Manosphère

La manosphère, au sein de la sphère masculiniste, désigne un ensemble de communautés en ligne où des hommes se retrouvent entre eux pour parler de leurs problèmes masculins et ouvertement revendiquer certains stéréotypes de genre et une haine des femmes. Ce mouvement et sa rhétorique anti-féministe se sont rapidement développés dans la bulle de filtres masculiniste de l'internet, et dans certains réseaux sociaux qui leur ont fait « chambre d'écho », dont par exemple dans le Forum "Blabla 18-25" du site jeuxvideo.com[1] ou sur Reddit[2]. Ces mouvements produisent et colportent des théories du complot faisant croire que le féminisme ne cherchent pas l'égalité des sexes mais le contrôle des hommes par les femmes. Ils estiment fréquemment que les féministes pilotent les gouvernements (alors qu'elles sont presque partout encore sous-représentées dans toutes les fonctions électives)[3]. Il est fréquent que dans ces forums, sous l'influence de vidéos et théories du complot la haine s'étende ensuite aux étrangers qui par leur immigration ou leur taux de natalité menaceraient l'identité "blanche"[3].

Dans divers pays, certains de ces groupes misogynes, et souvent suprémacistes et haineux[4],[5],[6],[7],[8],[9],[10], ont lancé des attaques et harcèlements coordonnés contre des femmes Youtubeuses, bloggeuses ou des journalistes féministes ; certains de leurs membres ont été à l'origine de crimes. L'organisation caritative britannique anti-extrémisme Hope not Hate a inclus la manosphère dans son rapport « State of Hate »[3].

Sous-ensembles

La manosphère inclue au moins deux sous-communautés s'estimant vivre dans un monde gynocentrique qui favoriserait les femmes et aurait des préjugés contre les hommes ; ils se sentent particulièrement victimes d’une supposée "fémocratie" où les hommes seraient soumis aux femmes et au féminisme[3]. Ces deux communautés ont attiré l'attention en raison de faits d'apologie de la violence et d'usage de violence psychologique et/ou physique par certains de leurs membres :

La communauté incel

Composée de célibataire misogynes et souvent haineux[11]

La communauté MGTOW

communauté les séparatistes masculins dits MGTOW (Men Going Their Own Way ou « hommes suivant leur propre voie », encore plus misogyne, antiféministe et haineux[12],[13]

Histoire

Manoel Horta Ribeiro et ses collègues observent qu'entre 2000 et 2020, les communautés de Pick-Up Artists (jeunes hommes souvent d'une vingtaine d'années, n'ayant pas réussi à établir de contact avec les filles à l’adolescence. se « vengeant » ensuite en multipliant les conquêtes d’un soir, certains présentant les femmes comme du prêt-à-consommer et à jeter)[14] et les militants pour les droits des hommes se sont radicalisées.

En 2020, ces deux communautés semblent dépassées par des communautés plus extrémistes comme les Incels et les Men Going Their Own Way, qui ont absorbés un nombre substantiel d'utilisateurs autrefois actifs dans des communautés plus « douces ».
Ces chercheurs suggèrent que ces communautés récentes, qui s'appuie souvent sur des théories du complot sont plus toxiques et misogynes que les anciennes[15]. Le sexisme étant condamné par les élites politiques et culturelles, l'exprimer fait en outre paraître rebelle et insurgé[3].

Idéologies politiques

Se prétendant souvent apolitiques, les mouvements masculinisées, Incels et MGTOW ont cependant été alternativement associé au libertarianisme de droite et à l'alt-right (extrême droite américaine)[5],[16]. Certains sont ouvertement violents, mais ceux qui ont des « discours policés, calibrés pour être plus socialement acceptables, sont souvent les plus insidieux. Ils s’enrobent de statistiques et de faits (il y a plus de garçons décrocheurs, plus d’hommes itinérants) détournés de leur sens pour mieux servir une thèse plus générale à coups de sophismes et de fausses équivalences »[17].

Notes et références

  1. « Cyber-harcèlement : la polémique autour du site Jeuxvideo.com en cinq actes », sur Franceinfo, (consulté le )
  2. (en-US) Arthur Goldwag, « Leader’s Suicide Brings Attention to Men’s Rights Movement », sur Southern Poverty Law Center, (consulté le ).
  3. (en) Helen Lewis, « To Learn About the Far Right, Start With the ‘Manosphere’ », sur The Atlantic, (consulté le )
  4. Mack Lamoureux, « Le groupe d’antiféministes qui a banni les femmes de sa vie », sur Vice, (consulté le ).
  5. (en) « The men who have sworn never to sleep with women again », sur The Independent, (consulté le ).
  6. « Les MGTOW ou la haine des femmes poussée à son comble », sur Slate.fr, (consulté le ).
  7. Marc-André Sabourin, « Voyage au cœur de la manosphère », sur L’actualité (consulté le ).
  8. « MGTOW, ces hommes qui détestent les femmes », 24Heures, (ISSN 1424-4039, lire en ligne, consulté le ).
  9. « La nébuleuse masculiniste », sur LExpress.fr, (consulté le ).
  10. (en) Justin Caffier, « Here Are Reddit’s Whiniest, Most Low-Key Toxic Subreddits », sur Vice, (consulté le ).
  11. (en-US) « Male Supremacy », sur Southern Poverty Law Center (consulté le ).
  12. (en-US) C. Brian Smith, « The Straight Men Who Want Nothing to Do With Women », sur MEL Magazine, (consulté le ).
  13. (en-GB) George Harrison, « These men hate women so much they’ve sworn off sex and refuse to speak to them: Meet the 'Men Going Their Own Way' », sur The Sun, (consulté le ).
  14. « Hommes en colère », sur La Presse, (consulté le )
  15. (en) Manoel Horta Ribeiro, Jeremy Blackburn, Barry Bradlyn et Emiliano De Cristofaro, « The Evolution of the Manosphere Across the Web », arXiv:2001.07600 [cs], (lire en ligne, consulté le ).
  16. (en) Angela Nagle, Kill All Normies: Online Culture Wars From 4Chan And Tumblr To Trump And The Alt-Right, John Hunt Publishing, (ISBN 978-1-78535-544-8, lire en ligne).
  17. « Hommes en colère », sur La Presse, (consulté le )

Voir aussi

Articles connexes

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