Cría cuervos

Cría cuervos est un film espagnol réalisé par Carlos Saura, sorti en 1976.

Cet article possède un paronyme, voir Crew Cuervos.

Cría cuervos
Réalisation Carlos Saura
Scénario Carlos Saura
Acteurs principaux
Sociétés de production Elías Querejeta Producciones Cinematográficas
Pays d’origine Espagne
Genre Drame
Durée 110 minutes
Sortie 1976


Pour plus de détails, voir Fiche technique et Distribution

Le titre fait référence au dicton espagnol « cría cuervos y te sacarán los ojos » (littéralement « élève des corbeaux et ils te crèveront les yeux »).

Synopsis

Dans le Madrid des années 1970, Ana, dix ans à peine, a été témoin de la mort de ses parents : son père mort dans les bras de sa maîtresse et sa mère, morte avant cela. Élevée par Paulina, sa tante maternelle, avec laquelle elle ne s'entend pas, elle se réfugie alors dans ses rêves et souvenirs pour retrouver sa mère.

Fiche technique

Distribution

  • Géraldine Chaplin (VF : Béatrice Delfe[1]) : La mère d'Ana / Ana adulte
  • Mónica Randall : Paulina, la tante des trois filles
  • Florinda Chico : Rosa, la bonne
  • Ana Torrent : Ana à 8 ans
  • Héctor Alterio : Anselmo, un officier franquiste, le père des trois filles
  • Germán Cobos : Nicolás Garontes, un officier ami du père d'Ana
  • Mirta Miller : Amelia Garontes, sa femme
  • Josefina Díaz : la grand-mère paralytique des fillettes
  • Conchita Pérez : Irène, 11 ans, l'aînée des trois filles
  • Maite Sánchez : Maïté, 5 ans, la cadette des trois filles
  • Juan Sánchez Almendros

Analyse

Cría cuervos est une fable sur les rapports difficiles entre l'enfance et l'âge adulte. L'incompréhension entre ces deux mondes prend un relief saisissant dans une Espagne franquiste et bourgeoise cloisonnée dans ses codes et ses interdits. C'est également un film « presque entièrement consacré à l'évocation d'un univers féminin. Le metteur en scène a su montrer avec une grande sensibilité la force de l'amour entre une enfant et sa mère »[2] irrémédiablement disparue.

« Je crois que les enfants ont une idée de la mort différente de celle qu'ont les adultes. Pour un adulte, la mort c'est la fin d'un processus de dégradation et d'usure. Pour un enfant, la mort s'identifie plus à la disparition, elle n'a pas de sens tragique [...]. Pour Ana (Ana Torrent) enfant, la mort de sa mère signifie sa disparition, ce qui veut dire qu'à n'importe quel moment elle peut réapparaître, et pour cela, elle est capable de la faire revivre quand elle en a besoin », dit Carlos Saura[3].

C'est donc une vision sans idéalisme sur le monde de l'enfance. Ana, le personnage principal, pense qu'elle a le pouvoir de faire revivre sa mère par la seule force de ses souvenirs. Mais aussi celui de faire mourir son père qu'elle juge responsable de la mort de sa mère et sa tante qui ne réussit pas à remplacer cette dernière. Ana porte sur les adultes un regard d'enfant extrêmement mûr, rempli de cynisme et de réalisme. Dans Cría cuervos, Carlos Saura mélange habilement le présent avec Ana devenue adulte qui analyse les moments qu'elle se remémore, le passé, avec le souvenir omniprésent de sa mère, et le futur. « Le fait que l'histoire soit racontée par Ana femme, vingt ans après le déroulement des événements, signifie que le récit s'effectue à partir du futur. Ce n'est pas gratuit, c'est simplement la seule façon que j'ai trouvée de voir le présent avec les yeux du passé », explique le réalisateur[3].

Autour du film

  • « Cría cuervos » signifie « Élève des corbeaux ». Le titre s'inspire ironiquement d'un proverbe espagnol : « Cría cuervos y te sacarán los ojos » qui signifie « Élève des corbeaux et ils t'arracheront les yeux ». Cette maxime est volontiers utilisée par des adultes se plaignant amèrement de l'ingratitude des enfants. Le titre reflète donc le point de vue de la tante Paulina. Le dicton n'a pas d'équivalent exact en français mais correspond au portugais quem cria cobra amanhace picado, « qui élève des serpents se réveillera un jour mordu ».
  • Carlos Saura annonce le titre de ce film dans La Cousine Angélique, son œuvre précédente, en plaçant le fameux dicton dans la bouche de l'acteur Fernando Delgado, à l'instant où il se prépare à infliger une sévère correction à Luis (José Luis López Vázquez), coupable d'une escapade avec sa cousine[2].
  • La chanson Porque te vas, composée par José Luis Perales et interprétée par Jeanette, est le thème musical du film. Sortie deux ans plus tôt mais passée inaperçue, cette chansonnette du film est devenue par la suite un véritable hit international, notamment en France où elle a été le tube de l'été 1976.

Distinctions

Récompenses

Nominations


Notes et références

  1. (fr) RSdoublage.com (onglet doublage)
  2. Emmanuel Larraz (préf. Luis Garcia Berlanga), Le cinéma espagnol des origines à nos jours, Paris, Les Éditions du Cerf,, coll. « Septième art » (no 77), (ISBN 978-2-204-02487-7, OCLC 417176223).
  3. Enrique Brasó : Entretien avec Carlos Saura, Positif, no 194, juin 1977.

Voir aussi

Bibliographie

  • (es) Natalia Ardanaz Yunta, « Cría Cuervos, la representación del universo femenino en una película de la transición », dans Rafael Ruzafa Ortega (dir.), La historia a través del cine : transición y consolidación democrática en España, Universidad del País Vasco/Euskal Herriko Unibertsitatea, Servicio de Publicaciones, , 264 p. (ISBN 84-8373-645-4, lire en ligne), p. 129-166.
  • (en) Rachel Beaney, « Orphans at play in Cría cuervos (1976) and Estiu 1993 (2017) : Reconsidering the playspace », Forum for Modern Language Studies, vol. 56, no 4, (DOI 10.1093/fmls/cqaa047).
  • Marianne Bloch-Robin, « Invisible et indicible dans Cría Cuervos (1975) de Carlos Saura », L'Âge d'or. Images dans le monde ibérique et ibéricoaméricain, no 5 « Le visible et l’invisible dans le monde hispanique et hispano-américain », (DOI 10.4000/agedor.909, lire en ligne).
  • (en) Stuart Davis, « The time of the (orphan) child : Viewing Carla Simón's Estiu 1993/Summer 1993 (2017) with Carlos Saura's Cría cuervos/Raise Ravens (1976) », Studies in Spanish & Latin American Cinemas, Publisher Intellect Ltd., vol. 17, no 1, , p. 117-136 (ISSN 2050-4837, DOI 10.1386/slac_00014_1).
  • Arnaud Duprat de Montero, « Les voix des héroïnes de Geraldine Chaplin dans le cinéma de Carlos Saura ou la mise en lumière d'une collaboration artistique », Entrelacs, no 11 « La Voix », (DOI 10.4000/entrelacs.912, lire en ligne).
  • (pt) Sandra Fischer, « Cría cuervos e Todo sobre mi madre : família, cinema e subversão », Significação : revista brasileira de semiótica, vol. 31, no 21, , p. 43-61 (ISSN 1516-4330, DOI 10.11606/issn.2316-7114.sig.2004.65581, lire en ligne).
  • (es) Mariá José Gámez Fuentes, « Maternidad y Ausencia en Cría cuervos de Carlos Saura », Hispanic Research Journal : Iberian and Latin American Studies, vol. 2, no 2, , p. 153-164 (DOI 10.1179/hrj.2001.2.2.153).
  • (en) Yeon-Soo Kim, The Family Album : Histories, Subjectivities, and Immigration in Contemporary Spanish Culture, Lewisburg (Pennsylvanie), Bucknell University Press, , 268 p. (ISBN 0-8387-5610-7), chap. 2 (« The Family Album and Gender : Transgenerational Succession of Historical Consciousness in Carlos Saura's Cría cuervos and Julio Llamazares's Escenas de cine mudo »), p. 69-95.
  • (de) Rolf Kloepfer, « Die Konzeption einer neuen Blickweise für die eigene Geschichte : Sauras Film Cría cuervos », dans Bernhard Teuber et Horst Weich (dir.), Iberische Körperbilder im Dialog der Medien und Kulturen, Francfort-sur-le-Main / Madrid, Vervuert Verlagsgesellschaft, , 320 p. (ISBN 978-3893541485, DOI 10.31819/9783964567123-016), p. 269-294.
  • (en) Guillermo Rodríguez-Romaguera, « « Y te sacarán los ojos... » : the defiance of reconstituted sight in dictatorship and post-dictatorship Spanish cinema », Studies in European Cinema, , p. 1-15.
  • Jean Tena, « La prima Angélica et Cría cuervos : le regard d'un(e) enfant », dans Voir et lire Carlos Saura : actes du colloque international Carlos Saura, Dijon, 25 et , Dijon, Faculté des langues, coll. « Hispanistica XX », , 188 p. (lire en ligne), p. 43-49.
  • (en) Sarah Thomas, Inhabiting the In-Between : Childhood and Cinema in Spain's Long Transition, Toronto, University of Toronto Press, , 240 p. (ISBN 978-1-4875-0488-5).
  • (en) Sarah Wright, The child in Spanish cinema, Manchester University Press, , 224 p. (ISBN 978-0-7190-9052-3, présentation en ligne).

Article connexe

Liens externes

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