Débredinoire de Saint-Menoux

La débredinoire est un sarcophage contenant les restes de saint Menoux, percé d'un trou dans lequel les simples d'esprit sont censés passer la tête afin de recouvrer la santé mentale. Elle constitue un élément identitaire majeur de la province du Bourbonnais.

Situation

Elle se trouve dans l'église du village de Saint-Menoux, dans l'Allier, à une quinzaine de kilomètres à l'ouest de Moulins, la préfecture.

La débredinoire avait été repoussée en par les révolutionnaires dans le déambulatoire pour laisser la place aux danses patriotiques. Elle est placée dans le chœur derrière l'autel depuis [1].

Origine

Personne passant la tête dans la débredinoire. Les reliques sont à droite.

Au VIIe siècle, selon la légende, un prélat probablement d'origine irlandaise dénommé Menulphe, supposément évêque de Quimper, de retour d'un pèlerinage à Rome entrepris à la fin de sa vie, passe par le village, alors nommé Mailly-sur-Rose ; malade, il s'y installe et sa réputation d'anachorète, faiseur de miracles, se répand bien vite. Il finit par rendre son dernier soupir sur place un (année inconnue)[n 1]. Durant son séjour, il s'était attaché les services du simple d'esprit du village, Blaise. À la mort de son protecteur, Blaise refuse de le quitter et se couche sur son sarcophage. Finalement, il put continuer à honorer la dépouille de l'évêque en passant sa tête dans son sarcophage, grâce à un orifice percé avec le concours du curé. La légende dit qu'il devint sage au fil du temps. Rapidement, d'autres miracles se produisent et attirent une foule de pèlerins, mais la dépouille du saint devint surtout connu pour rendre leurs esprits aux personnes un peu dérangées.

Le village est alors renommé Saint-Menoux et une abbaye de bénédictines est créée au Xe siècle pour accueillir les pèlerins[2],[3].

Après d'importantes destructions et profanations à la Révolution, seule l'église de Saint-Menoux subsiste.

Église de Saint-Menoux. Style roman bourguignon, XIIe siècle.

Cette église, construite dans le style roman bourguignon, date globalement du XIIe siècle. Le chœur possède deux travées et précède une profonde abside entourée d'un déambulatoire. C'est là, derrière l'autel, que se trouve le sarcophage du saint ; ce dernier contenant encore une partie des reliques, que quatre petites rosettes ajourées permettent d'entrevoir.

Le sarcophage est percé sur le flanc d'un trou en demi-cercle, dans lequel, selon la légende, les « simples d'esprit » et autres esprits tourmentés ou en souffrance viennent passer la tête pour y laisser leur "folie" ou tout simplement leurs maux de tête, souvent ce sont de simples touristes qui viennent satisfaire leur curiosité ! Quelques ex-voto témoignent cependant des effets présumés qu'aurait cet exercice de dévotion mais, gare à ne pas toucher les bords du trou en passant sa tête, car la légende veut que celui qui le ferait récupèrerait toute la folie, accumulée dans la pierre, de ceux qui sont passés avant lui[2],[3].

Le nom débredinoire provient du mot bredin, qui signifie "simple d'esprit" en dialecte bourbonnais.

La romancière Anne Waddington a appelé Le Débredinoire l'un de ses romans, paru en 2008, mais le rapport paraît seulement symbolique.

René Fallet, romancier (1927-1983), amoureux du Bourbonnais, parle de la débredinoire de Saint-Menoux dans son roman Un idiot à Paris : « De bons samaritains l'avaient pourtant traîné à la débredinoire de St-Menoux afin que le saint du lieu, spécialiste des maladies mentales, le "débredinât" pour de bon et lui rendît le sens commun, la maturité politique, l'aspiration aux choses de la pensée, l'appétit de culture et le goût de la grandeur qui caractérisaient ses contemporains… »

Description

Ce sarcophage du VIe siècle, monolithique en grès rose, jaune et violet, est de forme trapézoïdale. La cuve mesure 199 de long, 66 de large et 57 de profondeur. Il est sans doute remonté de la crypte au début du XIe siècle. Au XIIe siècle la fenestella[n 2] est agrandie par une ouverture en plein cintre à décor floral, cette modification entraîne plusieurs fissures. En , Dadole réalise une restauration du sarcophage et le surélève par une marche et deux colonnettes pour le rendre plus accessible à la dévotion. En , le curé fait percer quatre petites ouvertures en forme de fleur permettant de voir les reliques[1]. Il est classé monument historique au titre immeuble en 1840, étant intégré à l'église elle même classée[1].

Un ou une débredinoire ?

Le mot se rencontre au masculin et au féminin[n 3]. Les sites locaux à caractère officiel sont partagés[3],[4]. Les écrivains régionaux semblent préférer le féminin[5], mais il y a des contre-exemples[6].

Bien qu'il ne s'agisse pas d'un mot du français standard, mais d'un mot de parler régional, on peut prendre en compte le traitement du suffixe -oir/-oire en français[7]. Les noms d'instrument construits avec le suffixe -oire sont normalement féminins (bassinoire, balançoire, écritoire, doloire, etc.), tandis que ceux, beaucoup plus nombreux, qui se terminent en -oir sont habituellement masculins (encensoir, ostensoir, battoir, miroir, tranchoir, arrosoir, etc.) ; il existe des mots masculins en -oire, comme observatoire, déambulatoire, crématoire, dormitoire, auditoire, mais ce ne sont pas des noms d'instrument ; ils désignent pour la plupart des lieux.

Le mot « débredinoir » est attesté aussi (et dans ce cas il est naturellement masculin).

Débredinoire

Notes et références

Notes

  1. Connaître l'anniversaire est important pour prier tous les ans pour l'âme du moine, mais pas l'année de sa mort.
  2. Ouverture permettant de voir une relique ou une tombe vénérée.
  3. Une recherche sur google donne un assez net avantage à la forme féminine.

Références

  1. Notice no IM03000389, base Palissy, ministère français de la Culture
  2. Le Debrédinoire sur lieux-insolites.fr (consulté le 29 août 2017)
  3. Office de tourisme de Bourbon-l'Archambault
  4. Comité départemental du tourisme de l'Allier.
  5. Valery Larbaud (dans plusieurs textes), René Fallet (Un idiot à Paris), Marcel Bonin (Les noms de lieux en Bourbonnais, p. 59), Jean Débordes (loc. cit.), Jean Anglade (L'Auvergne de Jean Anglade, p. 37).
  6. Frantz Brunet, Dictionnaire du parler bourbonnais et des régions voisines, p. 30 s.v. « berdin ».
  7. Trésor de la Langue française.

Voir aussi

Bibliographie

  • Jean Débordes, chap. III « La débredinoire de Saint-Menoux », dans Les Mystères de l'Allier : Histoires insolites, étranges, criminelles et extraordinaires, Clermont-Ferrand, De Borée, (ISBN 978-2-8449-4085-8), p. 37 et suiv.

Articles connexes

Liens externes

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