Bronchiolite

Une bronchiolite est une infection aiguë des voies aériennes inférieures d'origine virale, touchant les petites bronches du nourrisson et du jeune enfant et se transmettant sur un mode épidémique saisonnier. Les symptômes respiratoires sont souvent inquiétants pour les parents, mais cette maladie est le plus souvent bénigne. Pourtant dans certains cas des complications sont possibles et certains signes doivent conduire à consulter rapidement un médecin.

Bronchiolite
Radiographie thoracique d'un enfant montrant des opacités périhilaires bilatérales typiques de bronchiolite.
Spécialité Pneumologie
CISP-2 R78
CIM-10 J21
CIM-9 466.1
DiseasesDB 1701
MedlinePlus 000975
eMedicine 961963
eMedicine emerg/365 
MeSH D001988

Mise en garde médicale

Causes

Le virus respiratoire syncytial (VRS) en est responsable dans près de 80 % des cas[1].

D'autres virus peuvent en être la cause (metapneumovirus, rhinovirus, adénovirus, virus influenza et para-influenza virus, entérovirus…). Le HMPV (Human Metapneumovirus) a été identifié en 2001[2] et semble être responsable de près de 10 % des bronchiolites.

Épidémiologie

La bronchiolite touche les nourrissons et les jeunes enfants (de 1 mois à 2 ans) par épidémies hivernales, généralement de la mi-octobre à la fin de l'hiver, le pic de cas se situe en décembre[3]. Le pic de fréquence se situe entre 2 et 8 mois. C'est une maladie fréquente puisqu'on évalue en France à 460 000 le nombre de nourrissons malades par an[3], soit 30 %.

Les enfants fragiles (prématurés, faible poids de naissance, âge inférieur à six semaines, anomalies respiratoires préexistantes, porteurs de maladies cardiaques ou neurologiques, immnunodéficients…) sont particulièrement touchés, ainsi que ceux exposés au tabagisme passif ou à d'autres facteurs environnementaux (garde en collectivité, fratrie nombreuse, zone urbaine, bas niveau socio-économique sont des facteurs favorisants les récidives).

Un à 2 % des bronchiolites sont graves, chaque année, 2 % des nourrissons de moins de 1 an seraient hospitalisés pour une bronchiolite plus sévère[3].

La période épidémique va de décembre à janvier en Europe et peut s'étendre jusqu'à février aux États-Unis. C'est la première cause d'hospitalisation des enfants dans ce pays[4].

Physiopathologie

La contamination est interhumaine, le virus en cause se transmet soit directement par le biais des sécrétions contaminées (lors d'une toux ou d'un éternuement) soit indirectement (par les mains souillées). Le virus peut survivre à l'air libre 30 minutes sur la peau et jusqu'à 6 à 7 heures sur un linge.

La période d'incubation est de 2 à 8 jours, puis le virus se multiplie dans la muqueuse nasale (une rhino-pharyngite inaugure ainsi fréquemment une bronchiolite). Il gagne ensuite les voies respiratoires inférieures pour atteindre les bronchioles où il se multiplie, au sein des cellules épithéliales.

Le tableau clinique est dû à une obstruction des voies aériennes, d'une part causée par un bouchon muqueux obstruant la lumière, d'autre part due à une inflammation de la paroi. Le bouchon muqueux est créé par l'accumulation de cellules mortes et de sécrétions muqueuses. L'obstruction n'est que peu liée au spasme bronchique, les muscles lisses étant encore peu développés à cet âge.

Le virus est éliminé au bout de 3 à 7 jours en moyenne, mais la contamination peut parfois durer jusqu'à 4 semaines.

Description du tableau clinique

Les premiers symptômes sont ORL avec une rhinite (écoulement nasal) et une toux plutôt sèche. L'obstruction nasale est variable ainsi que la fièvre, absente ou modérée (autour de 38 °C). Cette rhinopharyngite aiguë peut rester isolée, mais précède la bronchiolite de 24 à 72 heures, et doit donc inciter à la vigilance en période épidémique.

La bronchiolite proprement dite se manifeste par une difficulté respiratoire (dyspnée) avec respiration rapide (polypnée). La dyspnée prédomine à l'expiration, est plus ou moins bruyante et accompagnée d'un freinage (augmentation du temps expiratoire par rapport au temps inspiratoire), voire d'une distension thoracique et de signes de lutte tels qu'un battement des ailes du nez ou un tirage inter-costal et sus-claviculaire).

Certains signes de gravité justifient une consultation en urgence :

L'auscultation des poumons perçoit au début de la maladie des crépitants (secs et inspiratoires) et/ou des sous-crépitants (plus humides et expiratoires), surtout chez le jeune nourrisson. Puis apparaissent des râles bronchiques et des sibilants, parfois audibles à distance (wheezing). Après l'âge d'un an, l'auscultation retrouve des râles sibilants expiratoires. Parfois l'auscultation peut être normale, notamment dans les formes graves à thorax distendu.

Évolution

À court terme

La période d'incubation est de 2 à 8 jours puis les symptômes apparaissent et atteignent un pic d'intensité après 2 à 4 jours. L'évolution clinique est favorable dans la très grande majorité des cas. L'évolution peut être trainante, avec une toux et une respiration sifflante pouvant se prolonger quelques semaines.

Le risque de décès à la phase aiguë, notamment à la suite d'une apnée, est souvent nul dans les séries occidentales les plus récentes.

Surinfection bactérienne

Une surinfection par une bactérie est possible. C'est uniquement dans ce cas qu'une antibiothérapie est utile. Les 3 germes les plus fréquemment rencontrés sont Haemophilus influenzae, Streptococcus pneumoniae et Moraxella catarrhalis. Une réévaluation clinique de l'enfant est nécessaire dans les cas suivants[5] :

À moyen et long terme

Persistance des signes respiratoires au-delà des 2 à 3 semaines habituelles, et notamment du wheezing qui peut devenir chronique. Répétition des épisodes lors des 2 premières années de vie. On parle d'« asthme du nourrisson » à partir du 3e épisode; celui-ci évolue vers un asthme du grand enfant dans seulement 20 à 25 % des cas.

Examens complémentaires

En règle générale, le tableau est suffisamment typique sans qu'aucun examen complémentaire soit nécessaire.

  • La radiographie pulmonaire montre une opacité diffuse de la trame pulmonaire, une augmentation de la taille des espaces intercostaux et un abaissement des coupoles diaphragmatiques.
  • La recherche du virus respiratoire syncytial peut être faite soit directement dans un prélèvement de la gorge ou du nez, soit indirectement par la recherche de ses antigènes. Cette recherche s'avère positive dans 70 %. Elle n'a d'intérêt que dans le cadre d'enquêtes épidémiologiques.
  • Une mesure de la saturation en oxygène du sang par Oxymétrie colorimétrique peut être utile si une forme grave est suspectée.

En cas de bronchiolites répétées, il faut rechercher une maladie sous-jacente, par des examens complémentaires qui seront choisis en fonction des symptômes de l'enfant :

Cependant, dans la grande majorité des cas, aucune cause n'est retrouvée, et la répétition des épisodes n'est due qu'à une exposition trop importante à d'autres enfants malades.

Critères de gravité pour une hospitalisation

Parfois la bronchiolite aiguë du nourrisson peut mettre en jeu le pronostic vital et l'hospitalisation est nécessaire dans les cas suivants[5] :
Sévérité clinique

  • Altération importante de l'état général
  • Apnée et cyanose
  • Fréquence respiratoire supérieure à 60 par minute
  • Saturation en O2 inférieure à 94 % en air ambiant et au repos ou lors de la prise du biberon
  • Troubles de la ventilation suspectés par la clinique et confirmés par la radiologie
  • Troubles digestifs (vomissement, anorexie) compromettant l'hydratation, déshydratation avec perte de poids supérieure à 5 %

Terrain

  • Âge inférieur à 6 semaines
  • Prématurité inférieure à 34 SA, âge corrigé inférieur à 3 mois
  • Cardiopathie ou pathologie pulmonaire chronique grave

Environnement

  • Difficultés psycho-sociales, environnement familial problématique

Traitement

La prise en charge de la bronchiolite est essentiellement symptomatique.

Mesures générales

La désobstruction rhinopharyngée, consistant en un nettoyage du nez et du circuit nez/sinus/arrière gorge est primordiale. Elle doit être réalisée plusieurs fois par jour, avec du sérum physiologique, narine par narine, nourrisson couché sur le dos, la tête tournée sur le côté ou en position latérale. L'utilisation du mouche bébé est moins efficace[5].

Il faut veiller à apporter une hydratation et une alimentation suffisante et adaptée à la fièvre et à la polypnée, qui augmentent légèrement les besoins. Il peut être utile de fractionner les repas de l'enfant.

Il faut assurer la suppression du tabac dans l'environnement. La chambre de l'enfant doit être correctement aérée et la température maintenue sous 19 °C.

Lors du couchage, il est recommandé de placer l'enfant en proclive dorsal à 30 degrés[6].

Dans les formes graves l'hospitalisation est de mise avec oxygénothérapie, alimentation entérale ou parentérale, voire la ventilation assistée.

Traitement médicamenteux

Les sirops contre la toux et les médicaments sédatifs ne sont pas indiqués car la toux doit être respectée. Les mucolytiques et les mucorégulateurs n'ont pas d'indication per os. Les mucolytiques peuvent être dangereux en nébulisation, parfois responsables d'un bronchospasme.

Les corticoïdes[7], bronchodilatateurs bétamimétiques[8], antihistaminiques et antibiotiques n'ont pas d'efficacité sur la durée ou la sévérité de la maladie.

Les antibiotiques ne sont utilisés que dans les rares complications bactériennes. Il faut alors choisir un antibiotique efficace contre les 3 germes les plus fréquemment rencontrés (Haemophilus influenzae, Streptococcus pneumoniae et Moraxella catarrhalis). En l'absence d'allergie, l'amoxicilline associée à de l'acide clavulanique est une antibiothérapie possible.

Le Palivizumab est un anticorps monoclonal dirigé contre le virus respiratoire syncytial. Il est efficace dans la prévention de la bronchiolite mais son coût, très important, le réserve à certains enfants particulièrement fragiles. Il n'a pas d'efficacité curative démontrée, de la même façon que pour les autres traitements antiviraux.

Kinésithérapie

En France, à la différence de la pratique aux États-Unis, la kinésithérapie respiratoire a été préconisée par un consensus datant de l'an 2000. Cette recommandation était fondée sur un faible niveau de preuve (grade C)[9]. La technique est celle de l'augmentation du flux expiratoire (AFE lente) avec toux provoquée. En particulier, il n'a pas été démontré d'efficacité de cette technique tant en termes de délai de guérison que de taux de survenue de complications. Les vomissements et troubles respiratoires ont été plus fréquents dans le groupe traité par kinésithérapie. D'autre part, on estime que la kinésithérapie entraîne environ une fracture de côte pour 1 000 nourrissons traités[10]. Le recours systématique à la kinésithérapie respiratoire n'est probablement pas justifié[11],[12].

Les techniques utilisant la percussion et les vibrations ont été évaluées mais n'apportent pas la preuve de leur efficacité[13] et ne sont plus utilisées depuis les années 1990. Par contre aucun effet indésirable n'a été recensé en utilisant ces techniques.

À noter que la kinésithérapie n'est pas un traitement de la bronchiolite, mais une aide symptomatique au désencombrement bronchique. Elle permet une amélioration de l'état général par la diminution des difficultés respiratoires, et par là prévient les complications respiratoires que ces difficultés pourraient engendrer.

La surveillance de l'enfant et de sa respiration doit être attentive. La séance de kinésithérapie doit être brève et son efficacité évaluée par l'auscultation et la prise de la saturation en oxygène. Le relais de l'hospitalisation peut parfois s’avérer nécessaire.

Il n'existe pas, pour l'instant, de vaccination efficace contre le virus respiratoire syncytial mais des essais sont en cours.

Notes et références

  1. (en) Bush A, Thomson AH, « Acute bronchiolitis » BMJ 2007;335:1037-1041
  2. (en) van den Hoogen BG, de Jong JC, Groen J, Kuiken T, de Groot R, Fouchier RA, Osterhaus AD, « A newly discovered human pneumovirus isolated from young children with respiratory tract disease », Nat Med, vol. 7, no 6, , p. 719-24. (PMID 11385510, DOI 10.1038/89098)
  3. Institut national de veille sanitaire
  4. (en) Breese Hall C, « Therapy for bronchiolitis: when some become none » New Eng J Med. 2007;357:402-404
  5. « Prise en charge de la bronchiolite du nourrisson - Conférence de consensus », ANAES,
  6. http://www.has-sante.fr/portail/jcms/c_271917/prise-en-charge-de-la-bronchiolite-du-nourrisson
  7. (en) Patel H, Platt R, Lozano JM, Wang EEL, « Glucocorticoids for acute viral bronchiolitis in infants and young children » Cochrane Database Syst Rev. 2004;(3):CD004878
  8. (en) Gadomski AM, Bhasale AL, « Bronchodilators for bronchiolitis » Cochrane Database Syst Rev. 2006;(3):CD001262
  9. Anaes 2000 et institut national de prévention et d'éducation pour la santé 2003
  10. Prescrire rédaction, « Bronchiolite : un essai négatif pour la kinésithérapie respiratoire », Prescrire, vol. 30, no 325, , p. 849
  11. Rev. Prescrire (nov 2006)
  12. B. Sterling, E. Bosdure, N. Stremler-Le Bel, B. Chabrol, J.-C. Dubus, « Bronchiolite et kinésithérapie respiratoire : un dogme ébranlé », Archives de Pédiatrie 2015;22:98-103
  13. (en) Perrota C, Ortiz Z, Roque M, « Chest physiotherapy for acute bronchiolitis in paediatric patients between 0 and 24 months old » Cochrane Database Syst Rev 2005;(2):CD004873

Liens externes

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