Décret de Gélase

Le Décret de Gélase (en latin : Decretum Gelasianum) est une compilation de documents de diverses origines dont l'attribution est mise sous les noms des papes Damase Ier (366-384), Gélase Ier (492-496) et Hormisdas (514-523). Pour cette raison, on l'appelle parfois pseudo décret gélasien. La tradition l'attribue cependant majoritairement au premier cité. Selon l'historienne Jacqueline Rambaud-Buhot, le contenu du Décret de Gélase, une compilation de textes d'origines diverses, manifeste une volonté d'attribuer à des documents douteux, ou d'importance secondaire, une autorité auxquels ils n'auraient pas droit en les joignant à d'autres rédigés par des personnages de premier plan, Gélase, dans le cas présent[1].

Manuscrit du décret de Gélase daté de l'époque carolingienne, vers 800, Missel gallican, Bibliothèque apostolique vaticane, f.101v.

Sa cinquième partie, listant et condamnant une série d'apocryphes, a exercé jusqu'à récemment une forte influence. L'affirmation de son caractère pontifical est à l'origine de cette autorité : c'est à la suite de telles recommandations semblant provenir du pape (l’Évêque des évêques, selon l'expression patristique) que les communautés chrétiennes ont mis de côté certains écrits, désormais classés comme hétérodoxes.

Présentation

Le Décret de Gélase est un document étonnant et complexe, dont le texte a été reproduit et recopié à de multiples reprises dont on conserve une centaine de manuscrits[2] et qui a fait l'objet de nombreuses études[3].

Il est composé de cinq parties[4].

La première (I) s'attache aux définitions dogmatiques de l'Esprit septiforme, ensuite des vingt-huit noms de Jésus et enfin du Saint-Esprit procédant du Père. La deuxième (II) liste les écrits reconnus par l’Église universelle. La troisième (III) contient une déclaration sur les trois Sièges apostoliques : l'Église de Rome fondée par Pierre et sanctifiée par les martyrs de Pierre et Paul, l'Église d'Alexandrie fondée par Marc, disciple de Pierre, et l'Église d'Antioche fondée en premier par Pierre. La quatrième (IV) est une déclaration concernant autorités - conciles et pères - à reconnaitre par les fidèles ; elle comporte la mention d'auteurs douteux. Enfin, la cinquième (V) est une liste de livres « apocryphes » - à entendre ici comme « à rejeter » - qui donne son nom traditionnel à l'ensemble de la compilation : Decretum Gelasium de libris recipiendis et non recipiendis[5].

Origine et datation

Tant l'origine que la datation du document sont problématiques de par la nature de sa composition. Les spécialistes proposent différentes points de vue à ce sujet[6].

Certains ont défendu l'unité du texte, estimant que c'est un document non officiel composé en Italie par une personne privée au VIe siècle. D'autres, plus récemment, estiment qu'il s'agit d'une juxtaposition de deux ou trois textes composés à des époques différentes : la partie I-III - conformément à son titre - serait alors de l'époque de Damase et relèverait des travaux du concile de Rome de 382 tandis que la partie IV-V serait le fruit d'un particulier de Gaule méridionale vers le Ve ou VIe siècle ; certains voient la première partie I-III constituée elle-même de deux parties, la III datant de Damase et la I-II étant de composition plus tardive[6].

Les apocryphes

En tout état de cause, pour la partie contenant la liste des apocryphe (V), tous s'accordent sur une rédaction vers l'an 500 par un particulier de Gaule méridionale[6].

Celle-ci[Qui ?] a nourri un a priori longtemps négatif et une grande suspicion vis-à-vis de la littérature apocryphe, du moins dans le christianisme occidental[7] mais il faut remarquer qu'il n'a jamais fait l'unanimité même en son temps[8].

Cette partie comporte une liste d'auteurs et d'écrits - souvent impossible à identifier - que l'auteur affirme citer de mémoire et qui se déroule dans une certaine confusion et incohérence[6]. Il a pour projet de composer le catalogue des documents interdits aux chrétiens, qui auraient été rédigés par des « hérétiques » ou des « schismatiques », qu'il confond[8].

C'est un pêle-mêle où se mélangent avis personnels du rédacteur et opinions de Jérôme de Stridon, où des incohérences font taxer d'« apocryphe » des documents orthodoxes repris dans la partie IV et qui semble avoir été composé au hasard des lectures de l'auteur[9], ce qui pourrait expliquer les nombreuses erreurs qu'il contient[8].

Références

  1. Jacqueline Rambaud-Buhot, « La critique des faux dans l'ancien droit canonique », Bibliothèque de l’École des Chartes, volume 126, numéro 1, 1968, pp.5-62
  2. pour la liste cf. Henri Leclercq, article « Gélasien (Décret) » in Dictionnaire d'archéologie chrétienne et de liturgie, 4/1, 1924, col. 745-746, cité par S. C. Mimouni, op. cit. 2011, p. 249
  3. Simon Claude Mimouni, Les traditions anciennes sur la Dormition et l'Assomption de Marie : Études littéraires, historiques et doctrinales, éd. Brill, 2011, p. 249
  4. Decretum Gelasianum
  5. Simon Claude Mimouni, Les traditions anciennes sur la Dormition et l'Assomption de Marie : Études littéraires, historiques et doctrinales, éd. Brill, 2011, p. 249-250
  6. Simon Claude Mimouni, Les traditions anciennes sur la Dormition et l'Assomption de Marie : Études littéraires, historiques et doctrinales, éd. Brill, 2011, p. 250
  7. Simon Claude Mimouni, Les traditions anciennes sur la Dormition et l'Assomption de Marie : Études littéraires, historiques et doctrinales, éd. Brill, 2011, p. 247
  8. Simon Claude Mimouni, Les traditions anciennes sur la Dormition et l'Assomption de Marie : Études littéraires, historiques et doctrinales, éd. Brill, 2011, p. 251
  9. Jérôme, Augustin d'Hippone, une lettre d'Innocent Ier à Exupère de Toulouse et une autre de Léon Ier à Turibius d’Astorga datées de la première moitié du Ve siècle

Voir aussi

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