Mohamed Oufkir

Mohamed Oufkir () (arabe : محمد أوفقير) est un général et homme politique marocain.

Pour l’article homonyme, voir Malika Oufkir.

Mohamed Oufkir
Surnom « Le serviteur français »
Naissance
Aïn Chair (Région de l'Oriental)
Décès  52 ans)
Palais royal de Skhirat
Origine Marocain
Allégeance France (jusqu'à 1955)
Maroc (de 1955 à 1972)
Arme Armée de terre française (jusqu'à 1955)
Armée royale marocaine (de 1955 à 1972)
Grade Général de division
Années de service années 1940
Conflits Seconde Guerre mondiale, Guerre d'Indochine, Guerre des sables, Affaire Ben Barka, Coup d'État des aviateurs
Autres fonctions ministre de l'Intérieur, ministre de la Défense, chef d'État-major des Forces armées royales

Natif d'Ain-Chair, dans la région marocaine de l'Oriental, Mohamed Oufkir est décoré par la France pour avoir combattu dans l'armée française lors de la Seconde Guerre mondiale en 1944 puis en Indochine française de 1947 à 1949. Il devient capitaine de l'armée française en 1949 et est détaché en 1950 au cabinet du général Duval, commandant supérieur des troupes du Maroc.

À l'indépendance du Maroc en 1955, il devient aide de camp de Mohammed V, puis directeur de la Sûreté, ministre de l'Intérieur et enfin ministre de la Défense du roi Hassan II ; il est chargé de toutes les affaires « délicates » du roi.

Les conditions de sa mort restent imprécises, suicidé ou exécuté, après le coup d'État raté contre le roi, dont il était l'instigateur.

Biographie

Mohamed Oufkir est natif d'Ain Chair, dans la région marocaine de l'Oriental.

Il étudie au collège berbère d'Azrou près de Meknès. En 1939, il entre à l'École militaire de Dar El Beida et, en 1941, il s'engage comme sous-lieutenant dans l'armée française.

Son livret militaire mentionne qu'il « appartient à une influente famille du sud-est marocain qui a rendu des services appréciables à la cause française »[réf. nécessaire]. Il participe en 1944 comme sous-lieutenant du 4e régiment de tirailleurs marocains (4e RTM) à la campagne d'Italie au sein du corps expéditionnaire français du général Juin puis à la guerre d'Indochine de 1947 à 1949, ce qui lui vaut au total huit citations, dont trois à l'ordre de l'armée, et d'être promu chevalier puis officier de la Légion d'honneur pour faits de guerre[1],[2].

En 1950, il est « détaché au cabinet du général commandant supérieur des troupes du Maroc », le général Duval, aux côtés duquel il devient un spécialiste des services de renseignement.

En 1955, il devient aide de camp du roi Mohammed V, au lendemain de l'indépendance du Maroc. Son rôle est de réduire l'influence de l'Armée de libération nationale marocaine (ALN), d'atténuer le plébiscite autour de la légitimité des partis nationalistes, notamment l'Istiqlal et l'UNFP, et de créer les Forces armées royales (FAR). Promu colonel puis général de division, il se distingue par une fermeté anti-populaire notamment lors du soulèvement du Rif entre 1957 et 1959 (cette répression exécutée avec une aide militaire française précieuse), le « complot de juillet » que le régime attribue en 1963 à la gauche marocaine et les émeutes de Casablanca du 23 mars 1965 où, à bord d'un hélicoptère, il tire à la mitraillette sur la foule[3]. L'opposant Moumen Diouri décrit dans Réquisitoire contre un despote les tortures que lui a personnellement infligées Oufkir dans la prison de Dar el-Mokri. Des prisonniers auraient été victimes d’exécutions extra-judiciaires sur son ordre[4].

Sa renommée franchit les frontières lorsqu'il est mêlé en 1965 à l'assassinat de Mehdi Ben Barka[5], principal opposant au roi Hassan II et secrétaire général de la Tricontinentale qui se déroule la même année de sa disparition. La justice française le condamne par contumace en France aux travaux forcés à perpétuité.

Il est ministre de l'Intérieur de 1967 à 1971 quand, le , échoue la tentative de coup d'État militaire de Skhirat menée par le lieutenant-colonel M'hamed Ababou, directeur de l'École militaire des sous-officiers d'Ahermoumou, avec l'appui du général Mohamed Medbouh, à l'occasion de la fête d'anniversaire du roi au palais de Skhirat. Fait peu connu jusqu'à présent[réf. nécessaire], Oufkir faisait déjà partie de ce premier complot. En effet les hauts gradés félons faisaient partie des invités et portaient des vêtements civils, mais avaient pour point communs le port de chemises jaunes[réf. nécessaire]. Les cadets putschistes reçurent pour instruction de ne pas inquiéter les convives portant une chemise jaune[réf. nécessaire]. Oufkir, pour une raison inconnue, décida pendant le putch de récupérer sa tenue d'officier et de sauver le roi. Par la suite il a supprimé ses complices en jouant le rôle de l'honnête officier accusateur[réf. nécessaire].

Oufkir tente d'infléchir la politique du roi dont il critique l'entourage. Conservant apparemment la confiance du roi, Il est nommé commandant en chef des Forces armées royales et ministre de la Défense en 1971, dans le gouvernement de Mohamed Karim Lamrani. Obtenant l'appui de plusieurs militaires de l'armée de l'air marocaine, notamment du lieutenant-colonel Mohamed Amekrane, chef adjoint de l'aviation militaire et du commandant Kouira, chef de la 3e base aérienne militaire de Kénitra, il organise contre le roi Hassan II une tentative d'assassinat (coup d'État des aviateurs) qui échoue le  : de retour de France, l'avion royal d'Hassan II est mitraillé par trois avions de chasse F-5 lors de son escorte aérienne, mais réussit à se poser à l'aéroport de Rabat-Salé.

Lors d'une conférence de presse, le , le ministre de l'Intérieur Mohamed Benhima annonce que, quelques heures après que le commandant Kouira ait avoué au roi qu'Oufkir était son complice, ce dernier s'est suicidé au palais royal de Skhirat en se tirant trois balles, dont la dernière fut fatale. La version officielle de ce « suicide de trahison » dans un communiqué de la MAP (Maghreb Agence Presse) est que « le général Oufkir s'est suicidé dans son bureau de l'état-major en se tirant une balle dans la tête » mais, selon le témoignage d'un diplomate occidental, Oufkir a été atteint de quatre balles, trois dans le dos et une dans la nuque[6].

Selon Fatéma Oufkir, dans son livre Les Jardins du roi, son mari a été exécuté (comme en témoigneraient trois balles dans le dos et une balle dans la nuque) le soir même du putsch avorté, vers minuit, par le général (alors colonel) Ahmed Dlimi et le général Moulay Hafid Alaoui (oncle du roi et ministre de la Maison royale et de la Chancellerie) au palais royal de Skhirat et en présence du roi Hassan II.

Selon une version relatée par Gilles Perrault dans son livre Notre Ami le roi, le général Oufkir a été exécuté en dehors du palais. Dlimi aurait contacté le général en lui annonçant que le roi, grièvement blessé, était à sa merci dans une maison proche de l'ambassade du Liban à Rabat. Oufkir s'y serait rendu aussitôt et y aurait été abattu par Dlimi et Moulay Hafid Alaoui ; le cadavre aurait été ensuite transporté à Skhirat. Certains hauts officiers marocains affirmaient qu'il était encore vivant, en 1999, prisonnier dans le Sud marocain, à 40 km d'Ifni[réf. nécessaire].

Vie privée

Mohamed Oufkir était marié et père de six enfants. Après l'attentat, sa famille reste emprisonnée pendant près de vingt ans dans des conditions très dures. Sa fille Malika en témoigne dans La Prisonnière, paru en 2000[7] et L'Étrangère en 2006 co-écrit avec Michèle Fitoussi[8]. La même année, sa veuve Fatéma publie Les Jardins du roi[9]. Son fils Raouf est l'auteur d'une analyse plus politique, Les Invités, parue en 2004[10]. Sa fille Soukaïna livre son vécu dans son ouvrage La Vie devant moi paru en 2008[11]. Fatéma Oufkir est décédée en 2013 à 75 ans.

Distinctions

Décorations françaises

Décorations américaines

Citations

Notes et références

  1. Raouf Oufkir, Les Invités, 20 ans dans les prisons du Roi, éd. Flammarion, 2003
  2. Stephen Smith, Oufkir, un destin marocain, Hachette Littératures, 2002
  3. Le nom maudit d'Oufkir, par Lexpress.fr, 2 mars 2006.
  4. Moumen Diouri, Réquisitoire contre un despote, Éditions Albatros,
  5. Il déteste Ben Barka depuis que celui-ci a traité les médailles militaires sur son uniforme militaire de « quincaillerie de mercenaire indigne ».
  6. Gilles Perrault, Notre ami le roi, éditions Gallimard, 1992, pp. 165-166 (ISBN 2070326950).
  7. « La Prisonnière (Français) Poche – 7 juin 2000 »
  8. « L'Etrangère (Français) Poche – 2 avril 2008 »
  9. « Les Jardins du roi : Oufkir, Hassan II et nous (Français) Poche – 2 avril 2001 »
  10. « Les Invités : Vingt ans dans les prisons du Roi (Français) Broché – 24 février 2003 »
  11. « La vie devant moi (Français) Broché – 2 avril 2008 »
  12. Il est notamment cité à l'ordre du corps d'armée lors de la Bataille du Garigliano (Monte Cassino) en mai 1944, ce qui lui vaut la croix de guerre 1939-1945 avec étoile de vermeil : « Jeune Officier plein d'allant et d'énergie conservant dans toutes les situations le calme le plus parfait. Le 11 mai 1944, a entraîné ses hommes à l'attaque du Cerasola, les maintenant pendant plusieurs heures sous le tir intense de l'artillerie et le feu rapproché des mitrailleuses ennemies. Le 12 mai, a repousse quatre contre-attaques allemandes dont la dernière a nécessité la mise en œuvre des rockets-guns. Représente le type parfait de l'officier marocain: baroudeur jusqu'à la témérité. »Stephen Smith, Oufkir, un destin marocain, Hachette Littératures, 2002
  13. Sa citation à l'ordre de la brigade en 1948 (Indochine) le décrit comme « officier marocain d'un dynamisme et d'un cran exceptionnels ayant acquis un immense prestige sur ses tirailleurs »Stephen Smith, Oufkir, un destin marocain, Hachette Littératures, 2002
  14. Dossier militaire 134953, Bureau central des archives administratives militaires, 64000 Pau

Annexes

Articles connexes

Bibliographie

Liens externes

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