Épître aux Romains

L'Épître aux Romains est une lettre du Nouveau Testament envoyée par l'apôtre Paul à l'Église de Rome.

Romains

L'Épître aux Romains
dans le Papyrus 10 (IVe siècle).

Auteur traditionnel Paul
Datation traditionnelle vers 57
Nombre de chapitres 16
Canon chrétien Épîtres pauliniennes

Elle est la plus longue des épîtres de Paul et la plus explicite sur son enseignement. Les idées qu'elle développe forment en effet le fondement de la doctrine des Églises chrétiennes au sujet de la justification par la foi. Les interprétations de cette épître sont à l'origine de diverses évolutions du monde chrétien et plus particulièrement de la Réforme protestante.

Le contenu se situe dans deux registres. D'une part, il s'agit d'une lettre adressée à une communauté rencontrant des difficultés ; d'autre part, l'auteur expose sa vision du salut et de la foi.

Rédaction

Carte du troisième voyage missionnaire (vers 54-58)

L'Épître aux Romains fait partie des sept épîtres reconnues comme authentiquement rédigées par Paul.

Elle aurait été écrite, durant le troisième voyage missionnaire, à Corinthe où Paul passe l'hiver 57-58 (Ac 20,2-3). Il y annonce qu'il va bientôt se rendre à Jérusalem pour y porter des aumônes (Rm 15,25-28).[réf. nécessaire]

Rome est une Église naissante à laquelle Paul envisage de rendre visite. À Rome, se côtoient des judéo-chrétiens et des pagano-chrétiens. Les deux communautés initialement séparées doivent apprendre à cohabiter et coopérer. Les Juifs à Rome forment une communauté mal acceptée.[réf. nécessaire] Paul profite de cette épître pour souligner l'importance de l'Ancien Testament et sa continuité avec le message du Christ et redonne une place privilégiée au peuple d'Israël dans l'histoire du salut. Paul exhorte donc les deux communautés à s'entendre.

Thèmes

Le thème central est la fidélité de Dieu dans sa promesse à Abraham, qui se manifeste dans le salut par la foi. Juifs et non-Juifs sont déclarés justes devant Dieu par la foi en Jésus (Rm 3: 21-26) . La justification : tous les humains sont coupables devant Dieu et méritent sa colère (Rm 2: 1 - 3: 20), mais il y a une bonne nouvelle : la promesse de salut en Christ pour qui croit ; sa mort lave du péché dont la conséquence est la mort. (Rm 3: 21 - 5: 21) Unis à Jésus, les chrétiens expriment l'action du Saint-Esprit qui leur permet de mener une vie juste ici-bas (Rm 6-8). Enfin la réconciliation et la sensibilité à l'autre au-delà des barrières culturelles. On trouve également des conseils pour la résolution de conflits dans l'église (Rm 14: 1 - 15: 6) : prendre exemple sur Christ. (Rm 15: 1-6). Paul rappelle l'enseignement de Jésus : l'amour pour son prochain accomplit l'objectif de la loi (Rm 13: 8 - 10)[1].

Histoire du christianisme

L’Épître aux Romains fut commentée par Origène, Jean Chrysostome et Théodoret de Cyr. Son interprétation fut largement débattue au Ve siècle, lors de la crise pélagienne à propos de la gratuité du salut, puis approfondie au Moyen Âge par Pierre Abélard et Thomas d'Aquin . Aux yeux de nombre d'historiens, les commentaires de l’épître aux Romains en 1516 par Martin Luther ont été le point de départ doctrinal de la Réforme protestante. Jean Calvin et Philippe Mélanchthon considèrent l’épître aux Romains comme « donnant le sommaire de la doctrine chrétienne ». Depuis, les exégètes et théologiens protestants n'ont cessé de la commenter, en particulier Karl Barth, dont l'influence fut décisive sur la pensée théologique contemporaine

Partie doctrinale

C'est la première partie de la lettre.

Elle se présente sous forme d'un exposé méthodique. Paul y évoque la malédiction du péché, la détresse de l'humanité et lui oppose la justice de Dieu et sa compassion, la puissance de la grâce, la justification par la foi en Jésus-Christ, la gloire du Christ ressuscité et la force de l'action de l'Esprit[2].

Résumé

Après l'exposé du salut de Dieu pour les hommes (chapitre 1 à 8), Paul examine la situation d'Israël à la lumière de l'incarnation (chapitre 9 à 11). Il termine son épître sur des enseignements pratiques pour les chrétiens (chapitre 12 à 15).

L'adresse à l'Église de Rome (1,1-17)

L'épître débute par une présentation spirituelle de Paul. Il poursuit par des salutations et des actions de grâce adressées aux membres de l'Église de Rome (1,1-8). Puis l'auteur fait part de son désir de se rendre à Rome (1,9-15).

Il présente ensuite le thème principal : Dieu est venu sauver le peuple élu (les Juifs) mais aussi les païens au moyen de l'évangile annoncé par le Christ et grâce à la foi (1,16-17).

La condition des hommes devant Dieu (1,18 - 3,20)

Dans un premier temps il démontre que les hommes ont besoin d'être sauvés par Dieu. Les païens notamment qui refusent de croire en lui malgré le témoignage de sa puissance créatrice. Ne se souciant pas de posséder la connaissance de Dieu, ils sont abandonnés à eux-mêmes, livrés à leur esprit insouciant, à une conduite indigne. C'est comme une punition, mais cette punition est la conséquence de l’absence d’une vraie lumière, d’un guide sûr (1,18-32). Il s'adresse ensuite à ceux qui jugent les autres à la place de Dieu pensant ainsi échapper au jugement sur leur propre conduite (2,1-6).

La vie éternelle sera pour ceux qui font le bien, qu'ils soient juifs ou païens car faire le bien ne dépend pas de l'application scrupuleuse d'une loi ou de la circoncision mais d'une disposition intérieure du cœur (2,7-29).

Quel est dans ce cas l'avantage d'être juif ? Le peuple juif a le privilège d'avoir été choisi par Dieu qui lui a confié sa Parole. Que certains ne soient pas dignes de cette confiance ne remet pas en cause la fidélité de Dieu à son peuple (3,1-8). Mais ce privilège ne rend pas les Juifs meilleurs, ils sont comme tous les Hommes, sous l'emprise d'une inclinaison à choisir le mal (3,9-18). Ainsi, la Loi révélée par Dieu permet la connaissance du péché mais son observation rigoureuse n'est pas le moyen pour avoir la vie éternelle (3,19-20).

Le moyen de la réconciliation entre l'homme et Dieu (3, 21 à 5, 21)

Après avoir affirmé que le péché est présent aussi bien chez ceux qui possèdent la Loi que chez les païens, Paul entreprend de montrer que la justification est indépendante de la possession de la Loi, qu'elle est « donnée par la foi en Jésus-Christ, pour tous ceux qui croient » (3, 22).

Ce n'est pas « au nom d'une loi qu'il pratiquerait » que l'homme est sauvé, mais par la foi. Si ce n'était pas le cas, Dieu serait seulement le Dieu des juifs. Or « il est aussi le Dieu des païens, puisqu'il n'y a qu'un seul Dieu » (3, 29-30). Il n'y a qu'un seul mode de justification, commun aux païens et aux juifs : la foi.

Abraham a eu foi en Dieu avant que la Loi ne soit donnée et avant sa circoncision, qui ne fut que le signe postérieur de sa foi en Dieu. Abraham est ainsi le père des circoncis et des incirconcis (4,1-12). C'est uniquement par sa foi que Dieu l'a considéré comme un juste et lui a donné le monde en héritage; ainsi, par la foi seule, tout homme peut devenir juste devant Dieu qui a ressuscité Jésus d'entre les morts (4,13-25).

Ceux ayant la foi, grâce au Christ, sont ainsi dans l'espérance d'avoir part à la gloire de Dieu et jouissent de son amour répandu dans leur cœur par l'Esprit Saint (5,1-5). Cet amour est sans limite, car loin de punir les hommes qui ont crucifié le Christ, Il leur permet d'être sauvés par la foi (5,6-11).

Autant la mort et le péché sont la condition humaine depuis le premier homme, Adam, qui a refusé la vie avec Dieu ; autant la grâce de Dieu venant du Christ, justification qui donne la vie, est répandue gratuitement et en abondance sur tous les Hommes (5,12-21).

La grâce délivre du péché et de la Loi pour une vie nouvelle (6-8)

Par le baptême en Jésus-Christ les chrétiens marchent dans une vie nouvelle. Leur corps n'est plus soumis au péché mais il est sous l'emprise de la grâce. Libéré du péché par la grâce ils sont au service de la justice, ont pour fruit la sainteté, et pour fin la vie éternelle (6).

Servant Dieu dans un esprit nouveau, les chrétiens n'ont plus besoin du régime de la Loi (7,1-6). En effet le rôle de la Loi est de canaliser les passions des péchés (7,7-25)> or, l'Esprit en Jésus-Christ qui vit en nous condamne le péché qui est dans notre chair; l'Esprit purifie, la Loi est donc inutile (8,1-8). Vivant ainsi de l'Esprit de Celui qui a ressuscité le Christ d'entre les morts, Il fera revivre nos corps mortels par ce même Esprit qui habite en nous (8,9-11). C'est à ce titre que nous sommes les enfants de Dieu et qu'il nous fera participer à sa Gloire (8,12-17).

Cette espérance et les prémices de l'Esprit que nous possédons concourent déjà à notre bien et nous aide à supporter les souffrances du temps présent (8,18-30). Cet amour de Dieu manifesté par le Christ est notre bien le plus précieux (8,31-39

Dieu appelle tout homme à la foi, les juifs comme les non-juifs (9)

En préambule, Paul témoigne de son affection pour Israël (9,1-5). Il démontre ensuite que la grâce souveraine n'est pas liée à un avantage héréditaire mais à notre volonté d'accueillir Dieu. Ainsi, Ésaü, bien que frère jumeau de Jacob n'a pu hériter de la bénédiction (9,6-13) car, comme Pharaon, il a endurci son cœur (9,14-18).

Dieu pouvant tout, il peut sembler qu'il crée certains hommes destinés à se perdre et d'autres à être sauvés. Or, Paul nous dit que les hommes qui choisissent la perdition n'ont pas été préparés pour cette voie à l'avance par Dieu, mais, qu'au contraire, Il les soutient avec patience (9,19-23).

Personne n'étant exclu de l'appel de la grâce de Dieu, le salut est offert à tous les hommes car il dépend de la foi et non de l'application d'une loi. Le Christ, cette "pierre d'achoppement" pour Israël, est venu le révéler (9,24-33).

L'évangile est pour les Juifs et les païens (Rm 10)

La justice qui vient de la foi dit : ne pas se demander dans son cœur qui montera au ciel ou qui descendra dans l'abîme (Rm10: 5-7) Mais croire en la Parole de Dieu et en témoigner: "La parole est tout près de toi, dans ta bouche et dans ton cœur (Rm10: 8). Être sauvé est possible pour tous les hommes: "Si tu reconnais publiquement de ta bouche que Jésus est Le Seigneur et si tu crois dans ton cœur que Dieu l'a ressuscité, tu seras sauvé. En effet, c'est avec le cœur que l'on croit et parvient à La justice, et c'est avec la bouche que l'on affirme une conviction et parvient au salut" (Rm 10: 9-10) Il n'y a aucune différence entre le juif et le non-juif...un seul Seigneur, qui se montre généreux pour tous ceux qui font appel à Lui .. . seront sauvés (Rm 10: 12-13)

La Parole est proclamée sur toute la terre (Rm 10: 18). Mais Israël ne l'a pas compris (Rm10,16-21), sauf une partie (Rm 11: 1-10).

Par la chute d'Israël, le salut est parvenu aux nations (11,11-36)

Le rejet de l'évangile par Israël a profité aux païens qui l'ont accueilli (11,11-15). Israël est comme un olivier cultivé dont des branches ont été arrachées. À leur place, des rameaux sauvages, représentant les païens, ont été greffés. C'est une grâce divine qui nous permet de bénéficier de la promesse faite à Abraham (11,16-24). Cependant choisi dès l'origine, Israël sera finalement sauvé (11,25-32). Saint Paul conclut cette partie par un hymne à la sagesse divine (11,33-36).

Enseignements pratiques pour les chrétiens (12-16)

Les chrétiens sont consacrés à Dieu (12,1-2); ils sont les membres d'un seul corps (12,3-8) et ont un devoir d'amour envers leurs frères chrétiens (12,9-16) et envers les autres hommes (12,17-21). Ils sont soumis aux autorités institutionnelles qui visent le bien commun (13,1-7). Revêtus du Christ, l'amour du prochain est leur Loi (13,8-14).

Paul invite aussi à ne pas critiquer les autres selon leurs pratiques extérieures qui sont secondaires (14,1-18) mais à choisir des attitudes favorisant la communion fraternelle, de tel manière à ce que les forts portent plus d'égards aux faibles (14,19-15,13).

Paul s'adresse en fin à ses frères de Rome, à cœur ouvert, pour leur faire part de sa vocation et de ses projets de visites (15,14-33). Il termine sa lettre par des salutations à ses frères et sœurs en Christ (16,1-16) et un avertissement contre ceux qui sont la cause de scandales et de divisions (16,17-18).

Voir aussi

Articles connexes

Bibliographie

  • Giorgio Agamben, Le temps qui reste : un commentaire de l'épître aux Romains.
  • Karl Barth, L'Épitre aux Romains
  • Samuel Bénétreau, L'Épître de Paul aux Romains, CEB, Vaux-sur-Seine, Edifac, 1996, 1997, 2 t.
  • Alain Gignac, « Introduction et notes de la Lettre aux Romains », dans Frédéric Boyer, Jean-Pierre Prévost et Marc Sévin (dir.), Bible. Nouvelle traduction, Paris; Montréal, Bayard; Médiaspaul, 2001, p. 3035-3042.
  • Alain Gignac, Juifs et chrétiens à l'école de Paul de Tarse. Enjeux identitaires et éthiques d'une lecture de Rm 9-11, Montréal, Médiaspaul (Sciences bibliques; 9), 1999.
  • Simon Légasse, L'Épître de Paul aux Romains, Cerf, 2002, 1008 p.
  • Dominique Martens, La justification par la foi dans Romains 3,21-26. Pas sans Dieu. Pas sans l'homme. Pas sans le Christ, coll. « Connaître la Bible », no 52, Bruxelles, Lumen Vitae, 2008, 80 p. (ISBN 978-2-87324-340-1).
  • Ekkehard W. Stegemann, Le sujet de l'épître aux Romains et Romains 9-11, dans Le déchirement, Juifs et chrétiens au premier siècle. Daniel Marguerat éditeur, 1996.

Références

  1. Roselyne Dupont-Roc, « Peut-on parler de « loi naturelle » chez saint Paul ? », Transversalités, vol. 117, no 1, , p. 55 (ISSN 1286-9449 et 2259-3799, DOI 10.3917/trans.117.0055, lire en ligne, consulté le ).
  2. Nouveau Testament. TOB. Introduction à l'Epitre aux Romains, Paris, Cerf et Les Bergers et les Mages., 1975;, p. 446

Liens externes

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