Courbure spatiale

En cosmologie, la courbure spatiale représente la courbure[note 1] de l'Univers (uniquement dans ses dimensions spatiales) dans un modèle homogène et isotrope de type Friedmann-Lemaître-Robertson-Walker. Intuitivement, elle donne une échelle de longueur qui délimite les distances en deçà desquelles l'univers peut localement être décrit à l'aide d'une métrique euclidienne, c'est-à-dire que les résultats de géométrie dans l'espace usuelle (comme le théorème de Pythagore) restent valables. Dans un tel modèle cosmologique, la courbure spatiale est le seul paramètre géométrique local qui caractérise la structure de l'espace. Comme de coutume en géométrie, la courbure spatiale correspond (au signe éventuel près) à l'inverse du carré du rayon de courbure des hypersurfaces de densité constantes existant dans ces modèles[pas clair].

Trois cas possibles

Les trois courbures spatiales possibles. (La 1re image correspond à la courbure spatiale positive, la 2e à la courbure spatiale négative et la 3e à la courbure spatiale nulle.)

Trois cas sont possibles, selon le signe de la courbure :

  • Une courbure spatiale nulle décrit un univers plat. Elle correspond à des sections spatiales décrites par la géométrie euclidienne. En particulier le théorème de Pythagore y est valable, et la somme des angles d'un triangle est égale à 180 degrés.
  • Une courbure spatiale positive caractérise un univers fermé. Elle correspond à l'analogue tridimensionnel de la géométrie sphérique. Le théorème de Pythagore n'est plus valable, et la somme des angles d'un triangle est supérieure à 180 degrés. Corollaire, la taille angulaire d'un objet de taille donnée décroît moins vite avec la distance que dans le cas précédent (et augmente même avec la distance pour un objet situé plus proche du point antipodal que de l'observateur). On peut aisément visualiser un espace à deux dimensions de courbure positive constante : il s'agit de la sphère. Son analogue tridimensionnel est en revanche plus difficile à visualiser.
  • Une courbure spatiale négative caractérise un univers ouvert. Elle correspond à une géométrie hyperbolique. Le théorème de Pythagore n'est pas valable non plus, et la somme des angles d'un triangle est inférieure à 180 degrés. En conséquence, la taille angulaire des objets décroît plus vite avec la distance que dans les cas précédents. Sur des échelles plus grandes que le rayon de courbure, elle décroît même exponentiellement et non linéairement avec la distance. Un exemple simple en deux dimensions est donné par l'hyperboloïde à une nappe (visuellement c'est une selle de cheval quand il est plongé dans l'espace à trois dimensions). Encore une fois il n'est pas facile de visualiser simplement un espace tridimensionnel hyperbolique.

Les représentations visuelles de la courbure ne sont que des visualisations de la courbure à l'aide d'une troisième dimension mais la définition d'une surface bidimensionnelle courbe ne nécessite pas l’existence d'une troisième dimension. Elle est autosuffisante et n’a pas besoin d’être la surface d’autre chose. De même, il n'y a pas besoin d'une quatrième dimension pour définir la courbure d'un espace tridimensionnel[1].

Aspects cosmologiques

Les équations de Friedmann relient le paramètre de Hubble à la courbure et la masse volumique moyenne de la matière selon la formule

,

est la constante de Newton, la vitesse de la lumière et le facteur d'échelle. La courbure spatiale (unité : l'inverse du carré d'une longueur) correspond ici à . En introduisant la densité critique et le paramètre de densité , il est possible de réécrire l'égalité précédente selon

.

Le rayon de courbure des sections spatiales peut donc s'écrire en termes de l'écart à 1 du paramètre de densité et du rayon de Hubble,  :

Cette dernière égalité permet de voir quel écart éventuel à 1 du paramètre de densité l'on peut espérer mesurer. Pour que les effets géométriques (liés à la relation entre taille angulaire et distance) soient mesurables du fait d'une courbure non nulle, il faut que le rayon de courbure ne soit pas trop grand par rapport au rayon de l'univers observable. Dans le modèle standard de la cosmologie, cette dernière est de l'ordre de trois rayons de Hubble. Ainsi, les effets géométriques dus à une courbure spatiale non nulle sont mesurables dès que la quantité

n'est pas trop petite devant 1. De façon un peu inattendue, cela prouve que des valeurs de de 0,97 ou 1,03 peuvent être distinguées sans trop de difficulté, quand bien même les incertitudes sur la densité critique et la densité de matière (dont le rapport est égal à ) sont importantes.

Courbure et devenir de l'expansion de l'univers

Il est parfois dit que le signe de la courbure spatiale détermine le devenir de l'expansion de l'Univers, celui-ci connaissant une expansion éternelle si la courbure est négative ou nulle, ou un arrêt de cette expansion suivi d'un Big Crunch quand la courbure est positive. Cette assertion est erronée car elle dépend du contenu matériel de l'univers. Si toutes les formes de matière de l'univers sont de pression nulle ou négligeable, alors l'assertion précédente est exacte. Dans le cas où on a de la matière ordinaire et une constante cosmologique la situation devient très différente. En particulier un univers à courbure positive et constante cosmologique positive peut soit être issu d'un Big Bang et finir par se recontracter (quand la constante cosmologique est faible), soit avoir le même passé, mais une expansion éternelle si la constante cosmologique est suffisamment grande, soit être statique (c'est l'univers d'Einstein), soit avoir connu par le passé une phase de contraction, suivie d'une phase de rebond et d'une expansion éternelle (un des cas possibles de l'univers de Sitter).

Importance pour les modèles cosmologiques

Le modèle standard de la cosmologie est à l'heure actuelle dominé par l'idée que l'univers a connu une phase d'expansion extrêmement violente dans son passé, appelée inflation. Ce modèle prédit que les sections spatiales de l'univers soient euclidiennes, en tout cas sur des échelles de l'ordre de la taille de l'univers observable. Un écart avéré de la courbure spatiale à la valeur nulle serait considéré comme un argument très fort en défaveur de l'inflation, même si celle-ci pourrait s'accommoder d'un tel résultat, mais en nécessitant des paramètres assez peu naturels.

Données actuelles

La courbure spatiale de l'univers est déterminée en analysant les anisotropies du fond diffus cosmologique. Actuellement, les données les plus précises sont celles qui ont été fournies par le satellite Planck en 2013. D'après ces mesures, il y a 95 % de chances pour que :

[2]

On ne sait donc toujours pas si l'univers a une courbure positive, négative ou nulle. Cependant on peut affirmer que le rayon de l'univers est supérieur à 19 fois le rayon de Hubble si la courbure de l'univers est positive et supérieur à 33 fois le rayon de Hubble si la courbure de l'univers est négative.

Notes et références

Notes

  1. La courbure peut être caractérisée de plusieurs façons. Sean Carroll, dans Lecture notes on general relativity, en particulier page 219, utilise principalement le scalaire de Ricci. D'autres auteurs[réf. souhaitée] utilisent la courbure sectionnelle.

Références

  1. Max Tegmark, Notre univers mathématique : En quête de la nature ultime du Réel, Dunod, , 504 p. (ISBN 978-2-10-057036-2 et 2-10-057036-6), p. 44
  2. Planck Collaboration, P. A. R. Ade, N. Aghanim et C. Armitage-Caplan, « Planck 2013 results. XXVI. Background geometry and topology of the Universe », Astronomy & Astrophysics, vol. 571, , p. 2 (ISSN 0004-6361 et 1432-0746, DOI 10.1051/0004-6361/201321546, lire en ligne, consulté le )

Voir aussi

Articles connexes

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