Ida Rubinstein

Ida Lvovna Rubinstein (en russe : Ида Львовна Рубинштейн), née à Kharkov dans l'Empire russe (actuellement Kharkiv, en Ukraine) le et morte à Vence, dans les Alpes-Maritimes en France, le , est une danseuse et mécène russe, icône de la Belle Époque.

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Ida Rubinstein
Ida Rubinstein en 1912 posant avec un chapeau de chez Lenthéric[1].
Nom de naissance Ida Lvovna Rubinstein
Naissance
Kharkov (Empire russe)
Décès
Vence (Alpes-Maritimes, France)
Nationalité  Russe

Le compositeur français Maurice Ravel lui dédia sa pièce musicale le Boléro, qu'elle interpréta sur scène en 1928.

Biographie

Née dans une famille juive aisée, Ida Rubinstein est orpheline de bonne heure[2],[3]. Ayant vu danser Isadora Duncan, elle se tourne vers la danse. Elle reçoit une formation rudimentaire au ballet. Sous l'égide de Michel Fokine, elle fait ses débuts en 1908 avec un rôle dans le Salomé d'Oscar Wilde[4], se déshabillant complètement lors de la Danse des sept voiles.

Serge Diaghilev l'engage dans les Ballets russes. Elle danse dans le rôle-titre de Cléopâtre au cours de la saison 1909 à Paris. C’est un succès, son interprétation est jugée remarquable[4]. Les costumes sont signés Léon Bakst et le final inspire le Souvenir de la saison d'Opéra Russe 1909 du peintre hollandais Kees van Dongen.

Elle reste à Paris et tisse des liens avec des artistes. S’intéressant au théâtre, elle prend des cours avec Sarah Bernhardt[5].

Elle est aussi célébrée dans les arts. Son portrait par Valentin Serov en 1910 marque la plus complète réalisation du style de ce peintre arrivé à maturité.

Ida Rubinstein danse avec les Ballets russes de 1909 à début 1911, se produisant dans Shéhérazade, un ballet composé par Rimski-Korsakov basé sur la première histoire des Mille et une nuits, chorégraphié par Michel Fokine et écrit par lui-même et Léon Bakst. Le ballet est plébiscité à sa première représentation, pour sa sensualité et sa mise en scène[4]. De nos jours, il est rarement joué, car il est plus considéré comme une pantomime et son effet orientaliste semble démodé. Grande et mince, Ida Rubinstein compense son faible niveau technique en danse par son sens inné du mouvement, et sa puissance expressive sur scène[4],[6].

Rubinstein commence en 1911 une liaison de trois ans avec la peintre Romaine Brooks, qui compose un saisissant portrait et l'utilise comme modèle nu pour Vénus. Elle s’impose également dans la même période comme une des personnalités du monde théâtral parisien, en devenant indépendante des Ballets russes, en prenant son destin en main, et en utilisant sa fortune pour commander des œuvres et mettre à contribution des artistes de différents arts : des danseurs bien sûr, mais aussi des compositeurs, des auteurs, des décorateurs, etc., donnant une impulsion supplémentaire à la scène parisienne, dans une logique similaire à celle de son compatriote Serge de Diaghilev[6].

Ainsi, dès 1911, Ida Rubinstein se produit dans Le Martyre de saint Sébastien, avec une adaptation de Gabriele D'Annunzio, et une musique composée par Claude Debussy. Elle y interprète le rôle du saint[5],[7]. C’est à la fois un triomphe pour son modernisme stylisé et un scandale ; l'archevêque de Paris, Monseigneur Léon Adolphe Amette, interdit aux catholiques d’assister au spectacle, sous peine d’excommunion[8]. Elle fonde et finance plusieurs compagnies de ballet[6].

Pendant la Première Guerre mondiale, elle interrompt ses projets artistiques pour soigner les blessés[6]. En 1926 elle interprète le rôle principal dans le mimodrame de Jean Roger-Ducasse Orphée. Elle commandite le Boléro de Maurice Ravel dans lequel elle se produit en 1928[9],[10]. Elle organise des représentations de ballets et continue à danser jusqu'au début de la Seconde Guerre mondiale. C'est également Ida Rubinstein qui commandite en avril et les productions des ballets Perséphone d'Igor Stravinsky sur un texte d'André Gide, décors et costumes d'André Barsacq, et Sémiramis d'Arthur Honegger sur un texte de Paul Valéry, costumes et décors d'Alexandre Jakovleff, André Barsacq et Léon Bakst. Jeanne d'Arc au bûcher, sur un texte de Paul Claudel et une musique d’Arthur Honegger , est sa dernière interprétation en 1938[5],[6].

La Seconde Guerre mondiale la conduit à s'exiler à Londres. Elle y finance un centre médical pour soigner les pilotes[2]. Par la suite, elle ne joue plus[5]. De retour en France, elle n’y retrouve pas ce milieu culturel et artistique qui est son monde[2]. Elle meurt dans sa villa de Vence en 1960[2]. Elle repose au cimetière de Vence.[11]

Distinctions

Images et peintures

Ida Rubinstein en Hélène de Sparte, par Léon Bakst (1912).

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Notes et références

  1. (en) Archives Getty Images, en ligne — indexée sur Wiki Commons.
  2. Jean-Claude Gallotta, « Ida Rubinstein, intense insoumise », Le Monde, (lire en ligne)
  3. Donald Flanell Friedman (trad. Monique Briend-Walker), Ida Rubinstein, le roman d’une vie d’artiste, Salvator,
  4. Marie-Françoise Bouchon, « Rubinstein Ida », dans Philippe Le Moal (dir.), Dictionnaire de la danse, Éditions Larousse, , p. 377
  5. Sophie Humann, « Les voix de Jeanne », Le Figaro, no hors-série « Jeanne d'Arc. Le mythe - la légende - l'histoire », , p. 108-109
  6. Marie-Françoise Bouchon, « Rubinstein, Ida », dans Béatrice Didier, Antoinette Fouque et Mireille Calle-Gruber (dir.), Le Dictionnaire universel des créatrices, Éditions des femmes, , p. 3770-3771
  7. Renaud Machart, « Le "Martyre" de Debussy, est-ce de la bonne musique ? », Le Monde, (lire en ligne)
  8. (en) Tamara Levitz, Modernist Mysteries : Persephone, Oxford University Press, (lire en ligne), p. 426-427
  9. Jean-Jacques Larrochelle, « La Passion Boléro, Maurice Ravel », Le Monde, (lire en ligne)
  10. « Le Boléro de Ravel, crescendo le plus célèbre du monde, tombe dans le domaine public », Le Monde, (lire en ligne)
  11. « Elle était à l'abandon: la tombe d'une célèbre danseuse rénovée et valorisée à Vence », sur Nice-Matin, (consulté le )
  12. « Ministère de l'instruction publique et des beaux-arts », Journal officiel de la République française. Lois et décrets, , p. 7564 (lire en ligne)

Annexes

Bibliographie

  • (en) Michael de Cossart, Ida Rubinstein (1885-1960): A Theatrical Life, Liverpool University Press, 1987, (ISBN 0-85323-146-X).
  • Jacques Depaulis, Ida Rubinstein, une inconnue jadis célèbre, Paris, Honoré Champion, 1995, (ISBN 2-85203-717-3).
  • (en) Toni Bentley, Sisters of Salome, Bison Books, 2005 (ISBN 0-8032-6241-8).
  • Maurice Ravel, L'intégrale : Correspondance (1895-1937), écrits et entretiens : édition établie, présentée et annotée par Manuel Cornejo, Paris, Le Passeur Éditeur, , 1769 p. (ISBN 978-2-36890-577-7 et 2-36890-577-4, notice BnF no FRBNF45607052)
    Contient 1 correspondance d'Ida Rubinstein à Maurice Ravel (25 avril 1928) n°2175 et 1 correspondance collective sur papier à en-tête d'Ida Rubinstein des compositeurs Georges Auric, Arthur Honegger, Darius Milhaud, Maurice Ravel et Henri Sauguet à Jacques Rouché (24 octobre 1928) n°2210

Liens externes

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