Othismos

En Grèce antique, l'othismos, du grec ancien ὠθισμὸς, est le glissement vers la droite qui résulte de l'affrontement de deux phalanges d'hoplites. Il est la conséquence de l'armement hoplitique grec et la cause de la disposition au sein de la phalange des soldats les plus forts sur l'aile droite. Le phénomène est décrit par Thucydide (V, 71, 1).

Définition et étymologie

Étymologiquement, ὁ ὠθ-ισμός désigne la poussée, le choc, la mêlée bouclier contre bouclier. Hérodote en parle comme d'un combat, un tumulte de combattants affrontés dans une mêlée (« Περσέων τε καὶ Λακεδαιμονίων ὠθισμός ἐγένετο πολλός », Hérodote VII.225). Le terme est parfois employé métaphoriquement avec l'adjonction de λόγων pour désigner une altercation verbale.

Cause de l'othismos

Le combat hoplitique impliquant la solidarité des troupes entre elles, un bouclier défendant le flanc du porteur et de son voisin de gauche, il s'agissait pour le commandant des troupes de placer les soldats les plus forts sur la droite, mieux à-même de se défendre sur un flanc droit non protégé par un camarade. De ce fait, une phalange était souvent victorieuse sur son aile droite, puisqu'elle avait en face d'elle l'aile gauche de la phalange adverse. Chaque phalange serrant vers sa droite pour protéger ses plus faibles et augmenter la poussée générée par le choc entre les deux armées, elles dérivaient légèrement dans cette direction. Thucydide en parle en ces termes :

« Les armées, quelles qu'elles soient, font ceci : elles tendent à dévier, au cours de leur marche, vers leur propre aile droite; si bien que chaque adversaire déborde avec sa droite la gauche de l'ennemi ; en effet, la crainte aidant, chacun serre le plus possible de son côté non protégé contre le bouclier de son voisin de droite et pense que plus il est joint de façon étroite, plus on est à couvert ; et la responsabilité initiale revient au premier homme de l'aile droite, qui souhaite dérober toujours à l'adversaire son défaut de protection ; les autres le suivent, en vertu de la même crainte[1]. »

Devenir de l'othismos

La phalange hoplitique, que l'on voit se développer en Grèce ancienne dès le VIIe siècle avant notre ère, est intimement liée à la notion de cité, puisqu'elle fait se battre côte à côte des citoyens du même rang, qu'il s'agisse d'une phalange « aristocratique » dans les cités oligarchiques comme Sparte, ou plus ouverte à Athènes, l'idée d'égalité et de solidarité au combat est particulièrement forte. De fait l'othismos est conçu comme une conséquence naturelle du combat Grecs contre Grecs, cité contre cité, d'un combat en fait codifié par la notion de cité. C'est cette conception qui explique la longévité et la stabilité de la phalange hoplitique dérivant vers la droite.

Cette disposition perd en efficacité au IVe siècle avant notre ère pour deux raisons : d'une part les guerres d'Epaminondas, général thébain qui mit fin à l'hégémonie spartiate et qui décida de renverser la disposition de la phalange en plaçant son aile forte sur la gauche et en doublant la profondeur du rang, afin de pousser aile forte contre aile forte avec deux fois plus d'hommes et ainsi de briser la ligne lacédémonienne. Il employa cette tactique à la bataille de Leuctres et à la bataille de Mantinée. D'autre part, l'autre raison de l'abandon progressif de la phalange hoplitique est l'invention de la phalange macédonienne sous Philippe II de Macédoine, père d'Alexandre le Grand.

Notes et références

  1. Thucydide, Histoire de la guerre du Péloponnèse, V, 71, 1 : « τὰ στρατόπεδα ποιεῖ μὲν καὶ ἅπαντα τοῦτο· ἐπὶ τὰ δεξιὰ κέρατα αὐτῶν ἐν ταῖς ξυνόδοις μᾶλλον ἐξωθεῖται, καὶ περιίσχουσι κατὰ τὸ τῶν ἐναντίων εὐώνυμον ἀμφότεροι τῷ δεξιῷ, διὰ τὸ φοβουμένους προσστέλλειν τὰ γυμνὰ ἕκαστον ὡς μάλιστα τῇ τοῦ ἐν δεξιᾷ παρατεταγμένου ἀσπίδι καὶ νομίζειν τὴν πυκνότητα τῆς ξυγκλῄσεως εὐσκεπαστότατον εἶναι· καὶ ἡγεῖται μὲν τῆς αἰτίας ταύτης ὁ πρωτοστάτης τοῦ δεξιοῦ κέρως, προθυμούμενος ἐξαλλάσσειν αἰεὶ τῶν ἐναντίων τὴν ἑαυτοῦ γύμνωσιν, ἕπονται δὲ διὰ τὸν αὐτὸν φόβον καὶ οἱ ἄλλοι. »

Sources

  • Robert D. Luginbill, Othismos : The Importance of the Mass-Shove in Hoplite Warfare, Phoenix, vol. 48, no 1 (printemps 1994), p. 51-61
  • Victor D. Hanson, Le modèle occidental de la guerre, Paris, Les Belles Lettres, 1990
  • Jean-Pierre Vernant, Problèmes de la guerre en Grèce ancienne, Paris, Éditions du Seuil, 1999
  • Pierre Vidal-Naquet, Le Chasseur noir : formes de pensée et formes de société en Grèce ancienne, Paris, La Découverte, 2004
  • Pierre Ducrey, Guerre et guerriers en Grèce antique, Paris, Hachette Littérature, 2009
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