Talysh

Les Talysh (aussi appelés Talishi, Taleshi ou Talyshi) sont un groupe ethnique iranien[4] autochtone à l'Azerbaïdjan, parlant une des langues iraniennes. Ils habitent dans certaines régions du nord de l'Iran et dans les parties sud de la République d'Azerbaïdjan (partie connue historiquement sous le nom de Talish-i Gushtasbi (en)).

Cet article concerne le peuple talysh. Pour la langue talysh, voir Talysh (langue).

Talysh
Ensemble folklorique talysh à Bakou (Norouz 2010)

Populations significatives par région
Iran 112 000[1]430 000[2]
Azerbaïdjan 76 841[3],[2]
Population totale 1 089 000
Autres
Langues Talysh
Religions Islam chiite et sunnisme
Ethnies liées Peuples iraniens

Il n'existe pas de statistique officielle sur le nombre de Talysh en Iran. Dans la thèse Positive Orientation Towards the Vernacular among the Talysh of Sumgayit ("Orientation positive vers le vernaculaire parmi les Talysh de Sumgayit")[5], le nombre de locuteurs du Talysh serait d'au moins 400 000 dans la République d'Azerbaïdjan, chiffre en désaccord avec les statistiques officielles de l'État azerbaïdjanais[6].

Population

Les Talysh sont un peuple principalement rural vivant entre les régions du nord-ouest de l'Iran et du sud-est de l'Azerbaïdjan. Le territoire qu'ils occupent présente des caractéristiques très variées : une partie vit ainsi dans le milieu très forestier des montagnes Talysh, tandis qu'une autre part du groupe est établie le long de la côte bordée par la mer caspienne[7].

De ce fait, le mode de vie et la profession des Talysh dépendent de leur localisation. La plupart d'entre-eux occupe des fonctions de fermiers en raison du nombre important de ressources agricoles dont bénéficie la région qu'ils habitent. A ce titre, beaucoup vivent de la récolte du blé, de l'orge ou du riz, ainsi que des productions d'arbres fruitiers présents sur le littoral. D'autres encore se destinent à l'artisanat et travaillent la soie ou l'étain pour ensuite transformer la matière en tapis, chaussures ou bijoux[7].

Procéder au décompte de la population Talysh est relativement complexe, d'autant qu'en Azerbaïdjan, ce peuple a été considéré comme azéri jusqu'en 1989, avant d'être recensé de manière distincte. Les études à ce sujet avancent donc des chiffres très différents : d'après les conclusions de l'Organisation des nations et des peuples non représentés en 2015, il y aurait aux alentours de 540 000 Talysh répartis entre l'Iran et l'Azerbaïdjan, selon des données officielles, et environ un million selon le groupe lui-même[8]. Lors du recensement azéri de 2009, le chiffre officiel de 112 000 était lui privilégié alors que des estimations laissaient entendre que le groupe comptait entre 200 000 et 300 000 membres dans ce seul pays[9].

De même, si l'on se réfère au nombre de locuteurs talyshs, les données sont toutes autres. Celui-ci s'élèverait à plus d'un million en Azerbaïdjan. Mais il est nécessaire de distinguer ceux parlant la langue et ceux revendiquant leur appartenance au groupe ; l'effacement de l'identité talysh durant la période soviétique ayant contribué à réduire le sentiment d'appartenance à cette population malgré un usage toujours courant de sa langue[9],[10].

Histoire

L'histoire du peuple talysh est intrinsèquement liée à celle des populations des bords de la mer caspienne. Cette région est ainsi habitée depuis plus de 75 000 ans et parmi les premiers groupes établis connus, figuraient les Sakas (Scythes en grec), présents entre le Ve et le IIe siècle av. J.-C. La présence des Talysh, elle, remonterait à la conquête turque ayant eu cours entre les IVe et Ve siècles[11].

Si les Talysh ont vécu sous influence turque lors du Moyen-Age, ils ont pu établir leur propre khanat au XVIIe siècle et ainsi disposer d'une entité politique spécifique[7].

Le début du XIXe siècle a ensuite vu les puissances russe et perse se livrer bataille pour ce territoire durant les guerres russo-persanes. Dès lors, la partie nord-ouest du territoire sur lequel vivait les Talysh est passée sous pavillon russe, et ce jusqu'en 1991. A cette date, l'indépendance de l'Azerbaïdjan de l'URSS, a entraîné la perte de souveraineté de Moscou sur cette parcelle de territoire, au profit de Bakou[7],[12].

Depuis lors, les Talysh vivant en Azerbaïdjan sont en proie à une crise d'identité en raison des pressions de la part du pays, les poussant à s'identifier comme azéris, et de leur culture particulière, différente du reste de la population nationale[12].

Mouvement national

Pour exprimer leurs revendications, un parti national talysh d'Azerbaïdjan a d'abord été créé en 1992. Cependant, en juin 1993, profitant d'un contexte politique trouble dans le pays, Ali Ahkram Hummatov déclara la formation de la République autonome Talysh-Mughan (en) qui ne dura guère plus de deux mois. A. Hummatov fut arrêté et d'abord condamné à mort avant de voir sa sentence réduite à une peine de prison à perpétuité. Il fut ensuite libéré en 2004 à la suite de pressions récurrentes du Conseil de l'Europe[9].

Cette tentative indépendantiste conduisit le gouvernement azéri à intensifier sa "campagne d'intimidation et de répression contre les leaders du mouvement national talysh"[9].

Passée cette période, les activistes se réunirent au sein du Mouvement national talysh, constitué officiellement en 2007 aux Pays-Bas, là où vivent la majeure partie des leaders en exil depuis la création avortée de la République talysh. Aujourd'hui, les revendications du mouvement plaident en faveur de la création d'une province talysh co-gouvernée au sein des frontières de l'Azerbaïdjan. De même, l'accent est mis sur la nécessité pour le peuple talysh de bénéficier de droits culturels, visant notamment à préserver l'usage de sa langue[8].

Le Mouvement national talysh a renouvelé son adhésion à l'Organisation des nations et des peuples non-représentés en 2014[8].

Si en 2016, un mouvement revivaliste talysh s'est réuni en Russie à l'occasion d'une conférence internationale sur l'auto-détermination, le mouvement peine à faire entendre ses velléités autonomistes en raison des dissensions internes quant à la nature de l'identité talysh selon plusieurs ethnographes[12].

Culture

La langue talysh fait partie des langues indo-européennes du sous-groupe des langues iraniennes. D'après l'iranologue Khodzko, "La langue Talysh vient des soixante dialectes persans parlés à l’intérieur du royaume de Perse où elle est probablement née. Sa forme grammaticale et lexicale s’est sensiblement écartée des autres langues et dialectes du pays"[11].

Cette langue bénéficie d'un statut divers selon les pays. En Iran où seul le farsi est officiel, le talysh n'est pas enseigné. En revanche, en Azerbaïdjan, certains efforts pour la préserver existent, bien qu'étant minimes[13]. Une émission radio de quinze minutes est ainsi diffusée deux fois par semaine en langue talysh sur une fréquence publique. En termes de presse écrite, la diffusion du talysh reste limité : il n'existe qu'un seul journal émis dans cette langue et celui-ci n'est que faiblement tiré. De même, l'enseignement du talysh ne peut excéder deux heures par semaine selon la législation azéri et les professeurs sont clairement manquants[9].


A l'échelle locale, des initiatives ont vu le jour, visant à préserver le patrimoine culturel talysh. Dans le sud de l'Azerbaïdjan, un musée culturel talysh a ainsi été créé dans les années 1990 afin d'empêcher l'effacement de l'identité de ce peuple[12].

Sur le plan cultuel, les Talysh sont très majoritairement chiites et sont très proche des iraniens d'Iran, expliquant donc leur lien particulier à l'Iran, mais une minorité sunnite demeure. Par ailleurs, de nombreuses traditions et pratiques pré-islamiques sont toujours visibles. Ainsi, les membres du peuple talysh témoignent une forme de révérence pour les arbres, considérés comme des éléments sacrés. De même, leurs croyances évoquent la présence d'esprits, dont le plus maléfique d'entre-eux s'avère être Alazhan, la "femme rouge"[7].

Annexes

Bibliographie

  • (en) James B. Minahan, « Talysh », in One Europe, many nations: a historical dictionary of European national groups, Greenwood Press, Westport (Conn.), 2000, p. 673-676 (ISBN 0-313-30984-1)
  • Irada Piriyeva, Parlons talysh : Azerbaïdjan/Iran, Éditions L'Harmattan, 2011, 126 p. (ISBN 9782296449299)

Articles connexes

Liens externes

Notes et références

  1. Looklex Encyclopaedia — Talysh (en)
  2. Ethnologue.com
  3. 27.01.1999 census of Azerbaijan
  4. (en) Merle Wesley Shoemaker, Russia, Eurasian States, and Eastern Europe, 2000, Stryker-Post Publications, , 414 p. (ISBN 978-1-887985-29-1, lire en ligne)
  5. [PDF] (en) Lien vers la thèse
  6. (en) http://www.eurasianet.org/resource/azerbaijan/hypermail/200103/0062.html
  7. (en) Joshua Project, « Talysh in Iran », sur joshuaproject.net (consulté le )
  8. « UNPO: Talysh », sur unpo.org (consulté le )
  9. (en-GB) « Talysh », sur Minority Rights Group (consulté le )
  10. (en) Thomas Szayna, « POTENTIAL FOR ETHNIC CONFLICT IN THE CASPIAN REGION », Faultlines of Conflict in Central Asia and the South Caucasus: Implications for the U.S. Army, (www.jstor.org/stable/10.7249/mr1598a.14.)
  11. « Les Talysh, un peuple des bords de la Caspienne - La Revue de Téhéran | Iran », sur www.teheran.ir (consulté le )
  12. « Talysh: Community Strives to Preserve Language and Culture in Southern Azerbaijan », Premium Official News,
  13. Irada Piriyeva, Parlons talysh, L'Harmattan,
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