Emery Reves

Emery Reves, né le à Bácsföldvár en Autriche-Hongrie (aujourd'hui Bačko Gradište en Serbie), mort le à Monte-Carlo, était un journaliste américain d'origine hongroise.

Biographie

La famille juive[1] Rosenbaum (nom que le père d'Emery Reves abandonna pour celui de Revesz[2]) provenait d'Ada, petite ville hongroise située dans une partie de la Bačka rattachée plus tard à la Serbie.

Reves étudia à Dresde et travailla comme employé de la firme Odol (de), à Berlin. À l'arrivée des nazis au pouvoir, il s'installa à Paris, où il fonda avec succès une petite agence de presse par laquelle Winston Churchill faisait diffuser ses articles.

Avant l'occupation de la France par les Allemands, il obtint par l'entremise de Churchill un visa pour l'Angleterre puis la nationalité britannique. Quand, en 1940, Churchill fut nommé Premier Ministre, Reves fut envoyé à New York pour participer à l'organisation de la propagande britannique dans les deux Amériques.[réf. souhaitée] En 1941, il publia le livre I Paid Hitler de Fritz Thyssen, composé à l'aide des sténographies d'entretiens que Thyssen et Reves avaient eus en France au printemps 1940[3]. (À l'époque de la publication du livre, Thyssen était prisonnier en Allemagne.)

En 1945-1946, il s'occupa de la publication des Mémoires de guerre de Churchill[réf. souhaitée]. En 1953, il acheta la villa de Coco Chanel, la villa La Pausa, à Rocquebrune[4], dans le midi de la France, et la tint à la disposition de Churchill pour des fêtes et des séjours de détente. Il compta également parmi ses hôtes Konrad Adenauer, Greta Garbo et le Duc de Windsor. Reves était l'époux d'une Américaine, Wendy Reves. Son cousin Georg Solti le décrit dans ses mémoires comme snob et doué d'un humour sardonique. Sans l'aide de Reves en vivres et en argent, la vie de sa famille à Budapest aurait été menacée.

Emery Reves écrivit aussi le livre The Anatomy of Peace, publié en 1945 (traduction française Anatomie de la paix, 1947), où il défendait l'idée d'un gouvernement mondial comme seul moyen d'empêcher la guerre. Selon lui, le Conseil de sécurité des Nations unies, qui venait d'être créé en cette même année 1945, n'était pas un moyen efficace de maintenir la paix mondiale, car c'était un instrument de la force plutôt que du droit. Ce livre reçut entre autres le soutien d'Albert Einstein. Les questions qui y sont soulevées sur le droit et son fondement relèvent de la philosophie du droit.

Reves réunit une célèbre collection de tableaux des peintres impressionnistes et postimpressionnistes, dont il était considéré comme un expert. Wendy Reves légua toute la collection artistique de son mari (1400 pièces) au Dallas Museum of Art. Dans une aile du musée spécialement construite à cette fin, on imita cinq pièces de la villa La Pausa[4]. Outre des meubles et des objets d'artisanat d'art, la collection comprend surtout des tableaux français, de Corot à Bonnard.

Critiques et suspicions

Selon l'historien Samuel W. Mitcham[3], le livre I paid Hitler, que Reves publia en 1941 sous le nom de Fritz Thyssen, est une des sources les plus citées mais les plus inexactes sur les relations entre la haute finance et le nazisme. Ce livre avait en réalité été écrit par Reves (sur la base des sténogaphies des entretiens que Thyssen et Reves avaient eus en France au printemps de 1940) et seuls un petit nombre de chapitres avaient été revus et approuvés par Thyssen. Thyssen, qui au moment de la sortie du livre était prisonnier en Allemagne, n'avait pas donné son accord à la publication et n'avait jamais vu les chapitres relatifs à ses relations financières avec le parti nazi. S. W. Mitcham cite l'historien Henry Ashby Turner[5], qui a comparé les sténographies avec le premier état du livre et selon qui même les parties approuvées par Thyssen comportent des assertions ajoutées (« spurious ») et inexactes.

L'historien Wolfgang Koch[6], cité lui aussi par S. W. Mitcham, partage la façon de voir de Turner et ajoute que Reves assista également Hermann Rauschning dans la composition du livre Hitler m'a dit, ouvrage qui lui aussi fut largement cité, mais que la plupart des historiens tiennent en suspicion depuis 1984.

En 1944, Emery Reves a édité le livre de Jan Karski Histoire d'un État secret[7]. Il a interdit à Karski toute critique envers l'URSS, s'est arrogé le droit de rendre le texte plus attrayant et a exigé la moitié des droits d'auteur[8]. Ce livre a lui aussi éveillé des soupçons, notamment ceux de l'historien Raul Hilberg.

Publications

  • Fritz Thyssen: I paid Hitler, édité et tenu pour écrit en partie par Emery Reves, New York, 1941. Traduit en français, J'ai payé Hitler, Nouveau Monde Éditions, 312 p, 2019, Paris (ISBN 978-2369428565)
  • Hermann Rauschning: Gespräche mit Hitler (en français Hitler m'a dit), livre écrit avec l'aide d'Emery Reves.
  • Jan Karski History of a Secret State, 1944, livre à la rédaction duquel Reves a participé.
  • The Anatomy of Peace, 1945; tr. fr. Anatomie de la paix, Paris, Tallandier, 1946.
  • Winston Churchill and Emery Reves: Correspondence, 1937-1964, éditée par Martin Gilbert, University of Texas Press, Austin, Texas, 1997 (ISBN 0-292-71201-4)

Bibliographie

  • The Wendy and Emery Reves Collection. Dallas Museum of Art 1985, gebunden (ISBN 0-9609622-8-X) und paperback (ISBN 0-9609622-9-8)
  • Richard R. Brettell: Impressionist Paintings Drawings and Sculpture: From the Wendy and Emery Reves Collection. Dallas Museum of Art 1995, (ISBN 0-936227-15-X)
  • Charles L. Venable: Decorative Arts Highlights from the Wendy and Emery Reves Collection, Dallas Museum of Art, 1. Oktober 1995

Notes et références

  1. E.T. Wood et S.M. Jankowski, Karski, How One Man Tried to Stop the Holocaust, éd. de 2014, Texas Tech University Press et Gihon River Press, p. 200.
  2. Richard M. Langworth, « Sales Department for the Production Chief », Finest Hour, 96/34, consultable sur le site winstonchurchill.org.
  3. Samuel W. Mitcham, Jr., Why Hitler ? : The Genesis of the Nazi Reich, Westport, Connecticut, et Londres, Praeger, 1996, p. 137.
  4. Bénédicte Burguet, « La pause Riviera de Coco Chanel », Vanity Fair n°4, octobre 2013, pages 102-103.
  5. Henry Ashby Turner, Jr., « Big Business and the Rise of Hitler », American Historical Review, vol. 75 (octobre 1969), p. 59.
  6. H. W. Koch, « 1933 : The Legality of Hitler's Assumption of Power », dans H. W. Koch, dir., Aspects of the Third Reich, New York, 1985, p. 55.
  7. Réédité en français chez Robert Laffont en 2010, sous le titre Mon témoignage devant le monde, Histoire d'un État clandestin, accompagné de notes explicatives pour le lecteur français.
  8. Céline Gervais-Francelle, Introduction à l'édition française de 2010 du livre de Jan Karski, sous le titre Mon témoignage devant le monde, p. 19.

Liens externes

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