Helena Scheuberin

Helena Scheuberin (fl. 1485)[1],[2] est une femme autrichienne accusée de sorcellerie en 1485. Son procès et son acquittement conduisent Heinrich Kramer, insatisfait de l'issue du procès, à écrire le Malleus Maleficarum, publié deux ans plus tard après le procès.

Procès d'Innsbruck

En 1485, le procès d'Helena Scheuberin débute à Innsbruck[3],[4]. Elle est accusée d'avoir utilisé la magie pour tuer le chevalier Jörg Spiess[5]. Tombé malade, son médecin lui aurait intimé de ne pas continuer à rendre visite à Helena Scheuberin pour éviter de se faire assassiner.

Pendant le procès, six autres femmes sont impliquées et accusées de sorcellerie. Des personnes donnent des témoignages compromis par leur très forte animosité personnelle envers l'accusée.

Heinrich Kramer base son accusation sur une critique des pratiques sexuelles de l'accusée, qu'il juge indécente. Il lui pose des questions détaillées sur ses activités sexuelles, à tel point que le représentant de l'évêque lui demande de partir.

L'avocat des victimes Johann Merwais[6] souligne à l'ouverture du procès des modalités d'interrogatoires inappropriées, comportant des questions induisant les réponses. Environ 50 femmes sont soupçonnées et interrogées en même temps qu'Helena Scheuberin sur dénonciation de leurs anciens amoureux, conjoints trompés ou personnes ayant eu des querelles et des conflits avec les accusées[1]. L'évêque Georg Golser examinant attentivement les dossiers, trouve une certaine disparité entre les dénonciations initiales et les accusations retenues par Kramer, ce dernier choqué par la promiscuité et le comportement sexuel des accusées essayant de mettre en évidence un lien entre promiscuité sexuelle et immoralité et pratique de la sorcellerie. L'évêque considérant qu'aucune accusation de diabolisme ne figure dans les accusations initiales et que la vie sexuelle des femmes n'a pas à être évoquée aussi crûment émet des objections[7]. Les autorités à ce stade considèrent encore la sorcellerie comme un délit mineur et qui n'est pas nécessairement associé à Satan. Craignant les représailles des familles des accusées envers le représentant de l'Inquisition, l'évêque clot le procès. Helena Scheuberin est en effet loin de se laisser faire et apostrophe Kramer personnellement durant le procès[8],[9]. L'archiduc Sigismond du Tyrol accepte de payer les frais du procès.

Helena Scheuberin et les six autres femmes sont toutes soit libérées ou reçoivent une condamnation mineure sous forme de pénitence.

Signification historique

Page de garde du„Malleus maleficarum Lyon 1669

Les procès sont initiés en partie par l'inquisiteur Heinrich Kramer, qui voyage en Allemagne afin de débusquer des sorcières. Le diocèse local refuse d'obéir à ses ordres, ce qui conduit Kramer à chercher par la suite le soutien du Pape, sous forme de la publication d'une bulle papale, la Summis desiderantes affectibus (1484) qui réaffirme son autorité judiciaire en tant qu'inquisiteur.

Kramer n'est pas satisfait de l'issue du procès[10] et reste à Innsbruck pour continuer ses enquêtes. Il finit par partir après avoir échangé des courriers avec un évêque Italien, Georg Golser[11], qui lui ordonne de partir d'Innsbruck. Il retourne à Cologne et y écrit un traité sur la sorcellerie qui devient par la suite le Malleus Maleficarum, publié pour la première fois en 1487, et qui constitue une sorte de manuel d'instructions pour trouver, identifier et faire avouer les sorcières[12].

Postérité

Un roman historique est publié sur la vie d'Helena Scheuberin[13],[2] en 2010.

Littérature

Références

  1. (en) Sigrid Brauner, Fearless Wives and Frightened Shrews : The Construction of the Witch in Early Modern Germany, Univ of Massachusetts Press, , 164 p. (ISBN 1-55849-297-6, lire en ligne)
  2. (de) Matthias Kessler, Das Schicksal der Hexe Helena : Ein MysteryKrimi basierend auf wahren Begebenheiten, Allpart Media, , 400 p. (ISBN 978-3-86214-511-9, lire en ligne)
  3. (de) Tiroler Landesmuseum Ferdinandeum, Zeitschrift des Ferdinandeums für Tirol und Vorarlberg, Herausgegeben von dem verwaltungs-ausschusse desselben, (lire en ligne)
  4. (it) Pinuccia Di Gesaro, Streghe : l'ossessione del diavolo, il repertorio dei malefizi, la repressione, Praxis 3, (lire en ligne)
  5. (de) Thomas Wünsch, Religion und Magie in Ostmitteleuropa : Spielräume theologischer Normierungsprozesse in Spätmittelalter und Früher Neuzeit, Lit, , 339 p. (ISBN 978-3-8258-9273-9, lire en ligne)
  6. (en) William E. Burns, Witch Hunts in Europe and America : An Encyclopedia, Greenwood Publishing Group, , 359 p. (ISBN 978-0-313-32142-9, lire en ligne)
  7. (en) P. G. Maxwell-Stuart, Witchcraft : A History, Tempus Pub., , 160 p. (ISBN 978-0-7524-1786-8, lire en ligne)
  8. (de) Hilde Schmölzer, Phänomen Hexe : Wahn und Wirklichkeit im Lauf der Jahrhunderte, Herold, , 168 p. (ISBN 978-3-7008-0340-9, lire en ligne)
  9. (de) Der Schlern, Vogelweider, (lire en ligne)
  10. (en) Brian P. Levack, The Oxford Handbook of Witchcraft in Early Modern Europe and Colonial America, OUP Oxford, , 646 p. (ISBN 978-0-19-164883-0, lire en ligne).
  11. (en) Manfred Tschaikner, « Hexen in Innsbruck? Erzherzog Sigmund, Bischof Georg Golser und der Inquisitor Heinrich Kramer (1484-1486) » (consulté le ).
  12. (en) Hans Peter Broedel, The Malleus Maleficarum and the Construction of Witchcraft : theology and popular belief, Manchester/New York/New York, Manchester University Press, , 209 p. (ISBN 978-0-7190-6441-8, lire en ligne).
  13. (de) Elmar Bereuter, Hexenhammer : Historischer Roman, Piper ebooks, , 400 p. (ISBN 978-3-492-96348-0, lire en ligne)
  • Portail de l'Autriche
  • Portail du droit
Cet article est issu de Wikipedia. Le texte est sous licence Creative Commons - Attribution - Partage dans les Mêmes. Des conditions supplémentaires peuvent s'appliquer aux fichiers multimédias.