Théorème d'extinction d'Ewald–Oseen

Le théorème d'extinction d'Ewald–Oseen exprime l'extinction du faisceau de lumière entrant dans un milieu diélectrique par l'émission dipolaire induite par ce faisceau. Il a été énoncé par Paul Peter Ewald pour les cristaux en 1912[1] et Carl Wilhelm Oseen pour les matériaux isotropes en 1915[2].

Propagation d'un faisceau dans un milieu diélectrique

La réflexion et la réfraction d'une onde électromagnétique à la surface d'un solide d'indice de réfraction sont décrits par les équations de Maxwell donnant les champs électriques d'une onde sinusoïdale de champ électrique .

On se placera dans le cas d'une incidence normale pour laquelle la polarisation ne joue aucun rôle du simple fait de la symétrie du problème.

On suppose le milieu éclairé de manière homogène et on s'intéresse au problème stationnaire.

L'interface est située à l'origine des coordonnées, le solide est un diélectrique sans pertes et correspond au demi-espace .

L'onde incidente de pulsation et de nombre d'onde s'écrit

est le vecteur unitaire en .

La résolution des équations de Maxwell pour ce problème[3] permet d'obtenir la solution suivante :

est l'indice de réfraction.

On y voit :

  • dans le vide ( ) une onde incidente et une onde réfléchie, de même fréquence, d'amplitude égale à celle de l'onde incidente multipliée par le coefficient de Fresnel  ;
  • dans le matériau une onde transmise de même fréquence, d'amplitude égale à celle de l'onde incidente multipliée par le coefficient de Fresnel . Son nombre d'onde est , correspondant à une vitesse de phase .

Obtention de la solution et interprétation microscopique

Au plan microscopique le phénomène résulte de l'absorption de photons incidents par des électrons du milieu solide, lesquels réémettent des photons identiques en fréquence par rayonnement dipolaire électrique de dipôles oscillants. Ceux-ci se propagent dans le matériau à la vitesse dans des directions quelconques et interagissent avec des électrons qui à leur tour créent des dipôles et ainsi de suite. À l'état stationnaire le milieu est donc constitué de dipôles qui s'influencent mutuellement et de photons incidents qui entretiennent le phénomène.

Les équations de Maxwell étant linéaires elles autorisent l'écriture de la solution sous forme d'une somme du champ incident et du champ créé par les dipôles.

Le champ créé au point courant par un seul dipôle situé en est donné par[4] :

avec :

  • vecteur reliant le point courant au dipôle,
  • polarisation, étant la densité volumique de dipôles.

Dans cette équation est inconnu.

Sous l'hypothèse du continu et en tenant compte de la symétrie du problème on peut écrire :

est la permittivité et est la permittivité du vide.

On obtient le champ induit par les dipôles en sommant sur tout l'espace :

En tenant compte de la symétrie on introduit l'amplitude du champ de dipôles :

L'équation ci-dessus s'écrit :

Si on définit « vers l'avant » comme la propagation dans le sens valeurs croissantes de , alors dans cette dernière équation le premier terme donne le bilan à l'abscisse des photons émis vers l'avant (ou plus exactement ayant une composante vers l'avant) entre et , le second les photons émis vers l'arrière entre et l'infini.

Il s'agit d'une équation intégrale de type Kirchhoff–Helmholtz sur puisque . La solution est cherchée sous la forme de l'ansatz :

On obtient en supposant une extinction totale à l'infini :

D'où, par identification, d'après le second terme :

L'onde transmise se propage avec la vitesse de phase .

Par ailleurs le premier terme donne :

On peut à présent calculer le champ induit par les dipôles :

Cette expression justifie l'intitulé de la loi d'Ewald-Oseen : le champ dipolaire « éteint » complètement le champ incident.

On peut calculer le champ dipolaire émis dans le vide vers l'arrière qui constitue « l'onde réfléchie ».

Remarques

  • La démonstration suppose implicitement que la polarisation est propagée avec la même vitesse que le champ résultant qui est lui-même la somme de l'onde incidente de vitesse et l'onde dipolaire qui se propage avec la vitesse . Une démonstration plus exacte du théorème peut être trouvée en utilisant le potentiel retardé de Hertz[5],[6].
  • Le théorème d'Ewald-Oseen contredit le principe de Huygens-Fresnel qui suppose a priori l'inexistence de l'onde incidente dans le milieu diélectrique. On peut remarquer que l'interprétation faite du phénomène contredit le principe d'indiscernablité des photons.

Références

  1. (en) P. P. Ewald, On the Foundations of Crystal Optics, Traduction de la thèse de P. P. Ewald à l'université de Munich, par L. M. Hollingsworth, rapport Air Force Cambridge Research Laboratories Report AFCRL-70-0580,
  2. (de) C. W. Oseen, « Über die Wechselwirkung Zwischen Zwei elektischen Dipolen der Polarisationsebene in Kristallen und Flüssigkeiten », Annalen der Physik, vol. 48, , p. 1-56
  3. (en) Masud Mansuripur, Classical Optics and its Applications, Cambridge University Press, (ISBN 9780511803796, lire en ligne)
  4. (en) H. Serhat Tetikol, Ewald-Oseen Extinction Theorem, Université Koç, (lire en ligne)
  5. (en) Peter Enders, « The Ewald-Oseen Extinction Theorem in the Lightof Huygens’ Principle », Electronic Journal of Theoretical Physics, vol. 8, no 25, , p. 127-136 (lire en ligne)
  6. (en) Max Born et Emil Wolf, Principles of Optics, Cambridge University Press, (lire en ligne)

Voir aussi

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