Déficits jumeaux

En économie, les déficits jumeaux ou double déficit désignent la situation d'un pays enregistrant en même temps un déficit public et un déficit de sa balance courante, c'est-à-dire une situation dans laquelle les dépenses des administrations publiques excèdent leurs revenus, et où les importations de biens et services sont supérieures aux exportations.

Déficits jumeaux aux États-Unis. Balance fiscale (noir) et balance courante (rouge).

L’expression de déficits jumeaux est utilisée pour caractériser l’économie des États-Unis au début des années 1980, et au cours des années 2000. La monnaie des États-Unis, le dollar américain, qui joue le rôle de monnaie de référence à l'échelle mondiale malgré la disparition des Accords de Bretton Woods, permet probablement le maintien d’une telle situation sur les court et moyen termes, ainsi que l'illustre le dilemme de Triffin.

La relation de causalité entre les déficits extérieur et public à partir du modèle à générations imbriquées a été proposée par Olivier Blanchard en 1985. Ce modèle emboîte l'hypothèse des déficits jumeaux (il y a une relation positive entre les déficits) et l'hypothèse d’équivalence ricardienne (il n'y a aucun lien entre les déficits)[1].

Les équations comptables à la base des déficits jumeaux

Les déficits jumeaux sont issus de deux équations comptables, celles de la demande intérieure et des revenus, qui sont des identités donc toujours vraies d'un point de vue comptable.

Soit les équations de l'équilibre emplois-ressources issue de la comptabilité nationale:

-Ressources : Y+M

Les ressources sont l'ensemble des biens et services disponibles dans l'économie nationale et dans le reste du monde

-Emplois : C+I+G+X

Les emplois désignent la manière dont les ressources sont utilisées (employées) par les agents résidents et non résidents. (Ménages qui consomment, Entreprises qui investissent, les administrations publiques = APU qui investissent et consomment).

Toutes les ressources sont employées.

Dès lors, Y+M = C+I+G+X est toujours vérifiée d'un point de vue comptable.

-Demande intérieure/interne : C+I+G

-Demande extérieure/externe : X

-Demande globale : C+I+G+X

-Offre intérieure/interne : Y

-Offre extérieure/externe : M

-Offre globale : Y+M

Y est le PIB (offre des entreprises résidentes), M désigne les importations (demande des ménages résidents en biens et services produits par le reste du monde), C représente la consommation (ou Consommation finale des ménages = demande des ménages résidents en biens et services produits par les entreprises résidentes et du reste du monde) , I les investissements (ou Formation Brute de Capital fixe = les investissements des entreprises résidentes), G les dépenses publiques (C APU+ I APU = G) et X les exportations (demande des ménages du reste du monde de biens et services produits par les entreprises résidentes).

Et l'équation comptable des revenus :
S désigne l'épargne privée, T le montant des prélèvements obligatoires (Impôts + Cotisations sociales = PO) et C la consommation.

Démonstration

Reformulons l'équation de l'équilibre emplois-ressources:

Nous obtenons donc, en remplaçant Y :

puis :

  • S-I est le solde de financement des agents privés. Si S>I, les capacités de financement du secteur privé du pays excèdent ses besoins de financement.
  • T-G est le solde budgétaire de l'État. Quand l'État a un déficit budgétaire, nous avons T<G.
  • X-M est le solde de la balance commerciale qui peut aussi être trouvé sous l'appellation NX.

Soit:
On constate que .

On conclut qu'une augmentation des dépenses publiques dégrade la balance commerciale d'où le terme de "déficits jumeaux".

Exemple

Prenons l'exemple d'une augmentation des dépenses de l'État dans une économie où :

  • S et I sont constants c'est-à-dire dS=dI=O
  • Le solde budgétaire de l'État, le financement du secteur privé et la balance commerciale sont à l'équilibre soit

L'État décide d'augmenter les dépenses publiques sans augmenter les impôts, ce qui génère un déficit budgétaire soit

T-G<0 ⇔ T<G.

On a:
car S=I par hypothèse dans notre exemple
Or T<G donc X<M. Dans ce cas le déficit public implique un déficit de la balance commerciale.

Notes et références

  1. Olivier J. Blanchard, « Debt, Deficits, and Finite Horizons », Journal of Political Economy, vol. 93, , p. 223-247 (lire en ligne, consulté le )

Voir aussi

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