Infection urinaire

Une infection urinaire est définie par la colonisation des urines par des bactéries, ce qui se traduit le plus souvent par des signes infectieux urinaires. Elles sont très fréquentes, en particulier chez les nourrissons et les jeunes enfants, les femmes enceintes.

Infection urinaire
Globules blancs dans l'urine d'un patient atteint d'une infection urinaire
Spécialité Urologie
Symptôme Hématurie, fièvre, Dysurie, douleur abdominale et Pollakiurie
CISP-2 U71
CIM-10 N39.0
CIM-9 599.0
DiseasesDB 13657
MedlinePlus 000521
eMedicine 231574 et 233101
eMedicine emerg/625  emerg/626
MeSH D014552

Mise en garde médicale

Il existe deux tableaux principaux d'infection urinaire : la cystite (infection de la vessie) et la pyélonéphrite (infection du rein). Elles se traitent très bien par antibiotiques. L'insuffisance ou l'absence de traitement de la pyélonéphrite peut mener à des complications sévères (cf. infra). Les infections urinaires sont les infections bactériennes les plus fréquentes quel que soit l'âge[1].

Entre 20 et 50 ans, les infections sont 50 fois plus fréquentes chez la femme, mais après 50 ans l’incidence chez l’homme augmente nettement du fait de l’augmentation des maladies prostatiques, et le ratio est donc seulement 3/1 chez les sujets âgés.

L'infection urinaire chez l'homme a pratiquement toujours une cause anatomique. Schématiquement : malformations congénitales dans l'enfance et l'adolescence, problèmes prostatiques chez l'homme âgé, calculs et tumeurs entre ces deux âges. La tuberculose rénale semble pouvoir aussi être une cause « anatomique » favorisante.

La plupart du temps, les bactéries proviennent des intestins. Pour cette raison, les femmes sont plus sujettes aux infections urinaires (cystite) en raison de la proximité du méat urinaire et de l'anus (périnée court[2]) et de la brièveté de l'urètre qui de plus est large et s'ouvre lors des rapports sexuels.

Physiopathologie

Les germes les plus fréquemment en cause sont Escherichia coli (75 % des cas), Proteus mirabilis, Klebsiella, tous trois des entérobactéries (bacilles gram-négatif). Il faut ajouter Staphylococcus saprophyticus, cocci à gram-positif, dont la fréquence oscille entre 5 et 25 % des cas selon les pays et quelques autres germes beaucoup plus rares.

Le cas particulier des infections urinaires à lactobacille entre, avec quelques autres cas, dans la catégorie de ce qu'on appelait les « cystites à urines claires » qui sort de ce cadre.

Une infection urinaire peut-être simple ou compliquée. Elle est dite simple (critères ANDEM[3]) lorsque tous les éléments suivants sont réunis : évolution depuis moins de trois jours chez une femme âgée de 15 ans à 65 ans, sans terrain à risque particulier (diabète, grossesse, insuffisance rénale, immunodépression, contexte hospitalier …), sans anomalie urologique particulière, sans épisode d'infection urinaire dans les trois mois précédents. Elle est dite compliquée dans le cas contraire.

Une infection urinaire est dite sporadique s'il y a moins de deux épisodes dans les six mois précédents, ou moins de trois épisodes dans l'année précédente. Sinon elle est à répétition.

Chez l'enfant

Article détaillé : Infection urinaire chez l'enfant.

L'immaturité des voies urinaires est fréquemment responsable d'un reflux vésical (par perméabilité anormale des uretères : l'urine contenue dans la vessie ne peut normalement pas remonter vers les reins). Il existe parfois en plus des malformations urinaires.

Chez la femme enceinte

Article détaillé : Infection urinaire de la femme enceinte.

Les infections urinaires sont particulièrement fréquentes en raison de modifications anatomiques et physiologiques inhérentes à la grossesse qui profitent aux bactéries :

  • la croissance de l'utérus entraîne une compression de la vessie (d'où un résidu post-mictionnel, c’est-à-dire une stase des urines avec des mictions incomplètes) et des uretères ;
  • la progestérone entraîne une hypotonie des voies urinaires ;
  • les œstrogènes ont tendance à rendre l'épithélium urinaire plus propice au développement des bactéries ;
  • il existe une glycosurie physiologique (par abaissement du seuil de résorption du glucose) ;
  • la contamination bactérienne vulvopérinéale est plus fréquente ;
  • le pH urinaire est élevé (urines alcalines).

Chez l'adulte

La principale cause d'infection urinaire est dépendante de la longueur de l'urètre : un urètre court permet aux bactéries d'atteindre plus facilement la vessie, et même dans certains cas le rein, ce qui explique leur prévalence très supérieure chez les femmes. La prévention repose sur une toilette intime régulière, boire 1,5 litre d'eau par jour et surtout la miction pré et post-coïtale[4].

Diagnostic

La première étape lorsqu'un médecin veut vérifier la présence ou l'absence d'infection urinaire est de faire un examen cytobactériologique des urines (ECBU).

Bactériurie asymptomatique

Prévalence : 1 % chez les fillettes de moins de 10 ans, 10 à 20 % chez les femmes âgées en soins primaires, 20 à 50 % en milieu hospitalier[5]. Elle est fortement corrélée à l'activité sexuelle[5]. Elle est parfois suivie d'une infection symptomatique (8 % dans une étude de cohorte)[5].
Elle n'est dépistée systématiquement que pendant une grossesse, où la bandelette urinaire mensuelle est obligatoire. Elle se définit par la présence de plus de 100 000 bactéries/ml d'urine, sans entraîner le moindre symptôme. La bactériurie asymptomatique peut toutefois être responsable de contractions utérines et de menace d'accouchement prématuré à elle seule, ce qui justifie son dépistage et son traitement systématique.

Cystite

Article détaillé : Cystite.

Elle se manifeste par des signes fonctionnels urinaires :

  • pollakiurie (augmentation de la fréquence des mictions), impériosités (urgenturie : envie pressante d'uriner, impossible à contenir) ;
  • dysurie (difficultés à la miction) ;
  • brûlures mictionnelles ;
  • hématurie (présence de sang dans les urines).

Il n'y a ni fièvre ni douleur lombaire[6].

Pyélonéphrite aiguë

Article détaillé : Pyélonéphrite.

Tableau le plus sévère, il associe des signes fonctionnels urinaires, de la fièvre (39 à 40 °C), des frissons (lors de décharges bactériennes dans le sang), des douleurs lombaires unilatérales, des courbatures, une grande fatigue, des urines troubles, des nausées ou des vomissements, aucun appétit, une douleur à la mobilisation du rein à l'examen clinique. À un stade avancé, la pyurie s'associe et la vessie peut se rétracter (vessie bilharzienne) dans d'autres cas.

Examens complémentaires

La preuve de l'infection urinaire est donnée par l'examen cytobactériologique des urines. En cas de bactériurie asymptomatique ou de cystite simple, aucun autre examen n'est nécessaire. En cas de pyélonéphrite, on demande :

  1. des examens biologiques ; hémogramme, CRP, vitesse de sédimentation, hémocultures (avec recherche de Listéria chez la femme enceinte), ionogramme urinaire, urémie, glycémie) ;
  2. un examen cytobactériologique des urines avec identification bactérienne, culture, et antibiogramme ;
  3. une échographie rénale à la recherche de complications (dilatation des cavités pyélocalicielles, obstacle sur les voies urinaires, abcès du rein) ;
  4. une urographie intra-veineuse (après la grossesse chez la femme enceinte) parfois.

Complications

Bactériurie asymptomatique

Elle évolue vers une infection symptomatique dans 8 % des cas[5].

Cystite

La guérison spontanée de la cystite est fréquente (50 à 70 % des cas), mais elle est lente (plusieurs mois)[5].

  • Évolution, rare, vers une pyélonephrite aiguë (en cas de cystite simple)[5],
  • Récidives fréquentes : 20 % au cours de la vie, 3 % dans l'année[5],
  • Contractions utérines et menace d'accouchement prématuré chez la femme enceinte,
  • Pas de complications à long terme pour les cystites aiguës simples.

Pyélonephrite

Les complications sont rares mais graves

Traitement

Bactériurie asymptomatique

Étant donné le faible risque de complications, les risques d'antibiorésistance, un traitement symptomatique n'est pas justifié dans les infections urinaires simples de type bactériurie asymptomatique (chez la femme)[5], à l'exception des femmes enceintes[7].

Cystite aiguë

Le traitement est ambulatoire (à domicile). Antibiothérapie à bonne pénétration urinaire, bactéricide sur les germes habituels (bacilles gram négatifs), secondairement adaptée aux résultats de l'examen cytobactériologique des urines (s’il y a lieu), par voie orale, pendant 10 jours. Les traitement « minute » (dose unique d'antibiotique) ou d'une journée (une dose matin et une autre le soir) ont été largement utilisés pour améliorer le suivi du traitement et diminuer l'usage des antibiotiques. En fait, devant la fréquence des rechutes avec ces traitements courts, la durée d'antibiothérapie considérée comme nécessaire et suffisante et la plus généralement retenue aujourd'hui (2007) est de trois jours. Examen cytobactériologique des urines de contrôle 48 heures après la fin du traitement (les urines doivent être stériles). Ce délai doit être suffisant pour qu'il n'y ait plus de traces d'antibiotiques dans les urines. On peut préférer 72 heures, surtout si l'antibiotique était un aminoside.

Recommandations hygiéno-diététiques : boissons abondantes (boire 1,5 à 2 litres d'eau par jour), hygiène locale, uriner après les rapports sexuels, ne pas s'essuyer d'arrière en avant après la selle.

Examen cytobactériologique des urines mensuel pendant le reste de la grossesse chez la femme enceinte (à la recherche d'une récidive).

Pyélonéphrite

Le traitement est ambulatoire (à domicile) ou à l'hôpital (enfants, femmes enceintes, pyélonéphrite compliquée).

  • Traitement analgésique et antipyrétique (paracétamol, aussi appelé acétaminophène en Amérique du Nord).
  • Antibiothérapie à bonne pénétration urinaire et bonne diffusion tissulaire, bactéricide sur les germes habituels (bacilles gram négatifs), secondairement adaptée aux résultats de l'examen cytobactériologique des urines (s’il y a lieu), par voie orale ou veineuse, pendant 21 jours ou un mois.
  • Examen cytobactériologique des urines de contrôle 48 à 72 heures après le début et la fin du traitement (les urines doivent être stériles).
  • Recommandations hygiéno-diététiques.
  • Examen cytobactériologique des urines mensuel pendant le reste de la grossesse chez la femme enceinte (à la recherche d'une récidive).
  • Urographie intraveineuse à trois mois pour rechercher une malformation des voies urinaires.
  • Surveillance fœtale pendant la grossesse, tocolyse en cas de contractions.

Infection urinaire chronique

Les infections chroniques ne sont généralement traitées que lorsqu'elles deviennent symptomatiques et gênantes pour le patient afin de diminuer le risque de résistance aux antibiotiques.

Phagothérapie

La phagothérapie semble constituer une voie d'avenir pour les cas de résistance aux antibiotiques que l'infection soit aigüe ou chronique.

En Géorgie, en Russie et dans certains pays de l'est, la phagothérapie est utilisée avec succès contre les cystites bactériennes. Deux approches sont possibles: soit on administre un cocktail de phages standard spécifique à la pathologie ou au type de bactérie pathogène, soit on sélectionne et on cultive des phages lytiques pour la bactérie particulière.

La phagothérapie n'est pas encore reconnue en France ni dans les pays occidentaux mais elle y fait l'objet de nombreuses recherches et essais cliniques[8],[9]. Les médicaments bactériophagiques peuvent être utilisés en France dans le cadre d'une Autorisation Temporaire d'Utilisation nominative (ATUn) délivrée par l'ANSM au cas par cas, notamment dans les infections urologiques sévères[10].

En France la société Pherecydes Pharma développe un cocktail bactériophagique contre Pseudomonas aeruginosa (PP1131) et un contre E. coli (PP0121) dans le cadre du projet Phagoburn[11],[12]. Devant l'absence de solution par le circuit classique de soins, des organisations de patients se sont montées en France pour faciliter l'accès aux bactériophagiques[13],[14],[15].

Prévention médicamenteuse

Aux États-Unis, et dans les autres pays anglo-saxons, l'hippurate de méthénamine est couramment prescrit à une dose d'1 g par jour dans un but préventif[16]. Ce médicament, Hiprex, fabriqué par Sanofi, n'est pas disponible en France.

Prévention naturelle

Le jus de canneberge n'a pas d'efficacité démontrée pour la prévention des infections urinaires à répétition[17].

Prendre des bains chauds aide contre les infections urinaires. Toutefois, celui-ci ne doit pas être trop long au risque de ne retirer la douleur qu'à court terme avant que celle-ci ne revienne de nouveau.[citation nécessaire] Gélules de bruyère et busserole sont également indiquées.[citation nécessaire]

Idées reçues

Contrairement aux idées reçues, les rapports sexuels peuvent entraîner la diffusion de bactéries responsables d'infections urinaires.

Certaines bactéries infectant les voies urinaires sont en effet transmises lors des rapports sexuels. Les hommes sont plus à risque, les voies urinaires de l'homme étant plus exposées lors des rapports sexuels.[citation nécessaire]. Les bactéries impliquées dans la survenue d'infections transmises sexuellement (IST : infections sexuellement transmissibles) sont spécifiques. Il s'agit dans la majorité des cas des Chlamydiae et des gonocoques. Une bonne hygiène globale est recommandée avec lavage des mains en cas de crise urinaire. Il est fortement suggéré pour les femmes comme pour les hommes d'uriner rapidement après une relation sexuelle non protégée afin de prévenir l'infection urinaire.

Notes et références

  1. UROPAGE.com : créé avec le Professeur Thierry Flam 1999
  2. F. Lecomte. Infections urinaires. Encycl Méd Chir (Elsevier, Paris), AKOS Encyclopédie Pratique de Médecine, 4-0880, 1999, 4 p.
  3. Agence nationale pour le développement de l'évaluation médicale)
  4. Dr. Catherine Solano, « Petits gestes à faire après l'amour », sur e-sante.fr, (consulté le 6 septembre 2016)
  5. Revue Prescrire n° 280 février 2007 p. 120.
  6. Stéphane Emonet, Christian van Delden, Stephan Harbarth, « Infection urinaire de l'adulte [Urinary tract infections in adults] », Rev Med Suisse, vol. 7, no 292, , p. 912-6. (PMID 21674895, lire en ligne [html])
  7. http://www.infectiologie.com/site/medias/_documents/consensus/afssaps-inf-urinaires-adulte-recos.pdf
  8. « phagothérapie », Institut Pasteur, (lire en ligne)
  9. (en) Wilbert Sybesma, Reinhard Zbinden, Nino Chanishvili et Mzia Kutateladze, « Bacteriophages as Potential Treatment for Urinary Tract Infections », Frontiers in Microbiology, vol. 7, (ISSN 1664-302X, PMID 27148173, PMCID PMC4826877, DOI 10.3389/fmicb.2016.00465, lire en ligne)
  10. Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé, « Compte rendu de séance du CSST Phagothérapie en date du 24 mars 2016 » [PDF], sur ansm.sante.fr (consulté le 20 février 2018)
  11. « Phagoburn: Evaluation of phage therapy for the treatment of burn wound infections », sur www.phagoburn.eu (consulté le 26 avril 2018)
  12. « http://fr.pherecydes-pharma.com/developpement.html », sur fr.pherecydes-pharma.com (consulté le 26 avril 2018)
  13. « Phages-Sans-Frontières – Ensemble nous pouvons tenter de changer le destin ! », sur phages-sans-frontieres.com (consulté le 14 avril 2018)
  14. « Association PHAG ESPOIRS », sur Association PHAG ESPOIRS (consulté le 14 avril 2018)
  15. « EuroPhages - Sauver les vies de milliers de Français grâce aux bactériophagiques », sur EuroPhages (consulté le 14 avril 2018)
  16. (en) « DailyMed - hiprex- methenamine hippurate tablet », sur dailymed.nlm.nih.gov DailyMed - base de donnée des médicaments approuvés par la FDA (consulté le 20 avril 2015)
  17. (en) Jepson R, Craig J, Williams G, « Cranberry products and prevention of urinary tract infections », JAMA, 2013;310:1395-1396

Voir aussi

Articles connexes

Liens externes

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