En finir avec Eddy Bellegueule

En finir avec Eddy Bellegueule est un roman autobiographique français écrit par Édouard Louis, paru aux éditions du Seuil en février 2014.

En finir avec Eddy Bellegueule
Auteur Édouard Louis
Pays France
Genre Roman
Éditeur Éditions du Seuil
Collection Cadre rouge
Date de parution 2014
Nombre de pages 220
ISBN 978-2-02-111770-7
Chronologie

Structure et récit

Dédié à Didier Eribon, dont l'auteur a apprécié le Retour à Reims, ce premier roman d'Édouard Louis est constitué de deux parties, nommées « Livre I » et « Livre II » et intitulées « Picardie (fin des années 1990 - début des années 2000) » et « L'échec et la fuite », suivies d'un épilogue. En épigraphe figure une citation de Marguerite Duras : « Pour la première fois mon nom prononcé ne nomme pas »[1].

En finir avec Eddy Bellegueule narre l'enfance et l'adolescence d'Eddy Bellegueule (« patronyme originel » de l'auteur[2]) dans un village de Picardie, le rejet qu'il subit à cause de ses manières efféminées de la part des gens du village et de sa propre famille, les violences et les humiliations qu'il endure dans un milieu où l'on n'aime pas les « pédés ». Les expériences que relate le narrateur dépeignent un univers où la misère et l'alcool accompagnent une reproduction sociale qui amène les femmes à devenir caissières après avoir abandonné leurs études et les hommes à passer de l'école à l'usine. Eddy Bellegueule finit par prendre conscience de son attirance sexuelle pour les hommes, et de son dégoût pour les relations hétérosexuelles, mais essaie de rentrer dans la norme. Devant le constat de son échec, il décide de fuir, et finit par quitter le chemin qui lui était tracé pour rejoindre un lycée d'Amiens où il découvre une autre classe sociale dont les codes sont différents.

Réception critique et analyse

Pierre Vavasseur parle d'« un premier roman qui met le feu aux poudres de la rentrée » et note l'enthousiasme de la presse et des critiques[3]. Pour François Busnel, Édouard Louis ajoute à la narration une analyse sociale, et son style, qui « superpose deux niveaux de langage », mis en évidence par la typographie, « donne sa force au livre ». Il conclut à propos de l'auteur : « Il ne juge pas, il dit. C'est en cela qu'il est un écrivain »[4]. Le double niveau de langue est relevé aussi par Isabelle Curtet-Poulner dans Marianne, qui voit « deux mondes étanches » superposer leurs violences et parle à propos du roman de « petit chef-d'œuvre »[2].

« Édouard Louis a lu Bourdieu, il n'hésite pas à nommer les choses par leur nom : classes sociales, classe ouvrière », note Didier Eribon qui relève « la prouesse » que constitue l'imbrication de deux registres linguistiques, pour en déduire que « la réussite littéraire est indéniable »[5]. « Histoire d'un échec salutaire » selon Catherine Simon dans Le Monde, le livre est « d'une force et d'une vérité bouleversantes » pour la romancière Annie Ernaux[6].

Dans un article publié sur Fabula, Marc Escola écrit que « l'auteur explore l’enjeu du devenir homosexuel, tout en utilisant des outils d’analyse sociologique pour décrire le milieu populaire dont est issu le narrateur-personnage », « s'inscrivant dans la tradition française du récit de transfuge de classe (Ernaux, 1983 ; Eribon, 2009) »[7].

Le journaliste David Belliard a quant à lui dénoncé l'opposition simple effectuée par Édouard Louis, entre d'une part des classes populaires « violentes », « incultes » et « forcément racistes » et d'autre part des classes aisées « modernes », « apaisées » et « forcément tolérantes », ainsi que l'absence d'une réelle critique sociale qui « réassure la domination des codes et des fabuleux symboles bourgeois »[8].

Cependant, Edouard Louis nie tout mépris des classes populaires, réaffirmant à plusieurs reprises que le livre aurait pu s'intituler « les excuses sociologiques »[9].

Autour du livre

À la suite de la parution du livre et pour sa thématique, Édouard Louis reçoit en le prix Pierre Guénin contre l'homophobie et pour l’égalité des droits : le communiqué de l'association SOS Homophobie stipule qu'« Édouard Louis permet de prendre conscience de l’imprégnation de l’homophobie dans le quotidien des personnes LGBT »[10].

Si En finir avec Eddy Bellegueule évoque l'éveil du narrateur à l'homosexualité, l'auteur affirme, dans une interview pour La Grande Librairie : « Mon livre parle moins, je crois, de la sexualité, de la découverte de la sexualité, que de l'impossibilité de la sexualité »[11].

En 2021, Édouard Louis annonce que le réalisateur oscarisé James Ivory adapte et scénarise Qui a tué mon père et En finir avec Eddy Belleguele en une série télévisuelle, intitulée « The End of Eddy »[12].

Éditions françaises

Éditions imprimées
Livre audio
  • Édouard Louis, En finir avec Eddy Bellegueule, Paris, Audiolib, (ISBN 978-2-35641-726-8, notice BnF no FRBNF43819712)
    Narrateur : Philippe Calvario ; support : 1 disque compact audio MP3 ; durée : 4 h 42 min environ ; référence éditeur : Audiolib 8322244. Suivi d'un entretien avec l'auteur.

Traductions

En 2014, le livre est traduit en italien par A. Cristofori et publié aux éditions Bompiani sous le titre Il caso Eddy Bellegueule[13], et en albanais par Anila Xhekaliu aux éditions Buzuku (Kosovo) sous le titre Mori fund Eddy Bellegueule[14]. La traduction en néerlandais s'intitule Weg met Eddy Bellegueule (ISBN 9789085425991).

En , il est traduit en espagnol par María Teresa Gallego et publié aux éditions Salamandra sous le titre Para acabar con Eddy Bellegueule, ainsi qu'en allemand sous le titre Das Ende von Eddy, aux éditions S. Fischer.

La traduction anglaise par Michael Lucey, publiée aux éditions Harvill Secker sous le titre The End of Eddy, est parue en librairie en .

Adaptation cinématographique

En 2016, la réalisatrice Anne Fontaine commence le tournage d'un film intitulé Eddy Bellegueule, avec Finnegan Oldfield dans le rôle-titre, librement adapté du roman éponyme[15]. Finalement, à sa sortie en 2017, le film est titré Marvin ou la Belle Éducation. Édouard Louis, dont ni le nom ni le titre du roman n'apparaissent au générique, déclare sur Twitter n'avoir « rien à voir avec le film »[16]. Pourtant, son personnage présente une histoire personnelle qui a manifestement inspiré le film, et la biographie écrite par le héros dans le film est intitulée Qui a tué Marvin Bijoux ?.

Notes et références

  1. Extrait du Ravissement de Lol V. Stein
  2. Isabelle Curtet-Poulner, « En finir avec Eddy Bellegueule: chronique de la haine populaire », Marianne, (consulté le )
  3. Pierre Vavasseur, « Rencontre avec Edouard Louis, l'auteur d'«En finir avec Eddy Bellegueule» », Le Parisien, (consulté le )
  4. François Busnel, « En finir avec Eddy Bellegueule: différence exclue », L'Express, (consulté le )
  5. Didier Eribon, « C'est toi, le pédé ? », Le Nouvel Observateur, (consulté le )
  6. Catherine Simon, « Eddy se fait la belle », Le Monde, (consulté le )
  7. Marc Escola, « Tracés no 30: « L'expérience minoritaire » », Fabula, (consulté le )
  8. David Belliard, « Pour en finir vraiment avec Eddy Bellegueule », Libération, (consulté le ).
  9. 28 minutes - ARTE, « Édouard Louis - 28 minutes - ARTE », (consulté le )
  10. Florian Bardou, « Édouard Louis et Sébastien Lifshitz lauréats du prix Pierre Guénin 2014 », sur yagg.com, (consulté le )
  11. Vidéos Roman, « Edouard Louis, "En finir avec Eddy Bellegueule"/ LGL », (consulté le )
  12. Paris Match, « James Ivory adapte Edouard Louis en série », sur parismatch.com (consulté le )
  13. (it) Stefano Montefiori, « Io, gay, picchiato dalla mia Francia e scapatto », Corriere della Sera (consulté le )
  14. (sq) « Libri i shumëkërkuar në Francë promovohet edhe në Prishtinë », sur http://www.gazetaexpress.com, (consulté le )
  15. « "Eddy Bellegueule" : le tournage a débuté », sur www.leparisien.fr, (consulté le ).
  16. Pierre-Yves Grenu, « "Marvin ou la belle éducation" : famille, je vous hais », sur Culturebox.FranceTV.info, .

Liens externes

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