Grèves de Limoges de 1905

Le terme de grèves ouvrières de 1905 renvoie aux grèves et manifestations des ouvriers de Limoges, principalement les porcelainiers, qui eurent lieu entre février et . Ces événements eurent un retentissement national.

Sanglantes émeutes à Limoges, telles qu’imaginées par le supplément illustré du Petit Journal du 30 avril 1905 : drapeaux rouge et noir et charge des chasseurs à cheval.

Causes

Les manifestants réclament d'abord une hausse des salaires.

Dans la porcelaine, les ouvriers réclament le renvoi du contremaître Penaud – souvent qualifié aussi de directeur – âgé de la cinquantaine et employé depuis douze ans dans la fabrique Charles Haviland. Selon un contemporain, Penaud « fait tout son possible pour amener le rétablissement du travail aux pièces (et par ailleurs)... réserve le bon travail à ses créatures. On ne peut gagner sa vie sans s'être assuré, par des amabilités, des gracieusetés, des dons – en nature et en argent – de la bienveillance du contremaître... Les femmes et les jeunes filles sont soumises à des exigences de caractère particulier. »

Chronologie

Protestant contre les bas salaires et les contremaîtres, les ouvriers de la chaussure et du feutre sont les premiers à se mettre en grève.

En mars 1905, l'arrivée d'un nouveau général à la tête de la division de Limoges est mal perçue, et les ouvrières de Haviland (porcelaine) rejoignent le mouvement en solidarité avec leurs camarades renvoyés.

Les grèves se généralisent en avril à l'imprimerie.

Des grèves ouvrières très dures éclatent en 1905, ce sera la révolte des porcelainiers. Le parti socialiste et les syndicats ouvriers font le plein d'adhésions.
Usine de porcelaine Haviland au début du siècle : les barils de porcelaine sont prêts à l'expédition vers les États-Unis.

Plus tard la grève s'étend à chacune des deux usines Haviland (Charles Haviland, avenue Garibaldi, et Théodore Haviland, place des Tabacs). Le drapeau rouge est hissé sur le toit de la seconde, en réponse au patron qui, d'origine américaine, avait hissé le drapeau des États-Unis.

Le président du Conseil Maurice Rouvier demande que les échanges entre ouvriers et patrons aboutissent. Les pourparlers sont repoussés. Le lock-out est engagé et les porcelainiers mis à la porte le .

L'armée intervient le . Une bagarre éclate, des barricades sont dressées dans l'un des faubourgs populaires (ancienne route d'Aixe). On déplore un cheval tué, la jument Estacade, dont le corps devient le centre d'une nouvelle barricade.

Des renforts militaires sont envoyés. Tout attroupement est prohibé par la préfecture, des armureries sont pillées. Une bombe explose devant la maison du directeur de l'une des usines Haviland, l'automobile (rare à l'époque) de Théodore Haviland est incendiée. Des arrestations interviennent.

Le , un cortège formé après un meeting de la CGT se rend à la préfecture demander la libération des personnes arrêtées. Sur le refus du préfet, la foule se rend à la mairie demander l'intervention du maire, Émile Labussière (socialiste). Celui-ci tente une démarche qui échoue. Les manifestants gagnent alors la prison départementale (place du Champ-de-Foire) et en défoncent l'entrée. Une troupe de cavaliers (dragons) est dépêchée. S'ensuit un violent affrontement. L'infanterie est envoyée au secours des cavaliers empêchés d'agir ; les émeutiers se réfugient dans le jardin d'Orsay, qui domine la place, mais est occupé par des badauds. Sous le jet de projectiles divers (et selon certaines sources, non avérées, après avoir subi des coups de feu), la troupe ouvre le feu et prend le jardin d'assaut. On déplore plusieurs blessés et un mort, du nom de Camille Vardelle (19 ans), ouvrier porcelainier qui se serait trouvé là comme spectateur.

Les funérailles du jeune Vardelle sont suivies, deux jours plus tard, par des dizaines de milliers de personnes. Les festivités du sont cette année-là annulées.

Le 1905, le travail reprend dans la porcelaine après la fin des négociations, mais les salariés n'ont pas obtenu satisfaction sur leurs principales revendications. Le mouvement se poursuit dans d'autres secteurs, principalement à la couperie de poils de lapin Beaulieu, rue d'Auzette. Les grévistes bloquent l'usine et la maison du patron. Le siège est finalement levé.

Conséquences

L'évènement de Limoges est relaté dans les grands quotidiens français et étrangers, donnant à Limoges son surnom de ville rouge. Il est, en fait, une étape du combat des femmes pour préserver leur dignité.

Dans les décennies qui suivent, la ville acquiert une image en partie liée à ces évènements historiques. Ainsi, peu de temps après, un dessin portant la légende « Faites-nous peur, Monsieur Jaurès, parlez-nous de Limoges ! », paraît dans L'Assiette au beurre[1].

Voir aussi

Références

Le Populaire du Centre
  1. Limoges, ville d'art et d'histoire (livre publié en 2009 et issu du dossier de candidature de la ville présenté en 2007 au Ministère de la Culture), Ed. AD&D

Bibliographie et discographie

  • Disque de 1986 réédité en 2005 en CD : « Rue de la Mauvendière », avec Philippe Destrem, Françoise Etay et Jean-Jacques Le Creurer.
  • Vincent Brousse, Dominique Danthieux, Philippe Grandcoing, 1905, le printemps rouge de Limoges, Limoges, éditions Culture et patrimoine en Limousin, 2005.
  • Laurent Bourdelas, Histoire de Limoges, Geste Editions, 2014.
  • Georges-Emmanuel Clancier, Le pain noir, 1956
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