Domuztepe

Domuztepe est un site archéologique situé au sud de la Turquie entre les villes de Kahramanmaraş et Gaziantep. Avec une superficie d'environ 20 hectares, c'est l'un des plus grands sites préhistoriques du Proche-Orient. Le site assimilé à la culture de Halaf documente un village d'à peu près 1 500 habitants situé au bord d'un ancien marais et abandonné vers . Mais son occupation réelle  encore non entièrement documentée par des fouilles  pourrait commencer avant [1],[2].

Domuztepe

Vue du Nord-Est de Domuztepe
Localisation
Pays Turquie
Kahramanmaraş
Type Tell
Coordonnées 37° 19′ 16″ nord, 37° 02′ 08″ est
Superficie 25 ha
Géolocalisation sur la carte : Turquie
Domuztepe
Histoire
Culture de Halaf
Néolithique du Proche-Orient

Après une interruption de 5 000 ans, à l'époque hellénistique (vers ), le site connait encore une occupation tardive sur sa partie ouest. En outre, un bâtiment considérable appartenant à l'époque romaine tardive (vers ) est découvert sur le sommet du monticule. Ce bâtiment semble entretenu jusqu'à la période islamique moyenne (du XIe siècle au XIVe siècle apr. J.-C.)[3],[4].

Néolitihique

Le site de Domuztepe est surtout fouillé pour sa période néolithique. Il présente un grand intérêt pour la compréhension de plusieurs aspects de la culture de Halaf de l’extrême Nord-Ouest : le riche symbolisme de la poterie peinte, l'utilisation de jetons et de nouvelles habitudes mortuaires en sont les principaux traits caractéristiques. Tous ces aspects sont compris dans un cadre de changements sociaux, d'économie, d'identités sociales et artistiques[5].

Malgré l'étendue du site, les échanges à longue distance, la spécialisation des artisans et l'utilisation de sceaux et de scellés qui semblent indiquer une tendance à une complexification naissance de la société, Domuztepe ne fournit pas d’attestation archéologique concrète à propos de chefferies socialement complexes[6].

L'alimentation est fortement basée sur les plantes et animaux domestiques. Les os d'animaux appartiennent à très peu d'animaux chassés et sont plutôt composés de moutons, de bovins et de porcs. L'importance des bucranes sur les tessons de céramiques peintes et retrouvés dans la Fosse de la mort (voir supra) s'explique probablement par une nette préférence pour le bétail. Les céréales sont domestiquées et consistent en grande partie en blé amidonnier et un peu d'Orge commune, les champs de culture de céréales peuvent s'étendre jusqu'à 4 kilomètres. D'autre part Domuztepe étant anciennement proche de zones humides, l'exploitation de roseaux pour les paniers et peut-être le logement semble avoir été important dans l'économie locale[7].

La Fosse de la mort

Domuztepe possède un vaste et complexe dépôt funéraire. Il est connu sous le nom de Death Pit (« Fosse de la mort »). Ce dépôt d'environ 5 × 4 mètres et 1 mètre de profondeur est rempli d'objets, d'ossements humains et animaux. Plus de 10 000 ossements très fragmentés d'animaux et d'humains (au moins une quarantaine d'individus) s'y trouvent. En outre, les archéologues y trouvent un nombre important de tessons de poterie, de matériaux végétaux, des outils en os, des perles, d'empreintes de sceaux, et des restes de paniers plâtrés. Tous ces éléments indiquant une importante composante rituelle dans la création de cette fosse[8]. Les chercheurs voient dans ce dépôt une transformation des morts en un ancêtre collectif reconstitué. Cependant, le mélange entre ossements animaux et humains et le fait que certains corps montrent des traces de traumatismes accomplis avant et après la mort poussent également ces mêmes chercheurs à envisager l'existence de rituels faisant appel au cannibalisme ou à des sacrifices humains[9],[5].

Au sud de la fosse, se trouvent un crâne isolé, une zone d'enterrement secondaire et le squelette presque complet d'un enfant âgé de 6 ans. Ceux-ci datent d'un peu plus tard que la fosse. La zone d'enterrement indique d'autres rituels funéraires menés dans cet endroit. Certains crânes, notamment celui de l'enfant, ont subi des traumatismes[10].

Céramique et artisanat

La plupart des restes céramiques de Domuztepe sont identifiées comme appartenant à la culture de Halaf[10] : elles sont pourvues d'une pâte très fine et sont l'objet d'une cuisson plus chaude et plus oxydante qui leur apporte une couleur orange ou chamois[11]. Cependant, à Domuztepe, les décorations , sont empreintes de traits stylistiques régionaux reconnaissables. Deux céramiques, peintes découvertes dans un fossé creusé dans une terrasse d'argile rouge[Note 1] présentent, quant à elles, des scènes : sur l'une, des femmes dansent en cercle et, sur l'autre, se trouve un ensemble de bâtiments entre des arbres. Les débris d'un autre récipient peint semble représenter un rituel[12].

À côté de la céramique Halaf, il existe une gamme de récipients, majoritairement des bols non peints, brunis avec des plages rouges, brunes ou noires. Même si l'influence majeure du village est du type de la culture de Halaf, les meilleurs parallèles qui peuvent être faits avec ces bols sont à chercher dans le Levant jusqu'au sud de celui-ci, dans des sites de la culture de Wadi Rabah. D'autres céramiques, produites en petites quantités qui ne s'apparentent pas à la culture de Halaf, présentes des couleurs à dominantes oranges (une barbotine orange foncé avec une peinture marron foncé ou noire) et pourvues d'une fine ligne peinte (une surface chamois blanc ou pâle peinte avec des lignes extrêmement fines). Les origines de cette céramiques se trouvent au sud dans l'Amuq et à Ras Shamra[4].

Il existe également une poterie brune, épaisse, peu identifiable à des références externes. Ce sont des bocaux aux parois très épaisses (environ 1 centimètre) de matière est assez globuleuse et à longs cols verticaux colorés d'un large brunissage vertical. Ce type remplit fort probablement une fonction particulière encore non identifiée. Les dernières couches recèlent également d'une série de pots avec ou sans col dont certains sont enduits de plâtre sur la surface extérieure. D'autres objets plus grossiers présentent une grande variété de formes et sont composés de sable et d’un dégraissant végétal[13].

Le site est également le théâtre d'activités artisanales variée liées à la production textile et à la fabrication de récipients en pierre. Il y est observé une préoccupation de conservation, de réparation et de recyclage : les déchets d'os d'animaux sont transformés en outils, aiguilles, poinçons, bobines ou en perles ; les récipients réparés, transformés. Les récipients en céramique étaient parfois réparés, et souvent transformés en fuseau de filage de corde ou en simples disques de grattage ou en perles, pendentifs ou sceaux[4].

La grange brûlée

Les niveaux inférieurs de Domuztepe montrent une zone fortement brûlée. Dans un secteur du site, des appentis d'acacia et de torchis sont construits sur de faibles fondations en pierre et d'os d'animaux. Il semble qu'un incendie ait provoqué l'effondrement du toit et la combustion de nombreux pots et de meules posés sur des surfaces de plâtre fragmentaire. Il s'agit probablement d'une grange à côté de laquelle se trouve une cour adjacente à des stalles destinées à garder des animaux. Une partie de cet ensemble, fortement brûlée, fourni un grand nombre d'objets ménagers (des céramiques, des objets en pierre et une pierre à broyer) et des fragments de pisé carbonisés. De nombreux récipients verseurs, des bocaux, des bols à becs, trois grands récipients peints et de grand pots servant à la transformation du lait indique qu'il pourrait s'agir d'un lieu de vie ou d'activité commune[13].

Notes et références

Notes

  1. Fossé dans lequel se trouvent également des fragments de céramiques, des outils, des aiguilles finement travaillées en os, des objets en pierres, des impressions de sceaux et un morceau de miroir en obsidienne[12].

Références

  1. (en) Elizabeth Carter et Stuart Campbell, « The Domuztepe Projekt, 2006 », Kültür Varlıkları ve Müzeler Genel Müdürlüğü Yayın, vol. 29, no 3, , p. 129-135 (lire en ligne, consulté le ).
  2. (en) Sarah Whitcher Kansa, Suellen C. Gauld, Stuart Campbell et Elizabeth Carter, « Whose Bones are those? Preliminary Comparative Analysis ofFragmented Human and Animal Bones in the “Death Pit” at Domuztepe, a Late Neolithic Settlement in Southeastern Turkey », Anthropozoologica, vol. 44, no 1, , p. 159-172 (lire en ligne, consulté le ).
  3. Kansa et al. 2009, p. 161.
  4. Carter et Campbell 2006, p. 129.
  5. Kansa et al. 2009, p. 160.
  6. Carter et Campbell 2006, p. 133.
  7. Carter et Campbell 2006, p. 128.
  8. Kansa et al. 2009, p. 161-163.
  9. (en) Stuart Campbell, « Northern Mesopotamia », dans D.T. Potts, A Companion To The Archealogy Of The Ancient Near East, Oxford, Blackwell Publishing Ltd., (ISBN 978-1-4051-8988-0), p. 426-427.
  10. Carter et Campbell 2006, p. 125.
  11. W. Cruells, « Nouvelles données sur les origines et le développement de la céramique Halaf en Syrie », dans Méthodes d’approche des premières productions céramiques : étude de cas dans les Balkans et au Levant, Nanterre, Verlag Marie Leidorf GmbH, , p. 100.
  12. Carter et Campbell 2006, p. 124-125.
  13. Carter et Campbell 2006, p. 127.

Articles connexes

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