Louis Charles Trabut

Louis Charles Trabut né à Chambéry (alors Royaume de Sardaigne) le et mort à Alger le , est un botaniste et médecin français, connu notamment pour avoir réalisé la première description du clémentinier (Citrus clementina).

Biographie

Né à Chambéry en 1853, avant l'annexion de la Savoie, dès sa prime enfance il habite à Lyon où il fait ses études secondaires[1]. Botaniste précoce, il herborise aux environs de Lyon durant ses jours de congé et, en récompense de son travail scolaire, il peut explorer diverses parties de la France pendant ses vacances. Ainsi, à 17 ans, le jeune botaniste a accumulé un important herbier de France[2].

En 1871, âgé de 18 ans, il s'engage dans la Garde mobile, mais il n'est pas envoyé sur le front durant la guerre franco-prussienne[3].

En 1872, il obtient son baccalauréat ès sciences restreint. Séduit par un nouveau terrain d'herborisation, il commence en 1873 ses études médicales à l'École préparatoire de médecine et de pharmacie d'Alger. Il ne sort d'Algérie qu'à de brèves occasions, pour finir ses études médicales à la faculté de médecine de Montpellier et pour quelques voyages en France et en Espagne[3]. Il soutient sa thèse de doctorat en médecine en 1878 avec pour sujet « une nouvelle luxation du cou-de-pied »[4] et il obtient sa licence en sciences naturelles en 1879[3].

Fraîchement diplômé, il ouvre un cabinet de médecine à Alger et le ferme avec joie au bout de quelques semaines pour devenir, le , professeur d'histoire naturelle à l'École supérieure de médecine et de pharmacie d'Alger et, en même temps, médecin à l'hôpital Mustapha. Il assumera ces deux responsabilités respectivement pendant quarante-trois et pendant vingt-cinq ans[3].

En 1876, Jules Aimé Battandier devient pharmacien à l'hôpital Mustapha. Débutent alors une fructueuse collaboration et une fidèle amitié entre les deux hommes. Jusqu'à la mort de Battandier en 1922, ils travaillent à l'étude de la flore, de la phytogéographie et de la botanique agricole de l'Afrique du Nord[3].

De 1873 à 1892, Trabut étudie principalement la flore de l'Algérie. Il fait de nombreuses excursions à travers le pays et publie de nombreux travaux. Dans cette période, il crée un jardin botanique autour des pavillons de l'hôpital. Après la construction du palais des Écoles supérieures, il crée le Jardin botanique de l'université dont il reste directeur jusqu'à sa retraite universitaire en 1923[5].

En 1892, le Gouvernement général, souhaitant améliorer les plantes cultivées dans le pays, crée un Service de botanique et en confie la direction à Trabut. L'organisation de ce service et l'attribution à celui-ci d'un modeste champ d'expérience permet à Trabut de développer ses études de botanique appliquée. À partir de 1893, c'est le sujet principal de ses recherches et de ses publications. Il travaille alors sur l'introduction et la sélection d'espèces nouvelles ou indigènes. C'est ainsi qu'il développe le Service de botanique[6].

En 1892, il fonde la Société d'horticulture d'Algérie, qu'il préside jusqu'à sa mort et dont il rédige presque seul le bulletin. Il fonde également le Bulletin agricole de l'Algérie-Tunisie-Maroc, qu'il rédige, administre et fait vivre sans aucune subvention pendant trente-cinq ans[7].

René Maire s'associe au duo Battandier-Trabut à partir de 1911[7].

L'année 1923 est l'année de sa retraite universitaire obligatoire, mais il restera directeur du Service botanique du Gouvernement général d'Algérie jusqu'à son décès[8].

Professeur à la faculté de médecine et de pharmacie d'Alger depuis 1910, il est nommé officier de l'Instruction publique, chevalier de la Légion d'honneur, puis, à l'occasion du centenaire de Pasteur, officier du même ordre. Il est élu, en 1918, correspondant de l'Institut, dans la section d'Économie rurale de l'Académie des sciences. Il est également correspondant de l'Académie d'agriculture, correspondant du département de l'Agriculture des États-Unis, et il reçoit la médaille américaine Frank Meyer, distinction rare, conférée à ceux qui se sont le plus distingués dans l'introduction des plantes utiles. La Société botanique de Genève et la Société d'histoire naturelle d'Afrique du Nord le comptent au nombre de leurs membres d'honneur[8].

Il est, pendant plusieurs années, adjoint au maire de Mustapha, et l'un des fondateurs, avec Battandier, du lycée de jeunes filles de cette ville[8].

Après deux ans de souffrances, durant lesquels il n'interrompt pas ses recherches, il meurt à Alger le à l'âge de 75 ans, laissant une veuve et quatre enfants[9].

Découverte de la clémentine

« Une nouvelle mandarine[10] » apparaît à l'orphelinat agricole de Misserghin, dont le frère Clément est chef des cultures[10]. Ce dernier n'ayant laissé aucune trace écrite des circonstances de la découverte, on ne dispose là-dessus que des textes de Trabut, qui ne précise pas l'année. Sur la pierre tombale du frère Clément figurait la date de 1894, qui est controversée[11]. Trabut évoque sa rencontre, à l'orphelinat de Misserghin, avec des plants aberrants mêlés à ceux de mandarinier :

« Au cours d'une visite de cet établissement, je faisais observer au chef des cultures que dans les semis faits en vue d'obtenir des mandariniers francs de pied, il se trouvait un certain nombre de sujets bien différents du mandarinier, sujets qui devaient provenir d'hybridation du mandarinier avec les Citrus du voisinage[10]. »

Deux de ces plants inconnus vont donner des fruits sans avantage notable. Un troisième, en revanche, produit un fruit susceptible d'intéresser les producteurs et les exportateurs d'agrumes. Trabut appelle ce fruit nouveau la clémentine[12],[13]. Il pense qu'il est d'origine hybride, et que ses caractères indiquent comme père « un bigaradier à feuilles de saule dit Granito introduit d'Espagne et vivant au voisinage des mandariniers[10] ». En 1902, il attire l'attention de la communauté scientifique sur « la clémentine (nouvelle tangerine) »[14]. En 1925, la coopérative des agrumes de Boufarik exporte des clémentines aux Halles de Paris, où elles reçoivent bon accueil[10].

En 1943, Herbert John Webber met en doute que le père de la clémentine soit le bigaradier Granito, comme le pensait Trabut. Selon lui, il s'agit plutôt d'un oranger doux (Citrus sinensis)[15]. Sa théorie est confirmée à la fin du XXe siècle par l'utilisation de marqueurs moléculaires[16].

Quelques espèces dédiées au Dr Trabut

Liste partielle des publications

  • Atlas de la Flore d'Algérie (avec Jules Aimé Battandier et René Maire) (1886-1920)
  • Précis de botanique médicale (1891)
  • Flore de l'Algérie (avec Jules Aimé Battandier) (1895)
  • L'arboriculture fruitière dans l'Afrique du Nord (1921)
  • Jules Aimé Battandier et Louis Charles Trabut, Flore analytique et synoptique de l'Algérie et de la Tunisie, Alger, Giralt, , 460 p. (DOI 10.5962/bhl.title.10806, lire en ligne)
  • « La clémentine : les hybrides du Citrus Nobilis », Informations agricoles, n° 67, Direction de l'agriculture du gouvernement général de l'Algérie, Alger, 1926.
  • Répertoire des noms indigènes des plantes spontanées, cultivées et utilisées dans le Nord de l'Afrique (1935)

Bibliographie

Liens externes

Notes et références

  1. René Maire, « Louis Trabut », sur us.archive.org, Revue de botanique appliquée et d'agriculture tropicale, Paris, Laboratoire d'agronomie coloniale, vol. IX, n° 98, 1929, p. 613.
  2. René Maire, op. cit., p. 613 et 614.
  3. René Maire, op. cit., p. 614.
  4. Louis Trabut, D'une nouvelle luxation du cou-de-pied, sur biusante.parisdescartes.fr, Montpellier, 1878.
  5. René Maire, op. cit., p. 614 et 615.
  6. René Maire, op. cit., p. 615.
  7. René Maire, op. cit., p. 618.
  8. René Maire, op. cit., p. 619.
  9. René Maire, op. cit., p. 619 et 620.
  10. Louis Trabut, « La clémentine : les hybrides du Citrus Nobilis », sur archive.org, Informations agricoles, n° 67, Alger, Direction de l'agriculture du gouvernement général de l'Algérie, 1926, p. 2.
  11. René Charrier, « Pour compléter », sur spiritains.org, d’après Les Frères Courage, Paris, Mémoire spiritaine, 1994, Études et Documents 1, p. 62-69.
  12. Louis Trabut, « La clémentine (nouvelle tangerine) », Revue horticole française, n° 10, Paris, 16 mai 1902.
  13. Louis Trabut, « Sur quelques faits relatifs à l'hybridation des Citrus et à l'origine de l'oranger doux (Citrus Aurantium) », sur misserghin.com, notre présentée par Léon Guignard, Académie des sciences, séance du 13 décembre 1909.
  14. Louis Trabut, « La clémentine (nouvelle tangerine) », art. cité. — Louis Trabut, in Bulletin agricole de l'Algérie-Tunisie, n° 35, Service botanique du Gouvernement, 1902.
  15. (en) H. J. Webber, L. D. Batchelor et coll., The citus industry, University of California Press, Berkeley and Los Angeles, 1943, p. 558.
  16. (en) Iqrar Ahmad Khan, Citrus Genetics, Breeding and Biotechnology, sur books.google.fr, CAB International, 2007, p. 41. Khan donne comme références : Z. N. Deng, A. Gentile, E. Nicolosi, G. Continella, E. Tribulato, Parentage determination of some citrus hybrids by molecular markers, 1996 ; et E. Nicolosi, Z. N. Deng, A. Gentile, S. La Malfa, G. Continella, E. Tribulato, « Citrus and genetic origin of important species as investigated by molecular markers », Theorical Genetics 100, 2000, p. 1155-1166.
  17. 1932, Butl. Inst. Catalana Hist. Nat., 32 : 98
  18. 1913, Repert. Spec. Nov. Regni Veg., 13 : 53
  19. 1913, List. Herb. Portug. : 36
  20. 1886, Bull. Soc. bot. France, 33 : 297
  21. 1904, Annuaire Conserv. Jard. Bot. Genève, 7-8 : 123-124
  22. 1942, Bull. Soc. hist. nat. Afrique N., 33 : 96
  23. 1895, Bull. Soc. bot. France, 42 : 556

Trab. est l’abréviation botanique standard de Louis Charles Trabut.

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