Alain Laubreaux

Alain Laubreaux, né le à Nouméa et mort le à Madrid, est un journaliste et écrivain français.

Alain Laubreaux
Nom de naissance Alain Laubreaux
Naissance 9 octobre 1899
Nouméa, Nouvelle-Calédonie
Décès 15 juillet 1968
Madrid, Espagne
Nationalité française
Profession Journaliste
Écrivain
Spécialité Théâtre
Médias
Presse écrite Je suis partout

Principalement connu pour ses critiques de théâtre dans Je suis partout, il est condamné à mort par contumace en pour faits de collaboration.

Biographie

Fils d'un homme d'affaires installé depuis 1898 en Nouvelle-Calédonie, il y passe sa jeunesse et la colonie française marquera plusieurs de ses récits ultérieurs.

Alain Laubreaux a pour frères Raymond Laubreaux, futur enseignant au lycée Rodin à Paris, et qui écrira plusieurs ouvrages et critiques sur le théâtre tout comme lui, et Félicien Laubreaux, né en 1905, qui sera collaborationniste et prisonnier de guerre en Allemagne puis libéré tout en continuant d'exprimer durant sa captivité son adhésion à la politique de collaboration en qualité de rédacteur en chef du journal de l'Amicale des travailleurs français en Allemagne de 1942 à 1944.

Alain Laubreaux se rend en métropole pour finir sa scolarité au lycée Louis-le-Grand. Il retourne un temps en Nouvelle-Calédonie après la Première Guerre mondiale et, après avoir exercé comme clerc de notaire, il y fait ses armes dans le journalisme en y fondant avec son père le Messager de la Nouvelle-Calédonie en 1919, journal dont il écrit l'essentiel des articles et dont il fait seul la mise en page.

En 1921, il revient en France métropolitaine et sert tour à tour dans Le Journal (quotidien fortement ancré à droite, anticommuniste et ne cachant pas alors son admiration pour le régime fasciste de Mussolini, Laubreaux n'y écrit alors que pour la rubrique dite des « chiens écrasés ») puis à L'Œuvre (au contraire plutôt à gauche et pacifiste). Il se spécialise bientôt comme critique littéraire auprès du quotidien radical Dépêche de Toulouse (ancêtre de la Dépêche du Midi). Il est également rédacteur en chef du Paris matinal à partir de 1927 et de L'Européen à partir de 1929. Malgré ses convictions républicaines, il écrit un temps pour la revue maurrassienne Candide. Il fut avant-guerre le secrétaire d'Henri Béraud, mais une sombre affaire de plagiat entachera leur relation qui prendra fin en 1928.

En 1936, il entre à l'hebdomadaire Je suis partout, journal antisémite et pro-hitlérien où il remplit la fonction de critique de théâtre, tout en traitant occasionnellement de sujets politiques. Il y tient des positions pacifistes et antisémites, prônant l'entente avec l'Allemagne. Lucien Rebatet, autre journaliste de Je suis partout, expliquera l'attitude collaborationniste de Laubreaux en ces termes : « Avec lui, aucune équivoque. Venu de plusieurs bandes de réfractaires et de radicaux-socialistes toulousains fort débraillés dans leurs convictions, il n'avait pas à secouer comme nous des scrupules d'hommes de droite. Aucun débris de dogmes ne l'embarrassait. On peut dire qu'il s'était rallié à nous d'instinct, en 1936, du jour où ses amis démocrates avaient commencé d'agiter le boute-feu. Pas le moindre débat de conscience dans son cas, pas une seule de ces ridicules bouffées de chaleur que nous avions presque tous à confesser"[1].

Il est arrêté le [2] par Georges Mandel (nouveau ministre de l'Intérieur du gouvernement Paul Reynaud qui tente alors d'empêcher la débâcle et fait ainsi arrêter les principaux intellectuels d'extrême droite favorables à l'Allemagne nazie) et placé deux jours plus tard en détention à la prison de la Santé avec Charles Lesca, autre collaborateur à Je suis partout. Il est libéré par ordonnance du juge d'instruction au Tribunal militaire de la 12° région en date à Périgueux du , laquelle indique que "l'inculpation se base sur des allégations vagues, que rien de précis n'a été établi à l'encontre des inculpés et qu'il ne suffit pas de se borner à prétendre que leur activité est douteuse et leurs ressources mal établies.[3]"

Il soutient régulièrement et fanatiquement dans ses articles la politique de collaboration. En plus de sa participation à Je suis partout, il écrit également durant la guerre dans les principaux journaux collaborationnistes, dont Le Cri du peuple et Le Petit Parisien et il donne une conférence ayant pour sujet "Vingt ans de corruption", consacrée, selon le compte-rendu publié par l'hebdomadaire Je suis partout aux "malversations, escroqueries et crimes de sang d'Israël"[4].

Vouant depuis « près de vingt années » une haine féroce au poète Robert Desnos qui l'avait d'ailleurs giflé, il fut soupçonné, par Desnos lui-même et par son entourage[5], d'avoir joué un rôle dans son arrestation le par la Gestapo ; d'après le témoignage de Pierre Berger, Laubreaux intervint personnellement pour que Desnos fût déporté par le prochain convoi[5], alors que sa compagne Youki avait réussi à lui éviter le voyage. Pour Pierre Barlatier, Laubreaux est le responsable de la mort de Desnos[6].

À la Libération, il trouve refuge en [7] dans l'Espagne de Franco, auprès de Georges et Maud Guilbaud[8]. Accusé d'atteinte à la sûreté extérieure de l'État[9], il est condamné à mort par contumace le par la Cour de Justice de la Seine[10].

Anecdote

Connu pour ses critiques acides, il était craint et haï par une bonne partie du monde du spectacle. Ainsi, durant l'Occupation[11], Alain Laubreaux fut frappé publiquement, en juin 1941, par Jean Marais, qu'il avait appelé « l'homme au Cocteau entre les dents »[réf. nécessaire], et qui lui reprochait notamment d'avoir éreinté la pièce La Machine à écrire, de Jean Cocteau[12]. L'anecdote inspira librement la scène du film Le Dernier Métro, où le comédien interprété par Gérard Depardieu s'en prend à Daxiat, le critique de Je suis partout incarné par Jean-Louis Richard[13].

Bibliographie

Outre ses nombreux articles, dont certains à l'époque du Je suis partout avant la guerre furent publiés dans la Terreur rose (recueil d'articles d'opposition au gouvernement de Front populaire paru aux Éditions Denoël en 1939), Alain Laubreaux a écrit plusieurs œuvres littéraires dont la plupart furent inspirés par la Nouvelle-Calédonie.

  • Histoires canaques, éd. Fayard, coll. « Œuvres libres », Paris, 1926.
  • Yan-le-métis, éd. Albin Michel, Paris, 1928. Raconte les aventures plus ou moins rocambolesques d'un métis calédonien échoué aux Nouvelles-Hébrides, il perdit pour cette œuvre un procès en plagiat intenté par un autre auteur calédonien, Georges Baudoux[14].
  • Diane La Goule, éd. Albin Michel, Paris 1929
  • Le Corset noir, éd. Albin Michel, Paris 1930
  • Le Rocher à la voile, éd. Albin Michel, Paris 1930. Roman très critique sur la « bourgeoisie » nouméenne et l'administration coloniale et faisant l'éloge de la société « broussarde »[15].
  • L'Amateur de Cuisine, éd. Denoël & Steele, Paris 1931. Œuvre humoristique dans laquelle il revient sur sa passion de la cuisine et de la gastronomie, une version anglaise est parue la même année sous le titre de The Happy Glutton.
  • Aventures cocasses de Boulot aviateur, éd. Albin Michel, Paris, 1931 (avec Georges de La Fouchardière). Il écrit d'ailleurs les dialogues de l'adaptation cinématographique de ce roman, Boulot aviateur, réalisé par Maurice de Canonge en 1937[16].
  • Wara, éd. Albin Michel, Paris 1932
    • (de) trad. Noa Kiepenheuer = Matthias Holnstein: Wara. Goldmann, Leipzig 1934
  • Catherine Le Grand : le roman d'un couple impérial, Les Éditions nationales, Paris 1936.
  • J'étais un autre, éd. Albin Michel, Paris, 1941. Histoire romancée d'un bagnard et dont la véritable identité cache peut-être de nobles origines.
  • Écrit pendant la guerre, éd. du Centre d'études de l'agence Inter-France, Paris 1944[17].
  • Momus, poésies (épuisé)
  • Métropolis (traduit et adapté du roman allemand de Thea Von Harbou). Librairie Gallimard

Notes

  1. Lucien Rebatet, Les Mémoires d'un fasciste, Paris, Pauvert, 1976, p. 126-27.
  2. Je suis partout, 7 février 1941, page 1.
  3. Je suis partout, 7 février 1941, page 1
  4. Robert Klein, Je suis partout, les Juifs, 1941, , 190 p. (ISBN 978-1731151193), p.18.
  5. Pierre-André Taguieff et Annick Durafour, Céline, la race, le Juif, Fayard, , 1182 p. (ISBN 9782213702964, lire en ligne).
  6. Pierre Barlatier, « C'est Alain Laubreaux qui a envoyé Robert Desnos à la mort », Droit et liberté (MRAP), , cité dans Simon Epstein, Un paradoxe français, Albin Michel, , 624 p. (lire en ligne), « Universitaires, écrivains, journalistes », p. 155.
  7. Jean-Paul Lefebvre-Filleau et Gilles Perrault, Ces Français qui ont collaboré avec le IIIe Reich, éd. du Rocher, 2017.
  8. Maud de Belleroche, Le Ballet des crabes, Filipacchi, 1975, p. 203.
  9. Le Monde, 19 novembre 1946.
  10. Le Monde, 7 mai 1947.
  11. Jean Galtier-Boissière relate ce fait dans son ouvrage: "Mon journal pendant l'occupation" page 47, édition de 1944 ; il le situe le 10 juin 1940, alors que Laubreaux dînait avec Jacques Hébertot qui avait monté la pièce La Machine à écrire.
  12. Jean Marais
  13. http://educine.chez-alice.fr/analyses/truffaut%20dernier%20metro%20theatre.htm
  14. J. DAUPHINÉ, Canaques de la Nouvelle-Calédonie à Paris : de la case au zoo, éd. L'Harmattan, Paris, 1998, p. 98 (ISBN 978-2-7384-6384-5)
  15. Présentation du livre sur le site jacbayle.club.fr
  16. Fiche du film Boulot aviateur sur le site de l'encyclopédie du cinéma
  17. L'Atelier, 3 juin 1944, Georges Albertini, "Ecrit pendant la guerre"

Annexes

Sources

  • P. O'Reilly, Calédoniens : Répertoire bio-bibliographique de la Nouvelle-Calédonie, Publications de la Société des Océanistes, no 3, éd. Musée de l'Homme, Paris, 1953.

Liens externes

Articles connexes

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