1924 en dadaïsme et surréalisme
Pour l'année, voir 1924.
Éphémérides
Février
André Breton, Les Pas perdus[1]- Louis Aragon, Le Libertinage, recueil de textes écrits depuis 1918[2].
Mars
Paul Éluard embarque à Marseille pour un voyage autour du monde[3].
Paul Éluard, Mourir de ne pas mourir. Noté en exergue : « Pour tout simplifier je dédie mon dernier livre à André Breton »[3].
Mai
- Mai
Au départ de Blois (Loir-et-Cher), ville choisie au hasard, Aragon, Breton, Max Morise et Roger Vitrac tentent de « partir sur les routes » au gré de l'inspiration[4]. - Dans sa revue 391, Francis Picabia tente de lancer le « super-réalisme »[5].
Juin
- Juin
Dernier numéro de Littérature dans lequel paraît un inédit d'Arthur Rimbaud, Un cœur sous une soutane.
Les surréalistes assistent à la représentation du ballet Mercure dont les décors ont été créés par Picasso (musique d'Erik Satie)[6]. Seul Picabia affiche sa détestation de « l'autre Espagnol ».- Débuts au cinéma d'Antonin Artaud dans un court métrage de Claude Autant-Lara, Fait divers.
Juillet
Dans Le Journal littéraire, Breton déclare : « Le surréalisme est à l'ordre du jour et Desnos est son prophète. »- Dans sa revue Surréalisme, Yvan Goll publie un Manifeste du surréalisme dans la tonalité « Esprit nouveau » de Guillaume Apollinaire, ainsi qu'un programme pour un « théâtre surréaliste » : « La réalité est à la base de tout grand art ; la transposition de la réalité dans un plan supérieur (artistique) constitue le Surréalisme. »[7].
- En vacances à Lorient, Breton fait la connaissance de Pierre Naville.
Août
La revue Les Nouvelles littéraires publie un appel de Breton en faveur d'André Malraux emprisonné à Saïgon. Soupçonné de trafic d'œuvres archéologiques, il a été arrêté à Angkor[8].
Septembre
- 1er septembre
Antonin Artaud, Correspondance avec Jacques Rivière publié dans la NRF. À sa demande, le nom d’Artaud est remplacé par trois astérisques[9].
Octobre
- Breton rend visite à André Masson[6] dans son atelier de la rue Blomet (Paris, 15e arrdt). Ce dernier adhère aussitôt au groupe surréaliste.
- Rencontre Breton / Artaud. Lettre de Simone Breton à Denise Lévy : « [Artaud], beau comme une vague, sympathique comme une catastrophe. »[6]. Artaud : « J'ai fait connaissance avec tous les dadas qui voudraient bien m'englober dans leur dernier bateau Surréaliste, mais rien à faire. Je suis beaucoup trop surréaliste pour cela. Je l'ai d'ailleurs toujours été, et je sais, moi, ce que c'est que le surréalisme. C'est le système du monde et de la pensée que je me suis fait depuis toujours. Dont acte. »
- Retour d'Éluard[10]. Breton : « Alors il m'a mis un petit mot, qu'il m'attendait hier [au café] Cyrano, ni plus ni moins. C'est bien le même, à n'en pas douter. Des vacances, quoi. »[11].
Ouverture du Bureau de recherches surréalistes[6] : « ce bureau s'emploie à recueillir par tous les moyens appropriés les communications relatives aux diverses formes qu'est susceptible de prendre l'activité inconsciente de l'esprit. »[12].
André Breton, Manifeste du surréalisme et Poisson soluble[6].
En réaction aux funérailles nationales faites à l'écrivain Anatole France (mort le ), Aragon, Breton, Joseph Delteil, Robert Desnos, Pierre Drieu la Rochelle et Éluard publient une série de textes regroupés sous le titre Un cadavre[6]. Aragon et Drieu la Rochelle sont à l'origine de ce pamphlet. Drieu La Rochelle finance l'opération[13].
Aragon : « Avez-vous déjà giflé un mort ? Certains jours j'ai rêvé d'une gomme à effacer l'immondice humaine ».
Breton : « Loti, Barrès, France, marquons tout de même d'un beau signe blanc l'année qui coucha ces trois sinistres bonshommes : l'idiot, le traître et le policier. Avec France, c'est un peu de la servilité humaine qui s'en va. Que soit fête le jour où l'on enterre la ruse, le traditionalisme, le patriotisme et le manque de cœur ! »[14].
Jacques Doucet, scandalisé, renvoie Aragon tandis que ses relations avec Breton se refroidissent.- Parution à Bucarest du premier numéro de la revue 75 HP créée par Victor Brauner et Ilarie Voronca. Y figure le Manifeste de la picto-poésie[15].
Novembre
A Bruxelles, publication d'une feuille qui tient à la fois du tract et de la revue, intitulée Du Bleu 1, signée Paul Nougé mais écrite collectivement par Camille Goemans et Marcel Lecomte : « On conquiert le monde, on le domine, on l'utilise ; ainsi, tranquille et fier, un beau poisson tourne dans ce bocal (réponse à une enquête sur le modernisme). »[16]- Francis Picabia et Erik Satie, Relâche, ballet donné au théâtre des Champs-Élysées, avec la projection du film de René Clair Entr'acte, scénario de Picabia, musique de Satie et apparitions de Marcel Duchamp, Picabia, Man Ray[17]. Commentaire de Picabia : « Ce film est destiné à faire sortir le public de la salle[18]. »
Décembre
- 1er décembre
Parution du premier numéro de la revue La Révolution surréaliste dirigée par Pierre Naville et Benjamin Péret[19] : « Le surréalisme ouvre les portes du rêve à tous ceux à qui la nuit est avare, le surréalisme est le carrefour des enchantements […], mais il est aussi le briseur de chaîne […] La Révolution… La Révolution… Le réalisme, c'est émonder les arbres, le surréalisme, c'est émonder la vie. »[20].
Jacques Doucet achète Demoiselles d'Avignon de Picasso. Pour Breton : « [C'est] l'événement capital du XXe siècle. Voilà le tableau qu'on promenait, comme autrefois la Vierge de Cimabue, à travers les rues de notre capitale, si le scepticisme ne l'emportait pas sur les grandes vertus particulières par lesquelles notre temps accepte d'être, malgré tout. Il me paraît impossible d'en parler autrement que d'une façon mystique. […] c'est un symbole pur, comme le tableau chaldéen, une projection intense de cet idéal moderne que nous n'arrivons à saisir que par bribes… »[21].
Visite de Lise Meyer, (future Deharme), au Bureau de recherches surréalistes. Coup de foudre de Breton.
Elle donne au bureau « un des étonnants gants bleu ciel qu'elle porte. »[22].
- Robert Desnos, Deuil pour deuil
- Louis Aragon, Une vague de rêve
Cette année-là
- Joë Bousquet adhère au groupe : « Je n'aurais pas élevé la voix à mon tour, ni jamais pris au sérieux les seules aspirations qui me font un bien précieux de ma vie ici-bas, si je n'avais rencontré Paul Éluard et André Breton, et si je n'étais devenu leur ami. »[23].
- Rencontre Breton / Michel Leiris.
- Naissance officielle du groupe surréaliste, dont les réunions quotidiennes se déroulent au café le Cyrano près de la rue Fontaine.
- Dernier numéro de la revue 391[24].
Œuvres
- Louis Aragon
- Le Libertinage, recueil de textes écrits depuis 1918
- Une vague de rêve : « C'était le temps que, nous réunissant le soir comme des chasseurs, nous faisions notre tableau de la journée, le compte des bêtes que nous avions inventées, des plantes fantastiques, des images abattues... »
- Jean Arp
- L'Horloge, bois découpés, peints et collés[25]
- Der Pyramidenrock, poèmes, avec un portrait de l'auteur par Amedeo Modigliani[26]
- Antonin Artaud
- Correspondance avec Jacques Rivière
- Jacques Baron
- Victor Brauner et Ilarie Voronca
- Manifeste de la picto-poésie
- André Breton
- Manifeste du surréalisme : « Cet été les roses sont bleues, le bois c'est du verre. La terre drapée dans sa verdure ne fait pas plus d'effet qu'un revenant. C'est vivre et cesser de vivre qui sont des solutions imaginaires »
- Les Pas perdus, textes en prose : « Il ne sera pas dit que le dadaïsme aura servi à autre chose qu'à nous maintenir dans cet état de disponibilité parfaite où nous sommes et dont maintenant nous allons nous éloigner avec lucidité vers ce qui nous réclame ! »
- Poisson soluble, recueil de trente deux textes écrits au cours des séances de sommeils forcés
- Giorgio De Chirico
- Mélancolie d'une rue, huile sur toile[28]
- René Clair
- Salvador Dalí
- Portrait de Luis Buñuel, huile sur toile
- Robert Desnos
- Deuil pour deuil
- Arthur Garfield Dove
- Rain, huile sur toile et collage[29]
- Marcel Duchamp
- Moustiques domestiques demi-stock, collage[30]
- Marcel Duchamp et Man Ray
- Viking Eggeling et Hans Richter
- Rhythmus 21
- Symphonie diagonale, courts-métrages[32]
- Paul Éluard
- Mourir de ne pas mourir : « Elle est debout sur mes paupières / Et ses cheveux sont dans les miens / Elle a la forme de mes mains / Elle a la couleur de mes yeux / Elle s'engloutit dans mon ombre / Comme une pierre sur le ciel. »
- Max Ernst
- John Heartfield
- Après 10 ans : pères et fils, photomontage[38]
- Hannah Höch
- Rythme, huile sur toile[39]
- André Masson
- La Couronne
- Homme, huile sur toile achetée par Antonin Artaud[40] et décrite dans le texte Un ventre fin : « Un ventre fin. Un ventre de poudre ténue et comme en image. Au pied du ventre, une grenade éclatée. »
- Les Points cardinaux
- Les Quatre saisons[41]
- Pierre de Massot
- Réflexions on Rose Selavy[42]
- Joan Miró
- Georges Papazoff
- L'Esprit d'une source, peinture[47]
- Benjamin Péret
- Immortelle maladie
- Francis Picabia
- Caravansérail, roman
- Francis Picabia et Erik Satie
- Relâche, ballet
- Man Ray
- Le Violon d'Ingres, épreuve aux sels d'argent rehaussée à la mine de plomb et à l'encre de Chine et contrecollée sur papier[48]
- Jean Renoir
- La Fille de l'eau, film, avec la participation d'André Derain, dont la séquence onirique impressionne les surréalistes[49].
- Georges Ribemont-Dessaignes
- L'Autruche aux yeux clos
- Kurt Schwitters
- Philippe Soupault
- Les Frères Durandeau
- Tristan Tzara
- Sept manifestes Dada Lampisterie, avec des dessins de Francis Picabia[52]
Notes et références
- Marguerite Bonnet, André Breton, Œuvres complètes, tome 1 : chronologie, Bibliothèque de la Pléiade, éditions Gallimard, Paris, 1988 p. XLVIII & p. 266.
- Marcelle Dumas & Lucien Scheler, Chronologie de Paul Éluard, dans Poésies complètes, Bibliothèque de la Pléiade, Gallimard, Paris, 1968, p. LXIII.
- Dumas & Scheler, op. cit., p. LXIII.
- Bonnet, op. cit., p. XLVIII.
- Alain & Odette Virmaux Les Grandes figures du surréalisme international, éditions Bordas, Paris, 1994, p. 20.
- Bonnet, op. cit., p. XLIX.
- Adam Biro René Passeron Dictionnaire général du surréalisme et de ses environs, Office du livre, Genève & Presses universitaires de France, Paris, 1982, p. 186.
- Bonnet, op. cit. p. XLIX.
- L'usage de l'astéronyme a été pratiqué en 1886 à l'occasion de la publication du Premier chant des Chants de Maldoror. Jean-Luc Steinmetz dans sa préface à l'édition complètes des œuvres de Lautréamont, Bibliothèque de la Pléiade, Gallimard, Paris, 2009, p. XII.
- Dumas & Scheler, op. cit., p. LXIII
- Lettre à Marcel Noll du 7 octobre 1924 dans Henri Béhar André Breton le grand indésirable, éditions Fayard, Paris, 2005, p. 189.
- Extrait du communiqué de presse. Le bureau est situé au 15 rue de Grenelle, à l'hôtel de Berulle, dans un local prêté par le père de Pierre Naville, propriétaire de l'hôtel. Bonnet, op. cit., p. 481 & p. 1451.
- Georges Sebbag, André Breton l'amour-folie, éditions Jean-Michel Place, 2004, p. 72.
- Refus d'inhumer, dans Point du jour.
- Laurent Le Bon (sous la direction de), Dada, Éditions du Centre Pompidou, Paris, 2005, p. 61.
- Cette série de publications s'achèvera le 20 juin 1925 après 22 numéros avec Nakin 22. Reproduction de Bleu 1 et de Rouge 16 dans Xavier Canonne, Le Surréalisme en Belgique. 1924-2000, éditions Actes Sud, Arles, 2007, p. 17.
- Serge Lemoine Dada, éditions Hazan, Paris, 1991-2005, p. 80.
- Le Bon, op. cit., p. 264.
- Bonnet, op. cit., p. L.
- Pierre Daix La Vie quotidienne des surréalistes (1917-1932), éditions Hachette, Paris, 1993, p. 8.
- Béhar, op. cit., p. 191.
- André Breton, Nadja dans Œuvres complètes, tome 1, op. cit., p. 679 et Georges Sebbag, André Breton, l'amour-folie, éditions Jean-Michel Place, Paris, 2004, p. 61.
- Biro, op. cit., p. 61.
- Lemoine, op. cit., p. 92.
- Reproduction dans José Pierre, L'Univers surréaliste, Somogy, Paris, 1983, p. 137.
- Le Bon, op. cit., p. 149.
- Biro, op. cit., p. 18 & p. 47.
- Reproduction dans Agnès Angliviel de la Beaumelle, Yves Tanguy, Centre Pompidou, Paris, 1982, p. 48.
- Reproduction dans Le Bon, op. cit., p. 117.
- Reproduction dans André Breton, Le Surréalisme et la Peinture, Gallimard, 1928-1965, p. 91.
- 29,5 × 19,5 cm. Reproduction dans Beaux Arts Magazine no 126, septembre 1994, p. 111.
- Le Bon, op. cit., p. 117.
- Philippe Audoin, Les Surréalistes, p. 24.
- Reproduction dans Gabriele Crepaldi, L'Art moderne 1900-1945, Gründ, 2006, p. 209.
- Breton, LSELP, p. 24.
- Werner Spies, La Révolution surréaliste, éditions du Centre Pompidou, Paris, 2002, p. 130.
- 21 × 27 cm. Reproduction dans Connaissance des arts no 675, octobre 2009, p. 114.
- Reproduction dans Lemoine, op. cit., p. 49.
- Reproduction dans Aurélie Verdier, L'ABCdaire de Dada, éditions Flammarion, 2005, p. 52.
- Tableau disparu. Clébert, op. cit., p. 11.
- Reproduction dans Breton, LSELP, op. cit., p. 35.
- Jean-Louis Bédouin, La Poésie surréaliste, Seghers, Paris, 1964, p. 285.
- Spies, op. cit., p. 138.
- Spies, op. cit., p. 136.
- 146 × 115 cm. Museo Thyssen-Bornemisza, Madrid. Reproduction dans L'œil no 642, janvier 2012, p. 55.
- Reproduction dans Breton, LSELP, op. cit., p. 37.
- Cité par Biro, op. cit., p. 316.
- Paris, MNAM. Reproduction dans Connaissance des arts no 658, mars 2008, p. 83.
- Édité en DVD en 2006 par Studio Canal.
- Reproduction dans Le Bon, op. cit., p. 115.
- 10,4 × 13 cm. Paris, MNAM. Reproduction dans Beaux Arts magazine no 82, septembre 1990, p. 56.
- Lemoine, op. cit., p. 99.
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