Femme rabbin

L’ordination des femmes en tant que rabbins existe depuis le XXe siècle dans certaines branches du judaïsme.

Le rôle des femmes dans le rabbinat a été vivement débattu au sein du peuple juif. Les mouvements libéraux, reconstructionnistes et massortis acceptent le rabbinat des femmes, tandis que le courant orthodoxe dans sa majorité rejette leur ordination. Les premières traces de femmes souhaitant devenir rabbin remontent aux années 1860[1].

Historique

Le débat sur l’accession des femmes au rabbinat, au sein des divers courants du judaïsme se base sur la question du respect de la tradition et des lois du judaïsme (halakha)[2].

Tandis qu'un courant autorise depuis son commencement l’ordination des femmes (judaïsme reconstructionniste) (un mouvement relativement récent), le débat sur l’ordination des femmes provoque un temps une polémique au sein d’autres mouvements (Mouvement Massorti, judaïsme libéral), qui finalement les intègrent pour la plupart au sein de cette structure religieuse[3].

Le mouvement orthodoxe rejette l’ordination des femmes dans sa majorité. Il existe aujourd'hui plusieurs institutions orthodoxes remettant l'ordination aux femmes, mais la plupart des institutions orthodoxes rejettent ces actions et excluent partiellement les femmes des séminaires théologiques et des écoles rabbiniques.

Les femmes rabbins restent très peu nombreuses en Europe, à l’inverse des États-Unis, où les courants libéraux possèdent une plus grande importance.

De même, aux États-Unis, le premier rabbin trans, Reuben Zellman (en), est ordonné, le [4]. Il est rabbin au temple Beth El de Berkeley (Californie)[5].

Mouvement du judaïsme réformiste

Dès le départ, le mouvement réformiste permet aux hommes et aux femmes de prier ensemble - une décision fondée sur la philosophie égalitaire. Les dirigeants du mouvement proposent l'idée de femmes rabbins dans les années 1800, mais ce n'est qu'en 1922 que la question des femmes dans le rabbinat est discutée formellement par la Conférence centrale des rabbins américains (CCRA). La discussion porte sur deux questions: La position des femmes rabbins dans le judaïsme traditionnel, et la question de savoir si le mouvement de réforme doit suivre la tradition. À l'époque les chefs religieux réformistes considèrent l'ordination des femmes comme une violation de l'Halakha, et craignent que l'octroi aux femmes d'une place dans le rabbinat réformiste « donnerait au judaïsme traditionnel une bonne raison de remettre en question notre autorité… »[6]. En outre, le rabbinat réformiste de l'époque estime qu'en admettant les femmes au rabbinat, ceci serait préjudiciable à la vie familiale car le rabbinat exigerait à des femmes de choisir entre le rôle de rabbin et la tâche de mère de famille juive[6]. Le rabbinat réformiste vote donc contre une réforme permettant aux femmes de devenir rabbins[6].


Le rôle des femmes, cependant, change radicalement dans les sociétés occidentales durant le XXe siècle, et des femmes se battent pour obtenir dans la société, y compris le droit de vote. Le Conseil national des femmes juives (en langue anglaise National Council of Jewish Women (NCJW) et le groupe féministe Hadassah sont créés au cours de cette période, ouvrant la voie aux femmes pour participer dans des domaines traditionnellement masculins et dans des institutions patriarcales, telles que le rabbinat[6].

Mouvement Massorti

Le mouvement Massorti, fondé d'autre part sur le prémisse que la Halakha est en évolution, tient de nombreux débats internes mais la décision de donner aux femmes l'accès au rabbinat cause également des dissensions parmi ses leaders, ce qui entraîne de nombreux érudits talmudiques à quitter le mouvement pour former leur propre institution. En 1973, le Committee on Jewish Laws and Standards (CJLS) adopte une loi permettant aux femmes de participer activement dans le Minyan. Mais un an plus tard, en 1974, le comité vote contre l'accès des femmes au rabbinat. La question est de savoir si les femmes peuvent être en mesure de remplir adéquatement leurs rôle et taches de rabbin : le Comité décide alors d'effectuer une étude plus approfondie sur la question. En , l'Assemblée rabbinique et le Jewish Theological Seminary créent conjointement la Commission pour l'étude de l'ordination des femmes rabbins. Un an plus tard, en 1978, onze membres de la commission (tous des hommes) conviennent qu'« il n'y a aucune objection halakhiques aux actes de formation et d'ordination d'une femme d'être un rabbin, un pasteur et un enseignant. » Les conclusions de la commission sont présentés à l'Assemblée rabbinique. Mais la question est abandonnée, et la controverse continue au sein du Mouvement Massorti. Au printemps 1983, le rabbin Gershon Cahen, chancelier du mouvement Massorti annonce qu'il va soulever la question à nouveau devant le Jewish Theological Seminary. En , le séminaire vote pour admettre les femmes à l'école rabbinique[6]. Peu après, le Mouvement Massorti ouvre le collège rabbinique aux femmes désirant devenir rabbin.

Mouvement reconstructionniste

Le Mouvement reconstructioniste donne accès au rabbinat aux femmes dès sa création. En 1968, les femmes sont acceptées sans controverse au Collège rabbinique reconstructionniste[6],[7]. En 2005, 24 des 106 synagogues du mouvement aux États-Unis ont à leur direction des femmes rabbins[8].

De plus, les femmes rabbins du mouvement reconstructionniste contribuent à la création de rituels religieux[9] : des rituels sont créés pour les naissances, les mariages, les divorces et la ménopause[10]. Plusieurs rabbins du mouvement reconstructionniste se sont engagés à créer une liturgie en accord avec les idées d'égalité femmes-hommes[11],[12].

Mouvement orthodoxes

Certaines femmes ont franchi les barrières traditionnelles pour devenir rabbins. Au moins deux femmes ont reçu la semikha : Mimi Feigelson, une élève du rabbin Shlomo Carlebach, est ordonnée en par un panel de trois rabbins[13]. Cependant, Feigelson ne peut utiliser le titre « rabbi » par respect pour le rabbinat[13]. Par la suite à Jérusalem, en , Eveline Goodman-Thau est ordonné par le rabbin Jonathan Chipman[13]. Elle non plus ne peut utiliser le titre de « rabbi ».

Ces dernières années, 2008-2011, le nombre de femmes suivant des cours dans des yeshivot est en augmentation importante en Israël : l'Institut Shalom Hartman, fondé par le rabbin David Hartman a ouvert en 2009 un programme qui accorde la semikha aux femmes. Ces possibilités d'apprentissage religieux ont conduit à une nouvelle classe de femmes savantes orthodoxes. Le rabbin Aryeh Strikovski a travaillé dans les années 1990 avec le rabbin Avraham Shapira, pour lancer le programme de formation des femmes orthodoxes Toanot halakhiques auprès des tribunaux rabbiniques. Ils ont depuis formé 72 femmes. En outre, le rabbin Strikovsky a accordé l'ordination de Haviva Ner-David en 2006[14]. Elle non plus ne peut utiliser le titre de « rabbi ».

Aux États-Unis, la Yeshivat Maharat, se réclamant de l'orthodoxie moderne, est créé en 2009 par le rabbin Avi Weiss et donne l'ordination rabbinique aux femmes, en leur laissant le choix de leur titre : « Rabbi », « Rabba », « Maharat », ou « Darshanit ».

Quelques femmes rabbins

Au XVIIe siècle

Au XVIIIe siècle

Au XXe siècle

Rabbi Regina Jonas, première femme rabbin.

Au XXIe siècle

  • Séverine Sokol, deuxième rabbin française, ordonnée en 2003 au Leo Baeck College - Centre For Jewish Education de Londres, et première femme rabbin exclusivement d'origine sépharade d'Afrique du Nord. Elle a exercé en Grande-Bretagne et exerce actuellement aux États-Unis.
  • Floriane Chinsky, troisième rabbin de nationalité française, ordonnée en 2004, exerçant à Bruxelles depuis 2005 et fondatrice de la Communauté juive massorti Chir Hadach (Bruxelles), elle est la quatrième femme rabbin à exercer aujourd'hui à Paris au MJLF depuis 2014.
  • Célia Surget (en), deuxième femme rabbin en France, ordonnée en 2007, qui a travaillé quatre ans au Mouvement juif libéral de France[16]. Elle exerce aujourd'hui à Londres.
  • Delphine Horvilleur, troisième femme rabbin en France, ordonnée en 2008 à New York, exerce au MJLF.
  • Margit Oelsner-Baumatz, première femme rabbin en Argentine, ordonnée en 2010.
  • Sandra Lawson, première rabbin ouvertement homosexuelle, ordonnée en 2018[17].
  • Daniella Touati, ordonnée rabbin en 2019 au Leo Baeck College à Londres et exerçant dans la communauté libérale Keren Or à Lyon[18].
  • Iris Ferreira, première femme ordonnée rabbine en France, le à Paris, exerce à l'Union juive libérale de Strasbourg[19].

Citons également le cas d'Abby Stein, femme trans, ordonnée en 2011 au sein du courant orthodoxe avant son changement d'identité. Elle quitta le rabbinat en 2012.

Références

  1. (en) Brochure accompagnant un documentaire sur les femmes rabbins [PDF] - Publication du mouvement Massorti destinée aux lycéens.
  2. Pauline Bebe, « Des femmes rabbins au sein des mouvements juifs libéraux », Pardès, no 43, , p. 217-226 (DOI 10.3917/parde.043.0217, lire en ligne)
  3. excepté toutefois à l'ULIF.
  4. (en) Transgender Rabbinical Students Finding Equality in the Jewish World, Jewish Journal, 11 mai 2010.
  5. (en) Congregation Beth El.
  6. (en) Pamela Nadell, Women Who Would Be Rabbis: A History of Women’s Ordination 1889-1985. Boston: Beacon Press, 1998.
  7. (en) Sandy Sasso ordained as first female Reconstructionist rabbi, This Week in History dans Jewish Women's Archive.
  8. (en) Reconstructionist Judaism in the United States dans Jewish Women's Archive
  9. (en) Sandy Eisenberg Sasso, Call Them Builders: A Resource Booklet about Jewish Attitudes and Practices on Birth and Family Life, Reconstructionist Federation of Congregations and Havurot (New York).
  10. (en) Rabbi reaches out to interfaith couples as rates climb 8-24-06.pdf Rabbi reaches out to interfaith couples as rates climb du Canadian Jewish News, août 2006.
  11. (en) Female scribe to pen Reconstructionist shul’s new Torah dans Canadian Jewish News du 21 mai 2009.
  12. (en) Montreal congregation hires first female scribe to pen Torah in Canada, dans Jewish Tribune du 3 juin 2009.
  13. (en) « Ordained as Rabbis, Women tell Secret », dans le New York Times du 21 décembre 2000.
  14. (en) Rabbis, Rebbetzins and Halakhic Advisors", Wolowelsky, Joel B. Tradition, 36:4, 2002, pages 54–63.
  15. « Deborah Brin | Jewish Women's Archive », sur jwa.org (consulté le )
  16. (fr) Ordination d’une deuxième femme rabbin pour la France, Le Figaro du 2 août 2007.
  17. (en) « Rabbi Sandra Lawson named associate chaplain for Jewish life, Jewish educator at Hillel », sur Elon University (consulté le )
  18. « Daniela Touati, quatrième femme rabbin en France », La Croix, (ISSN 0242-6056, lire en ligne, consulté le )
  19. « Iris Ferreira, première femme ordonnée rabbin en France », sur CNEWS (consulté le )

Bibliographie

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Liens externes

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