Charles Joseph Fossez

Le fakir Birman

Charles Joseph Fossez, alias le fakir Birman né le à Saint-Étienne (Loire) est un astrologue, voyant ou devin, très controversé et condamné par la justice pour abus de confiance, mais extrêmement populaire en France durant les années 1930 et qui mit fin à ses jours le 12 décembre 1952, dans le 9e arrondissement de Paris.

Biographie

Un astrologue populaire

Charles Joseph Fossez est né au domicile de ses parents au tout début du siècle. Son père, prénommé Louis, exerçait la profession de chirurgien dentiste dans la ville de Saint-Étienne dans le département de la Loire. Alors qu'il est âgé d'une trentaine d'années, Fossez quitte son emploi de vendeur aux Galeries Lafayette de sa ville natale pour se rendre à Paris et décide de s'installer une dans le quartier Saint-Lazare, situé au cœur de la métropole.

Au début de l'année 1932, un texte de trois lignes, publié dans la rubrique des petites annonces de sciences occultes du journal L'Intransigeant, est libellée ainsi :

« Dans l’ennui, venez à lui: FAKIR BIRMAN. »

avec l'indication des horaires de consultation (de 2 à 7 heures) et l'adresse (14, rue de Berne). Ce texte marque le début de la carrière et de l’« activité considérable » du fakir qui durèrent sept ans jusqu’à l'année qui vit le déclanchement de la Seconde Guerre mondiale. Pas plus fakir que Birman, Charles Joseph Flossez parvint à attirer une importante clientèle. Un premier procès lié à une affaire de femme trompée par un mari volage qui vient demander conseil au fakir, le rend célèbre[1].

Ayant compris que le seul moyen d'attirer les foules était de soigner sa présentation, il décide de se coiffer d’un turban blanc de porter une barbe soigneusement taillée en gardant une allure autant intimidante que photogénique. En 1939, il est contraint par les autorités de mettre fin à ses activités de voyance. Malgré ses nombreuses relations féminines, il finit par se marier en 1944 avec une femme d'origine indochinoise. Déprimé, il finira par se suicider dans son appartement de la rue Ballu à Paris, le 12 décembre 1952 sans avoir oublié d'écrire un livre de souvenirs, publié six ans auparavant[2].

Interviewé en 1949, Charles Joseph Fossez rappelle ses heures de gloire comme fakir en revendiquant plus de 500 000 fiches de clients et 75 dactylos à son service et se vente même d'avoir reçu en « consultation », Marguerite Lebrun, épouse du président de la République de l'époque qui lui aurait demandé si elle pouvait se rendre, sans danger, dans un institut d'amaigrissement[3].

Une voiture postale de l'époque était nécessaire pour amener un courrier venu de partout à son domicile et dut procéder à plusieurs agrandissements de ses locaux en raison de son succès. Son bureau de consultation était luxueusement aménagé afin d'impressionner ses clients. Il aurait amassé une somme de 50 millions de francs à l'époque[4].

Un escroc rattrapé par la justice

Maurice Garçon l'avocat du fakir Birman lors du procès de 1941.

En juin, 1938, Le « fakir Birman », alias « Sarum Katelik Maksoudian », (en fait Charles Joseph Fossez) se retrouve avec des complices dont le « mage noir Samba » dit « Ybou Marie » (de son vrai nom Abdoulaye Touré) et le « professeur Olaf » dit « Georges Lazujan » (de son vrai nom Helmut Schelssinger) en accusé à la 13e chambre correctionnelle de Paris dans ce que la presse dénommé le « procès de fakirs »[5]. Toutes ces personnes sont notamment accusées d'escroquerie et d'abus de confiance sur la base d'une organisation comprenant plus d'une trentaine de personnes. Le substitut du procureur Lebesque reprochant à ce voyant d'avoir mention dans sa publicité d'avoir indiqué à leurs clients les numéros gagnants de la loterie nationale avant leurs tirages[6]. Le trafic se basait également sur l'établissement d'horoscopes gratuits, mais en fait partiels puis payant, selon des prix progressifs si le client, ainsi attiré, demandait à en savoir plus sur son avenir[7].

Le 16 juin de cette même année, le délit d'abus de confiance ayant été retenu, le fakir Birman est condamné à 3 000 francs d'amende et l'ensemble de ses complices astrologues à diverses sommes d'amende fixées entre 500 et 3 000 francs[8],[9].

Le , Charles Joseph Fossez se retrouve de nouveau devant un tribunal. La 16e chambre correctionnelle de Paris, le condamne à 4 000 francs d'amende pour « avoir fait commerce d'illusions ». Celui-ci, par la voix de son avocat Maurice Garçon, avait pourtant déclaré avoir abandonné sa profession de fakir pour se lancer dans la vente de lingerie féminine mais le tribunal le soupçonnant également de pratique le marché noir n'a pas hésité à prononcer cette sentence[10].

Évocations

Dans le film, d'Henri Decoin sorti en 1955, Razzia sur la chnouf, le personnage de Roger le Catalan, joué par Lino Ventura, annonce devant ses complices qu'il ignore comment ceux-ci ont pu être dénoncé par la simple réplique « Je ne suis pas le fakir Birman, moi »[11].

Dans son livre Pourquoi je fuis les cartomanciennes ?, le prêtre et romancier Roger Guichardan (paru aux éditions Bonne Presse en 1946) dénonce les voyants et autres devins et évoque le fakir Birman au travers du fameux procès des fakirs[12].

Selon l'ouvrage Le métro virtuel de Thierry Van de Leur, Charles Joseph Fossez au travers de son numéro de fakir (car celui-ci aimait bien participer à des exhibitions afin de soigner sa publicité) a pu inspirer à Pierre Dac la création de son fameux sketch du fakir, plus connu sous le titre Le Sâr Rabindranath Duval[13].

Références

  1. Gilette Ziegler, Histoire secrète de Paris, FeniXX, 236 p. (ISBN 9782706280733, présentation en ligne).
  2. Olivier Cariguel, « Un sorcier moderne, le fakir Birman, de l'astrologie au dessous féminins », Revue des Deux Mondes, décembre 2018-janvier 2019, p. 148-155 (lire en ligne, consulté le ).
  3. Éliane Gauthier, La voyance pour les Nuls, First, , 324 p. (ISBN 9782754073318, présentation en ligne).
  4. René Vaisan, Le secret des sorciers modernes, Lyon, Aime Brachet, , 280 p. (ISBN 9782402222525, présentation en ligne).
  5. « Le procès des fakirs se poursuit en correctionnelle », Paris Soir, no 5433, , p. 7 (lire en ligne sur Gallica, consulté le ).
  6. « Les fakirs sous des fleurs de rhétorique », L'Excelsior, no 10030, , p. 7 (lire en ligne sur Gallica, consulté le ).
  7. « Le professeur Olaf et d'autres fakirs faisaient l'objet de plaintes multiples », L'Ouest-Éclair, no 15151, , p. 2 (lire en ligne sur Gallica, consulté le ).
  8. « Les fakirs n'avaient pas prévu çà... », Le Petit Marocain, no 6846, , p. 3 (lire en ligne sur Gallica, consulté le ).
  9. « Les « fakirs » ont été condamné par la 13e chambre correctionnelle », La Croix, no 16981, , p. 2 (lire en ligne sur Gallica, consulté le ).
  10. « Hors d'œuvres, de la 11e à la 16e », L'Œuvre, no 9301, , p. 2 (lire en ligne sur Gallica, consulté le ).
  11. « extrait du film "razzia sur la chnouff" », sur lemondedesavengers.fr (consulté le ).
  12. Roger Guichaurdan, Pourquoi je fuis les cartomanciennes ?, Bonne Presse, 32 p. (ISBN 9782307119449, OCLC 759751961, présentation en ligne).
  13. Thierry Van de Leur, Le métro virtuel, Lulu.com (ISBN 9791091289016, présentation en ligne), p. 16.

Annexes

Ouvrage de Charles Joseph Fossez

Autres ouvrages

  • Ni Fakir ni Birman - S’inventer une célébrité dans les années 1930 de Bertrand Tillier, éditions Le Point du Jour, 2021 (ISBN 978-2-912132-94-9)

Articles connexes

  • Portail des religions et croyances
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