Acide lactique

L'acide lactique est un acide organique qui joue un rôle dans divers processus biochimiques. Un lactate est un sel de cet acide (ou autrement dit la forme ionisée de l'acide lactique). Contrairement à ce que peut laisser penser son nom, l'acide lactique n'est pas présent uniquement dans le lait, mais également dans le vin, certains fruits et légumes, et il n'est pas produit dans le métabolisme par les cellules de la peau, des muscles et par les globules rouges car il résulte d'un autre mécanisme que la fermentation, qui se nomme "glycolyse" dont le produit final n'est autre que le lactate par addition d'atome H+ au pyruvate. L'acide lactique et le lactate sont bien deux molécules différentes[9],[10].

Acide lactique
 
Énantiomère R de l'acide lactique (en haut, à gauche), S-acide lactique (en haut, à droite) et structure tri-dimensionnelle du S-acide lactique (en bas).
Identification
Nom UICPA acide 2-hydroxypropanoïque
No CAS 50-21-5 (RS)
79-33-4 (S+ ou L)
10326-41-7 (R- ou D)
No ECHA 100.000.017
No EC 200-018-0
209-954-4 (RS)
201-196-2 (S)
233-713-2 (R)
Code ATC G01AD01
No E E270
FEMA 2611
SMILES
InChI
Apparence liquide incolore à jaune visqueux ou cristaux incolores à jaunes. (DL)[1]
Propriétés chimiques
Formule brute C3H6O3  [Isomères]
Masse molaire[2] 90,0779 ± 0,0037 g/mol
C 40 %, H 6,71 %, O 53,29 %,
pKa 3,86 (20 °C)[3]
Propriétés physiques
fusion D/L: 16,8 °C [3]
L: 53 °C
D: 53 °C
ébullition 122 °C (12 mmHg)[3]
Solubilité Miscible avec l'eau, l'alcool, le glycérol, et le furfural, une solution d'alcool-éther;

Légèrement sol. dans l'éther;
Insol. Dans le chloroforme, l'éther de pétrole, le disulfure de carbone[3]

Masse volumique 1,2485 g·cm-3 [4]
Point d’éclair 110 °C (coupelle fermée) (DL)[1]
Thermochimie
Cp
Propriétés optiques
Indice de réfraction  1,4414 [4]
Pouvoir rotatoire -2,6 ° (80 g·l-1, R)[6]

 +2,6 ° (25 g·l-1, S)[6]

Précautions
SIMDUT[7],[8]
Acide lactique :

Produit non classifié
Acide lactique, (dl-) :
E,
Directive 67/548/EEC

Xi

Phrases R : 38, 41,

Phrases S : 26, 39,
Composés apparentés
Isomère(s) acide 3-hydroxypropanoïque

Unités du SI et CNTP, sauf indication contraire.

L'acide lactique est un acide alpha hydroxylé, sa formule chimique est C3H6O3 et sa structure se reflète dans son nom systématique, l'acide 2-hydroxypropanoïque.

Chimie

L'atome de carbone 2 portant le groupe hydroxyle est asymétrique rendant la molécule d'acide lactique chirale. Il se présente donc sous forme de deux énantiomères :

  • (R)-acide lactique ou D(–)-acide lactique
  • (S)-acide lactique ou L(+)-acide lactique

En solution, le groupe carboxyle -COOH peut perdre un ion H+. Ainsi l'acide lactique (C3H6O3)se transforme en ion lactate : CH3CHOHCOO-.

Par contre dans le muscle, il est ajouté au pyruvate (C3H3O3) 2 ions H+ pour former le lactate (C3H5O3).

L'acide lactique est soluble dans l'eau et considéré comme un acide faible (pKa=3,90), c'est-à-dire que la réaction de dissociation dans l'eau n'est pas totale :

CH3CHOHCOOH + H2OCH3CHOHCOO- + H3O+

On trouve donc à la fois en solution l'acide lactique et sa forme basique, l'ion lactate, en proportions variables selon le pH.

Effort musculaire et fermentation lactique

L'acide lactique est l'un des produits-clés de la production d'énergie dans les muscles notamment. La respiration cellulaire (consommation de sucres en vue de produire de l'énergie) peut être décomposée en deux grandes étapes, la première est la glycolyse, la partie cytoplasmique du processus, qui peut fonctionner en l'absence de dioxygène. Elle fournit de l'acide pyruvique qui alimente la seconde partie, mitochondriale, de la respiration cellulaire (cycle de Krebs et phosphorylation oxydative) qui aboutit à la réduction du dioxygène en eau. À un bout de la chaîne, du glucose est oxydé, et à l'autre, du dioxygène est réduit. L'énergie dégagée est récupérée par la cellule.

Si l'apport en oxygène est supérieur à la consommation de sucre, alors la totalité de l'acide pyruvique produit est immédiatement consommée dans la partie mitochondriale.

Si la consommation de sucre devient supérieure à l'apport en oxygène (efforts intenses) alors une partie de l'acide pyruvique produit en première partie de processus est réduite en acide lactique, ce qui permet au cycle oxydatif de la glycolyse de continuer. C'est une fermentation. La partie mitochondriale est saturée et le rendement énergétique s'en trouve très diminué. Néanmoins, cette théorie consommation de sucre / consommation d'oxygène est remise en question[11]. Quant au rendement énergétique anaérobie, il semble proportionnellement plus élevé que le rendement énergétique aérobie, contrairement à ce qui est admis généralement[12].

L'acide lactique s'accumule dans la cellule, puis est hydrolysé quasi instantanément après sa production en lactate + H+. Ce lactate passe la membrane cellulaire pour se retrouver dans la circulation sanguine. Le foie le recycle finalement en acide pyruvique pendant qu'une autre partie est oxydée par le myocarde ainsi que par les muscles moins sollicités par l'effort sportif. Le lactate est métabolisé environ une heure après l'effort sans aucune activité post effort sportif, soit bien avant l'apparition des courbatures[13], dont il n'est donc pas responsable.

Fermentation bactérienne

Il existe deux grands types de fermentation bactérienne qui produisent de l'acide lactique : dans le vin et les produits laitiers.

  • Dans le vin, il s'agit de la fermentation malolactique : l'acide malique, naturellement contenu dans le vin, est dégradé en acide lactique sous l'action des bactéries.
  • Dans le lait et les produits laitiers, l'acide lactique provient de la dégradation du lactose par les bactéries. Plus un lait est frais, moins il contient d'acide lactique. La concentration en acide lactique dans un lait s'exprime en degré Dornic (°D) : 1 °D correspond à 0,1 g d'acide lactique par litre de lait. Un lait frais contient de 15 à 18 °D, il caille à 6070 °D.

Les organismes responsables de l'apparition d'acide lactique sont les lactobacilles. Lorsqu'ils opèrent dans la bouche, l'acide lactique produit peut entraîner des caries.

Ce mode de fermentation lactique se produit aussi sur certains légumes (chou = choucroute, et autres légumes dits « lacto-fermentés »). L'acide lactique utilisé comme AHA dans les cosmétiques n'est pas extrait du lait mais, par exemple, du sucre de betterave, de myrtille, etc.

Utilisations[14]

Directement dans l'alimentation humaine

L'acide lactique est utilisé dans l'industrie alimentaire comme additif (E270) en tant qu'antioxygène, acidifiant ou exhausteur de goût. L’acide lactique se présente aussi sous forme de sels : sel de sodium (E325), de potassium (E326) et calcium (E327). Ses sels sont sous formes de poudre et sont également solubles dans l’eau[15]. Il agit comme agent bactériostatique notamment sur des bactéries pathogènes comme la salmonelle (ou la listeria) et aussi un effet dépresseur d’activité de l'eau[15].

D'après des recherches ayant eu lieu au Québec[16], il semblerait que l'acide lactique soit un des moyens les plus naturels pour prévenir le cancer de la vessie, mais aussi celui de la peau.

En cosmétique

Cet acide est parfois utilisé dans le cadre d'un peeling esthétique, notamment pour les peaux colorées (des gammes de produits de décoloration esthétique sont composées d'acide lactique) ; toutefois, cet acide doit être appliqué sous surveillance d'un dermatologue et dans des conditions de dosage et de dilution spécifique selon le type de carnation du patient.

Comme agent décontaminant et détergeant

L'acide lactique a gagné en importance dans l'industrie des détergents après les années 2000. C'est un bon détartrant, un dissolvant à savon et un agent antibactérien. Il est également avantageux sur le plan économique et s'inscrit dans une tendance vers des ingrédients plus sûrs et naturels pour l'environnement. L'acide lactique est utilisé dès lors aux États-Unis pour la décontamination bactérienne des carcasses bovines en abattoir. La viande bovine soumise à cette pratique à d'abord été interdite par l'Union européenne, car l'utilisation de l'acide lactique vise ici à corriger un manque d'hygiène lié à des pratiques d'abatage peu rigoureuses. Dans le cadre du compromis sur l'importation de la viande bovine nord-américaine vers l’Europe suite à l’embargo du bœuf aux hormones, cette utilisation a été finalement autorisée après la publication du règlement européen 101/2013 de début février 2013[17]. En Europe, cette pratique est en principe traçable.

Historique

L'acide lactique a été découvert par Carl Wilhelm Scheele (1742-1786).

Commerce

La France, en 2014, est nette importatrice d'acide lactique, d'après les douanes françaises. Le prix moyen à la tonne à l'import était de 1 400 [18].

Notes et références

  1. ACIDE LACTIQUE, fiche(s) de sécurité du Programme International sur la Sécurité des Substances Chimiques, consultée(s) le 9 mai 2009
  2. Masse molaire calculée d’après « Atomic weights of the elements 2007 », sur www.chem.qmul.ac.uk.
  3. « CAS Registry Number: 50-21-5 », sur ntp.niehs.nih.gov (consulté le 14 février 2010)
  4. (en) J. G. Speight, Norbert Adolph Lange, Lange's handbook of chemistry, New York, McGraw-Hill, , 16e éd., 1623 p. (ISBN 978-0-07-143220-7, LCCN 84643191), p. 2.289
  5. (en) Carl L. Yaws, Handbook of Thermodynamic Diagrams, vol. 1, Huston, Texas, Gulf Pub. Co., (ISBN 978-0-88415-857-8, LCCN 96036328)
  6. (en) Maryadele J. O'Neil, Ann Smith, Patricia E. Heckelman, Susan Budavari, The Merck Index: An Encyclopedia of Chemicals, Drugs and Biologicals, 13th edition, United States, MERCK & CO INC, 2001, , 13e éd., 2564 p. (ISBN 978-0-911910-13-1)
  7. « Acide lactique » dans la base de données de produits chimiques Reptox de la CSST (organisme québécois responsable de la sécurité et de la santé au travail), consulté le 24 avril 2009
  8. « Acide lactique, (dl-) » dans la base de données de produits chimiques Reptox de la CSST (organisme québécois responsable de la sécurité et de la santé au travail), consulté le 25 avril 2009
  9. (en) Pubchem, « lactic acid », sur pubchem.ncbi.nlm.nih.gov (consulté le 9 janvier 2018)
  10. (en) Pubchem, « lactate », sur pubchem.ncbi.nlm.nih.gov (consulté le 9 janvier 2018)
  11. (en) George A. Brooks, « The Science and Translation of Lactate Shuttle Theory », Cell Metabolism, vol. 27, no 4, , p. 757–785 (ISSN 1550-4131, DOI 10.1016/j.cmet.2018.03.008, lire en ligne)
  12. Luc Léger, Georges Cazorla, Cyril Petibois et Laurent Bosquet, « Lactate et exercice : mythes et réalités », Staps, vol. no 54, no 1, , p. 63–76 (ISSN 0247-106X, DOI 10.3917/sta.054.0063, lire en ligne)
  13. Pascal Prevost, « Courbatures », sur Sciensport, 2006 (consulté le 8 janvier 2008)
  14. U. N. Wiesmann, S. DiDonato et N. N. Herschkowitz, « Effect of chloroquine on cultured fibroblasts: release of lysosomal hydrolases and inhibition of their uptake », Biochemical and Biophysical Research Communications, vol. 66, no 4, , p. 1338–1343 (ISSN 1090-2104, PMID 4, lire en ligne)
  15. [PDF] C Chêne (2002) les acides organiques Centre de Ressources Technologiques pour les Entreprises Agro-Alimentaires. http://www.adrianor.com.
  16. http://sante.canoe.com/channel_health_news_details.asp?channel_id=2001&relation_id=3483&news_channel_id=2001&news_id=3695
  17. Questions réponses au Sénat
  18. « Indicateur des échanges import/export », sur Direction générale des douanes. Indiquer NC8=29181100 (consulté le 7 août 2015)

Voir aussi

Articles connexes

  • Additif alimentaire
  • Arôme
  • Lait et vin
  • Acide polylactique Plastique biodégradable

Liens externes

Bibliographie

  • Ackerman SH, Sachar EJ. (1974) The lactate theory of anxiety: a review and reevaluation ; Psychosom Med. 1974 Jan-Feb; 36(1):69-81.


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