendre 1878 pour que le logis prieural devienne le presbytère de la paroisse. Après le départ de l'abbé Louis Jéhan en 1997, puis des religieuses en 2005, le presbytère est devenu la mairie
Références
- Thompson, op. cit., pp. 641-666.
- Racinet, op. cit.
- « Patrimoine »(Archive • Wikiwix • Archive.is • Google • Que faire ?) « Patrimoine », sur nogentlerotrou-tourisme.fr (consulté le ).
- « Église Saint-Laurent », notice no PA00097176, base Mérimée, ministère français de la Culture.
- Abbé Louis Froger (1848-1918), Histoire de Saint-Calais, Mayenne, 1901, 1.vol., [VI-567.p.), chapitre VI, p. 23 texte en ligne
- Archives nationales de France. P.937, N°38.
- Archives départementales d'Eure-et-Loir, B. 2622
- Victor Carrière, « Relevés des arrêts du Parlement de Paris de à », Revue d'histoire de l'église de France, p. 316.
- « Petit Champrond : église paroissiale Saint-Aubin, actuellement ruines. », notice no IA28000148, base Mérimée, ministère français de la Culture
- Paroisse Saint-Lubin du Perche (préf. Abbé Daniel Rambure, curé), Ces 36 églises ont quelque chose à vous dire..., , 101 p..
- « Communauté de Communes du Val d'Huisne - Patrimoine bâti » (consulté le ).
- « Église », notice no PA00110763, base Mérimée, ministère français de la Culture.
- « Œuvres mobilières à Ceton », base Palissy, ministère français de la Culture.
- Laurence de Calan, Presybtères du Perche, éditions des Amis du Perche, collection « Présence du Perche », juillet 2012, p. 39-40. [ (ISBN 978-2-900122-983)]
Voir aussi
Bibliographie
- Médiathèque de l'Architecture et du Patrimoine : Dossier Saint-Denis cote 0081 028 0064.
- Bry de la Clergerie, Histoire du Perche, charte XCIX, p. 303
- M. Gouverneur, Essais sur le Perche,
- Hector Guillier de Souancé, Saint-Denis de Nogent-le-Rotrou 1031-1789,Vannes, 1895
- Kathleen Thompson, Sept textes pour une fondation, les premiers temps de Saint-Denis de Nogent-le-Rotrou et leurs écritures. Le pouvoir dans le Perche au temps des Rotrou, Bibliothèque de l'école des chartes, 2002, tome 160, pp. 641-666
- Diane Laneluc, Monographie de Saint-Denis de Nogent, Maîtrise, Parus, 1991, p. 17-29
- Gaël Carré, Nicolas Payraud, L'abbaye Saint-Denis de Nogent-le-Rotrou, histoire et archéologie, dans : Cahiers Percherons, N°188, 2011, pp. 2-14
- Philippe Racinet, Saint-Denis de Nogent-le-Rotrou, dans Dossiers d'archéologie, n° 275, juillet-août 2002, pp. 72-73.
Articles connexes
- Liste d'abbayes bénédictines de France
- Liste d'abbayes et monastères
- Abbaye
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