Tribunal international des crimes contre les femmes

Le Tribunal international des crimes contre les femmes est un tribunal populaire qui a eu lieu les 4 et 8 mars 1976 à Bruxelles. L'événement a été créé avec l'intention de « rendre public les différents crimes, [...] commis contre des femmes de toutes cultures ».

Histoire

En 1974, Diana E. H. Russell prend un congé pour rencontrer les mouvements de libération des femmes en Europe occidentale. Elle retrouve un collectif de femmes danoises qui organise chaque été un camp de trois mois entièrement réservé aux femmes sur une île Femø, à quatre heures de Copenhague. 12 jours sont réservés chaque été pour des rencontres avec des femmes de tous les pays. Lors de cette rencontre, certaines femmes propose des actions que le mouvement de libération des femmes pourrait entreprendre pendant l’Année internationale des femmes déclarée par l’ONU. L'idée d'un tribunal populaire de femmes émerge. Le sujet est débattu lors de la Conférence internationale féministe les 15 et 17 novembre 1974, à Francfort. Un comité de coordination de huit femmes se met en place. Ce comité se réuni à nouveau en septembre 1975, en janvier 1976 et à la veille du Tribunal international en mars 1976. Lors de la réunion des 24 et 25 janvier 1976, 27 pays étaient inscrits[1].

Objectifs du Tribunal

Les objectifs du tribunal sont  :

  • de montrer que l'oppression des femmes est la même partout, mais à des degrés différents
  • que chaque cas n'est pas isolé, mais typique de ce qui se passe dans le pays en question
  • renforcer la solidarité entre les femmes
  • découvrir des moyens de lutter contre les crimes contre les femmes. C'était la première et la dernière fois que les organisateurs du Tribunal international se mettaient d'accord sur ses objectifs! À la fin de la réunion de planification[1].

Diana E. H. Russell, Nicole Van Den Ven, journaliste belge, Nicole Oily, principales organisatrices du tribunal se sont inspirés du Tribunal international des crimes de guerre de Bertrand Russell, un tribunal populaire sur les crimes commis pendant la guerre du Viêt Nam[2].

Contenu

Le tribunal des crimes contre les femmes a réuni plus de 2000 femmes de 40 pays. Elles ont traité des différentes violences faites aux femmes mutilations génitales, crimes économiques, viol, inceste, crimes subies par les prisonnières politiques, crimes contre les lesbiennes, violence conjugale, prostitution, pornographie et féminicide[3],[2].

Hormie la session d'ouverture de 45 minutes, aucun homme n'est admis dans l'auditorium où les femmes témoignent, ni dans les ateliers. Seules les femmes journalistes sont admises à toutes les sessions[1].

De nombreux témoignages ont été fournis par écrit par des femmes qui n'ont pas pu se présenter au tribunal[3].

La participante Frances Doughty a noté que le Tribunal lui avait confirmé que « l'oppression des femmes en général et des lesbiennes en particulier est véritablement mondiale »[4].

La poète lesbienne Pat Parker fait partie des contributrices. Elle témoigne du meurtre de sa sœur aînée assassinée par son mari[5].

Une marche Take Back the Night s'est déroulée sous la forme d'une procession aux chandelles en association avec le Tribunal[6].

Le tribunal à travers les nombreux témoignages fait un inventaire des violences faites aux femmes à travers le monde et propose des initiatives et solutions pour réduire ces violences[1].

Impact

Simone de Beauvoir, invitée pour la session d'ouverture du Tribunal international et qui finalement n'est pas présente, parle de cet évènement comme « le début de la décolonisation radicale des femmes »[7].

En France, le discours d'introduction de Simone de Beauvoir est repris dans Le Nouvel Observateur. Pour Évelyne Le Garrec, dans Politique Hebdo, l'heure est aux analyses et au développement stratégique. Elle se demande toutefois si dans cent ans, les femmes feront encore la liste des oppressions qu'elles subissent. Paris-Match parle d'« un immense psychodrame d'où émerge, avant tout, l'incohérence » et cite un gardien de salle au Palais : « Si vous voulez mon avis, il vaudrait mieux les enfermer dans un bordel de campagne. Cela les calmerait ». Dans Le Monde, Pierre Devos, parle de « témoignage de femmes venant essentiellement de pays riches », et « de liens touchants, par exemple entre les femmes arabes et israéliennes[1]. »

Les journalistes du Herald Tribune qui ont suivi l'évènement, ont créé une association de femmes journalistes dans le but d'éduquer leurs propres collègues sur le sexisme et pour améliorer l'emploi des femmes journalistes[1].

De nombreuses initiatives des mouvements de libération de femmes ont été réalisés après les rencontres entre femmes lors du tribunal[1].

Les organisatrices Diana E. H. Russell et Nicole Van Den Ven ont publié en novembre 1976, un livre qui relate l'aventure du Tribunal, Crimes Against Women: Proceedings of the International Tribunal[8].

Notes et références

  1. (en) Diana E. H. Russell et Nicole Van de Ven, Crimes Against Women: Proceedings of the International Tribunal, Berkeley (Californie), Russell publications, , 204 p. (lire en ligne)
  2. Chesler, Phyllis. Rape as a War Crime: Reaching Moral Clarity, On the Issues, mai 1996, page 14
  3. Doughty, Frances. lesbians and International Women's Year: A Report on Three Conferences, in Our Right to Love: A Lesbian Resource Book, Ginny Vida, Prentice Hall, 1978, (ISBN 0-13-644401-6), p148
  4. Doughty, Frances. lesbians and International Women's Year: A Report on Three Conferences, in Our Right to Love: A Lesbian Resource Book, Ginny Vida, Prentice Hall, 1978, (ISBN 0-13-644401-6), p149
  5. Alexander, Ilene 1998
  6. « Take Back the Night History » [archive du ] (consulté le )
  7. (en) « Diana Russell obituary », sur the Guardian, (consulté le )
  8. « dianarussell.com » [archive du ] (consulté le )
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