Délinquance juvénile

Le terme délinquance juvénile désigne un comportement illégal d'un enfant ou d'un adolescent[1]. La plupart des systèmes judiciaires, tant occidentaux que non-européens (par exemple, le droit égyptien) appliquent des procédures judiciaires particulières pour traiter les délits des jeunes. Dans le système pénal français, ce sont l'établissement pénitentiaire pour mineurs (EPM) ou le centre éducatif fermé (CEF).

Pour les articles homonymes, voir Délinquance juvénile (homonymie).

En France la responsabilité pénale est personnelle[2] et n'a aucune limite d'âge, elle fait néanmoins appel à la notion de discernement[3]. À partir de 10 ans, l'enfant peut faire l'objet de mesures éducatives. La sanction pénale dont l'incarcération peut intervenir à partir de l'âge de 13 ans. Le juge pour enfants qui traite des affaires judiciaires concernant les mineurs a été créé en France en 1945.

La forme de délinquance qui préoccupe le plus depuis toujours le politique c'est l'organisation en bande (ou gang) pour commettre des délits, et ce dans l'ensemble des pays occidentaux.

Parmi les délinquants, nombreux sont ceux qui souffrent de trouble mentaux et ne sont pas nécessairement diagnostiqués. Un diagnostic plus précoce servirait à modifier leur comportement[réf. nécessaire].

Historique en France

Dès l'Ancien Régime la délinquance, le vagabondage, la marginalité font l'objet d'un traitement pénal, par l'enfermement, le bannissement ou les galères[4].

Le code pénal de 1810 préconise l'enfermement des mineurs dans des lieux distincts des adultes. La prison de la Petite Roquette réservée aux mineurs est créée en 1832. La première colonie pénitentiaire est ouverte à Mettray en 1839. Cette colonie fonctionne de manière analogue au centre pénitentiaire d'Auburn dans l'État de New York. Alexis de Tocqueville membre fondateur de la colonie avait en 1831 visité cette prison avec Gustave de Beaumont, ils préconisaient une réforme du système pénitentiaire français dans leur livre sur le système pénitentiaire en France et à l'étranger[5]. La colonie est à l'origine du métier d'éducateur spécialisé et d'éducateur technique spécialisé, Les colonies pénitentiaires furent fermées après l'ordonnance de 1945, car considérées comme des bagnes pour enfants.

L'ordonnance de 1945 établissait la primauté de l'éducation sur la répression et l'enfermement pour les mineurs. Dans son rapport remis à la ministre de la Justice en décembre 2008, la Commission Varinard, chargée de présenter des observations pour réformer l'ordonnance de 1945, avait formulé 70 recommandations pour rendre la justice pénale « plus lisible et plus adaptée à la délinquance » en clarifiant les concepts fondamentaux qui sous-tendent la justice pénale des mineurs[6].

Depuis la doctrine en matière de pénalité des mineurs évolue vers plus de répression, sous l'influence du sentiment d'insécurité dans l'opinion et la réponse politique à l'opinion, renforce, l'arsenal juridique de lutte contre la délinquance juvénile[7].

La responsabilité parentale en France et en Europe

La France, comme de nombreux pays, distingue les mineurs des majeurs et d'autre part suivant l'âge du mineur qui commet une infraction, un délit ou un crime, les sanctions varient[8] :

  • En France, pour le mineur de 10 ans : aucune mesure ne peut être appliquée. La loi reconnaît donc l'irresponsabilité pénale absolue pour les enfants. En Angleterre et au Pays de Galles, en Espagne, aux Pays-Bas, au Portugal et en Suisse, le mineur qui n'a pas atteint l'âge de la responsabilité pénale ne peut en aucun cas être considéré comme pénalement responsable.

Dans ces cinq pays, l'âge de la responsabilité pénale varie entre sept et seize ans : il est de sept ans en Suisse, de dix ans en Angleterre et au Pays de Galles, de douze ans aux Pays-Bas et de seize ans en Espagne et au Portugal[9].

  • En France, pour le mineur entre 10 et 13 ans : ne peut faire l'objet que de mesures éducatives.
  • En France, pour le mineur de plus de 13 ans : des mesures éducatives peuvent être ordonnées, ainsi qu'une peine pénale si les circonstances et la personnalité du mineur l'exigent.

L'âge de l'irresponsabilité pénale relative varie en Europe : il est de 13 ans en France, de 14 ans en Allemagne et en Italie, et de 16 ans en Belgique[9].

Les mesures éducatives

Depuis l'Ordonnance de 1945, ce sont ces types de sanctions qui sont favorisées. Toutefois depuis la réforme de 2007. Le mineur de plus de 13 ans peut faire l'objet d'une mesure plus coercitive, sans être en détention, dans les centres éducatifs fermés.

Les mesures éducatives ont pour but de protéger, de surveiller et d'éduquer le mineur et de l'aider à se réinsérer. Il peut s'agir de :

  • l'admonestation, pour les infractions légères.
  • la remise au représentant légal ou à une personne digne de confiance.
  • une mesure d'aide ou de réparation.
  • une mesure d'activité de jour.
  • le placement dans un établissement.
  • une mesure de liberté surveillée.
  • la mise sous protection judiciaire (suivi éducatif par la protection judiciaire de la jeunesse).

Les peines

  • les amendes dans la limite de 7 500 
  • les peines de prison qui ne peuvent excéder la moitié du maximum prévu pour les majeurs
  • le travail d'intérêt général pour les mineurs de 16 à 18 ans. Il doit être adapté à leur âge, présenter un caractère éducatif et favoriser l'insertion sociale du mineur.

Révisions des décisions

Les mesures éducatives prises par le juge des enfants ou par le tribunal pour enfants peuvent ensuite être modifiées en fonction de l'évolution de la situation de l'enfant.

Facteurs de risques

Plusieurs études ont défini des facteurs de « risques » statistiquement associés à la délinquance[10]. Ces facteurs ont été étudiés dans le cadre de deux études longitudinales : la Cambridge Study in Deliquent Development (CSDD)[11] et la Pittsburgh Youth Study (PYS)[12]. Les facteurs de risque sont définis comme une variable qui prédit une forte probabilité de la délinquance mais ils ne sont pas nécessairement les causes de la délinquance. Une des méthodes pour établir les causes de la délinquance est de prouver que des changements apportés à un facteur causal chez certains individus sont suivis par des changements aux niveaux de leurs comportements criminels[13].

Pour le pédopsychiatre Maurice Berger, les causes premières de la violence se situent dans la petite enfance : « 69 % des adolescents très violents ont été exposés à des scènes de violences conjugales pendant les deux premières années de leur vie. Ils ont en eux l’image violente de leur père qui resurgit lorsqu’ils subissent une bousculade ou un mauvais regard. »[14]

Les délits et les infractions commises par les mineurs

La quantité et le type de délit servent d'indicateur du niveau de l'insécurité publique et de l'anomie sociale et du respect des lois d'un pays. En conséquence, ils peuvent provoquer un sentiment d'insécurité dans l'opinion publique[15]. Il existe différentes théories sur les causes des délits, lesquelles s'appliquent souvent aux délits causés par les mineurs. La criminologie s'y intéresse particulièrement, car la plupart des crimes sont commis par des personnes entre 15 et 25 ans[16]. De plus, étant souvent un primo-délinquant, un jeune serait plus facile à « rééduquer » qu'un criminel multi-récidiviste.

Statistiques sur les délits des mineurs, le débat en France

C'est un débat politique très sensible[17]. En 2009, le ministre de l'Intérieur Brice Hortefeux demandait la mise place d'un couvre-feu pour les mineurs de moins de 13 ans[18], estimant que l'on assistait à une montée des délits commis par les mineurs, hausse de 5 % en un an pour s'établir à 18 % de l'ensemble des délits et infractions constatés par la police. De plus, la nature des délits évolue vers plus de violence en bande organisée, et vers les jeunes filles qui commettraient également plus de délits avec violence. Cette vision est à mettre en lumière avec celle du rapport du Sénat du 27 juin 2002 Délinquance des mineurs : la République en quête de respect (rapport de la commission d'enquête sur la délinquance des mineurs) (rapport) qui aboutit à des conclusions proches de celles de Brice Hortefeux. Ce rapport va se concrétiser avec la création de l'Observatoire national de la délinquance, devenu en janvier 2010 Observatoire national de la délinquance et des réponses pénales (ONDRP), dont Alain Bauer est le président du conseil d'orientation.

Cette vision est critiquée par le sociologue Laurent Mucchielli[19]. Pour lui l'outil statistique produit par l'ONDRP et utilisé par le ministre de l'Intérieur n'est pas fiable[20].

Notes et références

  1. Macmillan Dictionary for Students Macmillan, Pan Ltd. (1981), p. 559. Consulté le 2010-7-15.
  2. Article 121-1 du Code pénal
  3. Article 122-8 du Code pénal, http://www.easydroit.fr/codes-et-lois/article-122-8-du-Code-penal/A50187/
  4. Michel Foucault, Surveiller et punir
  5. Heffer Jean, « Alexis de Tocqueville, Œuvres complètes, tome IV, Écrits sur le système pénitentiaire en France et à l'étranger », Annales. Économies, Sociétés, Civilisations, vol. 41, no 3, , p. 724-726 (lire en ligne)
  6. André Varinard, « La nécessité d'une refonte de la justice pénale des mineurs », Revue française de criminologie et de droit pénal, vol. 1, (lire en ligne)
  7. Loi du 5 mars 2007 sur la prévention de la délinquance, « Loi no 2007-297 du 5 mars 2007 relative à la prévention de la délinquance (1) – Article 55 » [archive], sur le site legifrance.gouv.fr
  8. source : http://vosdroits.service-public.fr/F1837.xhtml
  9. Sources : http://www.senat.fr/lc/lc52/lc52_mono.html#toc2
  10. Les facteurs de risque, de protection et de désistance, Conférence de consensus sur la prévention de la récidive
  11. Cambridge Study in Deliquent Development
  12. http://www.lifehistorystudies.pitt.edu/pittsburgh-youth-study
  13. Farrington, Ttofi, Loeber, « Facteurs de protection contre la délinquance », Revue française de criminologie et de droit pénal, vol. 2, (lire en ligne)
  14. Paul Sugy, Maurice Berger: «Non, la violence gratuite n’est pas due à la ghettoïsation», lefigaro.fr, 15 novembre 2019
  15. Eadie, T. & Morley, R. (2003) Crime, Justice and Punishment in Baldock, J. et al. (eds) Social Policy (3 rd edn.) Oxford: Oxford University Press
  16. Walklate, S (2003) Understanding Criminology – Current Theoretical Debates, 2nd edition, Maidenhead: Open University Press.
  17. https://www.20minutes.fr/article/311513/France-Les-chiffres-controverses-de-la-delinquance-des-mineurs.php
  18. « Hortefeux pour un "couvre-feu ciblé sur des mineurs délinquants" », sur lemonde.fr,
  19. Alain Salles et Nabil Wakim, « Laurent Mucchielli : "La délinquance des mineurs n'est pas en augmentation" », sur lemonde.fr,
  20. Laurent Mucchielli, « Délinquance: la com’ rituelle du ministre de l’Intérieur », sur blogs.mediapart.fr,

Bibliographie

  • Maurice Berger, Sur la violence gratuite en France : Adolescents hyper-violents, témoignages et analyse, Éditions L'artilleur, 2019, 180 p. (ISBN 9782810009237)
  • Maurice Berger, Voulons-nous des enfants barbares ? Prévenir et traiter la violence extrême, Dunod, 2013, 256 p. (ISBN 9782100701421)
  • Maurice Berger, Soigner les enfants violents : Traitement, prévention, enjeux, Dunod, 2012, 320 p. (ISBN 9782100574148)
  • Catherine Blatier : La délinquance des mineurs. L'enfant, le psychologue, le droit, Grenoble, Presses Universitaires, 3e Edition, 2014.
  • Véronique Le Goaziou, Laurent Mucchielli, La violence des jeunes en question, Éditions Champ social, coll. « Questions de société », 2009.
  • Les politiques publiques de sécurité. Alain Bauer, Christophe Soullez. Numéro : 3923 Collection "Que sais-je ?" Date de parution : 31/08/2011.
  • Violences et insécurité urbaine, Les fichiers de police et de gendarmerie et Statistiques criminelles et enquête de victimisation. Alain Bauer, Christophe Soullez. Numéro : 3856 Collection "Que sais-je ?" Date de parution : 12/10/2011
  • Claude Halmos, Pourquoi l'amour ne suffit pas? Aider l'enfant à se construire, Pocket, 20 novembre 2008
  • Maryse Vaillant, La Réparation. De la délinquance à la découverte de la responsabilité, Gallimard, coll. Sur le champ , 1998

Annexes

Articles connexes

Bibliographie

  • Laurent Mucchielli, « L’évolution de la délinquance juvénile en France (1980-2000) », Sociétés contemporaines, no 53, , p. 101-134 (lire en ligne [PDF])

Liens externes

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