Helen Keller

Helen Keller, née le à Tuscumbia (Alabama) et morte le à Easton (Connecticut), est une autrice, conférencière et militante politique américaine.

Pour les personnes ayant le même patronyme, voir Keller.

Bien que sourdaveugle à l'âge de deux ans à la suite d'une congestion cérébrale, elle parvint à devenir la première personne handicapée à obtenir un diplôme universitaire. Sa détermination a suscité l'admiration, principalement aux États-Unis. Elle a écrit douze livres et de nombreux articles au cours de sa vie. Son autobiographie Sourde, muette, aveugle : histoire de ma vie a inspiré la pièce Miracle en Alabama, puis le film, du même nom. L’histoire décrit comment sa professeure Anne Sullivan a réussi à briser l’isolement dans lequel se trouvait plongée Helen Keller par une absence presque totale de langage, permettant ainsi à la jeune fille de s’épanouir en apprenant à communiquer.

Autrice prolifique, Helen Keller a beaucoup voyagé et était franche dans ses convictions[pas clair]. Membre du Parti socialiste d'Amérique et d’Industrial Workers of the World, elle a fait campagne pour le droit de vote des femmes, les droits relatifs au travail, le socialisme, l’antimilitarisme et d’autres causes similaires. Elle prouva au monde que les personnes sourdes pouvaient apprendre à communiquer. Elle enseigna aussi que les personnes sourdes étaient capables de faire des choses que les personnes entendantes pouvaient faire. Keller est l’une des personnes sourdes les plus connues de l’Histoire principalement aux États-Unis, et un modèle pour beaucoup de personnes sourdes dans le monde.

Biographie

Jeunesse

Helen, à gauche, avec sa maîtresse Anne Sullivan, en 1888.

En , âgée d'un an et demi, Helen Keller souffre d'une congestion cérébrale qui la rend sourde et aveugle à la fois. Brusquement coupée du monde, elle a du mal à communiquer avec ses proches, notamment ses parents[1].

Plus tard, en 1886, ses parents font appel à Anne Mansfield Sullivan (1866-1936), jeune éducatrice exerçant ses fonctions à l'école pour aveugles Perkins, dont ils avaient entendu parler par Sir Alexander Graham Bell et qui souffre de problèmes oculaires[1]. Trop jeune à leur goût, Anne doit s'imposer. Elle s'engage à rester un temps déterminé, et à partir sans demander quoi que ce soit si rien n'évolue.

Les parents d'Helen cédant toujours à ses caprices, Anne n'a aucune influence sur elle. Elle réussit à s'isoler avec Helen dans une grange appartenant à la famille. Durant plusieurs jours, elle consacre son temps à lui esquisser des signes dans la paume de la main juste avant de lui présenter un objet.

Cet isolement permet à Anne de laisser Helen faire ses crises quand elle n'a pas ce qu'elle veut, pensant qu'elle finirait par utiliser des signes pour demander un objet précis.

À la fin du temps accordé par les parents, ils constatent qu'Helen a fait de gros progrès concernant la communication et l'autorité. Un jour qu'Anne et Helen sont dans le jardin, elles s'approchent du puits. Anne fait toucher de l'eau à Helen et lui épèle sans cesse le mot : eau (w-a-t-e-r en anglais)[1]. Brusquement, Helen comprend, une porte s'ouvre pour elle. Alors que la jeune handicapée a en sa possession une tasse, elle la laisse tomber et prend Anne par la main. Elle l'emmène partout dans le jardin pour savoir le nom de toutes ces choses connues uniquement par le toucher d'Helen. C'est ainsi que la jeune fille apprend à communiquer. Plus tard, elle apprend le braille et la langue des signes, pouvant ainsi lire[1].

Anne Sullivan a réussi son pari. Par la suite, elle lui apprend à lire, à parler et à écrire[1].

Études

Helen Keller lors de sa remise de diplôme au Radcliffe College.

Helen Keller entre en à l’Institut Perkins pour Aveugles.

Six ans plus tard, Anne Sullivan et elle déménagent à New York pour entrer à l’Horace Mann School for the Deaf and Hard of Hearing (en), afin d'apprendre de Sarah Fuller.

En 1896, elles retournent dans le Massachusetts, où Helen intègre l’École de Cambridge pour Jeunes Filles avant d’être admise, en 1900, au Radcliffe College, Université d’Harvard.

Son éducation est payée par le magnat pétrolier, Henry Huttleston Rogers et sa femme Abbie, après une introduction par Mark Twain qui la leur présenta. En 1904, à l’âge de 24 ans, Helen Keller est diplômée de Radcliffe, devenant la première personne aveugle et sourde à obtenir une Licence en Lettres[2].

Compagnes et vie privée

Helen Keller et Anne Sullivan en 1913.

Anne Sullivan resta la compagne d'Helen Keller bien après lui avoir enseigné, en l'aidant notamment lors de ses études en lui traduisant les textes en braille et l'accompagnant dans sa vie de tous les jours ainsi que lors de ses nombreux déplacements. Elle épouse en 1905 John Macy, mais malheureusement sa santé se dégrade de plus en plus à partir de 1914. Elles emploient donc pour les aider aux travaux de la maison Polly Thomson (), jeune femme originaire d’Écosse qui n’avait aucune expérience des personnes sourdes ou aveugles auparavant. Elle est rapidement promue en plus de ses autres tâches au rang de secrétaire, avant de remplacer Anne, devenue trop malade, aux côtés d'Helen avant de toutes les trois déménager à Forest Hills dans le Queens. Anne Sullivan meurt en 1936 après un coma dû à un infarctus du myocarde, avec Helen à ses côtés tenant sa main. Après cela, Helen et Polly déménagent dans le Connecticut. Elles voyagent dans le monde entier et réunissent des fonds pour les personnes ayant une déficience visuelle. En 1957 Polly a une attaque dont elle ne se remettra jamais complètement et elle meurt en 1960. Winnie Corbally, une infirmière qu’elles avaient précédemment engagée pour s’occuper de Polly Thomson en 1957, resta après la mort de celle-ci et fut la compagne de Helen Keller pour le reste de sa vie.

Vers l'âge de 30 ans, Helen keller se fiança secrètement avec Peter Fagan, jeune reporter au Boston Herald, envoyé chez elle pour devenir son secrétaire privé alors qu'Anne était malade. Elle tenta de fuguer avec lui mais cela n'aboutit pas[3].

Elle est décédée dans son sommeil, le , à son domicile, Arcan Ridge, dans le Connecticut.

Activités et honneurs

Helen Keller crée une fondation pour personnes handicapées et milite au sein de mouvements socialistes, féministes et pacifistes. Elle soutient notamment le syndicat ouvrier IWW et se prononce en 1916 pour une guerre révolutionnaire mettant fin à la Première Guerre mondiale et assurant le triomphe du prolétariat[4]. Elle écrit des essais politiques, des romans et des articles de journaux. Par ailleurs, la vue d'Anne Sullivan, déjà fragile, se dégrade. À la mort d'Anne, Helen écrivit un livre sur sa courageuse « maîtresse ».

En 1915, elle fonde avec George Kessler l'organisation Helen Keller International (HKI) afin de soutenir la prévention de la cécité et la réduction de la malnutrition dans le monde. HKI est aujourd'hui présente dans 22 pays[5].

En 1925, Helen Keller assiste à la convention du Lions Clubs International (l'organisation de Clubs-Service fondée 8 ans plus tôt, en 1917, par l'homme d'affaires philanthrope de chicago Melvin Jones) et met les Lions au défi de devenir les « chevaliers des aveugles dans la croisade contre les ténèbres »[6],[7].

Les Lions acceptèrent de relever le défi et sont depuis lors engagés dans des programmes pour la vue visant à combattre la cécité évitable.

Elle a reçu la médaille présidentielle de la Liberté des mains du président américain Lyndon B. Johnson, en 1964.

En 1971, le Conseil d'administration du Lions Clubs International déclare le 1er juin la « Journée Helen Keller ». À l'occasion de cette journée, les Lions du monde entier organisent des projets autour de la vue.

Toutes les archives d'Helen Keller stockées à New York ont été perdues lors de la destruction des Tours jumelles du World Trade Center par les attentats du 11 septembre.

Les Archives d'Helen Keller appartiennent à l'American Foundation for the Blind (en).

Discours de 1925 à la convention internationale du Lions Clubs International

Helen Keller vers 1920.

Le discours historique de Helen Keller à la convention internationale du Lions Clubs International en 1925 a marqué le début d'une ère d'œuvres sociales et de soutien pour la préservation de la vue qui devait devenir pour des décennies la carte d'identité des Lions. Son discours est reproduit intégralement ci-dessous.

Cedar Point, Ohio, États-Unis

Chers Lions et Lionnes,

Je suppose que vous connaissez cette légende qui décrit la chance comme une jeune femme capricieuse ne frappant à chaque porte qu'une seule fois. Si la porte tarde à s'ouvrir, la jeune femme passe son chemin, pour ne jamais revenir. C'est ainsi. Les femmes les plus charmantes n'attendent pas. Vous devez agir vite pour ne pas les laisser filer.

Je suis votre chance. Je frappe à votre porte. Je veux être adoptée. La légende n'explique pas ce que vous devez faire si plusieurs belles occasions se présentent à la même porte. J'imagine que vous devez choisir celle qui vous plaît le plus. J'espère que vous allez m'adopter. Je suis la plus jeune ici et ce que j'ai à vous offrir regorge d'occasions de vous illustrer par vos actions.

La Fondation américaine pour les aveugles n'a que quatre ans d'existence. Elle a été créée en réponse aux besoins urgents des aveugles, qui en sont eux-mêmes les instigateurs. Sa portée et son importance sont nationales et internationales. Elle incarne les pensées les plus généreuses et les plus éclairées que nous ayons jamais inspirées. Sa mission est de valoriser les personnes aveugles dans nos sociétés, en leur apportant une nouvelle valeur économique et en leur offrant la satisfaction d'une activité normale.

Essayez d'imaginer ce que vous éprouveriez si vous étiez soudainement frappé de cécité. Imaginez-vous trébuchant et tâtonnant à midi comme si c'était la nuit, votre travail et votre indépendance perdus ! Dans ces ténèbres, ne seriez-vous pas heureux qu'un ami vous prenne par la main en vous disant : « Viens avec moi et je t'apprendrai à faire certaines choses que tu avais l'habitude de faire quand tu pouvais voir » ? C'est précisément le genre d'ami que la Fondation américaine deviendra pour tous les aveugles de ce pays, si les personnes voyantes lui apportent le soutien dont elle a besoin.

Vous connaissez mon histoire : comment quelques mots transmis par les doigts d'un autre, un rayon de lumière d'une autre âme, ont percé l'obscurité de mon esprit et m'ont permis de me découvrir, de découvrir le monde et Dieu. Grâce à mon institutrice, qui a appris à me connaître pour me libérer de cette prison sombre et silencieuse dans laquelle j'étais murée, je suis désormais capable d'agir pour moi-même et pour les autres. C'est d'attention, plus que d'argent, dont nous avons besoin. Sans la sympathie et l'attention, le geste est vide. Si vous vous sentez sincèrement concernés, si nous pouvons faire en sorte que les citoyens de ce grand pays s'impliquent réellement, les aveugles pourront triompher de leur cécité.

Je m'adresse à vous, Lions, pour vous offrir l'occasion d'agir, en encourageant et en soutenant le travail de la Fondation américaine pour les aveugles. Aidez-moi à avancer vers ce jour où la cécité évitable sera éradiquée, où chaque enfant sourd ou aveugle bénéficiera d'une éducation digne et où aucun aveugle, homme ou femme, ne sera laissé sans assistance. J'en fais appel à vous, Lions, qui voyez, qui entendez, avec toute votre force, votre courage et votre bienveillance. Devenez les Chevaliers des aveugles dans la croisade contre les ténèbres.

Je vous remercie.[8]

Œuvres

  • Sourde, muette, aveugle : histoire de ma vie, première publication en 1903[9], traduction de l'anglais par A. Huzard, Payot & Rivages, 2001 (ISBN 2-228-89413-3)
  • Ma libératrice : Anne Sullivan Macy, Payot, 1956
  • Ma religion, préface de Benjamin Vallotton, libr. Fischbacher, 1931

Adaptations

Télévision

Théâtre

Films

Bande dessinée

Hommages

  • 1973 : cérémonie d'admission au National Women's Hall of Fame[12].
  • Un festival annuel nommé The Helen Keller festival est tenu à Tuscumbia, sa ville natale.
  • En France, une rue de Caen porte le nom d'Helen Keller ainsi qu'un établissement public autonome hospitalier au Havre.
  • Un EAJE est construit à Villeurbanne en son honneur.[13]

Dans la culture populaire

Pièce de monnaie commémorative.
  • Dans l'épisode 1 du drama japonais My Boss My Hero, l'histoire d'Helen Keller est cité pour encourager le protagoniste à ne pas abandonner.
  • Dans le manga Laura ou la passion du théâtre (Glass no Kamen), l'histoire d'Helen Keller est la principale intrigue : Laura et sa rivale sont en compétition pour le rôle d'Helen Keller (épisode 19 à 23).
  • Thanksgiving, Helen Keller! The Musical en version originale, est le treizième épisode de la quatrième saison de la série animée South Park.
  • 8 Footsteps, le troisième épisode de la onzième saison de la série télévisée Les Enquêtes de Murdoch place Helen Keller et son éducatrice au centre de son intrigue.
  • La chanson Jacksonville sur l'album Illinois de Sufjan Stevens fait allusion à Helen Keller.
  • Dans un épisode de la série TV Esprits Criminels, sa citation est mentionnée : « De nombreuses personnes se font une fausse idée du bonheur. On ne l'atteint pas en satisfaisant ses désirs, mais en se vouant à un but louable. »

Références

  1. Charles Gardou, « Helen Adams Keller : de la fillette sourde et aveugle à l'écrivain et à la conférencière », Reliance, vol. no 16, no 2, 0000-00-00, p. 106–114 (ISSN 1774-9743, lire en ligne, consulté le ).
  2. Hoskyns 2011, p. 165.
  3. Dorothy Herrmann, Helen Keller : a life, A. Knopf, (ISBN 0-679-44354-1, 978-0-679-44354-4 et 0-226-32763-9, OCLC 38527933, lire en ligne)
  4. (en) , Interview au New York Tribune, le .
  5. (en) About Us, sur le site d'Helen Keller International.
  6. « Helen Keller ».
  7. « Lions clubs, un siècle au service des autres », supplément de quatre pages au n°3524 de Paris Match, semaine du 1er au 7 décembre 2016.
  8. http://lionsclubhelenkeller.fr/discours-dhelen-keller-lors-de-la-convention-internationale-de-1925-cedar-point-ohio-etats-unis-30-juin-1925/
  9. (en) « Helen Keller's Life and Legacy », sur Helen Keller International (consulté le ).
  10. « Deliverance (1919) » (consulté le ).
  11. Philippe MAGNERON, « Annie Sullivan & Helen Keller », sur www.bedetheque.com (consulté le ).
  12. (en-US) « Keller, Helen », sur National Women’s Hall of Fame (consulté le )
  13. « Plaquette terrain des sœurs »

Voir aussi

Bibliographie

  • Yvonne Pitrois, Helen Keller, Une nuit rayonnante, 1922
  • Margery Weiner, Helen Keller, Edito-Service, 1971, 294 p.
  • Anna Marchon, Helen, la petite fille du silence et de la nuit, Bayard Jeunesse, Paris, 10e éd. 2003, 30 p.
  • Lorena A. Hickok, L'histoire d'Helen Keller, Pocket Jeunesse, Paris, 1998, 224 p. (ISBN 2-266-08662-6).
  • Margaret Davidson, La métamorphose d'Helen Keller, Gallimard Jeunesse, Paris, 2001, 128 p. (ISBN 2-07-055597-6).

Articles connexes

Liens externes

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