Judith Coplon

Judith Coplon Socolov, née le à Brooklyn, New York City, USA et morte le à Manhattan, est une espionne américaine pour le compte de l'Union soviétique. Ses procès, condamnations et appels réussis des décisions de justice ont une profonde influence sur les poursuites judiciaires pour espionnage pendant la guerre froide[1],[2].

Jeunesse

Le père Judith Coplon, Samuel Coplon est fabricant de jouets et sa mère, Rebecca Moroh, une modiste. Judith Coplon étudie à l'école publique Joseph F. Lamb de Brooklyn. Au lycée, elle remporte un prix de citoyenneté et obtient une bourse pour la faculté d'art libéraux Barnard College. Elle s'y spécialise en histoire et rejoint la Ligue des jeunes communistes. En 1943, elle obtient son diplôme avec mention[2].

Elle est recrutée comme espionne soviétique à l'Université de Columbia par Flora Wovschin et Marion Davis Berdecio.

En 1944, Coplon obtient un emploi au ministère américain de la Justice[2]. Elle est mutée dans l'unité Foreign Agents Registration (enregistrement des agents étrangers), où elle a accès aux informations de contre-espionnage, et aurait été recrutée comme espionne par le NKGB à la fin de 1944[3].

Coplon et Socolov 1950

Espionnage

Recrutement

Coplon est recrutée comme espionne pour le compte de l'URSS au début de l’année 1945. Coplon rencontre Vladimir Pravdin, le chef de la station NKVD à New York le 4 janvier 1945[4]. Pravdin est impressionné par Coplon qu'il décrit comme «une fille très sérieuse, timide, profonde, idéologiquement proche de nous». Il poursuit[5] :

« Nous n'avons aucun doute sur la sincérité de son désir de travailler avec nous. Au cours de la conversation (Coplon) a souligné combien elle appréciait l'importance que nous lui accordions et que, sachant maintenant pour qui elle travaillait, elle redoublerait d'efforts. Au tout premier stade de son travail (Coplon) pensait qu'elle aidait les compatriotes locaux (le parti communiste des USA). . . . Elle pensait que les choses qu'elle avait acquises ne pouvaient pas représenter un intérêt pour les compatriotes mais pourraient l’être pour une organisation comme le Komintern ou une autre institution entretenant une relation avec nous. Elle a ajouté qu'elle espérait travailler pour nous car elle considérait que c'était le plus grand honneur d'avoir l'opportunité de nous fournir une aide modeste »

Bientôt, elle est recrutée comme espion soviétique (nom de code Sima)[6].

Coplon est devenu l'une des informantes les plus appréciées du NKVD. Son attention est concentrée sur les principales archives de contre-espionnage du ministère de la Justice qui recueillent des informations auprès des différentes agences gouvernementales : FBI, OSS et intelligence navales et militaires. Elle transmet à son contact au NKVD un certain nombre de documents des archives. Cela comprend des documents du FBI sur les organisations soviétiques aux États-Unis et des informations sur les dirigeants du Parti communiste des États-Unis[7].

Le FBI arrête Judith Coplon le 4 mars 1949

Elle attire l'attention du FBI à la suite d'un message codé identifié par le projet Venona à la fin de 1948. Coplon est connue à la fois dans les renseignements soviétiques et dans les fichiers Venona sous le nom de «SIMA». Elle est la première personne jugée à la suite du projet Venona.

L'agent spécial du FBI, Robert Lamphere, témoigne lors de son procès que des soupçons étaient tombés sur Coplon en raison d'informations provenant d'un « informateur confidentiel » fiable[8]. Une vaste opération de contre-espionnage a planté un document secret à transmettre aux Soviétiques. Des agents du FBI ont arrêté Coplon le 4 mars 1949, à Manhattan, alors qu'elle rencontrait Valentin Gubitchev, un fonctionnaire du KGB employé par les Nations Unies alors qu'elle portait dans son sac ce qu'elle croyait être des documents secrets du gouvernement américain[3],[8].

Procès et appels

En 1949, trois grandes affaires contre des communistes émergent aux États-Unis : Coplon (1949-1967), Hiss et Chambers (1949-1950) et le procès des dirigeants du Parti communiste dirigeants en vertu du Smith Act (en) (1949-1958).

L'avocat de Coplon est Archibald Palmer[9] et celui de Gubitchev est Abraham Pomerantz[10].

Coplon est condamnée dans deux procès séparés, un pour espionnage qui a commencé le 25 avril 1949[11] et un autre pour complot avec Gubitchev en 1950. Les deux condamnations ont par la suite été annulées en appel en 1950 et 1951 respectivement[8] .

La cour d'appel, siégeant à New York, conclut que si les preuves montrent qu'elle est coupable, des agents du FBI ont menti sous serment au sujet des écoutes téléphoniques. De plus, le judgement dit que l’échec d’obtention d'un mandat d’arrêt ne justifie pas sa condamnation. Le tribunal annule le verdict, mais l'acte d'accusation n'est pas rejeté.

Dans l'appel du procès de Washington, le verdict est confirmé, mais en raison d'une éventuelle mise sur écoute, un nouveau procès est devenu impossible. Les irrégularités juridiques rendent impossible un nouveau jugement et le gouvernement a finalement abandonné l'affaire en 1967[8].

Les procès de Coplon attirent l'attention aux USA. Après son arrestation mais avant ses procès Coplon reçoit une attention particulière de la part des médias.

Traitement dans la presse

Gertrude Samuels écrit pour le New York Times, et remet en question la situation[12] :

« Pourquoi certaines personnes deviennent-elles des traîtres? Qu'est-ce qui transforme certains Américains nés dans le pays, ainsi que des citoyens naturalisés, en Benedict Arnolds et Quislings ? Qu'est-ce qui les motive à trahir leur pays et eux-mêmes? »

Samuels examine quatre types de traîtres: les professionnels, les gens fidèles à leur pays natal, les cinglés et les idéalistes. Dans ce dernier groupe, elle nomme Elizabeth Bentley et Whittaker Chambers. Pour comprendre ce groupe, soutient-elle, il faut comprendre leur volonté de justice sociale, des raisons « hors de la compétence du FBI » alors que « peu de juges sont gênés par des motivations ». Le rédacteur en chef du NYT Book Review, Sam Tanenhaus, écrit en mars 2011[13]:

« Au moment de son procès, Mme Coplon suscita beaucoup d'intérêt, en particulier dans la presse à scandales de l'époque. Diplômée avec mention de Barnard College, âgée de 27 ans, employée dans la section de la sécurité intérieure du ministère de la Justice, elle donnait l'impression d’être l'employée gouvernementale modèle d'après-guerre, vêtue de pulls douillets et de jupes New Look avec la sorte d'attention que les apparitions d'audience de Lindsay Lohan attirent aujourd'hui. »

Vie après les procès

En 1950, Coplon épouse l'un de ses avocats, Albert Socolov, et ils restent mariés jusqu'à sa mort en 2011. Le couple a eu quatre enfants[14],[15],[16].

Elle retourne dans l'anonymat une fois les procès terminés et obtient un master en éducation, publie des livres bilingues, donne des cours aux femmes en prison et gère deux restaurants mexicain à Manhattan avec son mari[8].

Références

  1. « Judith Coplon Socolov -NY woman convicted of spying in '49 dies at 89 », The Associated Press, (lire en ligne, consulté le )
  2. « Judith Coplon '43, political analyst, dies », Barnard College (consulté le )
  3. (en) TIME, « Baby Face », (consulté le )
  4. Allen Weinstein et Alexsander Vassiliev, The Haunted Wood: Soviet Espionage in America–The Stalin Years, New York, Random House, , 277 p. (ISBN 0-679-45724-0, lire en ligne)
  5. Vladimir Pravdin, report on Judith Coplon (January 8, 1945)
  6. Athan Theoharis, Chasing Spies (2002) page 46
  7. John Simkin, « Judith Coplon », Spartacus Educational
  8. Sam Roberts, « Judith Coplon, Haunted by Espionage Case, Dies at 89 », The New York Times, (lire en ligne, consulté le )
  9. Leab, « Coplon, Judith », American National Biography Online (consulté le )
  10. (en-US) Edward A. Gargan, « ABRAHAM POMERANTZ, 79, PIONEERING LAWYER », The New York Times, (ISSN 0362-4331, lire en ligne, consulté le )
  11. « Venona » [archive du ], FBI (consulté le )
  12. Gertrude Samuels, « American Traitors: A Study in Motives », New York Times, (lire en ligne, consulté le )
  13. Sam Tanenhaus, « ArtsBeat: A Cold War Spy Trial, Before McCarthy and the Rosenbergs », The New York Times, (lire en ligne, consulté le )
  14. (en) « NY woman convicted of spying in '49 dies at 89 », The Wall Street Journal,
  15. (en-US) Jim Fitzgerald, « Judith Coplon, accused and cleared of being a Soviet spy, dies at 89 », The Washington Post, (ISSN 0190-8286, lire en ligne, consulté le )
  16. « Judith Coplon, NY woman convicted of Cold War spying, dies at 89; convictions were overturned »,

Bibliographie

  • (en) John Earl Haynes, Harvey Klehr, Decoding Soviet Espionage in America, New Haven, Yale University Press, (ISBN 0-300-08462-5), p. 157-160
  • (en) Robert J. Lamphere et Tom Shachtman, The FBI-KGB War: A Special Agent's Story, New York, Random House, (ISBN 0-86554-477-8), p. 97–124
  • (en) Marcia Mitchell, Thomas Mitchell, The Spy Who Seduced America: Lies and Betrayal in the Heat of the Cold War – The Judith Coplon Story, Montpelier, Invisible Cities Press, (ISBN 1-931229-22-8)
  • (en) Alexander Vassiliev, Allen Weinstein, The Haunted Wood: Soviet Espionage in America – The Stalin Era, New York, Random House,, (ISBN 0-375-75536-5), p. 277–279, 298

Articles connexes

Liens externes

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