Mariage homosexuel en Belgique

Le , la Chambre des représentants belge adopte la « proposition de loi ouvrant le mariage à des personnes de même sexe »[1],[2]. La « cohabitation légale », incluant les unions de personnes de même sexe avait été instaurée le .

Willy Demeyer, bourgmestre de Liège, officiant lors d’un mariage gay (2013).

La Belgique devient alors le deuxième pays au monde (après les Pays-Bas) à reconnaitre le mariage homosexuel, avec certaines restrictions concernant la filiation (abrogées par la loi du ). Le mariage avec un étranger ou entre étrangers de même sexe n’est d’abord autorisé que si le pays d’origine permet ces unions. Une circulaire ministérielle du étend la portée de la loi à tous les couples, quelle que soit la législation du pays d’origine, à condition que l’un des époux ait vécu au moins trois mois sur le territoire belge.

Aujourd’hui les couples de même sexe peuvent se marier et adopter légalement en Belgique[3].

Historique

Cohabitation légale

Vers la fin des années 1990, les organisations défendant les droits des homosexuels en Belgique revendiquent la légalisation du mariage pour les couples de même sexe.

En 1995, une proposition de loi est introduite à la Chambre des représentants afin d’établir un cadre légal pour les « contrats de cohabitation ». Il s’agissait essentiellement d’une réponse au déclin du nombre de mariage plutôt qu’établir des droits pour des couples de même sexe. En 1998, la proposition de loi évolue vers le statut de « cohabitation légale » et est finalement votée le . Le dispositif juridique prévoit que deux personnes peuvent se faire reconnaître comme cohabitants légaux, pour autant qu’elles soient majeures et ne soient pas liées par le mariage ou par une autre cohabitation légale. La loi ne prévoit pas de condition de différence de sexe (genre) ou d’absence de lien de parenté. La cohabitation légale est donc accessible, par exemple, à un couple homosexuel, un couple hétérosexuel non marié, à une fratrie (frère et sœur, deux frères ou sœurs), à un couple ascendant-descendant (parent ou grand-parent avec enfant ou petit-enfant majeur)[4].

La loi est publiée au Moniteur belge (journal officiel) le mais, le décret d’application[Quoi ?] ne suivant pas, elle n’est pas appliquée.[réf. souhaitée]

Contexte politique

À la suite des élections belges du 13 juin 1999, le libéral flamand Guy Verhofstadt forme un gouvernement appelé « arc-en-ciel ». De même qu’aux Pays-Bas, cette coalition met fin à la longue domination des chrétiens-démocrates et l’accord de gouvernement[5] prévoit la mise en place d’un cadre légal d’union pour les couples de même sexe ainsi que l’application immédiate de la loi du . Un arrêté royal signé le et publié le rend effective la loi sur la cohabitation légale le [6]

Au cours de l’année 1999, le Parti Socialiste et Ecolo annoncent qu’ils sont en faveur de la légalisation du mariage pour couples de même sexe. Les libéraux francophones et les sociaux-chrétiens n’acceptent cependant de donner leur accord qu’à la condition que le texte n’inclue pas le droit à la filiation et à l’adoption.

Parcours législatif

Statut juridique des couples composés de personnes du même sexe en Europe :
  • Mariage homosexuel
  • Autre type de partenariat (ou concubinage)
  • Cohabitant enregistré
  • Mariage reconnu dans une mesure limitée mais non célébré
  • Unions de personnes de même sexe non reconnues
  • Mariage interdit par la Constitution

Alors que les Pays-Bas adoptent le mariage homosexuel le , le gouvernement belge commence à envisager une telle loi. En juin, le conseil des ministres approuve formellement le mariage pour le couples de même sexe[7], estimant que le mariage est aujourd’hui ressenti comme une relation formelle entre deux personnes ayant comme but principal la création d’une communauté de vie durable. En septembre, les démocrates-chrétiens flamands, alors dans l’opposition, décident de soutenir la proposition de loi. Cependant, le , le Conseil d’État émet un avis négatif, déclarant que le « la figure juridique du mariage est définie comme étant l’union entre un homme et une femme » et que « seules les unions hétérosexuelles sont de nature à donner naissance à des enfants », qu’elles « ont davantage besoin de stabilité [cfr. statistiques ci-dessous] et ont une utilité sociale différente des unions homosexuelles »[8] Les organisations homosexuelles et des ministres du gouvernement critiquent alors l’avis[9]; socialistes et écologistes font connaitre leur intention de poursuivre le processus sans tenir compte de l’avis.

Le projet de loi du gouvernement est alors retiré et réintroduit le [10] en tant que proposition parlementaire — ce qui ne requiert pas l’avis du Conseil d’État — au Sénat par Jeannine Leduc (libéraux flamands), Philippe Mahoux (PS), Philippe Monfils (libéraux francophones), Myriam Vanlerberghe (socialistes flamands), Marie Nagy (Ecolo) et Frans Lozie (écologistes flamands).

À la suite de la démission de la ministre Magda Aelvoet le , des élections sont convoquées et le sort de la loi devient incertain. Néanmoins, la proposition de loi passe au Sénat le par 46 votes contre 15 (70,77 %) et 4 abstentions. Le , la Chambre des Représentants vote par 91 voix contre 22 (74,59 %) et 9 abstentions[11],[12]

Le roi des Belges Albert II signe et promulgue la loi le . Elle parait le au Moniteur belge et entre en vigueur le . Le premier paragraphe de l’article 143 du Code Civil (Livre I, Titre V, Chapitre I) devient : « Deux personnes de sexe différent ou de même sexe peuvent contracter mariage ».

Le , la Cour d’arbitrage (aujourd’hui Cour constitutionnelle) rejette une tentative faite par des opposant à la loi de la déclarer anticonstitutionnelle[13].

Loi sur l’adoption

La loi sur le mariage homosexuel de 2003 ne permettait pas l’adoption par des partenaires de même sexe et la naissance dans un mariage homosexuel n’impliquait pas la filiation, le conjoint de même sexe du parent de naissance n’ayant aucun moyen de devenir le parent légal.

L’avis négatif rendu par le Conseil d’État, qui considère que le but premier du mariage est de servir de cadre à la procréation, est à l’origine de ce droit refusé aux homosexuels. Le gouvernement passe outre, jugeant, à l’instar de nombreuses associations, que si l’on ne refusait pas le droit au mariage aux personnes stériles ou ménopausées, il n’y avait pas lieu de le refuser aux homosexuels. Le , une proposition de loi pour autoriser l’adoption est approuvée par la Chambre des représentants. Un projet de loi ouvrant l’adoption aux couples mariés ou cohabitant dans les mêmes conditions quel que soit leur sexe est adopté par la Chambre des représentants du Parlement fédéral belge le et par le Sénat le . La loi, après sanction royale le , entre en vigueur 10 jours après sa publication officielle le au Moniteur belge, soit le [14],[15].

Statistiques

Le tableau suivant inclut les statistiques officielles par année et une comparaison par rapport à la population globale[10]. Alors que la Belgique étant un des pays en Europe avec le fort taux de divorce, celui-ci est plus faible chez les couples homosexuels.

Année Tous
mariages
Tous
divorces
Mariages
homos
Divorces
homos
Mariages
hétéros
Divorces
hétéros
% divorce
chez les
hétéros
% divorce
chez les
homos
Total Gays Lesbiens Total Gays Lesbiens
2004 43 296 31 405 2 138 1 244 894 18 9 9 41 158 31 387 76,26 0,84
2005 43 141 30 840 2 054 1 160 894 29 8 21 41 087 30 811 74,99 1,41
2006 44 813 29 189 2 248 1 191 1 057 59 17 42 42 565 29 130 68,44 2,62
2007 45 561 30 081 2 300 1 189 1 111 184 73 111 43 261 29 897 69,11 8,00
2008 45 613 35 366 2 183 1 148 1 035 321 151 170 43 430 35 045 80,69 14,70
2009 43 303 32 606 2 132 1 133 999 371 158 213 41 171 32 235 78,30 17,40
2010 42 159 28 903 2 164 1 062 1 102 449 197 252 39 995 28 454 71,14 20,75
2011 41 001 27 522 2 141 1 108 1 017 493 202 291 38 860 27 029 69,55 23,03
2012 42 198 26 145 2 103 1 086 1 017 521 216 305 40 095 25 624 63,91 24,77
2004-2012 391 085 272 057 19 463 10 321 9 126 2 445 1 031 1 414 371 622 269 612 72,55 12,56

Notes et références

  1. Compte-rendu intégral des débats du 30 janvier 2003 et vote de la Chambre des représentants.
  2. Dossier complet du Sénat de Belgique sur la « Proposition de loi ouvrant le mariage à des personnes de même sexe et modifiant certaines dispositions du Code civil.
  3. David Paternotte, Belgique, une success story ?, Centre Bruxellois d’Action Interculturelle, octobre 2010.
  4. « Cohabitation légale », sur belgium.be (consulté le )
  5. De brug naar de eenentwintigste eeuw - regeerakkoord / La voie vers le XXIe siècle - accord de gouvernement - 7 juillet 1999
  6. Olivier De Schutter, Kees Waaldijk, Major legal consequences of marriage, cohabitation and registered partnership for different-sex and same-sex partners in Belgium.
  7. Ministerraad maakt homohuwelijk mogelijk, Het Belang van Limburg, 22 juin 2001.
  8. Mariages homosexuels : texte officiel de l’avis du Conseil d’État (La Libre Belgique, 30 novembre 2001.
  9. Le refus du mariage homosexuel par le Conseil d’État provoque un tollé (La Libre Belgique, 30 novembre 2001.
  10. Statistiques officielles des mariages, divorces et cohabitation légale
  11. Dossier législatif du Sénat.
  12. « Mariage homo en Belgique : il y a 10 ans, qui a voté quoi et pourquoi ?, publication de l’association Arc-en-ciel-Wallonie, 17 janvier 2013 »(ArchiveWikiwixArchive.isGoogle • Que faire ?).
  13. Arbitragehof verwerpt verzoek tot vernietiging homohuwelijk|publisher, De Standaard, 20 octobre 2004.
  14. Loi modifiant certaines dispositions du Code civil en vue de permettre l’adoption par des personnes de même sexe, du Code civil belge
  15. Belgium OK’s Co-Parenting For Gay Couples

Voir aussi

Articles connexes

Liens externes

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