Pseudocumène

Le pseudocumène ou 1,2,4-triméthylbenzène est un composé aromatique de formule brute C9H12. Il est constitué d'un cycle benzénique substitué par trois groupes méthyle aux positions 1, 2, et 4. Avec l'hémimellitène et le mésitylène, c'est l'un des trois isomères du triméthylbenzène. Ce composant de nombreux solvants est un polluant pour l'eau, et un produit toxique[7] ; faiblement irritant pour les muqueuses et la peau, il peut avoir un effet dépresseur sur le système nerveux central pouvant conduire à des troubles chroniques[8].

Pseudocumène
Identification
Nom systématique 1,2,4-Triméthylbenzène
Synonymes

1,2,4-triméthylbenzène, TMB

No CAS 95-63-6
No ECHA 100.002.216
No RTECS DC3325000
PubChem 7247
ChEBI 34039
SMILES
InChI
Apparence liquide huileux incolore, odeur aromatique[1]
Propriétés chimiques
Formule C9H12  [Isomères]
Masse molaire[2] 120,1916 ± 0,008 g/mol
C 89,94 %, H 10,06 %,
Propriétés physiques
fusion −44 °C[1]
ébullition 169 °C[1]
Solubilité 0,06 g·l-1 (20 °C)[1]
Masse volumique 0,88 g·cm-3 (20 °C)[1]
Densité de vapeur 4,15[1]
Densité du mélange air-vapeur 1,01[1]
d'auto-inflammation 485 °C[1]
Point d’éclair 50 °C[1]
Limites d’explosivité dans l’air 0,8 – 7,0 vol.%[1]
(42 – 350 g/m³)
Pression de vapeur saturante 2,8 hPa (25 °C)
6 hPa (37,7 °C)
15 hPa (50 °C)[1]
Thermochimie
Δvap 39,2 kJ·mol-1[3]
Propriétés optiques
Indice de réfraction  1,5048[4]
Précautions
SGH[1]

Attention
H226, H304, H315, H319, H332, H335, H411, P261, P273, P331, P301+P310, P302+P352 et P304+P340+P312
Transport[1]
30
   3295   
Écotoxicologie
DL50 5 000 mg·kg-1 (rat, oral)[5]
CL50 18g/m3/4H (rat, inhalation)[6]
LogP 3,7[1]
Composés apparentés
Isomère(s) Hémimellitène
Mésitylène

Unités du SI et CNTP, sauf indication contraire.

Propriétés

Ce liquide huileux incolore et inflammable a une odeur aromatique caractéristique[1]. Plus léger que l'eau, il y est quasi insoluble[1]. Il est peu à très peu volatil. Ses vapeurs forment avec l'air un mélange explosif quand il est chauffé au-dessus de son point d'éclair (50 °C)[1],[9]. Avec une température d'auto-inflammation de 485 °C[1],[9], il appartient à la classe de température T1. Il présente un risque d'explosion en cas des contact avec des oxydants et l'acide nitrique[1].

Toxicité, écotoxicité, risques pour la santé

Le pseudocumène présente des risques aigus et chroniques pour la santé, soupçonnés dès les années 1930[10].

Son métabolisme et son excrétion (de même que ceux de les deux autres isomères du triméthylbenzène, l'hémimellitène et le mésitylène) sont étudiés chez le rat dans les années 1970[11].

Outre des effets d'irritation respiratoire, des effets neurotoxiques (déplétion respiratoire), comportementaux[12] et sensoriels (diminution des seuils et temps de perception de la douleur) ont été démontrés par Z. Korsak et al. (1995), après exposition (aiguë : 1230 à 9840 mg/m3 soit 250 à 2 000 ppm, par inhalation) de rats et souris mâles au 1,2,4-triméthylbenzène (pseudocumène) pour des expositions de 6 minutes chez la souris et de 4 heures chez le rat[8]. Sur la base des valeurs RD50 qu'ils ont notées, les auteurs ont suggéré des valeurs MAC pour le pseudocumène 85 mg/m3 (17,0 ppm), soit bien moins que les valeurs de RD50 antérieurement proposées (sur la base des irritations uniquement, par l'ACGIH TLV (125 mg/m3 ou 25 ppm) ou la Pologne en 1995 (100 mg/m3 ou 20 ppm)[13]. Korsak et al. (1995) suggèrent alors des études toxicologiques plus approfondies, également car des effets hématopoïétiques semblent possibles en conditions d'exposition subchronique[8].

Une unique exposition (par inhalation) a effets dose-dépendant, neurotoxiques chez le rat et également irritant (des voies respiratoires) chez la souris[14].

Le test de performance du rotarod (CE50 = 954 ppm) et une diminution de la sensibilité à la douleur (CE50 = 1 155 ppm) sont décrits. La concentration de pseudocumène qui a réduit la fréquence respiratoire de 50% chez les souris Balb/C (RD50) était de 578 ppm[14]. Une exposition répétée de 90 jours par inhalation de rats au pseudocumène à des concentrations de 25, 100 et 250 ppm a entraîné des modifications pathologiques de l'appareil respiratoire dépendant de la concentration, ainsi qu'une érythropénie, une leucocytose et une diminution du temps de coagulation. L'ultrastructure des pneumocytes (type II) a été affectée à une concentration de 250 ppm. Une augmentation de la teneur totale en protéines, des activités LDH, bêta-glucuronidase et phosphatase dans le surnageant de lavage bronchoalvéolaire est notée [14]. Le test de performance Rotarod a également révélé des effets neurotoxiques du composé pendant et 14 jours après une exposition répétée de 90 jours[14]. Sur la base de l'irritation des voies respiratoires, des effets hématopoïétiques et neurotoxiques, une NOAEL de 25 ppm et une LOAEL de 100 ppm ont été proposées en 1995 par Jajte et al.[14].

La neurotoxicité des isomères du triméthylbenzène (pseudocumène, mésitylène et hémimellitène) est documentée chez le rats de laboratoire mâle exposé de manière aiguë et subchronique (inhalation durant 4h). Tous les isomères du triméthylbenzène ont causé des perturbations dose-dépendantes, l'hémimellitène se montrant le plus toxique, devant le mésitylène lui même plus toxique que le pseudocumène. Les auteurs précisent que 15 jours après l'arrêt de l'exposition au pseudocumène ou à l'hémimellitène, aucune aucune amélioration de performance au test rotarod n'était observée[15]. En 1997, Gralewicz constate, sans pouvoir l'expliquer que « le toilettage a augmenté de manière significative chez les rats exposés à 100 ppm de TMB »[16].

Une étude (1997) montre que certains effets d'une exposition par inhalation de 4 semaines (6 h/jour, 5 jours/semaine) au TMB à des concentrations de 0, 25, 100 ou 250 ppm peut-être durables[16]. Ainsi chez les rats exposés à 250 ppm de TMB), 14 à 54 jours après la dernière exposition (par inhalation) certains réflexes restent ralentis, de même que l'apprentissage d'un évitement actif bidirectionnel ([16].
Les rats exposés à 100 et 250 ppm de TMB montrent aussi une réaction de peur (ici induite par un choc électrique sur le pied) anormalement persistante[16]. Ces donnés suggèrent que l'inhalation chronique de faibles doses de TMB peut conduire à des perturbations durables de certaines fonctions du système nerveux central[16].

Sa toxicité est confirmée chez le rat de laboratoire adulte par Korsak & al. en 2000[7], puis 5 ans après, une toxicité développementale est en outre démontrée par Saillenfait & al. (2005)[17].

Ce produit est également classé dangereux pour l'environnent aquatique[1].

Occurrence naturelle

Le pseudocumène est présent dans le goudron de houille[18]. Il a également été détecté comme arôme dans le café[19].

Production et synthèse

Industriellement, le pseudocumène est isolé de la fraction C9 des hydrocarbure aromatique durant le raffinage du pétrole ; il représente environ 40% de cette fraction. Il peut également être synthétisé par méthylation du toluène ou des xylènes, ou par dismutation du xylène sur des catalyseurs d'aluminosilicate[20].

Utilisations

Le pseudocumène est un intermédiaire dans la production de composés pharmaceutiques, de parfums, des résines et de colorants[1]. Il peut également servir d'agent stérilisant, et d'additif pour carburant[21].

Son oxydation produit l'anhydride trimellitique[22] dont on peut faire des polymères à haute performance. Le pseudocumène produit dans l'industrie pétrochimique est converti en acide trimellitique par oxydation catalytique des groupes méthyle[23].

Scintillateur

Dissous dans une huile minérale, il est utilisé comme scintillateur liquide[24] ,[25] dans des expériences en physique des particules telles que NOvA (en) et Borexino (en).

Voir aussi

Articles connexes

Notes et références

  1. Entrée « 1,2,3-Trimethylbenzene » dans la base de données de produits chimiques GESTIS de la IFA (organisme allemand responsable de la sécurité et de la santé au travail) (allemand, anglais), accès le 14 décembre 2020 (JavaScript nécessaire).
  2. Masse molaire calculée d’après « Atomic weights of the elements 2007 », sur www.chem.qmul.ac.uk.
  3. Earhart HW, Komin QP; Kirk-Othmer Encyclopedia of Chemical Technology. (2005). NY, NY: John Wiley & Sons; Polymethylbenzenes. Online Posting Date: Dec 4, 2000.
  4. Lide, D.R. CRC Handbook of Chemistry and Physics 86TH Edition 2005-2006. CRC Press, Taylor & Francis, Boca Raton, FL 2005, p. 3-504
  5. Prehled Prumyslove Toxikologie; Organicke Latky, Marhold, J.Prague, Czechoslovakia, Avicenum, 1986Vol. -, Pg. 34, 1986
  6. HYSAAV. Vol. 44(5), Pg. 15, 1979.
  7. (en) Korsak Zofia, Stetkiewicz J, Majcherek Wanda, Stetkiewicz Rena, Jajte Jolanta & Rydzynski K (2000) « Sub-chronic inhalation toxicity of 1, 2, 4-trimethylbenzene (pseudocumene) in rats » International journal of occupational medicine and environmental health, 13(2), 155-164.
  8. Korsak Z, Swiercz R & Rydzynski K (1995) « Toxic effects of acute inhalation exposure to 1, 2, 4-trimethylbenzene (pseudocumene) in experimental animals » International Journal of Occupational Medicine and Environmental Health, 8(4), 331-337.
  9. (de) E. Brandes, W. Möller, Sicherheitstechnische Kenngrößen : Band 1: Brennbare Flüssigkeiten und Gase., Bremerhaven, Wirtschaftsverlag NW – Verlag für neue Wissenschaft, .
  10. (en) Cameron, G. R., Paterson, J. L. H., De Saram, G. S. W., & Thomas, J. C. (1938). « The toxicity of some methyl derivatives of benzene with special reference to pseudocumene and heavy coal tar naphtha » The Journal of Pathology and Bacteriology, 46(1), 95-107.
  11. (en) Mikulski P.I & Wiglusz R (1975) « The comparative metabolism of mesitylene, pseudocumene, and hemimellitene in rats » Toxicology and applied pharmacology, 31(1), 21-31.
  12. (en) Wiaderna D, Tomas T & Rydzyński K (1997) « Behavioral changes following 4-week inhalation exposure to pseudocumene (1, 2, 4-trimethylbenzene) in the rat » Neurotoxicology and teratology, 19(4), 327-333.
  13. Gazette légale no 69, Varsovie, 29 juillet 1995 (en polonais)
  14. (pl) J. Jajte, Z. Korsak, K. Rydzyński, J. Stetkiewicz, R. Świercz (1995) « [Toxic Effects of 1,2,4-Trimethylbenzene (Pseudocumene) After Acute and Subchronic Inhalation Exposure ] » ; Toxicology Letters ; 78  ; Supplement 1 ; 49
  15. (en) Korsak Z & Rydzynski K (1996) « Neurotoxic effects of accute and subchronic inhalation exposure to trimethylbenzene isomers (pseudocumene, mesitylene, hemimellitene) in rats » International journal of occupational medicine and environmental health, 9, 341-350.
  16. S Gralewicz, « Behavioral Changes Following 4-Week Inhalation Exposure to Pseudocumene (1,2,4-Trimethylbenzene) in the Rat », Neurotoxicology and Teratology, vol. 19, no 4, , p. 327–333 (DOI 10.1016/S0892-0362(97)00001-9, lire en ligne, consulté le )
  17. (en) A.M. Saillenfait, F. Gallissot, J.P. Sabate et G. Morel, « Developmental toxicity of two trimethylbenzene isomers, mesitylene and pseudocumene, in rats following inhalation exposure », Food and Chemical Toxicology, vol. 43, no 7, , p. 1055–1063 (DOI 10.1016/j.fct.2005.02.008, lire en ligne, consulté le )
  18. « Numéro CAS 95-63-6 » dans la base de données Hazardous Substances Data Bank
  19. M. Stoll, M. Winter, F. Gautschi, I. Flament, B. Willhalm, « Recherches sur les arômes. 13e communication. Sur l′arôme de café. I », Helvetica Chimica Acta, vol. 50, no 2, , p. 628–94. (DOI 10.1002/hlca.19670500229)
  20. Karl Griesbaum, Arno Behr, Dieter Biedenkapp, Heinz-Werner Voges, Dorothea Garbe, Christian Paetz, Gerd Collin, Dieter Mayer, Hartmut Höke "Hydrocarbons" in Ullmann's Encyclopedia of Industrial Chemistry 2002 Wiley-VCH, Weinheim. DOI:10.1002/14356007.a13_227
  21. « Chemical Summary for 1,2,4-Trimethylbenzene » [text], United States Environmental Protection Agency, (consulté le )
  22. O'Neil, M.J. (ed.). The Merck Index - An Encyclopedia of Chemicals, Drugs, and Biologicals. Whitehouse Station, NJ: Merck and Co., Inc., 2006., p. 1361
  23. Luftoxidation von Pseudocumol: Brevet  
  24. (de) Brigitte Röthlein, « Überall – und kaum zu fassen : Forscher der TUM machen tief unter der Erde Jagd auf Neutrinos. », Faszination Forschung: https://portal.mytum.de/pressestelle/faszination-forschung/, Technische Universität München, (consulté le ), p. 65
  25. S. Mufson, « Liquid scintillator production for the NOvA experiment », Nuclear Instruments and Methods A, vol. 799, , p. 1–9 (DOI 10.1016/j.nima.2015.07.026, Bibcode 2015NIMPA.799....1M, arXiv 1504.04035, S2CID 118578183)
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