Groupe Front national – Rassemblement national

Le groupe Front national – Rassemblement national (FN-RN) est un groupe parlementaire de l'Assemblée nationale française rassemblant les députés du Front national (FN) et des membres du CNIP de 1986 à 1988.

Pour les articles homonymes, voir Front national et Rassemblement national.

Groupe Front national – Rassemblement national
Chambre Assemblée nationale
Législature(s) VIIIe (Cinquième République)
Partis membres Front national
Centre national des indépendants et paysans
Président Jean-Marie Le Pen
Député de Paris
Représentation
32  /  577
(ne siègent plus)

Historique

Les députés du FN-RN siègent durant la VIIIe législature, élue à l'issue du scrutin législatif du 16 mars 1986 et se terminant le , à la suite de la dissolution de l'Assemblée nationale par le président François Mitterrand, réélu à l'élection présidentielle.

Le seuil nécessaire à la constitution d’un groupe à l'Assemblée est alors de 30 membres[1].

Le groupe compte 32 députés du FN et 3 députés apparentés membres du CNIP lors de sa création ; à la fin de la législature, il rassemble 30 députés frontistes, et 2 apparentés membres du CNIP[réf. nécessaire]. Ils constituent 6 % de l'effectif de l'Assemblée nationale. Yann Piat est la seule femme du groupe. Sur les 35 députés élus en 1986, plus de la moitié a rejoint le FN depuis moins de deux ans[1].

Ce groupe est principalement constitué de nouveaux élus, car seulement 6 d'entre eux (Pascal Arrighi, Charles de Chambrun, Gabriel Domenech, Édouard Frédéric-Dupont, Jean-Marie Le Pen, Olivier d'Ormesson) ont été députés auparavant. Édouard Frédéric-Dupont est l'unique membre du groupe à avoir été député durant la législature précédente. Le groupe compte deux anciens ministres, Edouard Frédéric-Dupont et Charles De Chambrun. Trois membres (Yvon Briant, Édouard Frédéric-Dupont, Michel de Rostolan) adhèrent au Centre national des indépendants et paysans[2].

Afin de présenter des candidats dans tous les départements, Jean-Marie Le Pen s'est dit prêt, « tout en préservant son identité, à ouvrir ses listes à un certain nombre de candidats “divers droite, socio-professionnels et cercles d’opinion” représentatifs du pays réel et soucieux de défendre la France et les Français d’abord ». Valérie Igounet relève que « cette stratégie, inimaginable dans ses premières années d’existence, pose problème entre la base et les nouveaux encartés. [...] Au sein du FN, on critique ces hommes qui, en se faisant élire sous l’étiquette RN, auraient non seulement trahi la base militante du parti et l’électorat frontiste mais aussi pris la place des militants de la première heure [...] »[3].

Organisation

Direction

Le groupe est présidé par Jean-Marie Le Pen, député de Paris et président du Front national. Son secrétaire général est Jean-Yves Le Gallou[4], assisté de Françoise Bernard.

Composition au début de la législature

Parti Députés membres Députés apparentés Total
Front national 32 0 32
CNIP 0 3 3
Total 32 3 35

Députés ayant quitté le groupe pendant la législature

Composition à la fin de la législature

Parti Députés membres Députés apparentés Total
Front national 30 0 30 (2)
CNIP 0 2 2 (1)
Total 30 (2) 2 (1) 32 (3)

Droits

Le groupe ne dispose pas des droits accordés plus tard aux groupes minoritaires à l'Assemblée, et ne peut par exemple inscrire ses textes à l'ordre du jour[6][pourquoi ?].

Positionnement

Le RPR et l'UDF se sont engagés à gouverner ensemble sans le FN avant les élections[7]. Jean-Marie Le Pen décide de situer son groupe dans l'opposition au gouvernement de Jacques Chirac[1]. Le , le groupe refuse ainsi d’accorder le vote de confiance à ce dernier, ce qui entraîne la démission de Bruno Chauvierre puis l'abandon du poste de vice-président du groupe parlementaire par Yvon Briant : d'après Valérie Igounet, « leur départ et le refus de voter la confiance au gouvernement Chirac déstabilisent des électeurs FN, avant tout poussés par leur rejet des politiques socialiste et communiste. [...] Au printemps 1986, de nombreux adhérents retournent leurs cartes au FN »[3].

Jacques Chirac met en place la stratégie dite du « cordon sanitaire » en désignant personnellement les députés de la majorité chargés de côtoyer ceux du groupe FN, et en demandant à sa majorité de ne pas leur adresser la parole[6]. Dans son premier discours à l'Assemblée, Jean-Marie Le Pen dénonce « le mensonge, les calomnies, les outrages et la désinformation » qui ont selon lui marqué la campagne électorale, puis accuse Jacques Chirac d'avoir, « en quelque sorte, bravé le pays en nous frappant d'une espèce d'apartheid politique, matérialisé de façon naïve, hier, par le fait que les bancs qui nous entouraient n'étaient pas occupés, comme si vous pensiez que nous puissions transmettre le sida ! — un sida politique, s'entend, car j'espère que dans ce domaine, nous sommes au-dessus de tout soupçon ! »[6] Jean Lecanuet salue « un discours bien fait » et Valéry Giscard d'Estaing un discours « chaleureux et vivant »[6]. Tout en décidant de ne pas accorder sa confiance au gouvernement de Jacques Chirac, Jean-Marie Le Pen se situe dans une « majorité anti-marxiste », anti-socialiste, et se dit prêt à voter au cas par cas des textes de la majorité[6]. D'après Nicolas Lebourg, Jean-Marie Le Pen a espéré « être appelé au gouvernement, rêvant du ministère de la Défense », et s'avère partie prenante de cette stratégie du cordon sanitaire car il craint que ses élus ne soient « tentés de rejoindre des partis plus faciles à porter socialement et distribuant plus de capital social et financier »[8],[9].

En deux ans, le groupe dépose 63 propositions de loi[1],[3]. D'après Valérie Igounet, « les mesures proposées reprennent le principe phare du FN, celui de la préférence nationale. Elles défendent, dans leur globalité, la priorité des Français sur les étrangers, que ce soit pour les accès aux HLM, pour les prestations familiales, pour les allocations vieillesse, etc. »[3] Elles visent notamment à rétablir la peine de mort[1], sont hostiles à la fiscalité ou prônent la suppression de l'impôt sur le revenu[10]. Parmi les premières figurent celles de Michel de Rostolan « favorables à la vie et visant à supprimer le remboursement de l’avortement » par la Sécurité sociale[11]. Jean-Marie Le Pen dépose une proposition de loi visant à instaurer le référendum d'initiative populaire, le [12].

Les députés FN-RN s'abstiennent lors du vote sur l'Acte unique européen en 1986[13].

Guy Birenbaum estime qu'« au sein du groupe parlementaire FN, ouverture et radicalisation ont [...] été modulées et mobilisées par des députés différents, non seulement selon une répartition tactiquement pensée des positions et des rôles en fonction des questions inscrites à l'agenda politique et parlementaire, des compétences des uns ou des autres, mais également selon leurs sensibilités et intérêts particuliers »[14]. Si bon nombre d'analystes ont comparé ce groupe, lors de sa création, aux poujadistes entrés à l'Assemblée nationale en 1956, Guy Birenbaum souligne que « la structuration partisane réalisée par le FN depuis 1984 et les profils de nombreux députés du Rassemblement national attestent de fortes différences entre l'intrusion forte mais maladroite des poujadistes à l'Assemblée et l'entrisme pensé des nationaux-frontistes. Sans revenir de façon exhaustive sur l'histoire du poujadisme, on peut dire que les 52 députés entrant au Palais bourbon le 2 janvier 1956 cumulaient d'emblée, pour la plupart, des handicaps propres à leur interdire tout espoir de professionnalisation politique »[15].

Postérité

Avec les élections législatives de 1988 qui voient le rétablissement du scrutin uninominal majoritaire à deux tours, Yann Piat et Édouard Frédéric-Dupont sont les seuls membre du groupe à conserver leur siège[1].

Parmi les 35 députés membres, 25 rompent avec le FN à plus ou moins long terme, dont certains en cours de mandat[1]. Sur les 17 encore vivants en 2016, seuls deux sont alors toujours membres du FN[1],[n 2].

Lors du XVIe congrès du Front national, Marine Le Pen propose de renommer le parti en « Rassemblement national » en faisant référence au groupe parlementaire de 1986 et à « la grande période d’ouverture, d’alliances du Front national »[16]. Le changement de nom est officialisé le .

Notes et références

Notes

  1. Siège en remplacement d'Olivier d'Ormesson qui est élu député européen.
  2. Jean-François Jalkh et Bruno Gollnisch.

Références

  1. Dominique Albertini, « Trente ans après, les 35 députés FN de 1986 sont presque tous partis », sur www.liberation.fr, (consulté le ).
  2. Laurent de Boissieu, « Affaire Bourdouleix : le CNIP, entre droite et extrême droite », sur La Croix.fr, (consulté le ).
  3. Valérie Igounet, « 1986 : le FN entre à l'Assemblée nationale », sur blog.francetvinfo.fr/derriere-le-front, (consulté le ).
  4. « Déclaration de M. Jean-Yves Le Gallou, secrétaire général du groupe Front national à l'Assemblée nationale […] », sur Vie Publique.fr, (consulté le ).
  5. « Liste alphabétique des députés de la VIIIe législature 1986-1988 », sur assemblee-nationale.fr.
  6. Jean-Marie Pottier, « La saga des députés Le Pen, une histoire du Front national », sur Slate, (consulté le )
  7. Birenbaum 1992, p. 99
  8. Nicolas Lebourg, « Le Front républicain est un mythe. Et il ne suffit plus pour repousser le Front national », sur Slate, .
  9. Nicolas Lebourg, Lettre aux Français qui croient que 5 ans d'extrême droite remettraient la France debout, Les échappés, , p. 33.
  10. Delphine Espagno et Stéphane François, « Le Front national et les services publics », dans Sylvain Crépon, Alexandre Dézé, Nonna Mayer, Les Faux-semblants du Front national : sociologie d'un parti politique, Presses de Sciences Po, , p. 213.
  11. Valérie Igounet, « Retour sur le passé: le FN, défenseur des droits des femmes? », sur Mediapart, (consulté le ).
  12. Laurent de Boissieu, « Le RIC, de la gauche autogestionnaire à l’extrême droite », sur la-croix.com, (consulté le ).
  13. Emmanuelle Reungoat, « Le Front national et l'Union européenne », dans Sylvain Crépon, Alexandre Dézé, Nonna Mayer, Les Faux-semblants du Front national : sociologie d'un parti politique, Presses de Sciences Po, , p. 229.
  14. Birenbaum 1992, p. 100
  15. Birenbaum 1992, p. 102
  16. AFP, « Les Républicains et le Front national engagés dans une «lutte à mort» », sur liberation.fr, (consulté le ).

Voir aussi

Articles connexes

Bibliographie

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