Malleus Maleficarum

Le Malleus Maleficarum Marteau des sorcières », c’est-à-dire marteau contre les sorcières), est un traité des dominicains Heinrich Kramer Institoris et Jacques Sprenger (Jacob Sprenger), ayant eu place de coauteur, publié à Strasbourg en 1486 ou 1487[1],[2]. Il connut de nombreuses rééditions. Ce texte est utilisé dans le cadre de la chasse aux sorcières qui débute au XVe siècle en Europe.

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Le Marteau des sorcières

Malleus Maleficarum, Lyon 1669

Auteur Henri Kramer Institoris
(Heinrich Kramer Institoris)
Jacques Sprenger
(Jacob Sprenger)
Pays Ville libre d'Empire de Strasbourg
Genre Traité de théologie
Version originale
Langue Latin
Titre Malleus Maleficarum
Lieu de parution Strasbourg
Date de parution 1486

Le , le pape Innocent VIII fait paraître la bulle Summis desiderantes affectibus, mettant en garde contre la sorcellerie. Ce document apporte de la légitimité aux deux inquisiteurs, Jacques Sprenger et Henry Institoris (Kraemer), qui s'attaquent alors au problème. Heinrich Kramer avait tenté de mener des procès en sorcellerie, notamment celui d'Helena Scheuberin dans la ville d'Innsbruck sans succès, et il tente par la suite de défendre ses idées en les publiant et en demandant le soutien de l'Église catholique, jusque-là très réservée sur la question. Les deux hommes publient le livre Malleus Maleficarum (Le Marteau des sorcières). Bien que rapidement condamné par l'Église catholique et mis à l'Index, l'ouvrage eut un large succès dans la lutte contre la sorcellerie chez les catholiques comme chez les protestants à l'époque moderne.

Les auteurs

L'essentiel de l'ouvrage est l'œuvre d'Institoris, Sprenger n'ayant joué qu'un rôle mineur. Il y a une polémique indiquant que Sprenger fut précisé comme co-auteur contre son gré puisqu'il était plus connu que l'auteur et que cela permettait de mieux vendre et diffuser le livre.

Institoris, inquisiteur pontifical, chassa les sorcières de l'Alsace à l'Autriche, au prix de nombreuses polémiques.

Le Malleus Maleficarum

Il s’agit pour la majeure partie du texte d’une codification de croyances préexistantes, souvent tirées de textes plus anciens comme le Directorium Inquisitorum de Nicolas Eymerich (1376), et le Formicarius de Johannes Nider (1435). L'arrivée de l'imprimerie en Europe et l'apport, par Gutenberg de la presse à cette technique, permit de diffuser le manuel à grande échelle pour l'époque. L'ouvrage fut réédité de nombreuses fois, et largement utilisé en Europe occidentale, malgré son interdiction en 1490, peu après sa publication, par l'Église catholique.

La première partie du livre traite de la nature de la sorcellerie. Une bonne partie de cette section affirme que les femmes, à cause de leur faiblesse et de l’infériorité de leur intelligence, seraient par nature prédisposées à céder aux tentations de Satan. Le titre même du livre présente le mot maleficarum (avec la voyelle de la terminaison au féminin) et les auteurs déclarent (de façon erronée) que le mot femina (femme) dérive de fe + minus (foi mineure)[3]. Le manuel soutient que certains des actes confessés par les sorcières, comme le fait de se transformer en animaux ou en monstres, ne sont qu’illusions suscitées par le Diable, tandis que d’autres actions comme celles consistant à voler au sabbat, provoquer des tempêtes ou détruire les récoltes sont réellement possibles. Les auteurs insistent en outre de façon morbide sur l’aspect licencieux des rapports sexuels que les sorcières auraient avec les démons[4].

La seconde partie explique comment procéder à la capture, instruire le procès, organiser la détention et l’élimination des sorcières. Cette partie traite aussi de la confiance qu’on peut accorder ou non aux déclarations des témoins, dont les accusations sont souvent proférées par envie ou désir de vengeance ; les auteurs affirment toutefois que les indiscrétions et la rumeur publique sont suffisantes pour conduire une personne devant les tribunaux et qu’une défense trop véhémente d’un avocat prouve que celui-ci est ensorcelé. Le manuel donne des indications sur la manière d’éviter aux autorités d’être sujettes à la sorcellerie et rassurent le lecteur sur le fait que les juges, en tant que représentants de Dieu, sont immunisés contre le pouvoir des sorcières. Une grande partie est consacrée à l’illustration des signes[5], dont la glossolalie, la voyance et la psychokinèse et les « marques du diable » (pattes de crapaud au blanc de l'œil, taches sur la peau, zones insensibles, maigreur…). Elle est consacrée aussi aux techniques d’extorsion des confessions, des preuves (notamment la pesée et l'ordalie par l'eau glacée) et à la pratique de la torture durant les interrogatoires : il est en particulier recommandé d’utiliser le fer rougi au feu pour le rasage du corps en son entier des accusées, afin de trouver la fameuse « marque du Diable », qui prouverait leur supposée culpabilité.

Réception et condamnation de l'ouvrage

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On en a recensé au moins 34 rééditions entre 1487 et 1669, période principale de la chasse aux sorcières et des polémiques et débats qu'elle entraîna.

L'ouvrage fut interdit par l'Eglise catholique peu après sa parution. Il fut mis à l'Index car contraire aux enseignements catholiques en matière de démonologie. Le pouvoir des démons de causer des catastrophes naturelles, par exemple, est une idée qui fut déclarée fausse lors du premier concile de Braga vers 561 dans le canon 8.

Dans la culture populaire

On retrouve plusieurs mentions du traité dans les fictions modernes :

  • L'ouvrage est au coeur de l'intrigue du roman Le Grimoire de Jane Stanton Hitchcock ;
  • Le scénario de la bande dessinée Le Marteau des sorcières est basé sur ce traité ;
  • La trame de la comédie musicale norvégienne Which Witch provient du traité ;
  • L'ouvrage est régulièrement cité par le personnage du sorcier vaudou (Omar) dans le Service après-vente des émissions ;
  • Le 9e épisode de la 3e saison de la série télévisée Supernatural se nomme Malleus Maleficarum (Les Reines du Sabbat en français) ;
  • L’ouvrage est mentionné dans le Da Vinci Code, et a donné son nom à une des compositions de Hans Zimmer dans la bande originale du film.
  • Le nom de l'ouvrage est psalmodié par Dead (ancien chanteur du groupe de black métal Mayhem) au début d'une répétition
  • Il est matérialisé par un véritable marteau dans la bande dessinée Requiem, Chevalier Vampire d'Olivier Ledroit et Pat Mills;
  • C'est aussi le titre d'une chanson du groupe de punk-rock californien gothique AFI.
  • Dans le roman D'Outre Tombre de Jeaniene Frost (tome 6 des aventures de Chasseuse de la nuit), l'auteure cite le livre comme source principale de son intrigue.
  • Le nom de l'ouvrage a également été utilisé pour le premier album du groupe de Death metal néerlandais Pestilence, Malleus Maleficarum.
  • L'ouvrage est mentionné dans le roman Le Testament de Sherlock Holmes de Bob Garcia.
  • L'ouvrage est au centre de l'intrigue du polar islandais Ultimes Rituels d'Yrsa Sigurdardottir
  • En 1970, le groupe de rock progressif anglais Van Der Graaf Generator[6] enregistre la chanson White Hammer qui cite l'ouvrage
  • En 2013, à la suite de la réhabilitation d'Anna Göldin en 2008 en Suisse, Angella Marzullo réalise une œuvre audio intitulée Malleus Maleficarium[7] dans le cadre d'une résidence d'artiste au Radio Picnic[8] de Berlin.
  • En 2017, Fabien Cerutti donne ce titre au troisième tome du Cycle Le Bâtard de Kosigan.

Notes et références

  1. Jean-Pierre Dedieu (compte-rendu de « Henri Institoris et Jacques Sprenger, Le marteau des sorcières (Malleus Maleficarum) traduction d'Amand Danet, Grenoble, Jérôme Millon, 1990 » dans Annales. Économies, Sociétés, Civilisations, 1991, vol. 46, n° 6, pp. 1294-1295.)
  2. Marie-Pascale Rauzier, Lieux mystérieux et insolites en Alsace, Rennes, Éditions Ouest France, , 144 p. (ISBN 978-2-7373-5812-8), p. 116
  3. Google Books, livre "Raison d'Etat, raison de Dieu: politique et mystique chez Jeanne de France" par Jean-François Drèze, édition Beauchesne
  4. Google Books, livre "Procréer: Histoire et représentations" par Claude Humeau, édition Odile Jacob
  5. Des « détecteurs de sorciers » et « détecteurs de sorcières », généralement d'anciens sorciers repentis, étaient habilités à les déceler aux XVIe et XVIIe siècles
  6. « Van der Graaf Generator », Wikipédia, , p. 1 (The Least We Can Do is Wave to Each Other, consulté le )
  7. (en-US) « Radio Picnic » Archive » ANGELA MARZULLO » (consulté le )
  8. (en-US) « Radio Picnic » (consulté le )

Annexes

Bibliographie

Articles connexes

Liens externes

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