China Cables

China Cables est une enquête coordonnée par le Consortium international des journalistes d'investigation (ICIJ), associant 250 journalistes issus de 59 médias internationaux. Publiée à partir du , elle révèle l'existence et le fonctionnement des camps d'internement de la population ouïghoure, dans la province du Xinjiang.

Pour un article plus général, voir Camps d'internement du Xinjiang.

China Cables
Publication
Éditeurs clés Consortium international des journalistes d'investigation
Objet Camps d'internement du Xinjiang
Site web www.icij.org/investigations/china-cables/about-the-china-cables-investigation

Contexte

La politique d'internement des Ouïghours est d'abord révélée dans son ampleur par le chercheur Adrian Zenz en juillet 2019[1],[2].

Xinjiang Papers

Les Xinjiang Papers, documents internes chinois transmis au New York Times en novembre 2019[3], documentent la répression contre la minorité musulmane et la nature des camps[4],[5].

China Cables

Dix-sept médias révèlent le 24 novembre 2019 l'enquête du Consortium international des journalistes d’investigation sur la politique de répression et de détention menée par l'État chinois au Xinjiang envers la population ouighoure[6].

La BBC, le Guardian, la Süddeutsche Zeitung, El Pais, Le Monde et les agences Associated Press et Kyodo ont été associés à l'enquête[6].

Enquête

Nature des documents

Les documents obtenus sont un ensemble de directives et d'instructions administratives de l'État et du parti chinois. Les documents, classés secrets, datent de 2017 et mentionnent le rôle majeur de Zhu Hailun[7], directeur de la Commission politique et légale, numéro deux du parti dans la province du Xinjiang[6].

L'ICIJ indique ne pas connaître l'identité de la source ayant transmis les documents, et reconnaît les avoir reçus sans contrepartie[8].

Plusieurs circulaires et directives détaillent le fonctionnement des camps d'internement, mais également la création d’une base de données de surveillance de la population. La « plate-forme intégrée des opérations conjointes » fixe les critères permettant d'interner une population nombreuse[6].

Les circulaires montrent également le caractère coercitif et carcéral des camps d'internement[6].

Analyses

Associated Press indique que Pékin inaugure ainsi une nouvelle forme de contrôle social, fondée sur la combinaison de la surveillance de masse et de l'intelligence artificielle[9]. Pour El Pais, « Pékin, pour développer son système répressif, mise sur les technologies les plus modernes, parmi lesquelles l'interprétation des métadonnées, la surveillance des applications mobiles ou la reconnaissance faciale - et cela est particulièrement préoccupant. Si ce modèle a été testé et perfectionné dans un premier temps sur les Ouïgours, il est aisé de le transposer et de l'appliquer au reste de la population ou à un autre pays »[10].

Selon le quotidien Le Monde, les documents présentent un système « d’une perversité extrême, un mélange de camp militaire et de prison secrète »[6], dont le but est « l’endoctrinement et le lavage de cerveau jusqu’à l’aveu et à la repentance obtenus y compris au moyen de la torture »[11]. Pour la Süddeutsche Zeitung, ces documents prouvent la nature carcérale des camps, alors que le gouvernement chinois persiste à les présenter comme des « centres de formation »[8].

Selon le chercheur Adrian Zenz, la politique de surveillance et d'internement des Ouïgours est un génocide culturel[2],[12].

Réactions

Le gouvernement chinois qualifie les documents fondant l'enquête de « fake news »[6].

Amnesty International demande au gouvernement chinois d'autoriser « des observateurs indépendants de la situation des droits humains à se rendre sans délai et sans entrave au Xinjiang », et espère des pressions accrues de la communauté internationale[13].

Le gouvernement allemand condamne l'internement de la population ouïghoure : le ministre des Affaires étrangères Heiko Maas indique être préoccupé par la situation, et vouloir poursuivre le dialogue avec Pékin[14]. La coopération de Siemens avec des entreprises chinoises impliquées dans le programme de surveillance des Ouïghours est questionnée[15], de même que l'activité de Volkswagen[16], BASF ou KfW au Xinjiang[17]. Selon la Fondation Bertelsmann, « Berlin tente de sauvegarder le partenariat développé ces dernières décennies, et qui a été très profitable économiquement aux deux parties. Mais Berlin doit prendre conscience des enjeux que pose le commerce avec la Chine, et faire ce qu'il faut pour réduire sa dépendance »[15].

La France, par la voix de son ministre des affaires étrangères, invite « la Chine, outre la fermeture des camps d’internement, à inviter la haut-commissaire aux droits de l’homme [de l’ONU, Michelle Bachelet] et les experts des procédures spéciales dans les meilleurs délais afin de rendre compte de manière impartiale de la situation »[18].

Notes et références

  1. (en) Adrian Zenz, « Break Their Roots: Evidence for China’s Parent-Child Separation Campaign in Xinjiang », Journal of political Risk, (lire en ligne)
  2. Laurence Defranoux et Valentin Cebron, « Ouïghours : au Xinjiang, un lent et silencieux «génocide culturel» », Libération, (lire en ligne)
  3. « Ouïghours opprimés dans le Xinjiang : «Soyez sans pitié», a dit Xi Jinping », sur Libération.fr, (consulté le )
  4. (en-GB) Lily Kuo, « 'Show no mercy': leaked documents reveal details of China's Xinjiang detentions », The Guardian, (ISSN 0261-3077, lire en ligne, consulté le )
  5. (en-US) Austin Ramzy et Chris Buckley, « ‘Absolutely No Mercy’: Leaked Files Expose How China Organized Mass Detentions of Muslims », The New York Times, (ISSN 0362-4331, lire en ligne, consulté le )
  6. Harold Thibault et Brice Pedroletti, « « China Cables » : révélations sur le fonctionnement des camps d’internement des Ouïgours », Le Monde, (lire en ligne, consulté le )
  7. Sebastian Seibt, « “China Cables” : Zhu Hailun, artisan de la "rééducation" des Ouïghours », sur France 24, (consulté le )
  8. (de) Bastian Obermayer et Frederik Obermaier, « Uiguren: Die wichtigsten Fakten zu den China Cables », sur Süddeutsche.de (consulté le )
  9. « Secret documents: China detention camps to ‘prevent escapes’ », sur AP NEWS, (consulté le )
  10. (es) El País, « Editorial | Represión china », El País, (ISSN 1134-6582, lire en ligne, consulté le )
  11. Le Monde, « « China Cables » : il faut briser le silence sur le goulag des Ouïgours », Le Monde, (lire en ligne, consulté le )
  12. Dorian Malovic, « Chine, l’univers dantesque des camps de travail au Xinjiang », La Croix, (ISSN 0242-6056, lire en ligne, consulté le )
  13. « Chine. Les autorités doivent cesser de nier les faits et donner des réponses aux victimes des terribles violations perpétrées au Xinjiang », sur www.amnesty.org (consulté le )
  14. (de) tagesschau.de, « China Cables: Bundesregierung besorgt, aber weiter im Dialog », sur tagesschau.de (consulté le )
  15. (en-GB) Austin Davis, « China Cables: Germany under pressure to respond to Beijing's Uighur internment | DW | 25.11.2019 », sur Deutsche Welle, (consulté le )
  16. Jean-Michel Hauteville, « Volkswagen embarrassé par son usine du Xinjiang, où Pékin réprime la minorité ouïgoure », Le Monde, (lire en ligne, consulté le )
  17. (de) Christine Adelhardt, Philipp Eckstein, Jan Lukas Strozyk et Benedikt Strunz, « China Cables : Ignorieren deutsche Firmen die Unterdrückung ? », Tagesschau, (lire en ligne)
  18. « Ouïgours : Paris appelle Pékin à cesser les « détentions arbitraires de masse » », Le Monde, (lire en ligne, consulté le )

Voir aussi

Articles connexes

Liens externes

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